Images de page
PDF
ePub

est sensible. Nul autre tribunal ne trouverait autour de lui autant de lumière et de moyens de discerner la vérité.

(

Lorsque le condamné n'appartient à aucun corps, la reconnaissance est faite par le conseil de guerre qui a prononcé la condamnation; et si le conseil a cessé ses fonctions, elle est faite par celui de la division sur le territoire de laquelle le condamné a été repris. La reconnaissance, d'ailleurs, sera faite en audience publique; liberté entière laissée au prévenu dans ses moyens de défense; il pourra faire entendre ses témoins, combattre ceux qui lui seront opposés. Rien ne sera fait hors de sa présence, et le recours sera ouvert contre l'arrêt qui interviendra. Tout ce système, conforme au droit commun (Instr. crim. art. 519 et 520), a paru plein de raison et de justice à votre commission (1). »

Aux termes du premier paragraphe de l'article 180, c'est donc le conseil de guerre de la division où se trouve le corps dont fait partie le condamné, qui est chargé de reconnaître l'identité de ce dernier. Par le mot corps, il faut entendre un corps de troupes, tel qu'un régiment, un bataillon, une compagnie.

[ocr errors]

Quant aux condamnés n'appartenant à aucun corps, c'est-à-dire employés d'une manière isolée ou en résidence fixe, tels que les militaires appartenant à l'état-major général, ou aux états-majors du génie, de l'artillerie, ou au corps de l'intendance militaire, ou à certaines administrations militaires, la reconnaissance de leur identité est faite, aux termes du second paragraphe, par le conseil de guerre qui a prononcé la condamnation, et, si le conseil a cessé ses fonctions, par le conseil de guerre de la division sur le territoire de laquelle le condamné a été repris. M. Foucher fait remarquer, toutefois, que si ces militaires ou assimilés se trouvaient, au moment de leur mise en jugement, faire partie d'un corps de troupes et comptaient à l'effectif, le premier paragraphe de l'article 180 leur serait applicable (2).

«

La reconnaissance de l'identité par les conseils de guerre indiqués dans les premier et second paragraphes de l'article 180 est accompagnée de la purge du jugement de contumace, devant ces mêmes conseils (3). M. Foucher formule, à ce sujet, les règles suivantes: Lorsqu'il s'agit de purger un jugement rendu par contumace, l'identité de l'accusé doit d'abord être. constatée dans le jugement, soit par une simple déclaration du conseil, si elle n'est pas contestée, soit par un jugement séparé et préjudiciel, si elle

(4) CODE D'INSTRUCTION CRIMINELLE. Art. 518. « La reconnaissance de l'identité d'un individu condamné, évadé et repris, sera faite par la cour qui aura prononcé sa condamnation.

« Il en sera de même de l'identité d'un individu condamné à la déportation ou au bannissement, qui aura enfreint son ban et sera repris; et la cour, en prononçant l'identité, lui appliquera, de plus, la peine attachée par la loi à son infraction. >>

Art. 519. Tous ces jugements seront rendus sans assistance de jurés, après que la cour aura entendu les témoins appelés tant à la requête du procureur général qu'à celle de l'individu repris, si ce dernier en a fait citer.

«L'audience sera publique, et l'individu repris sera présent, à peine de nullité. »

Art. 520. « Le procureur général et l'individu repris pourront se pourvoir en cassation, dans la forme et dans le délai déterminés par le présent Code, contre l'arrêt rendu sur la poursuite en reconnaissance d'identité. »

(2) Foucher, Commentaire, p. 529.

