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de gouverner les hommes & de les rendre heureux : le développement que nous avons fait des befoins, des inclinations & des facultés de l'homme, les effets que nous avons vûs attachés au bon usage ou à l'abus que l'homme en fait, contiennent ces Loix; mais la connoiffance m'en paroît fi néceffaire que je n'ai pas regardé comme une répétition inutile de les rapprocher, & d'en faire en quelque forte des aphorifmes de Droit naturel & de Droit des gens, de Morale civile & de politique générale, dans lesquels on pût voir le précis du fyftême de la Nature par rapport à la fociété que les hommes doivent former & par rapport au bonheur auquel ils doivent afpirer: j'examinerai ensuite quelle espéce d'obéiffance l'homme doit à ces Loix.

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CHAPITRE PREMIER.

De la fociété univerfelle, ou de la fociété que forment tous les hommes, & des Loix de cette fociété.

1. LEs befoins, les inclinations de l'homme, le rapport de fon bonheur avec les phénoménes de. la Nature, le conduisent à la connoissance d'une intelligence fuprême qui a créé le monde & l'homme, qui a donné des Loix à la Nature, & prefcrit des régles à l'homme; qui veut en être honorée, & à laquelle l'homme doit un culte.

Que cet objet foit ou ne soit pas le premier dans l'ordre du développement des inclinations & des qualités fociables de l'homme, confidéré dans un état de pure nature, il en est certainement fa

heur des autres, de quelque Nation, de quelque Pays, de quelque condition qu'il foit.

6.o Les hommes ont un defir naturel de l'amitié de leurs femblables, & par l'inftitution de la Nature, il ne peut faire naître ces fentiments que par des actes d'humanité, de juftice & de bienfaifance: ainfi par le Droit naturel, il ne fuffit pas que l'homme ne faffe point de mal, il faut qu'il foit utile aux autres, que fa juftice & fa bienfaisance foient actives.

7.° Puifque l'eftime & l'amitié contribuent au bonheur de l'homme, 82 que dans l'inftitution de la Nature, la bienfaisance active fait naître ces fentiments, on doit de Droit naturel, de l'eftime & de l'amitié à tous les hommes juftes & bienfaifants.

8. L'homme craint naturellement la haine & le mépris des autres hommes ; par l'institution de

la Nature, l'injustice, la méchanceté, font naître ces fentiments, & ils font destinés à réprimer l'homme inhumain, injufte & méchant: c'est donc manquer à une obligation naturelle que de ne pas témoigner du mépris, de la haine & de l'indignation à l'injuste, au méchant, à l'homme dur & infenfible: c'est violer le Droit naturel que de témoigner à cet homme,' du refpect, de l'eftime & de l'amitié : car puifque la Nature a dépofé dans notre cœur la haine & le mépris comme une force deftinée à réprimer les méchants l'homme qui cache ces fentiments, qui les étouffe par crainte, eft un lâche qui abandonne fon pofte, il trahit la Nature & la fociété générale.

9.

° Par l'inftitution de la Nature, le malheur d'un homme n'est point néceffaire à l'existence d'un

fin; il eft donc non feulement le plus important, mais encore le premierdes principes du Droit naturel pour l'homme qui a réfléchi, & aucun homme ne peut ignorer invinciblement que cette intelligence exifte, & qu'il lui doit un culte.

me,

2.° La distance des lieux, la différence des climats, ne changent ni l'organisation de l'homni fon effence: par-tout il a les mêmes befoins & les mêmes inclinations naturelles; tous les principes de bienfaisance & d'humanité qui naiffent de l'organisation de l'homme, & du fond de fon ame, fubfiftent donc entre tous les hommes, quelque climat qu'ils habitent, & fous quelque gouvernement qu'ils vivent. Ainfi par-tout où deux hommes fe rencontrent, ils font dans un état de paix & de fociété avant qu'ils aient fait aucune convention alliés & freres.

il font unis

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