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égard, selon la nature de chaque cas particulier, aux demandes d'extradition pour des crimes de ce genre, qui leur seront faites réciproquement par l'un d'entre eux;

2) que les contraventions aux lois financières ne seront pas mises dans la catégorie des délits criminels;

3) qu'ils se réservent la faculté de décider, suivant leurs propres lois, la question de savoir si telle action pour laquelle l'un d'eux demande l'extradition d'un individu, doit être, ou non, mise dans la classe des délits criminels.

La présente déclaration, expédiée et signée en double par les plénipotentiaires respectifs, aura la même force et valeur que si elle était textuellement insérée dans la convention du cartel de ce jour.

Signé: COMTE ALOPEUS.
COMTE BERNSTORFF.

INSURRECTION NATIONALE 1830-1831

1830, 27-31 juillet, Paris.

La Révolution de juillet bouleverse l'ordre établi en France par le Congrès de Vienne, fait monter sur le trône une nouvelle dynastie et substitue à la Charte octroyée en 1814 une nouvelle constitution votée par les Chambres.

1830, 25 août, Bruxelles.

La révolution éclate à Bruxelles et renverse l'ordre artificiel établi par le
Congrès de Vienne : elle aboutit à la proclamation de l'indépendance de la
Belgique et à la séparation de ce pays de la Hollande.

1830, août-novembre.

L'Empereur Nicolas prépare les armées polonaises à marcher contre les révolutions de l'Europe occidentale.

C'est à contre-cœur que Nicolas Ier s'était résigné à reconnaître le changement de la succession au trône de France en faveur de Louis-Philippe. Il s'y était enfin décidé, parce que les autres Puissances (Angleterre, Autriche) avaient reconnu le nouveau Roi, et que Berlin était prêt à le faire. Mais il exigea que toutes les Puissances insistassent expressément sur le devoir de la France d'exécuter fidèlement tous les engagements internationaux qui lui incombaient en vertu des traités de 1815.

La reconnaissance du nouveau régime en Belgique souffrit plus de difficultés. Lorsque le Roi de Hollande s'adressa à l'Empereur, garant des décisions du Congrès de Vienne, et lui demanda son aide contre les Belges (automne de 1830), Nicolas essaya d'abord de pousser la Prusse à

prêter le secours demandé, et puis se décida lui-même à faire des préparatifs militaires. Le 30 octobre, sur le rapport du vice-chancelier l'Empereur mit en note cette résolution: « Il n'y a plus de possibilité de reculer, il est de notre dignité de prendre l'initiative. » Tout en préparant les troupes russes pour aller étouffer la révolution de l'Europe occidentale, le Czar avait l'intention d'y faire coopérer l'armée polonaise. Par ordre de Nicolas, le ministre secrétaire d'État du Royaume entra en pourparlers avec le ministre des finances, afin de se procurer les fonds nécessaires à l'expédition. On commença à rassembler à la forteresse de Modlin des approvisionnements de guerre. Le 21 octobre 1830, Grabowski, secrétaire d'État, écrivait au ministre Lubeçki: «M. l'aide de camp du général comte Tchernychew m'ayant fait connaître, par un office de ce jour, que S. M. Impériale et Royale venait de charger S. A. Impériale Mgr. le Grand-Duc Constantin de mettre sur le pied de guerre toutes les troupes qui sont sous ses ordres, y compris l'armée Royale polonaise, et d'en hâter l'exécution pour le terme définitif du 22 (10) décembre de l'année courante, qu'il soit fourni à la commission de la guerre des fonds dont elle aurait besoin pour cette opération. Je m'empresse d'informer Votre Excellence de cette volonté suprême. »

Mais l'armée polonaise ne voulut pas être un instrument de réaction. La Belgique et la France furent sauvées par la révolution qui éclata en Pologne.

1830, 29 novembre, Varsovie.

La révolution éclate à Varsovie.

L'insurrection débuta par un complot des élèves de l'école des enseignes d'infanterie. Dans la nuit du 29 novembre, ces jeunes gens attaquèrent la résidence et la garde du Grand-Duc Constantin. A la suite de cet attentat, celui-ci, avec l'armée russe, quitta précipitamment la ville et bientôt le Royaume. Les troupes polonaises accoururent à Varsovie. Le mouvement insurrectionnel n'avait nullement été organisé sur une large échelle. Les conjurés n'avaient aucun plan d'action ultérieure ; ils n'avaient même pas songé à constituer un nouveau gouvernement. Mais les violences russes avaient préparé un terrain favorable à la propagation du soulèvement. A l'appel des enseignes, la nation tout entière prit les armes. Le 5 décembre, le général Chłopicki se proclama dictateur.

N° 250.

1830, 4 décembre, Varsovie.

Déclaration remise au baron Oechsner, consul autrichien, assurant que le vernement polonais respectera les frontières de l'Autriche.

Monsieur le Baron,

gou

Le gouvernement provisoire du Royaume de Pologne s'empresse de déclarer qu'il est de

la ferme intention du gouvernement provisoire de respecter religieusement les frontières de tous

les États de S. M. Impériale et Royale Apostolique, et vous prie, Monsieur, de vouloir bien faire parvenir cette déclaration à la connaissance de votre Cour.

Signé: CZARTORYSKI.

1830, 10 décembre, Varsovie.

Afin d'éviter l'effusion du sang, le dictateur Chłopicki envoie à Saint-Pétersbourg une délégation chargée d'entrer en pourparlers avec Nicolas Ier.

