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l'autorisoient parmi le peuple, et le faisoient paroître un nouvel Élie.

C'étoit en effet sous cette figure qu'il avoit été annoncé par le prophète Malachie': et c'étoit un grand avantage au saint précurseur, non seulement d'avoir eu un prophète qui le prédît si expressément, comme on a vu; mais encore d'être figuré dans le prophète le plus zélé et le plus autorisé qui fût jamais, c'est-à-dire par Élie que son zèle fit transporter au ciel dans un chariot enflammé.

Isaïe même l'avoit annoncé comme celui dont la voix préparoit le chemin du Seigneur dans le désert2. Et quand on l'en vit sortir tout d'un coup, après y avoir passé toute sa vie dès son enfance, pour annoncer la pénitence dont il portoit l'habit, et dont il exerçoit avec tant d'austérité toutes les pratiques, le peuple ne pouvoit pas n'être point attentif à un si grand spectacle. Allons donc écouter avec tous les Juifs ce nouveau prédicateur de la pénitence, si saint, si admirable et si renommé par toute la contrée.

IIe ÉLÉVATION.

c'est ce que le même prophète appelle abaisser les montagnes et aplanir les collines. Saint Jean fait l'un et l'autre ; et pour commencer par le dernier, il abat les superbes, en disant aux pharisiens et aux saducéens: Race de vipères, de qui apprendrez-vous à fuir la vengeance qui doit venir? Failes donc de dignes fruits de pénitence :.... car la coignée est déja à la racine des arbres'. Il ne s'agit pas d'un ou de deux : c'est une vengeance publique et universelle : Toul arbre qui ne porte point de bon fruit sera coupé et jeté au feu 2. Toutes ces paroles sont autant de coups de tonnerre sur les cœurs rebelles. Et celles-ci où il parle de Jésus-Christ ne sont pas moins fortes: Il a un van en sa main, et il purgera son aire, et il recueillera le bon grain dans son grenier, et il brúlera la paille d'un feu qui ne s'éteint pas 3.

3

Tout cela est préparé par ces premières paroles: Faites pénitence, car le royaume des cieux est proche. Le monde dans peu de temps verra paroître son juge : plus il apporte de miséricorde, plus ses jugements seront rigoureux. Abaissezvous donc, orgueilleuses montagnes, qui sem

La prophétie d'Isaïe sur saint Jean-Baptiste, et comment blez vouloir menacer le ciel, abaissez vos super

il prépara la voie du Seigneur.

Comme il est écrit dans le livre des paroles du prophète Isaïe: La voix de celui qui crie dans le désert, préparez les voies du Seigneur: rendez droits ses sentiers: aplanissez le che min: toute vallée sera comblée, et toute montagne et toute colline abaissée et aplanie: et toute chair verra le salut qui vient de Dieu 3. Deux moyens de préparer les voies au Christ nous sont montrés dans cet oracle d'Isaïe : l'un, qu'il devoit précher devant lui à tout le peuple d'Israël le baptême de la pénitence, pour préparer son avénement, ainsi que saint Paul le dit dans les Actes et l'autre, qu'il devoit montrer au peuple ce Sauveur, comme il est encore porté dans le même sermon de l'apôtre.

Concevons donc ces deux caractères de saint Jean-Baptiste; laissons-nous préparer par le grand précurseur à l'avénement du Sauveur des

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bes têtes. Ce n'est pas, dit saint Chrysostôme ", aux feuilles ni aux branches, mais à la racine que la coignée est attachée. Il ne s'agit pas des biens du dehors, des honneurs et des richesses, qu'on peut appeler les feuilles et les ornements de l'arbre; ni de la santé ou de la vie corporelle que l'on peut comparer aux branches qui font partie de nous-mêmes : c'est à la racine, c'est à l'ame qu'on va frapper : il y va du tout; et le coup sera sans remède. Et ce ne sont pas seulement les plantes venimeuses et malfaisantes qu'on menace; c'est la paille, les serviteurs inutiles; ce sont les arbres infructueux que le feu brûlera toujours sans les consumer; et pour périr à jamais, il suffit de ne porter pas de fruit. Car c'est alors que vient la rigoureuse parole du sévère Père de famille, qui, visitant son jardin, prononce cette sentence contre le figuier stérile : Car pourquoi occupe-t-il la terre? coupez-le et le mettez dans le feu". Tremblez donc, pécheurs endurcis tremblez, ames superbes et impénitentes craignez cette inévitable coignée qui est déja mise à la racine. Si le serviteur tonne ainsi, que fera le maître quand il aura pris la parole? Si ceux qui ont transgressé la loi de Moïse, sont inévitablement punis,quel traitement recevront ceux qui auront outragé le Fils de Dieu méprisé sa parole et foulé son sang aux pieds1?