(3) Il y est procédé suivant les formes prescrites par l'article 176. · Voir, plus haut, cet article

et son commentaire.

l'est. Il est procédé à un débat public; les témoins doivent être entendus sous la foi du serment; à l'audience, le prévenu doit être présent pour pouvoir être confronté, s'il y a lieu, et c'est sur les dépositions des témoins, les confrontations et les autres documents produits pour éclairer les juges sur l'identité, que ceux-ci doivent se prononcer par un jugement motivé, rendu publiquement. Pour le jugement d'identité, l'accusé peut se faire assister d'un défenseur, puisque la loi ne l'interdit pas; mais il n'y a pas lieu de reprendre les dispositions de l'article 109 (1), qui ne s'appliquent qu'au jugement sur le fond. Toutefois, comme, s'il s'agit d'un contumax dont la peine ne serait pas prescrite, il y aurait lieu de reprendre l'instruction à partir de l'ordre de mise en jugement, le commissaire du gouvernement aura dù remplir les formalités exigées par l'article 109, avant la comparution de l'accusé devant le conseil, et, par le fait, dans ce cas, l'accusé sera toujours assisté d'un défenseur, même pour le jugement relatif à l'identité, qui est la question préjudicielle à vider avant de passer aux débats sur le fond (2). »

Le commissaire du gouvernement et l'individu repris ayant la faculté de se pourvoir en révision contre le jugement qui statue sur la reconnaissance de l'identité, ce recours pourra être immédiatement exercé. Il faudra donc faire donner, sans retard, lecture de ce jugement au condamné, par le greffier, en présence du commissaire du gouvernement et devant la garde rassemblée sous les armes. Aussitôt après cette lecture, le commissaire du gouvernement avertira le condamné que la loi lui accorde vingt-quatre heures pour exercer son recours devant le conseil de révision (3).

Il ne sera procédé au jugement sur le fond qu'à l'expiration des délais accordés pour recourir devant le conseil de révision (4).

ART. 181.

Lorsqu'après l'annulation d'un jugement, un second jugement rendu contre le même accusé est annulé pour les mêmes motifs que le premier, l'affaire est renvoyée devant un conseil de guerre d'une des divisions voisines. Ce conseil doit se conformer à la décision du conseil de révision sur le point de droit.

Toutefois, s'il s'agit de l'application de la peine, il doit adopter l'interprétation la plus favorable à l'accusé.

Le troisième jugement ne peut plus être attaqué par les mêmes moyens, si ce n'est par la voie de cassation dans l'intérêt de la loi, aux termes des articles 441 et 442 du Code d'instruction criminelle.

Cet article règle l'effet d'un deuxième jugement d'annulation. Il doit se combiner avec l'article 2 de la loi du 30 juillet 1828, qui dispose que, dans le cas où il s'agit de l'application de la peine, le tribunal saisi en troisième

(4) Voir, plus haut, l'article 409 et son commentaire.

(2) Foucher, Commentaire, p. 534, 532.

(3) Voir, plus haut, l'article 444 et son commentaire.

(4) Voir plus haut, les articles 144, 143, 144, 147 et 148 avec leur commentaire.

instance ne pourra appliquer une peine plus grave que celle qui résulterait de l'interprétation la plus favorable à l'accusé; mais sous la condition que les deux premiers jugements auront été annulés par les mêmes moyens de droit. Si, au contraire, l'annulation avait été prononcée par des motifs difféents, la disposition de l'article 181 ne serait plus applicable (1).

Après deux annulations prononcées dans la même affaire par le conseil de révision, le conseil de guerre, saisi comme deuxième tribunal de renvoi, n'est tenu de se conformer à la décision du conseil de révision que sur les points de droit dont la solution a motivé les deux annulations, et non sur ceux dont la solution n'a été indiquée comme motif d'annulation que relativement à l'un des deux jugements émanés des conseils de guerre précédemment saisis (2).

[ocr errors]

Dans le cas prévu par le premier paragraphe de l'article 180,- dit M. Foucher, la cassation annulant le jugement en son entier, le conseil de guerre saisi conserve toute son indépendance pour l'appréciation des faits qui lui sont soumis, et ce n'est qu'autant que ses réponses aux questions de fait présenteraient de nouveau à juger la question de droit qui aurait été l'objet des deux premières décisions des conseils de guerre, que le conseil de révision se trouverait obligé de se conformer à l'interprétation doctrinale donnée à la loi par ces décisions. Il en résulte que les juges de renvoi peuvent déclarer non constants les faits dont les accusés auraient été reconnus coupables par les jugements annulés; de même que, si la cassation provenait de ce qu'à tort les premiers juges avaient refusé de reconnaître une infraction punissable dans les faits qu'ils auraient constatés, les troisièmes juges peuvent déclarer, au contraire, que ces faits constituent fel crime ou tel délit; ils le doivent même, si c'est sur ce point de droit que la double cassation est motivée. Mais si ce n'était pas par le motif qui a déterminé cette double cassation qu'ils arrivassent à un jugement de condamnation, le recours serait ouvert; car l'action du demandeur ne serait pas fondée alors sur le motif qui a fait l'objet des deux premières cassations (3).

