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O jour admirable! je n'avois pas encore vu toutes vos lumières, ni compris toutes les merveilles dont vous êtes plein,

XIX JOUR.

Réflexions sur les merveilles de la première journée. Il faut continuer sans relâche l'œuvre de Dieu à l'exemple de Jésus-Christ.

Tous ces passages font voir qu'à cette dernière semaine, et dès le jour qu'il fit son entrée, le Sauveur sortoit tous les soirs de Jérusalem, et se cachoit à Béthanie, d'où il revenoit tous les matins faire ses fonctions dans le temple, où tout le peuple s'assembloit aussi dès le matin pour l'entendre. Le jour ses ennemis étoient retenus par la crainte d'émouvoir le peuple, si on le prenoit en plein jour Car ils craignoient, dit saint Marc parceque tout le peuple qui l'écoutoit étoit ravi de sa doctrine. Ou, comme le rapporte saint Luc 2: Ils ne savoient que lui faire; parceque tout le peuple qui l'écoutoil, étoit ravi et hors de soi. Ainsi dans le jour il demeuroit et dans la nuit, où ses ennemis eussent trouvé plus d'occasions de le perdre, il sortoit de la ville, et se retiroit à Béthanie, parmi ses disciples, afin d'achever sa semaine, et le temps qui lui étoit prescrit pour nous instruire; continuant à se servir des voies douces, si naturelles à la sagesse divine, des précautions nécessaires et des moyens ordinaires de se conserver jusqu'à la nuit où il devoit être pris. Voyons donc, soit qu'il se conserve, soit qu'il se livre, qu'il fait tout pour l'amour de nous. Il se conserve pour achever ses instructions, sans que nous perdions une seule de ses paroles; et il se livre pour consommer son sacrifice. O Jésus! je vous adore dans ces deux états; et je vous suivrai tous les matins de cette dernière semaine, pour écouter votre parole, plus touchante encore en ces derniers temps, que dans tous les autres. Ramassons toutes les merveilles que nous avons vues accomplies en ce sacré jour du triomphe de Jésus-Christ, toutes les marques de grandeur, d'autorité, de puissance, que le ciel et la terre donnent à Jésus; et en même temps tous ces caractères d'infirmité, de persécution et de fuite qu'il conserve. Adorons ce sacré mélange. Si nous sommes calomniés, maltraités, persécutés par nos ennemis, jusqu'à être contraints de fuir et de nous cacher devant eux, ne nous en affligeons pas : c'est le caractère de Jésus-Christ, qu'on doit au contraire être ravi

Marc. xi. 18. - Luc. XIX. 48.

de porter. Continuons toujours, à son exemple, l'œuvre de Dieu, s'il nous en a commis quelqu'un, quelque petit qu'il soit, sans nous relâcher jamais; et accomplissons la volonté de Dieu.

XXe JOUR.

Figuier desséché: figure de l'ame stérile, et sans bonnes œuvres. Matth. xxi. 18, 24. Marc. xi. 12, 28.

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Le lendemain de son entrée, en arrivant de Béthanie à Jérusalem du matin, il eut faim ; ayant vu de loin un figuier, il s'en approcha pour voir s'ily trouveroit du fruit; mais n'y trouvant que des feuilles, parceque ce n'étoit pas le temps des fruits, il le maudit ' comme on sait. C'est une parabole de choses, semblable à celles de paroles que l'on trouve en saint Luc, chap. XIII. 6. Il ne faut donc point demander ce qu'avoit fait ce figuier, ni ce qu'il avoit mérité : car qui ne sait qu'un arbre ne mérite rien ? ni regarder cette malédiction du Sauveur par rapport au figuier, qui n'étoit que la matière de la parabole. Il faut voir ce qu'il représentoit, c'està-dire, la créature raisonnable, qui doit toujours des fruits à son créateur, en quelque temps qu'il lui en demande et lorsqu'il ne trouve que des feuilles, un dehors apparent et rien de solide, il la maudit.

Que jamais il ne sorte de fruit de toi 2. Étrange malédiction sur l'ame dont Dieu se retire: jamais il n'en sort de bonnes œuvres. Qu'est-ce qu'un figuier sans fruit, et un homme sans bonnes œuvres ?

