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EN MATIÈRE CIVILE, COMMERCIALE, CRIMINELLE, DE DROIT PUBLIC ET ADMINISTRATIF.

TROISIÈME SERIE.

ABONNEMENT ANNUEL.

COURS DE FRANCE.

1861

Ire PARTIE.

ARRÊTS DE LA COUR DE CASSATION,

BRUXELLES.
BRUYLANT-CHRISTOPHE ET C, LIBRAIRES-EDITEURS,

PLACE SAINT-JEAN, 12.

1861

92. 61 NAP

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et à rendre ce fonds paraphernal. (Cod. Nap., 1559.) (2)

Peu importe que les constructions, commences avant l'échange, n'aient été terminées que depuis.· Rés. impl. (3)

Dans ce cas, les créanciers de la femme ne sauraient se prévaloir contre elle du jugement qui a autorisé l'échange, pour soutenir qu'une partie de l'immeuble est devenue paraphernale et a pu être utilement affectée au paiement de leurs créances. (4)

(1-2-3-4) Aux termes de l'art. 1559, Cod. Nap., priétaires différents, c'est que cet article suppose le l'immeuble dotal peut être échangé avec l'autorisa- cas où l'échange sera fait avec soulte, ce qui ne tion de la justice contre un autre immeuble, en jus- pourrait pas avoir lieu s'il s'agissait d'une opération tifiant de l'utilité de l'échange; dans ce cas, l'im- qui n'emporterait pas aliénation et mutation de promeuble reçu en échange devient dotal; l'excédant priété, mais seulement un simple échange de quadu prix, s'il y en a, le devient aussi, et il en doit lités entre deux immeubles. Il est si vrai que l'art. être fait emploi comme tel au profit de la femme. 1559 a eu en vue, non cet échange de qualités entre Résulte-t-il de cette disposition que les époux puis- deux immeubles appartenant à la femme dotale, mais sent, au moyen d'une opération qu'ils qualifieraient un véritable échange d'un immeuble de la femme d'échange, rendre dotal un immeuble paraphernal, contre un immeuble appartenant à un tiers, et emet paraphernal un immeuble dotal, en substituant portant mutation de propriété de l'un à l'autre l'un à l'autre, et en transportant la dotalité de l'un propriétaire, que les auteurs ont toujours considéré sur l'autre? L'affirmative nous semble douteuse, l'échange dont parle cet article comme l'un des cas Quand l'art. 1559 autorise la femme à échanger l'im- pour lesquels le Code autorise l'aliénation des immeuble dotal, il entend parler d'un échange propre-meubles que la constitution dotale a rendus inaliément dit par lequel la femme aliène cet immeuble nables (V. notamment MM. Troplong, Contr. de pour recevoir de l'échangiste avec lequel elle con- mar., n. 3500 et s.; Marcadé, sur l'art. 1559, n. 1; tracte un autre immeuble en contre-échange, im- Zachariæ, édit. Massé et Vergé, t. 4, § 670, p. 243, meuble qui se trouve subrogé à l'immeuble aliéné, et édit. Aubry et Rau, t. 4, § 537, p. 490), et et devient dotal en son lieu et place. On ne peut qu'aucun d'eux n'y a trouvé l'indice de la faculté considérer comme un échange, dans le sens juridi- que le législateur aurait entendu donner à la femme que de ce mot, l'acte par lequel une femme proprié- de substituer un immeuble paraphernal à un imtaire de deux immeubles, l'un dotal, l'autre para-meuble dotal, faculté qui pourrait d'ailleurs être phernal, opérerait entre ces deux immeubles une substitution de leurs qualités respectives, de manière à rendre dotal celui qui est paraphernal, et paraphernal celui qui est dotal; et ce qui prouve que l'art. 1559 a entendu parler, non d'un échange de qualités, mais d'un contrat d'échange réellement opéré entre deux immeubles appartenant à des pro

considérée comme contraire au principe de l'immulabilité des conventions matrimoniales, spécialement appliqué au régime dotal par l'art. 1543, Cod. Nap. Dans tous les cas, en admettant que cette faculté appartînt à la femme ou aux époux, et qu'ils pussent, au moyen d'une espèce d'échange, substituer un immeuble dotal à un immeuble paraphernal,

(Ellie C. Violot et autres.) Les époux Ellie se sont mariés en 1828, sous le régime dotal, avec faculté pour la femme d'aliéner, moyennant remploi, ses immeubles dotaux. En 1841, la dame Ellie, qui avait obtenu sa séparation de biens, entreprit de

construire une filature sur un terrain faisant partie de ses biens dotaux; et bientôt après, elle présenta requête au tribunal de Falaise afin d'être autorisée à échanger le terrain dotal sur lequel elle avait établi cette usine, avec le quart indivis de l'usine et de ses accessoi

et nous ne voyons pas comment des bâtiments qui font partie intégrante du fonds sur lequel ils s'appuient, qui ne sont pas autre chose que ce fonds, mais une partie de ce fonds, qui, par conséquent, n'en peuvent être séparés matériellement sans être détruits, soit absolument, soit relativement; qui ne peuvent en être séparés intellectuellement, sans que cette séparation soit en contradiction avec la na. ture même des choses, nous ne voyons pas comment ces bâtiments pourraient être considérés distincte

c'est avec raison, il nous semble, que l'arrêt ci-dessus de la Cour de cassation décide que, dans l'espèce, il ne pouvait y avoir lieu à une opération de celte nature.-La première condition, en effet, pour qu'il y ait lieu à échange, c'est qu'il y ait deux choses, et spécialement deux immeubles qui soient les termes de l'échange, et entre lesquels la permutation puisse s'opérer. Or, des constructions élevées par un propriétaire sur son terrain font avec ce terrain une seule et même chose, un seul et même immeuble; et, sous ce rapport, l'élément principalment du fonds même, de manière que les créanet indispensable de l'échange manque d'une manière absolue.

ciers qui n'ont aucun droit sur le fonds eussent sur les bâtiments un droit quelconque aussi difficile à préciser dans ses effets que dans son exercice.

