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Les premiers étaient toujours tenus pour dérogeans, et les autres seulement comme industrieux, mais devant toutefois être imposés aux tailles, et ne pouvant invoquer leur noblesse primitive pour cause d'exemp

tion.

Par l'ordonnance de Saint-Louis de 1256, qui porte que les nobles ne pourront acquérir aucuns offices vénaux ; par l'article VII de l'arrêt du Conseil-d'État du 4 juin 1668, qui porte que les Notaires mêmes, avant l'année 1560, seront censés avoir dérogé à la noblesse et exercé une profession roturière, on peut croire que l'office de Notaire était tout-à-fait incompatible avec l'état de noblesse, parce que cette charge, comme celle de Procureur, était vénale et produisait un salaire.

Les jurisconsultes les plus estimés en matière de noblesse, tels que Guy Pape, Bartole, Jean-Ferrérius, Florentin de Therriat et Charles Loiseau, partagent cette opinion, en mettant les Notaires au nombre des dérogeans.

Aussi, les sieurs de Bonneville prirent-ils des lettres de réhabilitation du Roi Henri III, parce que leurs pères avaient dérogé en exerçant la charge de Notaire. Les exemples sont fréquens en pareil cas.

Cependant, d'autres auteurs soutiennent que l'office de Notaire n'emportait pas toujours dérogeance, et n'était même pas dérogeant; quelques-uns, entre autres André Tiraqueau, l'ont mis au rang des offices qu'on ne pouvait exercer sans être noble.

Pierre Picot nous dit qu'au temps d'Auguste, les Notaires portaient l'anneau d'or, comme les Chevaliers romains.

En Bretagne, et à toutes les époques, plusieurs nobles exercèrent l'office de Notaire, et ne cessèrent de prendre le titre d'Écuyer dans leurs actes. Il en était de même en Normandie.

En Provence et en Dauphiné, la charge de Notaire fut souvent exercée par les familles les plus considérables, telles que celles de Caraccioli, Lauris, Joannis, Matharon, Guiramand, Thoullon, Domban de Littera, Sinmer, Rippert, etc., etc.

Dans un titre de l'an 1412, Pierre d'Abon, Notaire à Gap, est nommé Nobilis vir et sapiens. « Alors, dit << Chorrier, cet art, bien loin de déroger à la noblesse, « était même un exercice noble, comme il le serait « encore, si les Docteurs qui ont rétabli la jurispru<«<dence romaine, par la publication des livres de

Justinien, les avaient bien entendus. » Mais cet usage cessa après l'édit de François Ier de l'an 1532, qui enjoignait aux Notaires de ne plus écrire en latin; alors, comme il ne fallait plus autant de science, les nobles laissèrent cet office, qui ne fut plus guère occupé que par des plébéiens.

LA RÉHABILITATION était l'acte par lequel le Roi faisait revivre la noblesse que quelqu'un avait perdue, par quelque jugement qui l'en avait déclaré déchu, lui ou ses ancêtres, ou bien lorsqu'elle avait été perdue par quelque acte dérogeant.

CHAPITRE XLVI.

DE LA NOBLESSE DE L'ILE DE CORSE ET DES COLONIES FRANCAISES.

Cette île possédait, dès les temps les plus anciens, un nombre considérable de familles nobles, qui furent pour la plupart ruinées et détruites par la haine et la tyrannie des Génois, qui en étaient souverains. Mais les Corses ayant secoué le joug de ceux-ci à plusieurs reprises, et surtout en 1768, l'île fut réunie à la France, dont elle fait encore partie aujourd'hui.

Louis XV, voulant faire jouir ses nouveaux sujets des mêmes droits et priviléges dont la noblesse française était investie à cette époque, rendit une déclaration, au mois d'avril 1770, qui portait en substance : que les familles Corses qui se prétendraient nobles seraient tenues de produire, au greffe du conseil supérieur de l'île, des titres prouvant leur filiation et leur noblesse, depuis deux cents ans au moins; que, dans les cas où les preuves n'y seraient pas jugées suffisantes, le Roi se réservait de prononcer sur l'état de ces familles, relativement aux causes de la perte de leurs titres, et sur la considération de leurs services et de leur attachement à leur nouveau Souverain.

Les preuves se faisaient par titres originaux et par

expéditions; on n'admettait aucunes copies collationnées, de quelques formalités qu'elles pussent être revê

tues.

Chaque degré devait être établi par deux actes au

moins.

Dans le nombre des familles les plus distinguées de la Corse que le Gouvernement français voulut faire élever aux frais de l'État, se rencontre celle de Bonaparte le héros qui en est sorti commande à tous les historiens de respecter et d'honorer sa mémoire; il a terminé une révolution dont les suites pouvaient prolonger les malheurs de la France; il a su soumettre tous les Souverains de l'Europe à reconnaître la supériorité de son Empire, et réunir tous les partis sous les bannières de l'honneur et de la victoire. Que de plébéiens lui doivent, à lui et sa famille, leur élévation! et que de nobles anciens leur conservation! Le commerce, les sciences et les arts, protégés par sa vaste puissance, brillèrent d'un nouvel éclat et comblèrent la France de leurs riches productions. Ses Codes, ses lois, en assurant les droits de chaque citoyen, formèrent la base de l'ordre social, et peuvent encore servir de type à toute législation qui aura pour but le maintien et la prospérité de la civilisation.

Cette même famille n'avait besoin pour sa célébrité que de produire ce personnage illustre, mais le sort l'avait déjà servie en lui faisant prendre rang dans l'Ordre de la noblesse, que Charles Bonaparte, père de l'Empereur, fut chargé de représenter en 1776, dans la députation que l'île envoya au Roi Louis XVI; ce fut par suite de cet évènement, et à raison de l'or

donnance que j'ai citée plus haut, que Napoléon fut admis à l'école royale militaire de Brienne, et MarieAnne-Elisa, sa sœur, à la Maison royale de Saint-Cyr.

Le nom de Bonaparte était considéré en Toscane et dans plusieurs provinces de l'Italie, bien avant cette époque, et on le trouve allié aux familles les plus distinguées de cette contrée, surtout en 1632, que Marie de Gondi épousa Louis Bonaparte, fils de Fulvio Bonaparte, dont les armes étaient : de gueules à deux cotices d'argent, accompagnées de deux étoiles à six rais du même. C'est ainsi qu'on les trouve gravées dans l'histoire de la maison de Gondi, imprimée en 1705, tome 1er, page CCVIII. Cette Marie de Gondi, étant devenue veuve de Louis Bonaparte, épousa en secondes noces, en 1651, Hyacinthe Manelli, Chevalier de l'Ordre de St.-Etienne.

Quant aux Colonies françaises, des lettres-patentes du Roi, en forme d'édit, du 25 août 1782, registrées en la Cour des Aides le 25 décembre de la même année, réglaient les preuves de noblesse à établir par leurs habitans, et les obligeaient à se pourvoir, en outre, d'un acte de notoriété du Conseil supérieur dans le ressort duquel se trouvait leur domicile; cet acte devait constater que ces familles vivaient noblement et n'exerçaient aucune profession dérogeante; il devait être rendu sur les conclusions du Procureur général près dudit Conseil supérieur.

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