Quand on se sent desséché et stérile, qu'on doit craindre alors que Jésus n'ait lâché le mot fatal ! Dieu a son heure où il attend le fruit desiré : l'heure passée, si on lui manque, il laisse partir la triste sentence; et l'arbre, sans être coupé, est desséché jusqu'à la racine. C'est la damnation avant la mort on voit un arbre sur pied; mais il a la mort dans le sein. Vous avez le nom de vivant, mais vous êtes mort 3. Soyons donc fidèles et prêts à donner du fruit à notre Sauveur, toutes les fois qu'il en demandera.

Jésus eut faim. Selon la lettre, il jeûnoit beaucoup selon le mystère, il avoit faim et soif quand il falloit, Il a toujours faim et soif de notre salut.

Jésus-Christ continua son voyage, et revint à Béthanie, selon sa coutume; et la matinée d'après, ses disciples s'arrêtèrent au figuier, qu'ils trouvèrent desséché depuis la racine, et

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Pierre dit au Sauveur: Maitre, le figuier que vous avez maudit, est séché'. Jésus-Christ ne vouloit pas sortir de ce monde, sans faire voir | des effets sensibles de sa malédiction, voulant faire sentir ce qu'elle pouvoit ; mais, par un effet admirable de sa bonté, il frappe l'arbre, et épargne l'homme. Ainsi quand il voulut faire sentir combien les démons étoient malfaisants, et jusqu'où alloit leur puissance, lorsqu'il leur lâchoit la main, il le fit paroître sur un troupeau de pourceaux que les démons précipitèrent dans la mer 2. Qu'il est bon, et qu'il a de peine à frapper l'homme! Ne contraignons pas le Sauveur, contre son inclination, à étaler sur nousmêmes l'effet de sa colère vengeresse.

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Les apôtres étant étonnés de l'effet soudain de la parole de Jésus-Christ sur le figuier, le furent beaucoup davantage lorsqu'il leur dit qu'ils en pouvoient faire autant, et même beaucoup plus, pourvu qu'ils eussent la foi. Si vous l'avez, leur dit-il 3, vous ne pourrez pas seulement dessécher un figuier; mais vous direz à une montagne : Déracinez-vous, et jetez-vous dans la mer, et cela se fera.

Voici le prodige des prodiges : l'homme revêtu de la toute-puissance de Dieu.

malades à qui on les portoit. Et non-seulement les linges qui avoient touché les corps des apôtres avoient cette vertu, mais leur ombre même : l'ombre qui n'est rien; quand elle passoit sur les malades, ils étoient guéris'.

Voici donc le grand miracle de Jésus-Christ. C'est que, non seulement il est tout-puissant, mais il rend encore l'homme tout-puissant, et, s'il se peut, plus puissant que lui, faisant du moins constamment de plus grands miracles: et tout cela par la foi et par la prière : Tout ce que vous demanderez, en croyant sans hésiter qu'il vous sera donné, il vous arrivera 2. La foi donc et la prière sont toutes-puissantes, et revêtent l'homme de la toute-puissance de Dieu. Si vous pouvez croire, disoit le Sauveur 3, tout est possible à celui qui croit.

La difficulté n'est donc pas de faire des miracles: la difficulté est de croire. Si vous pouvez croire : c'est là le miracle des miracles, de croire parfaitement et sans hésiter. Je crois, Seigneur, aidez mon incrédulité, disoit cet homme à qui Jésus dit: Si vous pouvez croire. Seigneur, augmentez-nous la foi, disoient les apòtres 3. Nous n'avons besoin que de la foi, car avec elle nous pouvons tout. Oh! si vous en aviez, dit le Seigneur, comme un grain de senevé, le plus petit de tous les grains, vous diriez à ce múrier Déracine-toi, et te plante dans la mer; et il vous obéiroit: et il trouveroit un fond sur les flots pour y étendre ses racines.

:

Ainsi le grand miracle de Jésus-Christ n'est pas de nous faire des hommes tout-puissants; c'est de nous faire de courageux et de fidèles croyants, qui osent tout espérer de Dieu, quand s'agit de sa gloire.

Allez, disoit le Sauveur *, guérissez les malades, ressuscitez les morts, purifiez les lé-il preux, chassez les démons. Qui fit jamais un pareil commandement ?

