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velles de notre protectorat sur l'Annam, de viser un certain nombre de dispositions accessoires qui ont toutes eu l'approbation de votre Commmission. L'art. 5 stipule l'ouverture au commerce par le gouvernement annamite des ports de Qui-Nhon, de Tourane et de Xuan-Day. Le premier était déjà ouvert. D'autres ports encore pourront être ouverts ultérieurement après entente préalable.

Il y aura dans les ports ouverts des résidents français subordonnés au résident général de Hué.

Les citoyens français pourront s'établir dans les ports ouverts de l'Annam, y faire le commerce et y acquérir des propriétés.

Les étrangers y seront soumis à la juridiction française.

La liberté de conscience stipulée par les anciennes conventions en faveur des chrétiens indigènes et des missionnaires est garantie. Des conventions ultérieures règleront le régime monétaire, le mode de payement de la dette annamite envers la France, le régime et l'exploitation des mines; M. le Président du Conseil a donné l'assurance à la Commission que le gouvernement annamite s'est interdit dès à présent la faculté d'accorder, sans notre consentement, des concessions d'aucune sorte tant en Annam qu'au Tonkin.

L'établissement pour le Tonkin d'un régime spécial, essentiellement différent de celui de l'Annam, est un des traits caractéristiques du traité du 6 juin comme de la convention du 25 août 1883. La nature même des choses imposait celte différence. Car si l'Annam proprement dit est destiné à rester longtemps un royaume indigène subordonné, protégé, dirigé de haut, le Tonkin parait appelé par sa situation géographique, les ressources variées de son sol et par sa récente histoire à devenir une véritable colonie française. Les magnifiques plaines d'alluvion qui constituent le double delta du fleuve Rouge et du ThayBinh, comprenant les provinces de Ninh-Binh, Nam-Dinh, Hung-Yen, HaïDzuong, Quang-Yen, Hanoi, Son-Tay, Bae-Ninh, avec une partie de celles de Hong-Hoa, Tuyen-Quan et Thai-Nguyen, ces plaines constituent, disons-nous, la région la plus fertile, la plus grasse et la plus populeuse de l'Indo-Chine orientale. La terre y est d'une incomparable fécondité. Un prodigieux réseau fluvial, formé par les branches divergentes des deux principaux fleuves et la multitude de canaux qui les relient, ouvre l'intérieur du pays à la navigation, assure en tout temps la facilité et le bon marché des transports. Les canonnières et les avisos de notre marine de guerre remontent toute l'année jusqu'à Hanoï, situé à plus de 100 kilomètres de la mer, el alteignent beaucoup plus haut à la saison des pluies. Sur une superficie de plus de 50,000 kilomètres carrés, tout est en culture, et la terre exubérante de fertilité fournit de plantureuses récoltes. La population pullule. Sa densité paraît comparable à celle des cantons les plus peuplés des Flandres belges et françaises. Elle est paisible, douce et suffisamment laborieuse. Les évaluations les plus modérées en portent le total à dix ou douze millions d'âmes. Le riz est la principale céréale des plaines du Tonkin; mais toutes les cultures des climats intertropicaux y réussissent admirablement. La région des montagnes qui s'étend au nord des deux deltas jusqu'aux frontières du Yunnan et du Kouang-Si, comprenant les provinces de Langson, Lao-Kaï, Caobang, abonde en forêts contenant des essences précieuses et en gisements métallifères.

M. l'ingénieur des mines Fuchs, envoyé en mission en 1881, a constaté la présence à proximité de la mer, d'un bassin houiller d'exploitation facile, qui fournirait le combustible minéral dans des conditions avantageuses. Nous avons à peine besoin d'insister sur l'importance commerciale et militaire pour notre marine, de l'existence de mines de charbon sur le littoral d'un territoire désormais soumis à la France. Mais les richesses naturelles du Tonkin ne sont pas le seul élément de prospérité économique de ce beau pays. Sa situation sur le flanc méridional de l'Empire chinois, confinant au Kouang-Si et au Yunnan, le pays du monde peut-être le plus riche en métaux, ouvrant à cette dernière province une voie vers la mer par la vallée du Fleuve Rouge, semble assurer au Tonkin un magnifique avenir commercial. On compte un peu plus

de 400 kilomètres de l'embouchure du Fleuve Rouge au Yunnan, La navigabilité du fleuve pour les barques et les jonques de rivière, devinée par Francis Garnier lors de l'exploration de la vallée du Mékong et du Yunnan, a été constatée et vérifiée par Jean Dupuis. Cette navigabilité n'est sans doute point parfaite; mais personne ue doute que la vallée du fleuve Rouge ne devienne, soit après des travaux de canalisation, soit par la construction d'une voie ferrée, la grande artère commerciale du Yunnan vers la mer. Le rétablissement de la paix, l'extermination des bandes de routiers, Pavillons noirs et autres, la mise en vigueur des stipulations du traité de Tien-Tsin ouvrant le Yunnan au commerce français par le Tonkin, semblent devoir déterminer un mouvement d'affaires destiné à devenir un jour considérable.

