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de Mayence, pour détruire les poftes que les Ennemis ont établis fur le Necre & aux environs de Philisbourg,

On n'a point de nouvelles de Bonne. Les rendus ont dit que l'Electeur de Brandebourg faifoit battre la Place par quarante canons au travers du Rhin. Si cela eft il n'eft pas prêt d'entrer dedans. On doute fort s'il en formera entierement le siege, quoique deux ruës foient boulevertées par les bombes & les affiegez fort incommodez. Il y a prefque autant d'infanterie dans la Place que devant, & s'il n'étoit pas pris avant Mayence, ce feroit beaucoup en treprendre que d'effaïer le fecours avec ce qui eft à Maïence, & que les Allemans prenant l'une affurément par un feul fiege, rifquent de tout perdre par deux. Monfieur d'Asfeld qui commande dans Bonne, & Monfieur d'Uxeles dans Mayence, font gens dont ils doivent craindre la réfolution. Il y a huit mille hommes dans cette derniere Place. La tranchée y a dû être ouverte le 2 5. de ce mois.

Le Duc de Lorraine n'a pû tenir dans le quartier qu'il avoit pris à SaintEloy, le canon de Mayence l'a fait re

culer. Ce fiége n'eft point de fon goût, & il avoit raifon, il en vouloit à MontRoïal. Ce qui a obligé le Confeil de l'Empereur de prendre ce parti, c'est que le Duc de Saxe a reçû des prefens de ceux de Francfort pour appuïer cette résolution; & qu'ils ont fourni un million pour la dépenfe du fiege..

L'Electeur de Brandebourg a vingtcinq mille hommes devant Bonne, Monfieur de Lorraine cinquante mille hommes devant Mayence, & Monfieur de Baviere quinze mille chevaux qui tiennent la campagne. On ne peut guére fe fier aux Suiffes, tant à caufe qu'ils font divifez & que les Cantons Proteftans font nos mortels ennemis, qui ne fufpendent leur haine qu'à caufe que nous leur fommes plus utiles que les autres.

Les Imperiaux mettent tout en ufage pour faire une Tréve avec les Turcs. On craint qu'à tort & à travers ils ne la faffent. Si la Paix du Turc fe fait, & qu'avec les Ennemis que nous avons déja, le Prince d'Orange chaffe le Roy d'Angleterre de fon Païs, la Suede & le Dannemarck joints à tout cela aura besoin d'un auffi grand Roy que le nôtre pour ne pas fuccomber.

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XII. LETTRE.

De Madame de Sévigny au
Comte de Buffy.

Aux Rochers, ce 27. Juillet 1689.

Ous avons ici un grand corps de

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ces. Je vous ai déja mandé, mon cher Coufin, que mon fils, à fon grand regret, avoit été choifi par celle de tout ce canton. Comme ce chagrin eft une efpece d'honneur à l'égard des particuliers, il n'a pû le refufer. Il eft donc à Rennes tenant une grande table, dont il fe pafferoit fort bien, car cette penfe ne méne à rien. Monfieur de Seignelay eft à Breft pour hâter nôtre armement qui fera preft dans quatre ou cinq jours. Je fuis perfuadée qu'on congediera toute cette Nobleffe, lorfque Monfieur de Tourville aura une flotte; nous aurons alors dequoi faire baiffer le pavillon à ces prétendus maîtres de la mer.

Je fuis ici dans une vraie folitude, je

pourrai faire quelque petit voïage à Rennes pour voir la Ducheffe de Chaunes avec qui je fuis venuë en ce païsci; j'en repartirai avec elle. Si j'y pouvois avoir notre cher Corbinelly, je ne ferois pas à plaindre; vous fçavez le goût que j'ai pour fon mérite & pour fon efprit, vous l'avez auffi, mais comme fes autres amis l'ont auffi, ils le retiennent à Paris. Adieu, mon cher Cousin & ma chere Niéce, il n'y a point de bonheur que je ne vous souhaite à tous deux.

XIII. LETTRE.

Du Comte de Buffy à Madame de Sévigny.

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A Chafeu, ce 9. Aoust 1689.

Onfieur de Sévigny a raifon de regretter la dépense qu'il fait à la tête de la Nobleffe. C'est la plus inutile qu'il fera de fa vie. Monfieur de Tourville a enfin joint nôtre flotte à Breft; voilà nos côtes en feureté, & vos Nobles deformais inutiles. Le fiege de Maïence eft formé par Monfieur de Lor

raine avec cinquante mille hommes. H peut prendre cette Place, il peut la manquer; mais qu'il la prenne par un long fiege ou par des attaques vives, comil a attaqué Bude, il ruinera fon armée, parce que nous avons dans cette Place près de dix mille hommes & le Marquis d'Uxelles qui la deffendra bien. Bonne eft bombardée par l'Electeur de Brandebourg. On me mande qu'il n'y a plus que douze maisons entieres dans cette Ville, & qu'on y a jetté feize mille bombes à deux louis chacune; voilà faire du mal bien cherement.

Le Marquis de Buffy eft en Alface dans le corps que commande Monfieur de Choifeul, entre Strasbourg & Philisbourg. Je croi que ce corps-là joindra bien-tôt Mr. de Duras. Nous partons demain pour la Franche-Comté vôtre niece & moi ; elle ne fait que d'arriver d'Auvergne où elle a été reçûë du bon homme Comte de Dalet & de fa parenté, comme elle le pouvoit fouhaiter. Ils ont trouvé le petit de Colligny fort joli & font pleinement perfuadez qu'il n'eft pas mort. Je comprens bien que notre cher Corbinelly nous accommoderoit fort à nos campagnes.Ily feroit admirable,puisqu'il l'eft à Paris.

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