Matth. n. 7. 8. Ibid. 10.3 Ilid. 12. -Matth, mIE. 2. -Chrys. in Matth. Hom. x1, n. 3. Luc, XII. 7. Heb. x. 28. 29.

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Où irons-nous donc, race de vipères, qui ne pro- | pée : renoncez à vos emplois; mais: Ne faites duisons que des fruits empoisonnés? Qui nous point de concussion: contentez-vous de votre apprendra à éviter la colère du Tout-Puissant solde1. Le prince rendra compte à Dieu, et des qui nous poursuit ? Où nous cacherons-nous de- tributs qu'il impose, et des guerres qu'il entrevant sa face? Collines, couvrez-nous; monta- prend : mais ses ministres, qui, sans inspirer de gnes, tombez sur nos tétes '. mauvais conseils, ne font qu'exécuter les ordres publics, sont à couvert aux yeux de Dieu par l'autorité de Jean. Jésus viendra donner les conseils de perfection: Jean s'attache aux préceptes: et sans prêcher aucun excès, il console tout le monde en ouvrant la porte du ciel aux emplois non seulement les plus dangereux, mais encore les plus odieux, s'ils sont nécessaires, pourvu qu'on s'y renferme dans les règles.

IVe ELEVATION.

La consolation suit les terreurs.

Ve ÉLÉVATION.

Le baptême de Jean, et celui de Jésus-Christ.

Je vous baptise dans l'eau; mais celui qui vient après moi, vous baptisera dans le SaintEsprit et dans le feu 2. Ce que Jésus-Christ explique lui-même à ses disciples, lorsqu'il leur dit en montant au ciel Jean vous a donné un baptéme d'eau, mais dans peu de jours vous serez baptisés dans le Saint-Esprit 3. Saint Paul explique le baptême de Jean par ces paroles : JeanBaptiste a baptisé le peuple du baptême de la pénitence, en l'avertissant de croire en celui qui devoit venir après lui; c'est-à-dire en Jésus1. Voilà donc deux différences des deux baptêmes : celui de Jean préparoit la voie à Jésus-Christ, en montrant que c'étoit en lui, et non pas en Jean, qu'il falloit croire pour avoir la rémission des péchés; et outre cela le baptême de Jean ne donnoit ni le Saint-Esprit, ni la grace, ni par elle le feu céleste de la charité qui consume tous les péchés ; et cet effet étoit réservé au baptême de Jésus-Christ.

Pour moi, je vous donne un baptême d'eau, afin que vous fassiez pénitence: mais celui qui vient après moi, est plus puissant que moi; et je ne suis pas digne de lui porter ses souliers: c'est lui qui vous baptisera dans le Saint-Esprit et dans le feu 2. Si saint Jean nous inspire tant de terreur; s'il nous brûle par la frayeur du feu éternel, et de l'implacable colère de Dieu, un baptême lui est donné pour nous rafraîchir. Allons donc avec tout Jérusalem et avec toute la | Judée, et avec tout le pays que le Jourdain arrose; allons écouter le prédicateur de la pénitence, et recevons son baptême pour nous y consacrer. Car ce n'est pas ici un de ces foibles prédicateurs qui prêchent la pénitence dans la mollesse: celui-ci la prêche dans le cilice, dans le jeûne, dans la retraite, dans la prière. Mais allons, en confessant nos péchés, non en général, ce que les plus superbes ne refusent pas; mais confessons chacun en particulier nos fautes cachées, et commençons par celles qui nous humilient davantage. Prenons un confesseur comme Jean-Baptiste, sévère, mais sans être outré. Car que dit-il aux pécheurs en général : Que celui qui a deux habits, en donne à celui qui n'en a pas: et que celui qui a de quoi manger en use de même 3. La colère de Dieu est pressante et redoutable : mais consolez-vous, puisque vous avez dans l'aumône un moyen de l'éviter. Par- Quand saint Jean oppose l'eau de son baptême tagez vos biens avec les pauvres : il ne vous dit au feu de celui de Jésus-Christ; et quand Jésuspas de tout quitter; c'est bien là un conseil pour Christ explique lui-même que ce baptême de feu quelques uns, mais non pas un commandement et du Saint-Esprit, est celui dont les disciples pour tous. Il ne nous accable donc pas par d'ex-furent inondés au jour de la Pentecôte; on encessives rigueurs. Et que dit-il aux publicains, tend bien qu'il ne faut pas croire que le baptême ces gens de tout temps si odieux, les oblige-t-il à tout quitter? Non; pourvu qu'ils ne fassent rien au-delà des ordres qu'ils ont reçus '. Car la puissance publique peut imposer des péages pour le soutien de l'État : il lui faut laisser arbitrer ce que demandent les besoins publics, et s'en tenir à l'exécution sans vexer le peuple. Il ne dit non plus aux gens de guerre: Quittez l'é