et

Le désordre, le pillage organisé, les invasions chinoises périodiques, l'incurie et la rapacité des mandarins annamites dans les vingt dernières années, ont réduit le Tonkin, si richement doué par la nature, à un état de pauvreté qui touche la misère. La population presque exclusivement agricole ne cherche guère à se procurer plus que la subsistance. La main d'œuvre abonde, et ne trouve pas toujours à s'occuper. L'industrie y est encore rudimentaire. L'épargne y est nulle parce qu'il n'y a pas de sécurité. Il n'y a guère d'exception que pour les mandarins dont plusieurs s'enrichissent d'exactions et pour quelques négociants chinois aisés. Cet état de choses changera, à mesure que des industriels et des négociants européens apporteront au Tonkin leur initiative et leurs capitaux; il se modifie dès à présent, de mois en mois, avec une surprenante rapidité. Il résulte de communications faites par M. le sous-secrétaire d'Etat aux colonies que diverses maisons de commerce ont envoyé déjà des agents au Tonkin; que des industriels vont étudier sur place les ressources du pays, et y fonder des établissements; que des artisans et de petits commerçants animés de l'esprit d'entreprise y émigrent journellement. Du mois de janvier au mois d'octobre dernier, le Ministère de la Marine avait accueilli les demandes en réduction de frais de passage au Tonkin d'environ 800 émigrants, en général chefs de famille, tous pourvus de quelques capitaux. Le port d'Haïphong, point de rencontre de la navigation maritime et de la batellerie fluviale, se développe rapidement. Une chambre de commerce française y est déjà constituée. Hanoï s'est complètement repeuplé. L'agglomération de population annamite y dépasse cent mille habitants; les maisons européennes commencent à s'y élever de toutes parts. On peut prévoir l'époque peu éloignée où le Tonkin présentera l'agglomération de population européenne la plus considérable de l'extrême-Orient. Le mouvement qui se produit avant même le règlement définitif des difficultés politiques et militaires est un gage de l'avenir réservé à la nouvelle colonie.

Ces considérations imposaient au Gouvernement de la République l'obligation d'établir au Tonkin un système de protectorat plus immédiat, assurant à l'autorité française une action plus directe et plus complète. De puissantes raisons d'ordre moral militaient dans le même sens. La terre que Francis Garnier et Henri Rivière, que les braves tombés à Hanoï, à Son-Tay, à Bac-Ninh, à BacLé, ont trempée de leur sang généreux, est terre désormais française. Ceux de nos compatriotes qui vont y apporter leur industrie ont le droit d'y trouver les mêmes garanties de sécurité et de liberté que dans nos colonies proprement dites. Nous assumons enfin aussi l'obligation d'exercer une tutelle civilisatrice sur les populations au milieu desquelles nous avons fait flotter le drapeau tricolore.

Le Gouvernement de la République a estimé que ces résultats pouvaient être obtenus sans prononcer l'annexion du Tonkin et même sans assumer l'administration directe des populations indigènes.

Voici les traits principaux de l'organisation proposée, tels qu'ils ressortent des faits existants et des stipulations du traité.

Au Tonkin, l'occupation militaire, par les forces françaises de terre et de mer, sera complète et permanente. Le soin de veiller à la défense du pays, à

la sûreté de ses frontières, au maintien de l'ordre intérieur, appartiendra donc exclusivement à l'autorité française.

Les citoyens et les protégés français pourront s'établir librement dans toute l'étendue du Tonkin, et non point comme en Annam dans les seuls ports ouverts; ils pourront y acquérir des biens meubles et immeubles, et en disposer, aller, venir, exercer des industries et commercer librement. Ils ne seront soumis qu'à la juridiction française. Les étrangers de toute nationalité seront de même soumis exclusivement à la juridiction de nos autorités. Le Gouvernement prépare un décret qui établira des justices de paix à compétence étendue dans les principales villes du Tonkin et un tribunal d'appel à Haïphong ou à Hanoi.

Les douanes et la régie des contributions indirectes (opium et alcool) seront, ainsi qu'il a été dit plus haut, exclusivement françaises, et dépendront de la direction supérieure de Saigon.

