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ceaux, parce qu'ils font retentir tout le voisinage, et de leurs cris confus, et de leur joie dissolue? Eh! cependant quelle indignité que si près des jours de retraite, la dissolution paroisse si triomphante! L'Eglise notre bonne mère voit que nous donnons toute l'année à des divertissemens mondains : elle fait ce qu'elle peut pour dérober six semaines à nos déréglemens; elle nous veut donner quelque goût de la pénitence; elle nous en présente un essai pendant le carême, estimant que l'utilité que nous recevrons d'une médecine si salutaire, nous en fera digérer l'amertume et continuer l'usage. Mais ô vie humaine incapable de bons conseils! ô charité maternelle indignement traitée par de perfides enfans! nous prenons de ses salutaires préceptes une occasion de nouveaux désordres : pour honorer l'intempérance, nous lui faisons publiquement précéder le jeûne: et comme si nous avions entrepris de joindre Jésus-Christ avec Bélial, nous mettons les bacchanales à la tête du saint carême. O jours vraiment infâmes, et qui méritoient d'être ôtés du rôle des autres jours! jours qui ne seront jamais assez expiés par une pénitence de toute la vie, bien moins par quarante jours de jeûne mal observés! Mes Frères, ne diroit-on pas que pas que la licence et la volupté ont entrepris de nous fermer les chemins de la pénitence, et qu'ils en occupent l'entrée pour faire de la débauche un chemin à la piété? C'est pourquoi je ne m'étonne pas si nous n'en avons que la montre et quelques froides grimaces. Car c'est une chose certaine la chute de la pénitence au libertinage est bien aisée; mais de remonter du libertinage à la

pénitence; mais sitôt après s'être rassasié des fausses douceurs de l'un, goûter l'amertume de l'autre ; c'est ce que la corruption de notre nature ne sauroit souffrir.

Vous donc, ames chrétiennes, vous à qui notre Sauveur Jésus a donné quelque amour pour sa sainte doctrine, demeurez toujours dans sa crainte : qu'il n'y ait aucun jour qui puisse diminuer quelque chose de votre modestie ni de votre retenue. Etudiez vos voies avec le prophète : tournez avec lui vos pas aux témoignages de Dieu; sans doute vous y trouverez, et la certitude, et la règle, et l'immobile repos qui se commencera sur la terre, pour être consommé dans le ciel. Amen.

AUTRE EXORDE

DU MÊME SERMON.

Cogitavi vias meas, et converti pedes meos in testimonia

tua.

J'ai étudié mes voies, et enfin j'ai tourné mes pas du côté de vos témoignages. Ps. cxv. 59.

Si nos actions sont mal composées, s'il nous arrive presque tous les jours, ou de nous tromper dans nos jugemens, ou de nous égarer dans notre conduite; l'expérience nous fait connoître que la cause de ce malheur, c'est que nous ne délibérons pas assez posément de ce que nous avons à faire, c'est que nous nous laissons emporter aux objets qui se présentent. Une ardeur inconsidérée nous jette bien avant dans l'action, avant que nous en ayons assez remarqué et les suites et les circonstances; si bien qu'un conseil peu rassis produisant des résolutions trop précipitées, il arrive ordinairement que nous errons deçà et delà, plutôt que de marcher dans la droite voie. Ce grand et victorieux monarque dont j'ai aujourd'hui emprunté mon texte, s'est bien éloigné de ces deux défauts; il est aisé de le remarquer par les paroles que j'ai rapportées. Il a, dit-il, étudié ses voies, il a délivré son esprit de toutes préoc

cupations étrangères, il a médité sérieusement où il devoit porter ses inclinations: Cogitavi vias meas. Voilà une délibération bien posée; après quoi je ne m'étonne pas s'il a pris le meilleur parti, et s'il nous dit que le résultat de cette importante consultation a été de tourner ses pas du côté de la loi de Dieu : Et converti pedes meos in testimonia tua. Si tous les hommes délibéroient aussi soigneusement que David sur cette matière si nécessaire, je me persuade, mes Sœurs, qu'ils prendroient fort facilement une résolution semblable: et étant convaincu de ce sentiment, j'ai cru que cet entretien particulier que vous avez désiré de moi, contenteroit vos pieux désirs, si je recherchois les raisons sur lesquelles David a pu appuyer cette résolution si bien digérée.

SERMON

POUR LE TEMPS DU JUBILÉ,

SUR LA PÉNITENCE (*).

Trois qualités de la pénitence opposées aux trois désordres du péché comment elles en sont le remède. Difficulté à recouvrer la justice perdue. Fidélité qu'exige l'amitié réconciliée. Funestes effets du mépris ou de l'abus de la pénitence.

Qui enim mortui sumus peccato, quomodo adhuc vivemus in illo?

Nous qui sommes morts au péché, comment pourronsnous désormais y vivre? Rom. vI. 2.

Je ne puis vous exprimer, chrétiens, combien est JE grande aujourd'hui la joie de l'Eglise. Cette grâce du Jubilé que vous avez si ardemment embrassée, cette piété exemplaire, ce zèle que vous avez témoigné dans la fréquentation des saints sacremens, satisfait infiniment cette bonne mère : et si le père de ce prodigue voulut que toute sa maison fût en joie pour le retour d'un de ses enfans, quels sont les sentimens de l'Eglise voyant un si grand nombre des

(*) Ce sermon étant isolé, et n'appartenant à aucune suite de sermons, nous l'avons placé avant le carême, parce que le sujet qui y est traité, convient très-bien à ce saint temps. Edit. de Versailles.

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