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de Jésus-Christ ne soit pas comme celui de Jean un baptême; mais c'est que celui de Jean ne contenoit qu'une eau simple, au lieu que l'eau que donnoit Jésus étoit pleine du Saint-Esprit et d'un feu céleste; c'est-à-dire de ce même feu du Saint-Esprit, dont le déluge s'épancha sur toute l'Église dans le cénacle. C'est ce feu qui anime encore aujourd'hui l'eau du baptême, et qui fait

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dire au Sauveur, qu'on n'a point de part à son royaume, si l'on ne renaît de l'eau et du SaintEsprit ; c'est-à-dire dans le langage mystique, si l'on ne renaît de l'eau et du feu.

toute sa force. Avoit-elle jamais mieux paru que dans la prédication de saint Jean-Baptiste? et la sévérité de la vie s'étoit-elle jamais mieux unie avec celle de la doctrine? Paroissez donc, il est temps, divin Sauveur : la voie vous est préparée par la prédication de la pénitence.

VII ÉLÉVATION.

au monde Jésus-Christ.

Voici donc la consolation des chrétiens. L'eau du baptême de Jésus-Christ n'est pas une eau vide et stérile: le Saint-Esprit l'anime et la rend féconde; en lavant le corps elle enflamme le cœur: si vous ne sortez du baptême plein du feu céleste de l'amour de Dieu, ce n'est pas le bap- Seconde préparation des voies du Seigneur, en montrant tême de Jésus-Christ que vous avez reçu. La pénitence chrétienne, qui n'est autre chose qu'un second baptême, doit être animée du même feu. Celui à qui on remet davantage, doit aussi, dit le Sauveur 2, aimer davantage. Quand vous n'avez que les larmes que la terreur fait répandre, ce n'est encore que l'eau et le baptême de Jean. Quand vous commencez à aimer Dieu comme l'auteur et la source de toute justice 2, Jésus commence à vous baptiser intérieurement de son feu; et son sacrement achevera l'ouvrage.

VIe ÉLEVATION.

Quelle est la perfection de la pénitence.

Les chemins tortus seront redressés, et les raboteux seront aplanis: ce sont les paroles d'Isaïe rapportées par saint Luc. C'est-à-dire qu'il faut que le cœur souffre la violence, si sa pénitence est sincère; car on n'est pas sans violence sous la bêche et sous le hoyau il faut que le bois qu'on veut aplanir, gémisse long-temps sous le rabot : on ne réduit pas sans travail les passions qu'on veut abattre, les habitudes qu'on veut corriger il vous faut, pour vous redresser, non seulement une main ferme, mais encore rude d'abord à mesure qu'elle avancera son ouvrage, son effort deviendra plus doux; et à la fin tout étant aplani, le rabot coulera comme de lui-même, et n'aura plus qu'à ôter de légères inégalités, que vous-même vous serez ravi de voir disparoître, afin de demeurer tout uni sous la main de Dieu, et d'occuper la place qu'il vous donne dans son édifice. Les grands combats sont au commencement; la douce inspiration de la charité vous aplanira toutes choses, et c'est alors, comme dit saint Luc 3, que vous verrez le salut donné de Dieu. Avant que ce salut parùt au monde, Isaïe avoit prédit que la pénitence devoit paroître dans toute sa vérité, dans toute sa régularité, dans

Joan. III. 5.- Luc. vi. 47.- Conc. Trident, Sess. VI, de Justif. cap. 6. —- 1 Is. xt. 4. Luc. 11, 3. — Ibid. 6.