Il faut donc entendre que cette foi qui peut tout, nous est inspirée. Pour oser faire cet acte de foi qui peut tout, il faut que Dieu nous en donne le mouvement. Et le fruit de ces préceptes de l'Evangile, que nous lisons aujourd'hui, c'est de nous abandonner à ce mouvement divin qui nous fait sentir que Dieu veut de nous quelque chose. Quelque grand qu'il soit, il faut oser, et n'hésiter pas un seul moment.

Il les envoya précher et guérir les malades". Qui jamais envoya ses ministres avec de tels ordres? Allez, dit-il, entrez dans cette maison, et guérissez tous les malades que vous y trouverez. Tout est plein de pareils commandements. Mais ici il pousse la chose encore plus loin Tout ce que vous demanderez, vous l'obtiendrez. Vous pourrez tout ce que je puis vous Lorsqu'il s'agit de demander à Dieu les choses ferez tout ce que vous m'avez vu faire de plus nécessaires pour le salut, nous n'avons pas begrand, et vous ferez méme de plus grandes cho-soin de ce mouvement particulier de Dieu, qui ses. En effet, si on est guéri en touchant le bord de la robe de Jésus-Christ, pendant qu'elle étoit sur lui; ne se fait-il pas quelque chose de plus dans saint Paul, lorsque les linges qui avoient seulement touché son corps, guérissoient les

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nous apprend ce qu'il veut que nous obtenions de sa puissance. Nous savons très clairement par l'Évangile, que Dieu veut que nous lui demandions notre salut et notre conversion. Demandons-la done sans hésiter; assurés, si nous le

Act. v. 15.-2Matth. xx1. 22. Marc. x1. 24.— Marc. IX. 22. — ' Ibid. 25- - Luc. xvn. 5. — 5 1bid. 6.

faisons avec la persévérance qu'il faut, que tout | justifie, selon le même saint Paul dans le même

nous sera possible. Quand nos mauvaises habitudes auroient jeté dans nos ames de plus profondes racines, que les arbres ne font sur la terre, nous leur pouvons dire Déracine-toi. Quand nous serions plus mobiles et plus inconstants que des flots, nous dirons à un arbre: Va te planter là; et à notre esprit : Fixe-toi là; et il y trouvera du fond. Quand notre orgueil s'éleveroit à l'égal des plus hautes montagnes, nous leur pourrions ordonner de se jeter dans la mer, et de s'y abîmer, tellement qu'on ne voie plus aucune marque de leur première hauteur. Osons donc tout pour de tels miracles, puisque ce sont ceux que nous savons très certainement que Dieu veut que nous entreprenions. Osons tout: et pour petite que soit notre foi, ne craignons rien; car il n'en faut qu'un petit grain, gros comme du senevé, pour tout entreprendre. La grandeur n'y fait rien, dit le Sauveur, je ne demande que la vérité et la sincérité : car s'il faut que ce petit grain croisse, Dieu qui l'a donné le fera croître. Agissez donc avec peu, et il vous sera donné beaucoup: et ce grain de senevé, cette foi naissante, deviendra une grande plante, et les oiseaux du ciel se reposeront dessus '. Les plus sublimes vertus n'y viendront pas seule ment, mais y feront leur demeure.

XXIIe JOUR.

La prière persévérante; elle tient de la plénitude de la foi. Ibid.

Pesez les qualités de la foi et de la prière. Qu'on la fasse sans hésiter, pour peu que ce soit, avec une pleine persuasion : c'est ce que saint Paul appelle, plénitude de persuasion que la : Vulgate a traduit simplement, in plenitudine multá: avec une grande plénitude 2. Ce que le même saint Paul appelle ailleurs : plénitude d'intelligence 3; et ailleurs en termes formels : plénitude de l'espérance, et plénitude de la foi. C'est donc à dire, qu'il faut avoir une foi si pleine qu'elle ne se démente par aucun endroit, et qu'on n'ait nulle défiance du côté de Dieu; comme le même saint Paul le dit d'Abraham, qu'il n'hésita point par défiance; mais se fortifia dans la foi, donnant gloire à Dieu; pleinement persuadé et convaincu qu'il est puissant pour accomplir tout ce qu'il promet 5. Voilà donc la foi qui obtient tout, et la foi qui nous

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endroit'. Telle est donc la première condition de la prière marquée dans notre Évangile, qu'elle se fasse avec une pleine foi. La seconde y est encore marquée : Qu'on pardonne sincèrement à son frère, si on a quelque chose contre lui 2. On obtient donc tout ce qu'on demande, si on le demande avec un cœur plein de foi en Dieu, et en paix avec tous les hommes. Voilà ce que Dieu demande, un cœur sans aigreur et sans défiance: on a tout de lui à ce prix.

