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N'ont-ils pû découvrir, vos yeux, ce dont tout le monde est en peine, et ne vous ont-ils point donné quelques petites lumieres du panchant de mon cœur? Vous voyez les soins qu'on me rend, l'empressement qu'on me témoigne : quel est celuy de ces deux princes que vous croyez que je regarde d'un œil plus doux?

SOSTRATE.

Les doutes que l'on forme sur ces sortes de choses ne sont reglez d'ordinaire que par les interests qu'on prend.

ERIPHILE.

Pour qui, Sostrate, pancheriez-vous des deux? Quel est celuy, dites-moy, que vous souhaiteriez que j'épousasse ?

SOSTRATE.

Ah! Madame, ce ne seront pas mes souhaits, mais vostre inclination qui décidera de la chose.

ERIPHILE.

Mais si je me conseillois à vous pour ce choix?
SOSTRATE.

Si vous vous conseilliez à moy, je serois fort embarassé.

ERIPHILE.

Vous ne pourriez pas dire qui des deux vous semble plus digne de cette preference?

SOSTRATE.

Si l'on s'en rapporte à mes yeux, il n'y aura personne qui soit digne de cet honneur. Tous les princes du monde seront trop peu de chose pour aspirer à vous; les dieux seuls y pourront pre

tendre, et vous ne souffrirez des hommes que l'encens et les sacrifices.

ERIPHILE.

Cela est obligeant, et vous estes de mes amis. Mais je veux que vous me disiez pour qui des deux vous vous sentez plus d'inclination, quel est celuy que vous mettez le plus au rang de vos amis.

SCENE IV.

CHORÉBE, SOSTRATE, ERIPHILE.

CHORÉBE.

Madame, voila la princesse qui vient vous prendre icy pour aller au bois de Diane.

SOSTRATE.

Helas! petit garçon, que tu es venu à propos!

SCENE V.

ARISTIONE, IPHICRATE, TIMOCLĖS, ANAXARQUE, CLITIDAS, SOSTRATE, ERIPHILE.

ARISTIONE.

On vous a demandée, ma fille, et il y a des gens

que vostre absence chagrine fort.

ERIPHILE.

Je pense, Madame, qu'on m'a demandée par compliment, et on ne s'inquiete pas tant qu'on vous dit.

ARISTIONE.

On enchaîne pour nous ici tant de divertissemens les uns aux autres que toutes nos heures sont retenuës, et nous n'avons aucun moment à perdre si nous voulons les goûter tous. Entrons viste dans le bois, et voyons ce qui nous y attend; ce lieu est le plus beau du monde, prenons viste nos places.

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TROISIEME INTERMEDE

Le theatre est une forest où la princesse est invitée d'aller; une nymphe luy en fait les honneurs en chantant, et, pour la divertir, on luy jouë une petite comedie en musique dont voicy le sujet. Un berger se plaint à deux bergers, ses amis, des froideurs de celle qu'il ayme; les deux amis le consolent, et, comme la bergere aymée arrive, tous trois se retirent pour l'observer. Aprés quelque plainte amoureuse, elle se repose sur un gazon et s'abandonne aux douceurs du sommeil. L'amant fait approcher ses amis pour contempler les graces de sa bergere, et invite toutes choses à contribuer à son repos. La bergere, en s'éveillant, voit son berger à ses pieds, se plaint de sa poursuite; mais, considerant sa constance, elle luy accorde sa demande, et consent d'en estre aymée, en presence des deux bergers amis. Deux satyres, arrivant, se plaignent de son changement, et, estant touchez de cette disgrace, cherchent leur consolation dans le vin.

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Venez, grande Princesse, avec tous vos appas,
Venez prester vos yeux aux innocens ébas
Que nostre dezert vous presente.

N'y cherchez point l'éclat des festes de la cour;
On ne sent icy que l'amour,

Ce n'est que l'amour qu'on y chante.

SCENE PREMIERE.

TIRCIS.

Vous chantez sous ces feuillages,
Doux rossignols pleins d'amour,
Et de vos tendres ramages
Vous réveillez tour à tour

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