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Du reste, il seroit difficile d'arrêter ceci d'une manière générale. Il faut faire ce que le père spirituel dira, bien que je puisse assurer que la plus grande distance entre les communions est celle de mois en mois pour ceux qui veulent servir Dieu dévotement.

Si vous êtes bien prudente, il n'y aura ni père, ni mère, ni mari, ni femme qui vous empêche de communier souvent. Car, puisque le jour de votre communion vous ne laisserez pas d'avoir le soin qui est convenable à votre condition; que vous en serez plus douce et plus gracieuse envers ceux qui vous approchent ; que vous ne leur refuserez aucune espèce de devoirs; il n'y a pas d'apparence qu'ils veuillent vous détourner d'une pratique qui ne leur cause aucun préjudice, à moins qu'ils ne soient d'un esprit tout-à-fait fâcheux et déraisonnable; auquel cas, comme je l'ai dit, votre directeur voudra bien que vous usiez de condescendance.

A l'égard des gens mariés, il suffit de leur dire que sous l'ancienne loi c'étoit une chose désagréable à Dieu que les créanciers exigeassent, pendant les jours de fètes, le paiement de ce qu'on leur devoit, mais ce n'étoit point une chose mauvaise pour le débiteur de payer des dettes ces jours-là si ou l'exigeoit; de mê

me dans l'état du mariage exiger le devoir nuptial le jour de la communion, c'est manquer à une sainte bienséance, quoique ce ne soit pas un péché grave; mais s'acquitter ces jours - là de ce devoir si on l'exige, c'est se conformer à la religion. Il est donc vrai que cette sujétion du mariage ne doit priver de la communion aucun de ceux qui sont animés du désir d'y participer. Certes, dans la primitive Eglise les chrétiens ne laissoient pas de communier tous les jours, quoiqu'ils fussent mariés et qu'ils eussent un grand nombre d'enfans. C'est pourquoi j'ai dit que la fréquente communion ne donnoit aucune sorte d'incommodité ni aux pères, ni aux femmes, ni aux maris, pourvu que l'ame qui communie soit prudente et dis

crète.

Quant aux maladies corporelles, il n'y en a point qui soit un empêchement légitime à cette sainte participation, si ce n'est celle qui provoqueroit fréquemment au vomisse

ment.

Ainsi, pour communier tous les huit jours, il est nécessaire de n'avoir ni péché mortel, ni aucune affection au péché véniel, et de plus il faut avoir un grand désir de la communion. Mais communier tous les jours, il faut en outre avoir surmonté la plupart des mauvaises

pour

inclinations, et que ce soit avec l'avis du père

spirituel.

CHAPITRE XXI.

Comment il faut communier.

COMMENCEZ

OMMENCEZ le soir précédent à vous préparer à la sainte communion par plusieurs aspirations et élancemens de cœur, vous retirant un peu de meilleure heure, afin de pouvoir aussi vous lever plus matin : si la nuit vous vous réveillez, sanctifiez ces momens-là par quelques dévotes paroles ou par quelque doux sentiment, de manière que votre ame en soit comme parfumée pour recevoir l'époux, qui veillant pendant que vous dormez, se prépare à vous apporter mille grâces et mille faveurs, si de votre côté vous êtes prête à les recevoir. Le matin levez-vous avec grande joie pour le bonheur auquel vous aspirez; et vous étant bien confessée, allez avec grande confiance, mais aussi avec grande humilité, prendre cette viande céleste qui vous nourrit pour l'immortalité. Dès que vous aurez dit les paroles sacrées : Seigneur, je ne suis pas digne, etc., ne remuez plus votre tête ni vos lèvres, soit pour prier soit pour soupirer; mais ouvrant doucement

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et médiocrement la bouche, et levant la tête autant qu'il le faut pour que le prètre puisse voir ce qu'il fait, recevez, pleine de foi, d'espérance et de charité, celui qui est le principe, l'objet, le motif et la fin de toute chose. O Philothée ! imaginez-vous alors que, comme l'abeille, après avoir recueilli sur les fleurs la rosée du ciel et le suc le plus exquis de la terre, le réduit en miel; et le porte dans sa ruche; de même le prêtre, après avoir pris sur l'autel le Sauveur du monde, vrai fils de Dieu, descendu du Ciel comme une rosée, et vrai Fils de la Vierge, sorti de la terre comme une fleur, il le met dans votre bouche et dans votre poitrine, pour vous être une douce nòurriture. L'ayant reçu, excitez votre cœur à venir faire hommage à ce roi de salut; traitez avec lui de vos affaires intérieures; contemplez - le au dedans de vous-même, où il s'est mis pour votre bonheur; enfin, faites-lui tout l'accueil qu'il vous sera possible, et comportez-vous de cette sorte que l'on reconnoisse par toutes vos actions que Dieu est avec vous. Mais quand vous ne pourrez pas avoir cette consolation de communier réellement à la sainte messe, communiez au moins de cœur et d'esprit, vous unissant par un ardent désir à cette chair vivifiante du Sauveur

Votre grande intention en communiant, doit être de vous avancer, de vous fortifier et de vous consoler en l'amour de Dieu; car c'est pour l'amour que vous devez recevoir ce que l'amour daigne vous donner. Non, le Sauveur ne donne nulle part une plus grande preuve de sa bonté et de sa tendresse que dans ce sacrement, où il s'anéantit, pour ainsi dire, et se réduit en nourriture, afin de pénétrer nos ames, et de s'unir intimement au cœur et au corps de ses fidèles.

Si les mondains vous demandent pourquoi vous communiez si souvent, dites-leur que c'est pour apprendre à aimer Dieu, pour vous purifier de vos imperfections, pour vous délivrer de vos misères, pour vous consoler en vos afflictions, pour vous soutenir en vos foiblesses. Dites-leur que deux sortes de gens doivent souvent communier les parfaits, parce qu'étant bien disposés, ils auroient grand tort de ne point s'approcher de la source de la perfection; et les imparfaits, afin de pouvoir justement prétendre à la perfection; les forts, de peur de s'affoiblir; et les foibles, afin de se fortifier; les malades, afin de guérir; les sains, afin de ne pas tomber en maladie; et que quant à vous, étant imparfaite, foible et malade, vous avez besoin de souvent communiquer avec la

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