D

Le second paragraphe de l'article 181 dispose que lorsqu'il s'agit de l'application de la peine, le conseil de guerre devant lequel l'affaire est renvoyée en deuxième lieu, doit adopter l'interprétation la plus favorable à l'accusé. Pour l'application de cette disposition, il faut que la cassation ait porté sur l'application de la peine à un fait reconnu constant et constituant un crime ou délit dont la pénalité seulement aurait fait l'objet du conflit. Mais si la cassation avait été motivée sur ce que le fait déclaré constant

(1) Il avait été jugé, sous l'ancienne législation: 4° que la loi du 18 vendémiaire an vi, d'après laquelle un conseil de révision, appelé à prononcer sur un deuxième recours fondé sur les mêmes moyens qu'au premier pourvoi, devait en référer au Corps législatif, a été implicitement abrogée par la loi du 29 prairial an vi; l'affaire, dans de telles circonstances, devait être renvoyée devant un conseil de révision d'une des divisions militaires voisines; 2° que l'article 4er de la loi du 30 juillet 1838, aujourd'hui abrogée, qui ordonne qu'après cassation d'un arrêt par les chambres réunies de la Cour suprême, il en sera réferé au roi, est étranger aux tribunaux militaires; en conséquence, était nulle la décision d'un conseil de révision qui, appelé à connaitre d'une affaire sur un second pourvoi, avait sursis à prononcer, et ordonné qu'il en serait référé au roi ce conseil devait statuer. Dalloz, Répertoire, vo Organisation militairė, no 962, t. XXXIV, p. 2073. (2) Cass. crim., 28 avril 1864, affaire Bergeon. Dalloz P., 1864, 4, p. 404. (3) Foucher, Commentaire, p. 533 et 534.

aurait constitué un crime ou un délit que les jugements annulés auraient refusé de reconnaître, comme elle ne porterait que sur la qualification légale du fait admis par le conseil de guerre et non sur l'application de la peine, il n'y aurait pas lieu d'appliquer le second paragraphe de l'article 181.

ART. 182.

Lorsque les conseils de guerre ou de révision aux armées, dans les divisions territoriales en état de guerre, dans les communes, départements et places de guerre en état de siége, cessent leurs fonctions, les affaires dont l'information est commencée sont portées devant les conseils de guerre des divisions territoriales désignées par le ministre de la guerre (1).

Il s'agit dans cet article des conseils autres que les conseils permanents, et des affaires dont l'information était commencée avant la cessation de leurs fonctions. Ces affaires sont portées alors devant les conseils de guerre des divisions territoriales désignées par le ministre, qui doit s'inspirer, pour cette désignation, de l'arrêté des consuls du 15 vendémiaire an x, du décret du 22 mars 1813, relatif aux contumaces, et des articles 35 et 167 du Code de justice militaire (2).

L'article 43 porte que lorsqu'une ou plusieurs communes, un ou plusieurs départements ont été déclarés en état de siége, les conseils de guerre permanents des divisions territoriales dont font partie ces communes ou ces départements, indépendamment de leurs attributions ordinaires, statuent sur les crimes et délits dont la connaissance leur est déférée par le Code et par les lois sur l'état de siége (3). Dans ce cas, ces conseils permanents continuent à connaître des affaires commencées devant eux avant la levée de l'état de siége.

Que décider, dans le cas où, par suite de la suppression de la division territoriale, le conseil de guerre permanent appartenant à cette division viendrait à être supprimé? Les affaires pendantes devant lui seraient renvoyées de droit aux conseils de guerre des divisions qui auraient absorbé le territoire des divisions supprimées.

