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CHAPITRE XLV.

DÉCHÉANCE, DÉROGEANCE, ET RÉHABILITATION

DE NOBLESSE.

La peine de DÉCHÉANCE de noblesse était prononcée : 1° Contre les gentilshommes qui prenaient des biens à ferme, ou qui jouissaient des bénéfices: Ordonnance de Charles IX, du 14 octobre 1571;

2o Contre les nobles qui ne prenaient point les armes, suivant l'obligation de leurs fiefs: Édit d'Henri III, du mois de mai 1579;

3o Contre les anoblis qui ne payaient point le droit de confirmation ordonné : Déclaration de février 1640;

4° Contre les anoblis de Normandie qui ne payaient point les taxes auxquelles ils étaient imposés: Arrêt du Conseil de 8 janvier 1653;

5o Contre les anoblis, depuis 1606, qui ne payaient point le droit de confirmation: Déclaration du 17 septembre 1657;

6o Contre les descendans des Maires et Échevins qui avaient acquis la noblesse depuis l'année 1600, et n'avaient point satisfait à la taxe ordonnée : Arrêt du Conseil du 6 décembre 1666, édit du mois de mars 1667; 7° Contre les officiers vétérans des cours et compa

gnies supérieures du royaume qui n'avaient point pris de lettres d'honneur: Édit du mois d'août 1669;

8o Contre les Secrétaires du Roi qui, après vingt années de service, n'avaient pas obtenu de lettres de vétérance, leurs veuves et postérité: Même édit ;

9° Contre ceux qui, ayant obtenu des lettres de noblesse, n'avaient point payé la taxe à laquelle ils avaient été imposés: Arrêt du Conseil du 31 juillet 1696;

10° Contre les Commissaires de la maison du Roi qui n'avaient point satisfait au paiement de la finance Édit du mois ordonnée pour augmentation de gages: de janvier 1713;

11° Contre ceux qui avaient obtenu des lettres de noblesse depuis l'année 1643, et qui n'avaient point. payé la taxe : Arrêt du Conseil du 30 septembre 1723;

12o Contre les Prévôts des marchands, Maires, Échevins, Capitouls ou Jurats des villes, qui avaient exercé depuis 1643, ou leurs descendans qui n'avaient point payé le droit de confirmation ordonné: Arrêt du Conseil du 30 septembre 1723 et 1er juillet 1725;

13° Contre les Secrétaires qui n'avaient point payé l'augmentation de gages: Édit du mois de décembre

1727;

14o Contre ceux qui, jouissant de la noblesse, soit par lettres d'anoblissement, maintenues, confirmation, rétablissement ou réhabilitation, soit par mairies, prévôtés des marchands, échevinages ou capitoulats, depuis 1642 jusqu'au premier janvier 1715, n'avaient pas satisfait au paiement de la taxe à laquelle ils avaient été imposés pour droit de confirmation, à cause de l'a

vènement du Roi à la couronne: Arrêt du Conseil du

2 mai 1730.

15° Contre ceux qui, dans la province de Lorraine, n'avaient pas obtenu des lettres de réhabilitation et de confirmation depuis 1697: Ordonnance de François, Duc de Lorraine, du 19 décembre 1730.

16o Contre les anoblis par charges ou lettres, depuis le 1er janvier 1715, qui n'avaient pas satisfait au paiement de la taxe de 6,000 livres, sur eux imposée pour droit de confirmation: Édit du mois d'avril 1771.

LA DÉROGEANCE à la noblesse avait lieu par la profession des arts vils et mécaniques.

On dérogeait encore par l'exercice du trafic ou commerce en détail, par l'exercice de charges jugées incompatibles avec la noblesse, telles que celles d'Huissier, Procureur et Greffier, et par l'exploitation des fermes d'autrui.

L'omission des qualifications nobles était encore une sorte de dérogeance que l'on nommait tacite, mais qui n'avait l'effet de la première que dans le cas où elle était prolongée pendant un certain nombre de générations.

On distinguait dans les effets de la dérogeance l'enfant qui naissait avant qu'elle ait été commencée par le père, et celui qui venait après; le premier conservait la noblesse originaire dans toute sa pureté, et le second partageait la dégradation de son auteur.

Les nobles de la province de Bretagne jouissaient, à l'égard de la profession des arts dérogeans, de priviléges qui leur étaient particuliers. La noblesse y dor

mait, selon d'Argentré, mais ne s'y éteignait point. En effet, suivant les art. 51 et 52 de la coutume de Bretagne, la noblesse ne pouvait se perdre, dans cette province, par prescription, par dérogeance, ni même par désistement, quelque longue qu'eût été la dérogeance; son seul effet était de suspendre ou d'assoupir dans ceux qui dérogaient le droit et les priviléges de la noblesse, et l'assujétissait aux impositions roturières pendant la durée de la dérogeance. Cette sspension leur était purement personnelle, et ne pouvait nuire au droit acquis à leurs descendans, qui n'étaient pas même obligés d'obtenir des lettres de réhabilita

tion.

Lorsqu'une famille était dans le cas de dérogeance ou d'omission continuée, elle ne pouvait rentrer dans son premier état qu'en vertu de lettres du Prince; c'est ce qu'on nommait lettres de relief ou de réhabilitation.

La preuve de dérogeance antérieure à la possession centenaire suffisait pour rendre celle-ci nulle. ( Arrêt du Conseil du 19 mars 1667.)

Le commerce maritime ni le commerce en gros ne faisaient pas déroger.

Les gentilshommes qui s'employaient à l'art de la verrerie ne dérogeaient pas; ils étaient au contraire maintenus dans leur qualité d'Écuyers, par arrêt de la Cour des Aides de l'an 1582 et du mois d'août 1597; mais ce serait une erreur de croire que les verriers aient été nobles à raison de leur profession. Voyez page 445.

Un noble ne pouvait prendre à ferme que les terres

et seigneuries appartenant au Roi, aux Princes et Prin cesses du sang, sans déroger. (Arrêt du Conseil du 25 février 1720.)

Les dérogeans, dans la province de Champagne, ne cessaient pas de se qualifier Nobles et Écuyers, ce qui leur était permis, encore qu'ils fussent imposés aux tailles.

Chassanée s'explique ainsi sur la coutume de Bour gogne. Il dit Il dit que si un noble de race s'emploie à l'exercice de quelque art mécanique, il ne perd pas la noblesse, parce que les droits du sang ne se perdent point; mais qu'elle est offusquée et obscurcie tant et si longtemps que le noble demeure en cet exercice; car aussitôt qu'il le quitte, la noblesse récouvre sa splendeur et son premier lustre.

Les nobles qui exerçaient l'art de la médecine ne dérogaient point; et même, en Dauphiné, les médecins qui n'avaient pas l'avantage de la noblesse n'étaient point sujets au paiement des subsides, pourvu qu'ils fussent docteurs et qu'ils ne fissent aucun trafic.

Le noble qui labourait ses propres terres ne dérogeait point. Il plantait ordinairement son épée sur sa charrue, pour se distinguer des autres laboureurs.

Quand l'anobli dérogeait, cette dérogeance était dite au premier degré, et encourait la déchéance, sans pouvoir obtenir ensuite la réhabilitation.

Presque tous les jurisconsultes s'accordent sur la dérogeance qu'apportait l'exercice de la charge de Procureur; quelques-uns, cependant, font distinction entre les Procureurs ad negotia et les Procureurs ad lites.

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