Souvenons-nous que la préparation des voies du Seigneur a été mise en deux choses : dans la prédication de la pénitence, et dans la désignation de la personne de Jésus-Christ. Nous avons vu la première : passons à la seconde.

Saint Jean annonce aux Juifs plusieurs choses de Jésus-Christ, la première qu'il alloit venir; la seconde, qu'il étoit déja au milieu d'eux sans être connu ; la troisième, qui il étoit, et quelle étoit sa puissance.

Pour expliquer ce troisième point, il falloit que Jean commençât à se dépriser lui-même : Je ne suis pas, disoit-il ', celui que vous croyez; il en vient un après moi, qui est plus puissant que moi, et dont je ne suis pas digne de porter ni de délier les souliers.

Ce n'étoit pas assez de parler ainsi en général; il explique en quoi consistoit cette prééminence de Jésus-Christ. Il la fait consister premiè rement dans son éternelle préexistence : Celui, dit-il 2, qui est venu après moi, a été mis devant moi, a été fait mon supérieur: parcequ'il étoit devant moi de toute éternité. Il étoit, et ce qu'il étoit avant Jean de toute éternité, a été cause de l'avantage qu'il devoit avoir sur lui dans le temps, et de ce qu'il a été fait son supérieur. La prééminence de Jésus-Christ consiste en second lieu dans sa plénitude : Il est plein de grace et de vérité 3: car tout est en lui, et il est la source de la grace: ainsi elle regorge de sa plénitude: la grace se multiplie en nous sans mesure. Nous avons tous reçu de sa plénitude, et grace pour grace 4: une grace en attire une autre : la grace de la prière attire celle de l'action: la grace de la patience attire celle de la consolation : la grace qui nous rend fidèles dans les moments, attire celle de la persévérance : la grace de cette vie attire celle de l'autre. Moïse a donné la loi 5, qui étoit stérile, et ne consistoit qu'en figures; propre à nous déclarer pécheurs, et non pas à nous justifier; propre à

Act. XIII. 25, Matth. II. 11. Marc. 1. 7. Luc. 111. 46. Joan. 1. 27. -Joan. 1. 15. 24. Ibid. 44.--4[hid. 46.--- 5 Ibid. 47

nous montrer le chemin, mais non pas à nous y conduire, ni à nous y faire entrer par JésusChrist est venue la grace qui nous fait agir; et la vérité, au lieu des ombres. Enfin le dernier trait de prééminence en Jésus-Christ, c'est qu'il est le Fils et le Fils unique, et le Fils toujours dans le sein de son Père. Ce qui fait que la connoissance de Dieu se va augmenter, puisque c'est celui qui est dans son sein, qui nous en révélera le secret Jamais personne n'a vu Dieu mais son Fils unique va nous découvrir le secret du sein paternel: en sorte qu'en le voyant, nous verrons son Père 2. Faut-il donc s'étonner, si Jean ne se reconnoît pas digne de lui délier ses souliers? Si Jésus-Christ n'étoit qu'une créature, Jean en auroit-il parlé ainsi? Qui jamais a ainsi parlé, ou d'Élie un si grand prophète, ou de Salomon, ou de David, de si grands rois, ou de Moïse lui-même? Aussi n'étoient-ils tous que des serviteurs: mais JésusChrist est le Fils unique 3. S'il est éternellement dans le sein du Père, il ne peut pas être d'une nature inférieure ou dégénérante: autrement il aviliroit, pour ainsi parler, le sein où il demeure. Abaissons-nous donc à ses pieds : c'est le seul moyen de nous élever. Jean s'abaisse jusqu'à se juger indigne de déchausser son souverain et Jésus pour le relever viendra bientôt recevoir de lui le baptême : et cette main qui se juge indigne de toucher les pieds de Jésus, est élevée, dit saint Chrysostôme, au haut de sa tête, pour verser dessus l'eau baptismale.

