ij vous prendrez la mesure de toutes vos actions, et de toutes vos pensées. Il ne vous oblige pas à l'austérité et à la solitude d'un ermite; il ne vous persuade pas a'entreprendre un genre de vie extraordinaire ; son dessein est de vous mener au bout de la perfection chrétienne, et de vous instruire dans la solide piété, par une voie douce et facile, qui s'accommode admirablement à toutes les différentes conditions des hommes, quelque basses ou relevées qu'elles puissent être. Si la vertu, disoit un ancien, pouvoit nous être représentée avec des couleurs assez vives, et des traits dignes de son mérite, elle attireroit tous les mortels à son amour, avec une ardeur et une passion extrêmes. Il me semble, certes, que le grand François de Sales a réussi parfaitement dans ce dessein; en effet, il nous l'a représentée au vif avec tout l'éclat de sa majesté, et tous les attraits de ses beautés et de ses grâces. Mais ce qui est le plus digne de louange, et le plus agréable en cet excellent écrivain, c'est que se proposant Notre-Seigneur pour son modèle, il a commencé à bien faire avant que de bien dire, et que son premier soin a été d'exé cuter lui-même ce qu'il devoit enseigner aux autres. De sorte qu'on peut dire avec raison, que ceux qui étudient ses livres, étudient encore sa vie, et que ses préceptes et ses avis sont d'autant plus faciles à pratiquer, qu'ils sont prévenus et autorisés de son exemple. Cet homme, né dans une famille noble et riche, élevé dans la vertu et les belles-lettres, de la manière dont on a accoutumé d'instruire les enfans de bonne maison, a paru dans la cour des rois, et les palais des princes, dans les maisons des particuliers, dans les compagnies de ses amis, dans les affaires du monde, dans les exercices de dévotion: bref, dans tous les emplois de sa charge épiscopale, avec une conduite et une sainteté merveilleuses; tellement que nous avons bien sujet de nous couvrir de rougeur et de honte, et de condamner notre lâcheté, nous, à qui le prétexte, ou de la cou. tame du monde, ou de l'occupation des grandes affaires, ou de la condition de notre naissance, sert d'ex. cuse ordinaire pour nous dispenser de vivre dans les règles exactes de la piété chrétienne. Or ce que je dis de la Philothée, je le dis encore du Théotime: je veux dire, de ce livre tout d'or de l'amour divin; bref, de tous les autres ouvrages de ce grand homme, je vous avoue que les lisant souvent, et de nuit, je me suis fait comme une idée en moi-même, et un recueil de ses plus beaux sentimens, et des points principaux de sa doctrine, que je rumine puis après à mon loisir, que je goûte et que je fais passer, pour ainsi dire, dans non estomac, afin de le transformer en mon sang et en ma substance. Voilà mon sentiment touchant ce saint homme, mon cher neveu, dont je vous fais part, vous exhortant de tout mon cœur à le suivre: car en vérité, si vous le prenez pour le censeur et le guide de votre vie, si vous pratiquez en sa personne ce que Sénèque même nous enseigne, qu'il nous faut choisir l'exemple de quelque homme illustre, qui serve de patron à notre conduite, et en présence de qui nous nous Imaginions d'être et d'agir en toutes occasions, ni je n'aurai sujet de me repertir du conseil que je vous IV donne, ni vous de 1 avoir mis en execution. Je finis, mon cher neveu, en vous disant avec florace : Adieu, vivez content, et si vous savez quelque chose de meilleur que ces avis, je vous prie de m'en faire part en toute sincérité; sinon, servez-vous comme moi de ceux-ci, et faites-en votre profit. DEDICATOIRE. O doux Jésus! mon Seigneur, mor. Sauveur et mon Dieu, me voici prosterné devant votre Majesté, vouant et consacrant cet écrit à votre gloire. Animez-en les paroles de votre sainte bénédiction, afin que les ames pour lesquelles je l'ai fait, en puissent recevoir les inspirations que je leur désire, et particulièrement celle d'implorer sur moi votre immense vj ORAISON DEDICATOIRE. miséricorde, afin qu'en montrant aux autres le chemin de la dévotion en ce monde, je ne sois pas réprouvé et confondu éternellement dans l'autre ; mais qu'à jamais je chante avec eux pour cantique de triomphe le mot que de tout mon cœur je prononce maintenant en témoignage de fidélité parmi les hasards de cette vie mortelle: Vive Jésus! vive Jésus! Oui, Seigneur Jésus, vivez et régnez en nos cœurs par tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il. |