Que décider, dans le cas où il n'y aurait de supprimé que le deuxième conseil de guerre facultatif créé par suite des besoins du service, conformément au second paragraphe de l'article 2 (4)? Les affaires pendantes

(4) La loi italienne contient à ce sujet des dispositions toutes spéciales:

Art. 576. Tout délit commis en temps de guerre sera toujours puni par les lois prescrites pour le temps de guerre. »

Le Code militaire prussien renferme des prescriptions opposées :

Si une condamnation à mort n'a pas encore été confirmée au moment de la levée de l'état de siége, cette peine est commuée par les tribunaux ordinaires en celle qui aurait été prononcée si l'état de siége n'eût pas existé.

L'action des conseils de guerre cesse avec l'état de siége. Tous les jugements rendus, tous les dossiers, toutes les affaires encore en instance sont remis aux tribunaux ordinaires. Ces dernières, à l'exception de celles qui ressortissent aux tribunaux militaires, sont jugées conformément au Code pénal ordinaire.

(2) Voir, plus haut, ces deux articles et leur commentaire.

(3) Voir, plus haut, cet article et son commentaire. (4) Idem.

devant ce deuxième conseil facultatif seraient renvoyées devant le conseil restant en fonction dans la division, à moins que ce dernier conseil n'en ait déjà connu. On renverrait alors ces affaires à l'un des conseils de guerre des divisions voisines (1).

ART. 183.

Toutes assignations, citations et notifications aux témoins, inculpés ou accusés, sont faites sans frais par la gendarmerie ou par tous autres agents de la force publique.

Par tous autres agents de la force publique,» le législateur de 1857 entend les huissiers, par exemple, les gardes champêtres, les sous-officiers de l'armée, et même de simples soldats; mais M. Foucher recommande, avec raison, de n'employer pour les notifications, à défaut de gendarmes, que des agents dont le grade dans l'armée inspire de la confiance et offre des garanties pour l'accomplissement de formalités qui réclament une intelligence éclairée (2).

Il est expressément recommandé aux gendarmes ou autres agents de la force publique, de signifier les exploits à la personne même du témoin, ou au moins à quelqu'un de sa famille ou de sa domesticité, et non pas simplement au concierge d'une maison où il peut y avoir plusieurs locataires, surtout s'il s'agit d'un témoin non militaire (3).

Les gendarmes ou autres agents de la force publique employés à la notification des assignations, citations, etc., doivent apporter le plus grand soin à l'accomplissement de cette mission. Ils doivent particulièrement ne pas omettre de préciser les jours, les heures, les lieux où se font les actes; les nom, prénoms, profession et domicile des individus que ces actes concernent, ou qui ont pour objet d'indiquer les personnes entre les mains desquelles ces actes sont signifiés, ou encore la transcription intégrale, fidèle, des actes que ces agents ont pour objet de signifier. Tout grattage leur est absolument interdit. Ils doivent éviter toute surcharge, tout mot placé en interligne, raturer nettement ceux qui doivent l'être, sauf à reporter en marge les mots qui remplacent ceux qui ont été raturés, en ayant soin d'approuver les ratures et les renvois, avec cette distinction que, pour les ratures, il suffit d'une approbation placée à la fin de l'acte et faisantconnaître en toutes lettres le nombre des mots ou des lettres raturés, alors que chaque renvoi doit être approuvé par une signature de l'instrumentaire, placée sous chacun d'eux, précédée de la mention approuvé le présent renvoi. Si l'acte doit être signé par d'autres personnes, celles-ci doivent également signer les renvois (4).

La Cour de cassation a décidé, par de nombreux arrêts, que les dispositions de l'article 78 du Code d'instruction criminelle s'appliquaient à tous

(4) Voir, plus haut, les articles 167 et 174 avec leur commentaire.

(2) V. Foucher, Commentaire, p. 537.

(3) Id., P. 293.

(4) Id., p. 537, 538.

« PrécédentContinuer »