VIII ÉLÉVATION.

Première manière de manifester Jésus-Christ, avant que de l'avoir vu.

dant vous ne le connoissez pas, quoiqu'il soit au milieu de vous. Dans quelle attente de si hauts discours devoient-ils tenir le monde, et quelle préparation des voies du Seigneur! On s'accoutumoit à entendre nommer le Fils unique de Dieu, qui venoit en annoncer les secrets : mais, quoi! c'étoit de ce charpentier qu'on parloit ainsi. Qu'est-ce après cela que la gloire humaine? qu'est-ce devant Dieu que la différence des conditions? Jean ne l'avoit jamais vu, et ne le connoît peut-être que par l'impression qu'il en avoit ressentie au sein de sa mère; elle se continuoit, et il éprouvoit que le Fils de Dieu étoit au monde par les effets qu'il faisoit sur lui. Aussi confessoit-il, que nous recevons tous de sa plénitude: et il sentoit que c'étoit de là que lui venoit à lui-même cette abondance de grace. Mais il se prépare de plus grands mystères : Jésus va paroître au monde ; et le premier qu'il va visiter, c'est Jean-Baptiste : et si ce saint précurseur l'a si bien fait connoître, avant que de l'avoir vu, quelles merveilles nous paroîtront quand ils seront en présence!

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de Jean 2.

Pendant que saint Jean-Baptiste faisoit retentir les rives du Jourdain, et toute la contrée d'aDieu avoit déterminé à saint Jean-Baptiste lentour, de la prédication de la pénitence, et qu'on deux temps où il devoit faire connoître le Sau- accouroit de tous côtés à son baptême, où il en veur, dont le premier étoit avant que de l'avoir faisoit attendre un autre plus efficace de la part vu. Quelle merveille! Un artisan encore dans la du Sauveur qu'il annonçoit : le Sauveur vint luiboutique, et gagnant sa vie, est le sujet des pré-même de Galilée pour être baptisé de la main dications d'un prophète, plus que prophète, et si révéré, qu'on le prenoit pour le Christ. C'étoit de cet homme dans la boutique, que saint Jean disoit Il y a un homme au milieu de vous que vous ne connoissez pas, et dont je ne suis pas digne de toucher les pieds 5. Il est plus grand que Moïse il donne la grace, quand Moïse ne donne que la loi : il est devant tous les siècles, le Fils unique de Dieu, et dans le sein de son Père nous n'avons de grace que par lui: cepen

'Joan. 18. -2 Ibid. XIV. 9. - Heb. 111. 3. 6. -Chrysost. Hom. ix. aliàs. Hom. ut, in Matth. n. 5.- Joan. 1. 26, 27.

Ce fut donc alors qu'arriva ce que Jean raconte ailleurs aux Juifs: Je ne le connoissois pas 3. Il parle manifestement du temps qui avoit précédé le baptême de Jésus-Christ: car il l'avoit trop connu dans son baptême, et par des marques trop éclatantes, pour en perdre jamais l'idée. Mais ce fut lorsqu'il l'aborda la première fois que saint Jean-Baptiste pouvoit dire: Je ne le connoissois pas, mais je suis venu donnant le baptême d'eau, afin qu'il fút manifesté en Israël 1. Car, outre

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qu'en baptisant le peuple Jean annonçoit, comme on a vu, un meilleur baptême, il devoit encore arriver que Jésus-Christ, en se présentant au baptême avec les autres, seroit distingué par la manifestation que nous allons voir. Ce fut donc alors que Jean rendit ce témoignage: J'ai vu le SaintEsprit descendant du ciel, comme une colombe, et demeurant sur lui; et je ne le connoissois pas: mais celui qui m'a envoyé baptiser dans l'eau, m'a dit: Celui sur qui vous verrez descendre | le Saint-Esprit et demeurer sur lui, c'est celui qui baptise dans le Saint-Esprit. Et je l'ai vu ; et je lui rends ce témoignage, que c'est le Fils de Dieu 1.

Ainsi le Saint-Esprit descendu du ciel, et se reposant sur Jésus-Christ, devoit être la marque pour le reconnoître. Cette marque fut donnée à tout le peuple au baptême de Jésus-Christ: mais saint Jean, qui étoit l'ami de l'époux, la vit avant tous les autres; et reconnoissant Jésus-Christ dont il se trouvoit indigne de toucher les pieds, il ne vouloit pas le baptiser 2.