Mais peut-on ne se pas défier, et ne doit-on pas le faire ? Oui, de soi; puisqu'on est si foible, et qu'on ne sait même si on a une foi vive, encore moins si on y persévérera: mais avec toute cette incertitude, j'ose dire qu'il ne faut pas s'en inquiéter; et sans tant de retour sur soi-même, il faut, dans le temps que la prière s'allume, oser tout attendre et tout demander; et être si plein de Dieu, qu'on ne songe plus à soi même.

Est-ce là cette téméraire confiance que les hérétiques prêchent ? Point du tout. Mais sans éteindre les réflexions qu'on peut faire sur sa foiblesse, c'est dans la ferveur de la prière s'oublier tellement soi-même, qu'on ne demeure occupé que de ce que Dieu peut, et de l'immense bonté avec laquelle il a tout promis à la prière persévérante.

XXXIIIe JOUR.

Distinction des jours de la dernière semaine du Sauveur. Matière de ses derniers discours. Marc. xi. 11 — 53. Matth. xxI. 25 — 32. Luc. xx. 1 — 8.

En comptant avec saint Marc, c'est ici le quatrième jour de la dernière semaine de notre Sauveur. Le premier est celui de son entrée, qui est le cinquième avant Pâques. Le second jour de cette semaine fut le lendemain matin lorsque Jésus, venant de Béthanie à la ville, eut faim, dessécha le figuier, et nettoya le temple de voleurs, comme il les appelle. Le troisième est celui où, repassant sur le matin devant le figuier, on le vit flétri et séché; et c'est celui où nous avons entendu tant de merveilles sur la foi. Le quatrième est celui dont saint Marc dit, après tout ce que nous venons de voir : Jésus vint encore une autre fois à Jérusalem 3; et c'est celui où il objecta aux Juifs le baptême de saint Jean, comme on va voir.

Après cela je ne vois plus de distinction de jours. Nous apprenons seulement de saint Luc, que Jésus-Christ venoit tous les jours au temple pour y enseigner, et que le peuple l'y venoit

Rom. iv. 22. — ? Marc. xi. 24. 23. -Marc. xl. 27.

entendre dès le matin '. En sorte qu'il faut partager ce qui reste de ses discours entre le mercredi et le jeudi durant le jour; car il fut pris la nuit, et fut crucifié le lendemain.

Plus nous approchons de la fin de Jésus, plus nous devons être attentifs à ses discours. Hier, qui fut le mardi, il nous fit voir dans la foi le fondement de la prière et de toute la vie chrétienne. Il n'y avoit rien de plus essentiel à la piété. Mais dans la suite il va établir la foi, et autoriser sa mission d'une manière admirable: premièrement par le témoignage de saint JeanBaptiste, et ensuite par celui de David, et par beaucoup d'autres choses que nous allons voir les unes après les autres; fermant la bouche à tous les contredisants; et laissant ce témoignage au monde, que sa doctrine étoit absolument irrépréhensible, puisque ses plus grands ennemis demeuroient muets devant lui.

Méditons cette vérité : considérons de quelle sorte Jésus-Christ répond à ceux qui l'interrogeoient avec un esprit de contradiction; et apprenons comment il faut consulter la vérité éternelle.

XXIVe JOUR.

Jésus refuse de répondre aux questions des Juifs superbes et incrédules, et répond aux esprits humbles et dociles. Matth. xxI. 27. Marc. x1 55. Luc. xx1. 1, 2, 8.

