Images de page
PDF
ePub

CHAPITRE XXXII.

DES PAGES.

On trouve dans Ménage plusieurs étymologies de ce mot pædagogium, pagus, puer nobilis è famulitio viri principis. Pædagogiani pueri, etc., et en italien paggio, dont les Français ont fait page.

Les grands, chez les Romains, entretenaient à leur service une certaine quantité de jeunes gens qu'ils faisaient élever sous la surveillance de quelques vieux esclaves appelés pédagogues: chacun de ces jeunes garçons était désigné par le mot de pædagogianus puer. C'est de cet usage qu'est venu dans les cours modernes celui d'avoir des pages.

Ces pages étaient richement vêtus et choisis parmi les enfans qui se distinguaient par leur beauté: ceux qui étaient attachés au service des Empereurs romains étaient sous la surveillance du maître-d'hôtel.

« Les Francs, dit M. le Comte du Buat, conservèrent l'usage de grossir la cour du Prince par une nombreuse jeunesse, à laquelle Hincmar donne en latin le nom de discipuli, par lequel il a cru rendre le mot grec poedagogiani. Chaque officier palatin en avait un certain nombre sous lui. C'était, selon Hincmar, des jeunes gens qui s'attachaient à eux, et qui leur faisaient autant

d'honneur qu'ils en recevaient eux-mêmes de l'amitié que leur témoignaient des personnes considérables dans l'État. Chaque maître procurait à ses élèves l'occasion d'être connus du Roi et de lui faire leur cour, afin qu'ils se souvînt d'eux lorsqu'il s'agissait de remplir les places vacantes ces disciples contribuaient beaucoup a rendre la cour nombreuse et brillante. >>

Dans les temps de l'ancienne chevalerie, on appelait page, varlet ou damoiseau un gentilhomme que l'on retirait des mains des femmes à l'âge de sept ou huit ans pour le mettre auprès de quelque haut Baron ou de quelque illustre Chevalier qui avait un état de maison. Voyez ce que j'en ai dit, page 224 et suivantes.

M. de Boulainvilliers dit encore que « le page était « proprement un apprentif d'armes, qui faisait partie « de la suite du gendarme, lorsque Charles VII en for<«<ma les quinze compagnies dites d'ordonnance; » et il était compris dans la paye de ce gendarme, fixée à 30 francs par mois pour lui, trois chevaux, son page, un gros valet, des archers à cheval et un coutillier aussi à cheval, ce qui faisait six chevaux pour un gendarme.

Jusqu'au règne de François Ier, pour être admis à faire le service du Roi dans sa chambre, à titre de page, il fallait non seulement être noble d'ancienne extraction, mais jouir ou avoir la perspective d'une propriété de 6,000 francs de rentes.

Aux états-généraux tenus à Paris en 1614, la noblesse du royaume supplia le Roi de tenir le plus grand nombre des pages qu'il pourrait, et d'ordonner qu'ils fussent tous de la qualité requise, conformément à l'article cxII de l'ordonnance d'Orléans.

Les pages d'honneur ne servaient que le Roi et les grands vassaux de la couronne. On les appelait aussi premiers pages du Roi; ils servaient dans l'intérieur du Louvre sous les ordres du Grand-Chambrier de France, et les pages de la grande et petite Écurie servaient sous les ordres du Grand-Ecuyer de France.

Par le réglement du Roi du 18 septembre 1734, les places de pages de la chambre du Roi étaient à la nomination des quatre premiers gentilhommes de la chambre de S. M., chacun dans son année.

Pour être admis au nombre de ces pages, il fallait prouver sa noblesse dès l'an 1550, par titres originaux qui devaient établir une filiation paternelle, suivie depuis le présenté jusqu'à cette époque, sans aucun anoblissement, relief ou priviléges attributifs de noblesse.

Les pages de la grande Écurie, suivant les réglemens des années 1721 et 1727, devaient faire preuve de noblesse ancienne et militaire, au moins depuis l'an 1550, sans aucun anoblissement connu. Ils devaient être âgés de quinze ans au moins, bien constitués et connus par de bonnes mœurs. Le réglement de 1729 astreint aux mêmes conditions les pages de la petite Écurie et les pages des Écuries de la Reine.

Par un autre réglement du 4 février 1567, tous seigneurs, gentilshommes et autres personnes de quelque qualité et condition qu'elles fussent, ne pouvaient faire porter à leurs pages aucuns draps de soie, broderies, velours, ni autres enrichissemens de soie, le tout réservé seulement aux pages du Roi, de la Reine, et à ceux des Princes et des Princesses, des Ducs et des Duchesses.

A l'armée, les pages de la chambre, et ceux des écu

ries, servaient d'aides-de-camp aux aides-de-camp du Roi. Les armes du Roi étaient toujours portées, en campagne, à la suite de S. M., soit sur un chariot, soit à cheval, et s'il y avait apparence de bataille ou de combat, le doyen des pages de la grande Écurie mettait sur lui les armes du Roi, afin d'être prêt à les lui donner dans le moment. Ces armes consistaient dans un casque, une cuirasse et des tassettes ou demi-brassards: il y avait aussi une selle d'armes sur le cheval du Roi, garnie de lames d'acier.

CHAPITRE XXXIII.

DES VARLETS.

Plusieurs auteurs font dériver ce titre du mot hébreu valud, qui signifie enfant, ou de celui de bar ou var, qui signifiait fils chez les Sarrazins, et que les Espaguols ont changé en celui de varo, dont on a fait varolus, varoletus, varolet, puis varlet; et par syncope, valet. Ducange fait venir ce mot de vassallus, vassal, ce qui est plus vraisemblable.

Quoi qu'il en soit de l'origine de ce titre, il fut caractéristique de noblesse, dans l'ancienne monarchie, et fut même si considérable, que Villehardouin, dans son Histoire de Constantinople, appelle le Prince

[ocr errors]

Alexis, fils de l'Empereur grec Isaac Comnène, le valet de Constantinople:

Ensi furent li messager envoyé en Allemagne,

Al valet de Constantinople et al Roy Phelippe d'Allemagne.

Nous trouvons aussi, dans un compte de la maison du Roi, daté de la Pentecôte de l'an 1313, que Louis, Roi de Navarre, Philippe, Comte de Poitou, et Charles, enfans du Roi de France Philippe-le-Bel, ainsi que plusieurs grands Seigneurs, sont qualifiés de valets.

Dans les registres de la Chambre des comptes, on voit deux titres du même Roi Philippe, dont l'un, de l'an 1292, contient que valet est un serviteur noble, qui allait partout où le Chevalier son maître lui commandait; par l'autre titre, qui est de 1297, ce Prince qualifie de valet et damoiseau Aimery de Poitiers en ces termes: Philippus, Dei gratiam Francorum Rex, etc., dilectus et fidelis valetus noster Aimericus de Pictavis, domicellus.

Ce même Roi fit une ordonnance à Longchamp, le 10 juillet 1309, dans laquelle il est parlé de Huet de Beaujeu, valet de la Reine, c'est-à-dire, écuyer de la

Reine.

Guillaume de Lezay est employé avec la qualité de valet, au rôle des hommages rendus au Roi, à cause de la comté de Poitiers; et Savary, Vicomte de Thouars, y est aussi qualifié de valet.

Le titre de valet était autrefois si honorable dans toutes des chroniques, que Jean Froissart appelle Guy de Lusignan valet du Comte de Poitou.

Duchesne, dans l'Histoire de la maison de Richelieu,

« PrécédentContinuer »