Images de page
PDF
ePub

tirer une loterie, afin que rien ne manquât à la galanterie de ces fêtes. C'étoient des pierreries, des ameublements, de l'argenterie, et autres choses semblables; et, quoique le sort ait accoutumé de décider de ces présents, il s'accorda sans doute avec le désir de sa majesté, quand il fit tomber le gros lot entre les mains de la reine; chacun sortant de ce lieu-là fort content pour aller voir les courses qui s'alloient commencer.

Enfin Guidon et Olivier parurent sur les rangs, à cinq heures du soir, fort proprement vêtus et bien montés.

Le roi, avec toute la cour, les honora de sa présence; et sa majesté lut même les articles des courses, afin qu'il n'y eût aucune contestation entre eux. Le succès en fut heureux au duc de SaintAignan, qui gagna le défi,

Le soir, sa majesté fit jouer les trois premiers actes d'un une comédie nommée Tartuffe, que le sieur Molière avoit faite contre les hypocrites; mais, quoiqu'elle eût été trouvée fort divertis sante, le roi connut tant de conformité entre ceux qu'une véritable dévotion met dans le chemin du ciel, et ceux qu'une vaine ostentation de bonnes œuvres n'empêche pas d'en commettre de mauvaises, que son extrême délicatesse pour les choses de la religion eut de la peine à souffrir cette ressemblance du vice avec la vertu; et, quoiqu'on ne doutât point des bonnes intentions de l'auteur, il défendit cette comédie pour le public, jusqu'à ce qu'elle fût entièrement achevée, et examinée par des gens capables d'en juger, pour n'en pas laisser abuser à d'autres moins capables d'en faire un juste discernement.

SEPTIÈME JOURNÉE.

Le mardi, treizième, le roi voulut encore courre les têtes, comme à un jeu ordinaire que devoit gagner celui qui en feroit le plus. Sa majesté eut encore le prix de la course des dames, le duc de Saint-Aignan celui des jeux; et, ayant eu l'honneur d'entrer pour le second à la dispute avec sa majesté, l'adresse incompa

rable du roi lui fit encore avoir ce prix; et ce ne fut pas sans étonnement, duquel on ne pouvoit se défendre, qu'on en vit gagner quatre à sa majesté, en deux fois qu'elle avoit couru les têtes.

On joua, le même soir, la comédie du Mariage forcé, encore de la façon du même sieur Molière, mêlée d'entrées de ballet et de récits; puis le roi prit le chemin de Fontainebleau le mercredi, quatorzième. Toute la cour se trouva si satisfaite de ce qu'elle avoit vu, que chacun crut qu'on ne pouvoit se passer de le mettre par écrit pour en donner connoissance à ceux qui n'avoient pu voir des fêtes si diversifiées et si agréables', où l'on a pu admirer tout à la fois le projet avec le succès, la libéralité avec la politesse, le grand nombre avec l'ordre, et la satisfaction de tous; cù les soins infatigables de M. Colbert s'employèrent en tous ces divertissements, malgré ses importantes affaires; où le duc de Saint-Aignan joignit l'action à l'invention du dessin; où les beaux vers du président de Périgny à la louange des reines furent si justement pensés, si agréablement tournés, et récités avec tant d'art; où ceux que M. de Benserade fit pour les chevaliers eurent une approbation générale; où la vigilance exacte de M. Bontemps et l'application de M. de Launay ne laissèrent manquer d'aucune des choses nécessaires; enfin, où chacun a marqué si avantageusement son dessein de plaire au roi dans le temps où sa majesté ne pensoit elle-même qu'à plaire, et où ce qu'on a vu ne sauroit jamais se perdre dans la mémoire des spectateurs, quand on n'auroit pas pris le soin de conserver par écrit le souvenir de toutes ces merveilles.

[ocr errors]

FIN DU TROISIÈME VOLUME.

[blocks in formation]

1

« PrécédentContinuer »