Comme il enseignoit dans le temple, les princes des prêtres, et les docteurs de la loi, et les sénateurs du peuple s'assemblèrent, et lui firent cette demande: En quelle puissance faites-vous ces choses? il paroît que cette demande regardoit principalement la puissance qu'il se donnoit d'enseigner; car ils vinrent à lui comme il enseignoit. Mais la demande s'étend aussi à tout le reste que venoit de faire Jésus et c'est comme si on lui eût demandé : En quelle puissance êtes-vous entré si solennellement dans le temple? en quelle puissance y enseignez-vous? en quelle puissance en chassez-vous les vendeurs et les acheteurs, et y exercez-vous tant d'autorité? Ce seroit à nous à vous donner cette puissance: nous ne vous l'avons point donnée; d'où vous vient-elle? Voilà une demande faite dans les formes par l'assemblée et par les personnes qui sembloient avoir le plus de droit de la faire. Et néanmoins Jésus ne leur donne sur ce sujet aucune instruction. Je ne vous dirai pas non plus, leur dit-il, en quelle puissance j'agis 3. Mais il se contente de les confondre devant le

1 Luc. xxi. 57, 58. - Luc. xx. 1, 2. -- Luc. XX. S.

3

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peuple, de mauvaise foi et d'hypocrisie, comme l'on va voir.

Jésus se communique si facilement aux esprits dociles et humbles. La Samaritaine, une pécheresse, lui parle bonnement du Christ: Je le suis, moi qui vous parle, lui dit-il sans circuit '. Croyez-vous au Fils de Dieu, dit-il à l'aveugle-né? —Qui est-il, Seigneur, afin que j'y croie? – Vous l'avez vu, et c'est celui qui vous parle.-J'y crois, Seigneur; et il l'adora 2. Ainsi en d'autres endroits. Quand donc il ne répond pas de cette manière simple, si digne de lui, c'est que les hommes ne sont pas dignes qu'il se manifeste à eux en cette sorte.

En quelle puissance faites-vous ces choses3? Il leur avoit déja répondu sur un cas semblable, ou plus fort, en présence de tout le peuple. Car ayant dit à un paralytique qu'on lui présentoit pour le guérir: Homme, tes péchés te sont remis; ce qui dans le fond étoit beaucoup plus grand que tout ce qu'il avoit jamais fait : comme les docteurs de la loi le trouvoient étrange, il leur parla en cette sorte: Lequel des deux est le plus facile, ou de dire: Je vous remets vos péchés; ou de dire à un paralytique : Levezvous, et marchez? Or, afin que vous sachiez que le Fils de l'homme a le pouvoir de remettre les péchés: Homme, c'est à toi que je parle, lève-toi et marche. Il avoit donc clairement établi le pouvoir qu'il avoit de remettre les péchés, qui étoit le plus grand qui pût être donné à un homme. Il n'y avoit plus à l'interroger sur le reste; il n'y avoit autre chose à faire qu'à se soumettre. Comme ils ne pouvoient s'y résoudre, ils viennent encore lui demander De quelle puissance faites-vous ces choses? Comme s'ils eussent dit: De quelle puissance guérissez-vous tous les malades? de quelle puissance rendezvous la vue aux aveugles? de quelle puissance ressuscitez-vous les morts? Il étoit trop clair que c'étoit par la puissance divine; et ils ne l'interrogeoient sur une chose si claire que par un mauvais esprit.

Ailleurs on lui demande dans le même esprit : Jusqu'à quand nous tiendrez-vous en suspens, et nous arracherez-vous l'ame? Si vous êtes le Christ, dites-le-nous franchement ? A les entendre parler avec cette force, on diroit qu'ils veulent savoir de bonne foi la vérité; mais la réponse de Jésus fait voir le contraire. Vous demandez que je vous dise ouvertement qui je suis; je vous le dis, et vous ne me croyez pas : ce

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XXVI JOUR.

pendant les œuvres que je fais au nom de mon | qui ne vous demanderoit en tremblant : D'où Père, parlent assez, et me rendent un assez vient dans le cœur des Juifs une si étrange disgrand témoignage'. Ils avoient donc deux té- position? Ne se trouvera-t-il pas quelque chose moignages; celui de sa parole, et, ce qui étoit de semblable en nous? Nous le pourrons cherencore plus fort, celui de ses miracles. S'ils con- cher une autre fois : nous frapperons à la porte sultoient après cela, au lieu de croire, un mau- pour entendre ce secret, et peut-être nous seravais esprit les poussoit. La vérité éternelle, qu'ils t-elle ouverte. Continuous cependant notre consultent mal, n'a rien à leur répondre, et n'a lecture. plus qu'à les confondre devant tout le peuple. Ainsi nous arrivera-t-il, quand nous la consulterons contre notre propre conscience sur des choses déja résolues : nous ne cherchons qu'à tromper Les Juifs incrédules confondus par le témoignage de saint le monde, ou à nous tromper nous-mêmes. Cessons de nous flatter: cessons de chercher des expédients pour nous perdre. Rompons ce commerce dangereux et scandaleux : rendons ce bien mal acquis: soyons fidèles aux devoirs de notre profession: ne reculons point en arrière contre le précepte de l'Évangile : ne cherchons point à nous relâcher et à tout perdre.

