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J'ajoute une seule observation; la loi ne reconnaît pas de cocardes vertes? La ville de Nîmes est-elle dans une autre France? Le midi appartiendrait-il à quelque prince étranger? Qu'on y prenne garde, tout ce qui ne tient pas à la patrie appartient à des factions, et dans les factions rien n'est français, ni la cocarde, ni l'esprit, ni le cœur. Le roi, auguste interprète de la France, a proclamé l'union et l'oubli, ceux qui veulent séparer et hair ne sont point Français.

J.-P. P.

CORRESPONDANCE.

Aux auteurs de la Minerve.

Paris, le 23 janvier 1819.

Messieurs,

Après avoir lu, dans la cinquantième livraison de la Minerve, le passage de la lettre sur Paris où il est question des abus auxquels l'arbitraire a livré l'administration des communes, il m'est venu sur-le-champ à l'idée de mettre sous vos yeux un exemple irrécusable des vérités essentielles avancées dans cet article. Je crois qu'il est du devoir d'un bon citoyen de signaler à la justice de l'autorité ministérielle qui vient d'être constituée, les actes illégaux du pouvoir départemental de 1815, qui, appuyé sur les lois d'exception qui nous régissent encore, n'a que trop long-temps désolé nos cantons jusqu'alors si bien administrés et si paisibles.

L'esprit de désorganisation qui plana sur notre malheu reuse patrie en 1816, et dont le département d'Eure-etLoir fut loin d'être exempt, se fit particulièrement remarquer dans l'arrondissement de Châteaudun. C'est là surtout que le système municipal fut totalement bouleversé;

Fa, que les droits du peuple furent méconnus, sans ménament. On imagina de réunir plusieurs communes sous l'influence et la direction d'un seul maire, qui en fut le chef principal et auquel se rapportèrent tous les pouvoirs. Ce maire eut sous lui un adjoint dans chacune des communes réunies à la sienne. Je n'ai pas besoin de vous dire que cette constitution administrative, si évidemment anticonstitutionnelle, trouva partout des censeurs. De tels abus irritèrent les esprits autant qu'ils les frappèrent d'étonnement. On chercha vainement de tous côtés s'il existait quelque disposition législative qui portât qu'un maire qui n'habitait point une commune et qui n'y avait point son domicile, pouvait néanmoins en être l'administrateur; et surtout qui autorisât le même homme à discuter et à régler des intérêts qui, dans une telle occurence, se trouvent presque toujours diamétralement opposés. La terreur du moment nous réduisit au silence, et chacun se trouva contraint de courber la tête sous ce nouveau joug aristocratique; car ce fut ainsi que l'on qualifia, dans le particulier, toutes ces monstruosités du pouvoir préfectorial, qui n'offraient de toutes parts aux esprits étonnés que de véritables essais de féodalité dont personne ne fut dupe.

C'est ainsi, par exemple, que, dans le canton de Brou, MM. de la Faucherie, de la Faye et Lechapellier de la Varenne sont maires: le premier, des communes de Brou et d'Yèvres; le second, de celles de Saint-Avit, Charron ville et Vieuvic; et le troisième, des communes d'Unverre et de Dampierre.

On donna pour maire à la commune de Dangeau, le propriétaire du domaine du lieu, M. de Courcy, lequel habite la ville d'Orléans, qui en est à quinze lieues. Il vient, dans la belle saison, faire dans cette commune un acte d'apparition d'environ six semaines; et c'est pendant ce court espace de temps qu'il règle les affaires de l'année. D'abord il eut pour adjoint son régisseur; mais les administrés ayant osé se plaindre, un reste de pudeur fit révoquer cette nomination. Cependant, comme on ne voulait rien perdre à cela, le secrétaire de la mairie reçut le titre d'adjoint. Les choses devaient être ainsi.

Dans le canton de Bonneval, le maire de la commune

de Bonneval gouverne en même temps celles de SaintMaurice et de Saint-Martin-de-Péan.

Ce petit arrondissement fut proposé à M. le comte de Colbert, qui devait y réunir Montboissier, Alluyes et Saint-Germain, mais qui, dans sa modeste ambition se contenta du gouvernement des trois dernières communes, sans cependant abandonner son droit d'influence sur le tout. En faisant cette proposition à M. le comte, qui n'entra de fait dans cette nouvelle fonction qu'en quittant la chambre des députés, après la terrible ordonnance du 5 septembre, c'était vraiment lui offrir la fiche de consolation: il faut bien dédommager l'infortune.

A Montboissier, on avait aussi imaginé de donner à M. le comte pour adjoint son régisseur, dont la nomination fut révoquée peu de temps après sur la représentation de quelques administrés; mais, pour ne rien perdre à ce changement, M. le sous-préfet, qui est parent de M. de Vaublanc, donna pour adjoint à M. le comte, son fermier de basse-cour.

A Meslay-le-Vidame, le gendre du régisseur du domaine de M. le chancelier de France eut l'avantage de réunir trois communes à celle du lieu, savoir: Vitray, Andeville et Saint-Denis de Gernelles.

A la mairie de Pré-Saint-Euroult fut réunie celle de Bullainville.

Je bornerai ici mes citations, quoiqu'il ne tienne qu'à moi de les étendre davantage. Ce fut ainsi que tous les propriétaires intéressés au maintien du bon ordre, et qui, depuis quinze, vingt et trente ans, administraient leurs communes avec justice, et par conséquent à la satisfaction de tous, furent, dans ces jours de désordre, dépouillés de l'écharpe municipale qui fut remise à des comtes, à des barons, et dans quelques lieux même à leurs valets. Dire que tous ces messieurs, depuis le plus grand jusqu'au plus petit, ne composèrent leur conseil que de leurs fermiers, ouvriers et valets de basse cour, c'est ne rien apprendre à personne. Cet esprit de domination se fit remarquer partout, et partout on en trouve encore aujourd'hui, mais non sans quelque surprise, l'empreinte révoltante; par- . tout on se demande quand finira ce régime avilissant,

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LA MINERVE FRANÇAISE.

Sous lequel les campagnes gémissent dans cette portion du département d'Eure-et-Loir, depuis la fin de 18. Les habitans de l'arrondissement de Châteaudun ont lieu d'espérer, je pense, que l'état actuel des choses ne permettra pas qu'il ait une plus longue durée.

J'ai l'honneur d'être, messieurs, avec une considération très-distingué,

Un citoyen du département d'Eure-et-Loir.

LE CHAMP D'ASILE.

Le total des sommes reçues pour le Champ d'Asile, jusqu'au 27 janvier compris, s'éleve à 65,122 fr. 39 c. Nous publierons la suite des listes dans la prochaine li

vraison.

Les auteurs légalement responsables:

E. AIGNAN; Benjamin CONSTANT; Évariste
DUMOULIN; ÉTIENNE; A. JAY; E. JOUT;
LACRETELLE aîné; P.-F. TISSOT.

FIN DU QUATRIÈME VOLUME.

IMPRIMERIE DE FAIN, PLACE DE L'ODÉON.

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