Aussi l'arrêt de la Cour de Caen dont la cassation est prononcée n'était pas allé jusqu'à refuser d'une manière absolue le caractère dotal aux constructions élevées sur un fonds dotal; et pour admettre la validité de l'échange que la femme avait été autorisée à opérer, il s'était principalement fondé sur ce qu'au moment où l'autorisation d'échanger avait été demandée, les constructions étaient seule. ment commencées et non encore terminées. Mais comment aurait-on pu autoriser l'échange avec une chose qui n'existait pas encore et vis-à-vis de laquelle il était impossible de remplir aucune des con. ditions de l'art. 1559?

Donc, dans quelque hypothèse qu'on se place, on se trouve en présence d'impossibilités légales qu'on ne peut vaincre qu'en se mettant en opposition directe avec les principes et la nature des choses.

D'un autre côté, l'échange dont il s'agit ici suppose qu'il y a en présence un immeuble dotal et un immeuble paraphernal. Or, de cela même que les constructions élevées sur un fonds constituent une seule et même chose avec ce fonds, il résulte que si le fonds est dotal, les constructions sont égale ment dotales. Comme le dit fort bien la Cour de cassation, ces constructions sont l'accessoire du fonds sur lequel elles reposent, et dès lors ne peuvent être d'une autre condition que le fonds lui-même. Sans doute, aux termes de l'art. 1543, la dot ne peut être constituée ni même augmentée pendant le mariage; mais de là on aurait tort de conclure que les constructions élevées sur un fonds dotal ne sont pas dotales, sous prétexte qu'elles augmenteraient la valeur de la dot. Lorsque l'art. 1543 défend d'augmenter la dot pendant le mariage, il entend parler des augmentations conventionnelles, et non de celles qui résultent de la nature même des choses. Quand nous disons, observe M. Troplong., Contr. Il est d'ailleurs à remarquer que le jugement qui de mar., t. 4, n. 3057, que la dot ne peut être aug- autoriserait les époux à diviser un immeuble dotal, mentée pendant le mariage, nous entendons parler de manière à faire considérer comme paraphernale des augmentations qui procèdent d'une convention; une partie de cet immeuble, n'étant fondé sur aumais on comprend à merveille que notre article ne cune loi, ne pourrait être opposé par les tiers à la s'oppose pas aux accroissements qui tiennent au dé- femme qui l'aurait obtenu. Un tel jugement, en veloppement naturel du droit de propriété, par exem- effet, équivaut à une autorisation d'aliéner; et il est ple aux alluvions, accrues, BATIMENTS: Incrementum de règle certaine, l'arrêt attaqué lui-même le realluvionis non novus ager, sed pars primi.—Omne connaissait, que si l'autorisation d'aliéner a été donquod solo ædificatur solo cedit. (V. dans le même née en dehors des cas prévus par la loi, celui qui a sens, Marcadé sur l'art. 1543, n. 2, et nos anno- acheté les biens ou à qui ils ont été hypothéqués tations sur Zachariæ, t. 3, $667, note 3; V. en- ne saurait se prévaloir du jugement d'autorisation core Cass. 14 fév. 1843, vol. 1843.1.193-P. 1843. contre la femme qui demande la nullité de l'hypo1.608). L'opinion contraire a cependant été soutenue thèque ou la révocation de l'aliénation: à la diffé. par MM. Rodière et Pont, dans leur Tr. du contr. rence de ce qui a lieu si l'autorisation a été accordée de mar., t. 2, n. 415. Ces auteurs reconnaissent bien dans un des cas prévus par la loi, mais sur un faux que le fonds dotal peut recevoir des augmentations exposé ou après une mauvaise appréciation des faits; naturelles par l'effet d'attérissements, alluvions ou auquel cas la femme est liée et ne peut faire annuautres causes analogues; mais quant aux augmen- ler ses actes ou ses engagements (V. Caen, 12 juin tations industrielles, telles que les constructions, 1842, vol. 1842.2.462; Rouen, 20 mai 1847, vol. ils pensent qu'elles n'ont aucun caratère dotal, et 1848.2.245; Cass. 14 fév. 1848, vol. 1848.1.387 que les créanciers doivent être admis à faire déta--P. 1849.2.662; 30 déc. 1850, vol. 1851.1.29. cher du fonds tout ce qui est susceptible de l'être, pour exercer leurs droits sur la valeur des objets ainsi séparés; et que quant aux augmentations qui ne peuvent se détacher du sol, les créanciers ont le droit de se faire payer sur l'accroissement de revenu produit par les deniers paraphernaux qui y ont été employés. Tout cela nous semble fort arbitraire;

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P. 1851.1.502; 7 juill. 1854, vol. 1851.4.472-
P. 1851.2.367; Montpellier, 22 déc. 1852, vol.
1853.2.69-P. 1854.2.390; Cass. 7 juill. 1857,
vol. 1857.1.734 - P. 1858.492; MM. Troplong,
n. 3495 et s.; Marcadé, sur l'art. 1558; Massé et
Vergé, t. 4, $ 670, note 60; Aubry et Rau, t. 4,
§ 537, p. 498).
G. MASSE.

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