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De qui est le baptême de Jean 2? Est-il possible que le Sauveur doive tirer son témoignage de saint Jean-Baptiste, qui n'étoit que son précurseur, qui n'étoit pas l'Époux, mais l'ami de l'Époux, comme il l'avoit dit : qui n'étoit pas le Christ, mais celui qui lui devoit préparer la voie qui, pour tout dire en un mot, n'étoit pas digne de lui délier les cordons de ses souliers? Voilà ce qu'étoit Jean-Baptiste; et néanmoins Jesus-Christ se sert de son témoignage, pour convaincre ceux qui ne vouloient pas croire au Christ lui-même. Cependant Jean n'avoit fait aucun miracle; et Jésus en avoit rempli toute la Judée: Jean parloit comme le serviteur; et JésusChrist comme le Fils disoit ce qu'il avoit vu dans le sein du Père. Telle est la foiblesse de nos yeux, dit saint Augustin: un flambeau nous accommode mieux que le soleil. Nous cherchons le soleil avec un flambeau. Jésus l'entendoit bien ainsi, et il avoit dit : J'ai un témoignage plus grand que celui de Jean 3. Quand donc il se servoit de ce témoignage, c'est qu'il approchoit aux yeux malades une lumière plus proportionnée à leur foiblesse : et c'est ce qu'il fait encore en cette occasion. Profond aveuglement des hommes, plus disposés à croire saint Jean que JésusChrist même! O Dieu, qui ne trembleroit? Mais

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Jean. Ibid. et Joan. v. 53, 36.

Si nous disons que le baptême de Jean est du ciel, il nous dira: Pourquoi ne l'avez-vous pus cru 1? Il le leur avoit déja dit, et ils n'avoient su que répondre: Vous avez envoyé à Jean, et il a rendu témoignage à la vérité 2. S'ils avoient donc avoué la mission céleste de saint Jean-Baptiste, il leur auroit fermé la bouche par son témoignage. Que dire done? que le baptême de Jean ne venoit pas de Dieu? Ils n'osoient le dire devant le peuple qui le tenoit pour un prophète. Nous n'en savons rien, disent-ils. El moi, dit-il, je ne vous dis pas non plus en quelle puissance j'agis 3. Gens de mauvaise foi, qui n'osez ni avouer ni nier la mission de saint JeanBaptiste, vous ne méritez pas que je vous réponde. Avouez, niez, pensez ce que vous voudrez : vous êtes confondus; et il n'y a de parti pour vous que de vous taire. Il y en auroit un autre; ce seroit de croire en Jésus mais vous ne pouvez, pour les raisons et à la manière que nous verrons en son lieu.

Lisez ici le passage entier de saint Jean, v. 33: Vous avez envoyé à Jean, et il a rendu témoignage à la vérité. Pour moi, je ne reçois pas mon témoignage de l'homme; mais je parle ainsi, je vous allègue Jean à qui vous croyez, afin que vous soyez sauvés. Jean étoit un flambeau ardent et luisant, et vous avez voulu vous réjouir pour un peu de temps à sa lumière. Pour moi, j'ai un témoignage plus grand que celui de Jean: les œuvres que mon Père m'a donné le pouvoir de faire, rendent assez témoignage que c'est lui qui m'a envoyé1.

C'est ainsi qu'il se servoit du témoignage de saint Jean-Baptiste, afin, dit-il, que vous soyez sauvés, et pour vous convaincre par vousmêmes. Voilà donc l'orgueil et l'hypocrisie de ces interrogateurs de mauvaise foi, confondue. Ils ne méritoient pas que le Sauveur leur dît da

Matth. xxi. 23. — 2 Joan. v. 35. -Matth. xxI. 26, 27. Joan. v. 33, 34, 35, 36.

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