Un des caractères de saint Jean c'est l'humilité, qui paroît dans toutes ses actions et dans toutes ses paroles: mais Jésus le devoit surpasser en cette vertu comme en tout le reste; et on ne peut voir sans étonnement, que sa première sortie soit pour se faire baptiser par son serviteur. Et nous rougissons de la pénitence, pendant que Jésus, l'innocence même, se va initier à ce mystère; et ne sort de l'obscurité de son travail mécanique, que pour se mettre par le baptême, ne craignons point de le dire, au rang des pécheurs !

IIe ÉLEVATION.

Jésus-Christ commande à saint Jean de le baptiser.

bienséance le veut: Decet; il est à propos; est bienséant.

C'étoit donc l'ordre d'en-haut, que Jésus, la victime du péché, et qui devoit l'ôter en le portant, se mit volontairement au rang des pécheurs: c'est là cette justice qu'il lui falloit accomplir. Et comme Jean en cela lui devoit obéissance, le Fils de Dieu la devoit aux ordres de son Père. Alors Jean ne lui résista plus 1; et ainsi toute la justice fut accomplie dans une entière soumission aux ordres de Dieu.

Accomplissons aussi toute justice: ne laissons rien échapper des ordres de Dieu : allons à la suite de Jésus nous dévouer à la pénitence: souvenons-nous de notre baptême qui nous y a consacrés; et puisqu'en effaçant le péché il n'en éteint pas les desirs, préparons-nous à un combat éternel, entrons en lice avec le démon, et ne craignons rien puisque Jésus-Christ est à notre tête.

IIIe ÉLÉVATION.

Jésus-Christ est plongé dans le Jourdain.

Jésus-Christ est donc caché dans les eaux, et sa tête y est plongée sous la main de Jean. Il porte l'état du pécheur; il ne paroît, plus; le pécheur doit être noyé; et c'est pour lui qu'étoient faites les eaux du déluge. Mais si les eaux montrent la justice divine par cette vertu ravageante et abîmante, elles ont une autre vertu; et c'est celle de purifier et de laver. Le déluge lava le monde, et les eaux purifièrent et sauvèrent les restes du genre humain. Jésus-Christ plongé dans les eaux leur inspire une nouvelle vertu qui est celle de laver les ames. L'eau du baptême est un sépulcre, où nous sommes jetés tout vivants avec JésusChrist; mais pour y ressusciter avec lui 2. Entrons; subissons la mort que notre péché mérite; mais n'y demeurons pas, puisque Jésus-Christ l'a expié en se baptisant pour nous; sortons de ce mystique tombeau, et ressuscitons avec le Sau

Jésus-Christ venant au baptême avec tout le reste du peuple, Jean l'en empêchoit lui disant: C'est vous qui me devez baptiser, et vous venez à moi 3! Ce qu'on ressent à cette parole d'humilité et d'étonnement est inexplicable. Répétons-veur pour ne mourir plus. la avec componction: Et vous venez à moi! et vous venez me soumettre cette tête sur laquelle je vois le Saint-Esprit reposé! Non, non: donnezmoi vos pieds, dont encore je ne suis pas digne; et puisque c'est au baptême de votre sang que je dois tout, laissez-moi vous reconnoître. Mais Jésus lui dit: Laissez-moi faire maintenant; car il faut qu'en cette sorte nous accomplissions toute justice. L'ordre du ciel le demande, et la

'Joan. 1. 32, 35, 34. - Matth. 111. 14.- Matth, m. 13, 14. - Ibid. 15.

N'oublions jamais notre baptême, où ensevelis dans les eaux nous devions périr; mais au contraire, nous en sortons purs comme du sein d'une nouvelle mère. Toutes les fois que nous retombons dans le péché, nous nous noyons; nous nous abîmons: toutes les fois que par le recours à la pénitence nous ressuscitons notre baptême, nous commençons de nouveau à ne pécher plus. Où retournez-vous, malheureux? ne vous lavez-vous que pour vous souiller davantage? La miséricorde

Matth. 16.- - 2 Rom. vi. 2. 5. 4. Coloss. 11. 12.

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