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cedé du Duc de Richemont me paroît d'un homme qui a le cœur bien grand, c'eft dommage qu'il quitte le Royaume. Je crois comme vous que

le voyage du Roy à Compiegne n'ira qu'à voir fes Trouppes & embaraffer les Ennemis. Je fus affuré que Mademoiselle eft auffi fâchée de n'avoir eû que Joinville, que fi elle avoit des heritiers mal établis.

CCX. LETTRE.

De l'Abbé de Broffes au Comte de Buffy.

A Paris, ce 6. Mars 1692.

LE Prince Eugene affemble des troupes à Veillane, & les Allemands levent les quartiers pour le venir joindre. On dit qu'ils veulent affieger Suze. Monfieur de Catinat partit le dernier de Février de Grenoble pour y aller.Chamley n'eft pas encore revenu. Vingt mille Turcs, dix mille Tartares, & Tekeli font en marche pour le fecours de Varadin. Veterani a ordre de l'Empereur de leur donner Bataille. Vivans fa

meux Huguenot a été tué dans les Cevenes; le Prince d'Orange l'avoit naturalisé & fait Chevalier Anglois. Les Genois ont prété cent cinquante mille écus à Monfieur de Savoye & lui ont promis de lever deux Régimens Corfes. La fortereffe de Garabuse en Candie s'eft révoltée contre les Venitiens & s'eft donnée aux Turcs. La Reine mere d'Espagne a formé un parti dans leConfeil pour être déclarée Regente, à caufe de la foible complexion de fon fils. Quelques miniftres ont proposé de fai re venir en Espagne le fecond fils de l'Empereur, d'autres le Duc d'Anjou. On parle du Mariage de la Princeffe d'Hanovre avec le Duc de Saxe, qui par ce moyen n'enverra fur le Rhin que fon contingent. Le Duc de Modene é pouse la Princeffe de Parme. On dit que les affaires de Rome vont bien, & que le Pape piqué du mauvais procedé des Allemands, veut plaire aux François. Il a dit que s'il n'avoit que foixante & dix ans, il iroit à Turin avec vingt mille hommes & feroit la paix d'Italie c'étoit le deffein d'Alexandre VIII. Nulle nouvelle feure de Varadin; les neiges ont empêché les

:

Turcs d'agir. Monfieur de Savoye demande le Vicariat de l'Empire en Italie. Le Parlement d'Angleterre ne veut point affigner les fonds du fubfide qu'il n'ait établi des Commiffaires perpetuels pour recevoir les comptes Royaux. La Princeffe de Dannemarck a mieux aimé fortir de Londres, que de chaffer Madame Churchil fa Dame d'honneur.

CCXI. LETTRE.

Du Comte de Buffy à l'Abbé de Broffes.

A Chafeu, ce 11. Mars 1692.

E n'ay pas de foy aux Sieges que fe

JE

ra le Prince Eugene, & je crois bien plutôt que Monfieur de Catinat les feroit lever. Le fuccès de la Bataille que l'Empereur commande à Véterani de donner fera un évenement de confe quence.Vivans étoit un ennemi dangereux, il avoit du mérite. Les Genois fe fouviennent du Bombardement & s'en veulent venger,leut reffentiment pourroit leur coûter cher. La foibleffe du Roy d'Espagne ne vous fervira pas de grand

chofe.L'antipathie desNations nous empêche de profiter de leurs défordres. Je voudrois bien voir unPape faire un Siege & coucher au bioüac; mais c'eft un traité que celui-cy voudroit faire.

Le fervice d'Italie incommode toutes les Nations auffi bien que les François. Mais je ne comprends pas pourquoy les neiges fatiguent plus les Turcs que les Allemands. L'alliance de l'Empereur coûte affez cher à Monfieur de Savoye pour qu'il ne lui refufe pas un titre qui ne lui coûte rien. Le Prince d'Orange eft un Ufurpateur; mais les Anglois font des Tyrans à fon égard. Il a befoin de toute fa dexterité pour fẹ maintenir avec des peuples auffi bizares que fes fujets. Je ne ferois par étonné que la Princeffe de Dannemarck fe facrifiât pour Mylord Churchil; on voit des effets de l'amour plus extraordinaires ; mais que veut-elle faire de fa femme?

CCXII.

LETTRE.

Du Comte de Buffy à Monfieur le PRINCE.

A Chafeu, ce 12. Mars 16924

MONSEI

ONSEIGNEUR,

La part que je prends à tout ce qui touche V. A. S. m'oblige de vous témoigner aujourd'huy ma joye fur la nouvelle alliance que le Roy va prendre. avec vous. Vous êtes grand par vous me, Monfeigneur ; mais ces fortes de liaifons affermiffent votre grandeur. J'en fuis ravy, car l'attachement que j'ay eû dans la maifon de Monfeigneur votre grand-pere, & de Monfeigneur votre pere, & celui que j'auray le refte de ma vie aux interêts & à la perfonne de V. A. S. me font vous fouhaiter toutes les profpérités du monde, & que vous en jouiffiez longues années. Ce font les vœux que fait pour V. A.S. Monfeigneur. Vo tre, &c.

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