Cette délégation dont faisaient partie le prince Lubeçki, ministre des finances du Royaume, et le député Jezierski, n'eut pas le succès qu'espérait le dictateur. Lubeçki ne fut pas reçu par l'Empereur; Jezierski revint à Varsovie chargé de communiquer aux Polonais que Nicolas exigeait qu'ils se conformassent aux conditions exposées dans le manifeste du 17 décembre et fissent leur soumission.

1830, 10 décembre, Varsovie.

N° 251.

Lettre du dictateur Chłopicki à Nicolas Ier, le priant de donner satisfaction aux désirs de la nation polonaise en ce qui concerne le respect de la Charte constitutionnelle et d'étendre la constitution aux provinces polonaises autrefois annexées à l'Empire, afin d'éviter ainsi l'effusion du sang.

Sire,

L'assemblée délibérante, malgré le talent et même la popularité de ses membres, est trop faible pour pouvoir ramener la tranquillité au milieu de l'orage. Convaincu de cette vérité, d'autant plus que j'ai devant les yeux l'expérience des jours de terreur qui viennent de s'écouler, j'ai résolu de réunir en ma personne le pouvoir exécutif dans toute son étendue, afin qu'il ne devint pas la proie d'une foule d'agents provocateurs et de perturbateurs qui, timides à l'heure du danger, possèdent cependant l'art de tromper les masses par des mensonges et de faire tourner à leur profit les nobles sentiments du peuple. Ennemi de l'anarchie, après avoir vu renverser par elle trois sortes de gouvernements, je me suis proposé d'appuyer le gouvernement provisoire par une force organisée et de rendre l'autorité à un seul homme, en l'entourant du secours de l'armée et de l'obéissance du peuple.

Cette mesure, Sire, a déjà rétabli la tranquillité dans les esprits; le soldat observe la discipline militaire; la populace retourne à ses occupations habituelles; tous confient sans crainte ce

qu'ils ont de plus cher à une autorité qui désire le bien public, et qui atteindra désormais ce noble but. En un mot, les troubles ont cessé et les traces de désordre s'effacent.

Mais, Sire, ces sentiments qui, dans le cours de quelques heures, ont armé toute la capitale, qui ont réuni toute l'armée sous un même étendard, ces sentiments qui, comme une étincelle électrique, pénètrent tous les palatinats et y produisent les mêmes effets, ces sentiments, dis-je, brûlent dans tous les cœurs et ne s'éteindront qu'avec leur dernier soupir.

Il en est ainsi, Sire: la nation veut une liberté modérée; elle ne veut point en abuser; mais par cela même, elle veut qu'elle soit à l'abri de toute violation et de toute agression; elle veut une constitution applicable à la vie pratique. Par un concours inouï de circonstances, se trouvant dans une position peut-être trop hardie, elle n'en est pas moins prête à tout sacrifier pour la plus belle des causes, pour son indépendance nationale. Cependant, Sire, loin d'elle est la pensée de rompre les liens qui l'unissent à Votre auguste volonté. Le gouvernement provisoire a déjà reconnu la nécessité d'envoyer à Saint-Pétersbourg deux députés qui ont été chargés de déposer au pied du trône de V. M. Impériale et Royale l'expression des volontés et des désirs de la nation, que les provinces polonaises, anciennement incorporées à l'Empire, fussent admises à la jouissance des mêmes libertés que le Royaume.

Daignez, Sire, par humanité et par égard pour les bienfaits que Vous avez répandus sur nous au commencement de Votre règne, accueillir avec bonté les prières dont ils sont l'interprète ! Que la Pologne, déjà reconnaissante à V. M. Impériale et Royale pour les bonnes intentions que Vous lui avez toujours montrée, que cette Pologne, dis-je, puisse Vous entourer, Sire, de cet amour qu'elle conserve dans son cœur pour son auguste régénérateur! Que notre destinée s'accomplisse! Et Vous, Sire, remplissant à notre égard les promesses de Votre prédécesseur, prouvez-nous par de nouveaux bienfaits que Votre règne n'est qu'une suite non interrompue du règne de celui qui a rendu l'existence à une partie de l'ancienne Pologne. Du reste, la jouissance des libertés qui nous sont assurées par la Charte n'est point une concession que le trône nous fera; ce ne sera que la simple exécution d'un contrat passé entre le Roi et la Nation, et confirmé par un serment réciproque.

Connaissant, Sire, Votre magnanimité, je dois espérer qu'une députation qui n'a pour but que la paix obtiendra l'effet qu'elle se propose; les travaux du gouvernement provisoire sont consacrés à l'organisation intérieure du pays; ses ordonnances seront respectées, comme les miennes propres, jusqu'au moment de la réunion du sénat et de la chambre des nonces, auxquels il appartiendra de prendre des mesures ultérieures.

Sire, en ma qualité d'ancien soldat et de bon Polonais, j'ose Vous faire entendre la vérité, car je suis persuadé que V. M. Impériale et Royale daignera l'écouter. Vous tenez, Sire, dans Votre main les destinées de toute une nation d'un seul mot, Vous pouvez la mettre au comble du bonheur; d'un seul mot, la précipiter dans un abîme de maux.

Plein de confiance dans la magnanimité de Votre cœur, Sire, j'ose espérer qu'une effusion de sang n'aura pas lieu, et je me regarderai comme le plus heureux des hommes si je puis atteindre au but que je me propose par la réunion intime de tous les éléments de bon ordre et de force.

Signé: CHŁOPICKI.

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