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reproduit en outre les dessins de ces organes empruntés à un ouvrage posthume de Richon. Sans doute, il aurait été facile d'améliorer la disposition des planches en rapprochant les espèces comestibles des formes vénéneuses qui leur ressemblent le plus; mais ce défaut se trouve grandement atténué par les figures réduites qui accompagnent le texte lui-même.

Toutes les ressources de l'art du dessin ont été mises en œuvre pour arriver à une représentation exacte des champignons; c'était une œuvre difficile, exigeant un véritable talent artistique mis au service d'un botaniste expérimenté. Nous sommes heureux de déclarer que l'auteur a complétement réussi dans sa tâche; ses champignons sont bien vivants et quiconque rencontrera l'une des espèces décrites et figurées ne peut manquer d'arriver à une détermination précise.

Aussi, l'Académie décerne à l'auteur, M. Collet, membre correspondant à Sainte-Menehould et lauréat d'un précédent concours, une médaille d'or de cent francs.

RAPPORT

SUR LE

CONCOURS DE POÉSIE

Par M. ALFRED LEFORT, Membre titulaire.

Ne forçons point notre talent - a dit le fabuliste — nous ne ferions rien avec grâce (1). »

N'allez pas croire, Messieurs, que j'aie l'impertinence de prétendre appliquer cette moralité du bon La Fontaine aux poètes qui ont pris part au concours institué par notre Académie.

Non c'est bien à moi que « ce discours s'adresse ». C'est à moi seul que je donne ce conseil, en pensant à mon incompétence en matière de poésie et à mon inexpérience de ce rôle de rapporteur.

Non je ne veux pas faire cette injure à ceux qui nous fait l'honneur de nous prendre pour juges... Et pourtant!...

Je suis obligé d'avouer, en effet, Messieurs, qu'aucune des productions qui nous ont été soumises cette année ne nous a donné le « frisson poétique » dont parle Boileau. Aucun de ces candidats-poètes ne paraît avoir ressenti« du ciel l'influence secrète ». Aussi pourrait-on leur dire, comme Horace :

Ludere qui nescit, campestribus abstinet armis (2),

(1) La Fontaine. Fables, livre IV, fable 2.

(2) Horace. Art poétique, vers 379.

ou encore:

Mediocribus poetis

Non homines, non di, non concessere columnæ (1).

-

Vous m'excuserez, Mesdames, si quelques citations latines parfois m'échappent. Je sais bien qu'il n'est plus de mode, qu'il est même devenu presque de mauvais ton de citer Horace. Et cependant, nous ne sommes pas encore arrivés du moins je l'espère à l'application intégrale de la néo-formation littéraire tant prônée actuellement par les Jules Lemaître, les ChailleyBert, e tutti quanti !

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Grâce au ciel, on aime encore le latin à l'Académie de Reims. Elle applique toujours aux études classiques la belle devise qu'elle a, pour elle-même, choisie : Servare et augere.

L'Académie

-

vous le savez déjà

avait deux prix

à décerner une médaille d'or de cent francs à l'auteur de la meilleure pièce de vers dont le genre et le sujet étaient laissés au choix des concurrents; et une médaille d'or, de cent francs également, à l'auteur de la meilleure fable ou du meilleur conte de 50 à 150 vers.

Disons-le tout de suite: aucune des trois ou quatre fables envoyées cette année n'a paru à votre Commission (2) digne d'être proposée pour une récompense.

Restaient donc les autres pièces de vers sans indication spéciale de genre ni de sujet.

Peut-être y a-t-il lieu de regretter ici qu'une latitude

(1) Horace. Art poétique, vers 372.

(2) La Commission était composée de MM. Piéton, président, Duchâtaux, Paul Douce, Alb. Benoist et Alf. Lefort, membres.

aussi grande ait été laissée aux concurrents. Mais convient-il d'imposer un sujet?

Je sais bien que, sur cette question, les avis sont très divisés, non seulement parmi les membres de notre modeste Académie, mais aussi même parmi ceux de sa grande sœur, l'Académie française.

Nous l'avons vue, à la suite des médiocres résultats obtenus aux concours de 1889, renoncer, provisoirement au moins, à la fixation d'un sujet.

Écoutez, Messieurs, les regrets qu'une telle décision inspirait au rapporteur d'alors, M. Camille Doucet, le modèle de tous les rapporteurs:

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(

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Ceux, disait-il, dont l'imagination féconde n'a pas besoin qu'on lui vienne en aide, protestent naturelle<«<ment contre des entraves qui gênent leur indépendance; mais ces entraves, d'autres, moins sûrs d'euxmèmes, les considèrent au contraire comme des guides utiles qui, par le même chemin, les menant « tous au même but, sont à la fois, pour eux et pour «nous, les garanties d'une lutte plus égale, d'une com"paraison plus facile et d'un jugement plus équi« table (1). »

((

M'appropriant cette pensée, exprimée avec plus de justesse que je n'eusse pu le faire, je vous dirais bien franchement s'il était permis à un simple rapporteur d'émettre une opinion personnelle - que je préférerais

assurément voir notre Académie déterminer elle-même le sujet du concours de poésie. Elle le fait bien, d'ailleurs, pour les autres concours littéraires. J'y verrais plusieurs avantages, ne serait-ce que celui (et il n'est

(1) Rapport de M. Camille Doucet, secrétaire perpétuel de l'Académie française sur les concours de l'année 1889, page 6.

pas sans mérite aux yeux d'un rapporteur) de nous affranchir d'une quantité de pièces anciennes qui nous sont envoyées « au petit bonheur », et que je pourrais appeler irrévérencieusement des... fonds de tiroirs!

Je vous prie, Messieurs, d'excuser cette digression un peu personnelle et j'arrive à l'analyse que je vous dois des pièces présentées au concours.

Déblayons tout d'abord le terrain des morceaux qui ont été éliminés par votre Commission. Nous réserverons ainsi, pour la fin de ce rapport, la partie agréable de notre tâche. Donc, ouvrons notre dossier.

La première, en date, des pièces adressées à votre Secrétaire général est précisément une fable. Un espoir vint alors à votre Commission. Si, dès le début, elle avait eu la main heureuse? Si, de suite, elle allait faire l'attribution du prix Clicquot? Hélas! comme la plupart de ses pareils, cet espoir était vain...

Le dialogue entre « le Brochet et le Pêcheur, d'une versificationt rès faible, n'est guère relevé par la profondeur de l'idée et le piquant de l'expression. C'est une bien pâle imitation de la jolie fable de La Fontaine : l'Hirondelle et les petits Oiseaux (1). Ce duo entre le Brochet et le Pêcheur devient même un trio par l'intervention d'une carpe d'âge mûr.

Je cite textuellement :

Une vieille carpe impotente,
A l'écart, loin de l'hameçon,
D'une voix faible et chevrotante,
Leur faisait ainsi la leçon.

(1) La Fontaine. Fables, livre Ier, fable 8.

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