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de contre-garde qui étoit entre l'ouvrage à corne, & une Demie-lune qui a un bon foffe plein d'eau ; cette Demie-lune n'eft point revêtue, & le corps de la Place eft de ce côté-là compofé d'une muraille toute droite, flanquée de mauvaifes Tours. Le canon eft admirablement bien fervi.

On n'a point de nouvelles certaines des mouvemens du Prince d'Orange, car il ne fait qu'aller & venir, & l'on croit qu'il ne peut raffembler au plus que quarante mille hommes, & le Roy a deux cens Efcadrons & foixante-quinze Bataillons à portée de le joindre en fix heures; nous fommes icy cinquante Efcadrons. Le Duc de Montfort fils aîné de Monfieur de Chevreufe fut hier bleffé à la tête d'un coup de moufquet dans la Tranchée; on croit qu'il le faut trépaner. Un Soldat de la Place fe rendit hier. Il dit que la Garnison eft fort fatiguée, & que le Gouverneur la tient rigoureufement tou ours fur les remparts, fans. leur permettre d'entrer dans la Ville. Monfeigneur fut hier à la Tranchée, il avoit avec lui Monfieur de Chartres. Il vifita avec Monfieur de Vauban tous les travaux qu'on avoit faits pendant la nuit.

CLXX. LETTRE.

Du Comte de Buffy au Marquis de **

L

A Chafeu, ce 13. Avril 1691.

E détail que vous me faites du Siége de Mons, m'a fait un grand plaifir, un évenement de cette importance tient tout le monde aux écoutes. J'avois toûjours bien crû que la Garnifon de Mons fe défendroit avec vigueur quand on la prefferoit. Je ne pense pas qu'il y ait une Troupe au monde comparable aux Moufquetaires du Roy pour un coup de main on tuë ; tue point ces gens-là, mais on ne les bat point. Les coups de tête font dangereux; je crains pour la vie du Duc de Montfort, car j'aime fort fon pere.

Il faudroit que le Prince d'Orange fût fou s'il fongeoit à fecourir Mons en l'état où font les chofes. Ce n'eft pas de le laiffer prendre dont je le trouveray blâmable, c'eft de n'avoir pas prévû qu'on l'asfiégeroit, & de ne s'être pas mis affez tôt en campagne pour l'empêcher; mais

aprés cela eft-il le maître ? voilà les inconveniens des Ligues.

Je me défie toûjours des rapports des rendus quand ils difent les rudeffes d'un Gouverneur, ils croyent faire plaifir à ceux à qui ils fe rendent, & s'excufer d'avoir quitté le party où ils étoient; ils font au moins intereffez s'ils ne font menteurs. Quand je commençay d'aller à la guerre, les Maréchaux de Camp n'alloient qu'une heure à la Tranchée la nuit, & revenoient coucher dans leurs lits; les braves gens en ce temps-là étoient plus rares qu'aujourd'huy. Il faut dire la verité, il eft bien difficile qu'on n'en falle moins qu'on n'en fait à la vûë d'un Roy, qui fe met tous les jours au hazard d'être tué comme un fimple Officier.

CLXXI. LETTRE.

De l'Abbé de Choify au Comte de Buffy.

L

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E Gouverneur de Mons jugea à propos le 8. au foir de demander à capituler. Le 25. Mars à onze heures du foir nos Troupes entrerent dans Nice, aprés trois heures de Tranchée ouverte, ce qui ne fut qu'une formalité. Le 28. Monfieur de Carinat entra dans la Ville, les Ennemis firent un grand feu de canon & de moufqueterie du Château, Le 30. notre canon commenca à tirer, & une de nos bombes ayant mis le feu dans un magazin de poudres du Château, tout le donjon en fut renversé prefque tout leur canon fut démonté & ils eurent quatre cens hommes tuez ou bleffez.Enfin le 2.d'Avril lesEnnemis fe voyant en trés-mauvais état, & la Garnison fort épouvantée, demanderent à capituler, & le la Place fut rendue à Monfieur de Catinat. Le fel de Nice produifoit un million de revenu à

S.

Monfieur de Savoye. Vertillac eft Gouverneur de Mons, & le Chevalier de la Fare de Nice. Le Roy a donné cent mil le francs à Monfieur de Vauban. Sa Majefté fera Samedy à Compiegne, où les Dames fe trouveront; & Mardy àVerfailles.

CLXXII. LETTRE.

Du Comte de Buffy à l'Abbé de Choify.

I

A Chafeu, ce 15. Avril 1691.

L y a deux ans que quelque eftime

que nous euffions de la conduite & de la puiffance du Roy, nous croyions que tout ce qu'il pourroit faire feroit de réfifter à toute l'Europe déclarée contre lui; cependant nous lui avons vû la feconde campagne de cette guerre gagner troisBatailles, & il commence celle-cy par prendre en perfonne le 9. d'Avril, une des meilleures Places,& des plus renommées des Païs-Bas. Je défie les Orateurs de dire quelque chofe au-deffus de tels faits. La conquête de Nice payera bientôt au Roi les frais de la guerre de

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