Le protectorat aura pour organe, au Tonkin, des résidents qui seront placés par le Gouvernement de la République dans tous les chefs-lieux de province et d'arrondissement où leur présence sera jugée utile. Le rôle des résidents français sera double. Ils auront d'une part la juridiction exclusive sur les citoyens français et les étrangers de tonte nationalité; ils seront les intermédiaires obligés de toute communication entre les fonctionnaires el employés français de tout ordre et les autorités indigènes; ils exerceront, d'autre part, un contrôle permanent sur les mandarins chargés de l'administration de la population tonkinoise.

L'article 6 stipule que les résidents habiteront, avec leur escorte militaire, dans la citadelle du chef-lieu et en tous cas dans l'enceinte réservée au mandarin; les articles 7 et 11 consacrent leur droit de contrôle sur tous les actes des administrateurs indigènes, notamment sur la perception et l'emploi de l'impôt ancien; et ce droit de contrôle a pour sanction, en vertu d'un paragraphe de l'article 7, la faculté de réquérir là révocation des fonctionnaires annamites de tout ordre qui devront être destitués sur la demande des autorités françaises.

Les résidents français, dans la pensée du Gouvernement, doivent être à la fois les promoteurs des améliorations et des progrès à introduire dans le système traditionnel de l'administration annamite, et les tuteurs, les protecteurs des populations et des communes contre les injustices et les exactions des mandarins. Votre Commission ne s'est pas dissimulé ce qu'il y a de délicat dans la juxtaposition des résidents français et de fonctionnaires indigènes, gouverneurs de provinces, juges, etc., nommés et investis par la cour de Hué. Il ne pouvait être question pour des raisons diverses de supprimer l'administration des indigènes par les mandarins annamites, mais il importait de se prémunir contre la nomination aux postes importants de mandarins hostiles. Il avait paru à plusieurs membres de la Commission que les précautions prises à cet égard n'étaient peut-être pas suffisuantes. M. le Président du Conseil a fait observer que le résident général de France à Hué exercerait un contrôle préventif sur toutes les nominations de mandarins faites pour les provinces du Tonkin par la cour de Hué, et qu'aucun choix ne serait effectué sans son agrément préalable.

La Commission prend acte de cette déclaration.

L'article 6 du traité porte que les résidents seront sous les ordres du résident général à Hué, mais il ne prévoit pas l'existence d'une autorité supérieure au Tonkin, centralisant les services et donnant l'impulsion administrative. M. le Président du Conseil, interrogé à ce sujet, a reconnu qu'il serait effectivement nécessaire d'instituer une autorité intermédiaire entre le résident général de Hué et les résidents placés dans les provinces tonkinoises. Il se propose, en conséquence, de placer à Hanoï ou à Haïphong un résident supérieur qui, tout en restant sous l'autorité de notre ministre à Hué, centralisera sur place la direction des affaires administratives du Tonkin.

Plusieurs membres de la minorité ont émis l'avis que le résident général, représentant la République en Annam, ait sa résidence à Hanoï,

Le Gouvernement estime que les dépenses administratives du protectorat au Tonkin seront promptement couvertes par les revenus fiscaux du pays. L'art. 11 du traité stipule que les produits de l'impôt ancien seront affectés aux diverses branches de l'administration et aux services publics. Le reliquat seul serait versé dans les caisses de la cour de Hué. Cet impôt ancien, qui s'acquitte actuellernent en nature, est susceptible de produire des plus values considérables par suite de réformes dans l'assiette et d'un contrôle plus rigoureux dans la perception. L'impôt ancien ne produisait en Cochinchine que 2,350,000 fr. en 1867; il dépassait six millions quelques années plus tard. En ce qui concerne les taxes indirectes, il y aura, ainsi qu'il a été dit plus haut, union entre le Tonkin, l'Annam et la Cochinchine. La perception directe par la régie de Cochinchine sera substituée au fermage des droits sur l'opium et sur les alcools. Les résultats obtenus en Cochinchine permettent d'espérer que le protectorat du Tonkin trouvera dans ce mode de perception une source abondante de revenus. Le produit de la ferme de l'opium et des alcools était, dans notre colonie de Cochinchine, de un million et demi de francs en 1867, pour une population d'environ quatorze ou quinze cent mille habitants; ce produit s'élevait, sept ans plus tard, à plus de cinq millions; cette année, après la substitution de la régie directe à la ferme, le rendement est prévu pour seize millions au budget colonial. La population du Tonkin est environ le sextuple de celle de la Cochinchine. Or, en supposant que la régie n'y produise pas plus au début que la ferme ne produisait en 1867 en Cochinchine, la recette probable ne s'élèverait pas moins à six millions de francs, somme suffisante pour couvrir les dépenses administratives du protectorat.

Mais ce ne sont évidemment là que des évaluations de début, essentiellement provisoires. Les résultats obtenus en Cochinchine nous fournissent pour l'avenir une base solide d'induction, et il nous est permis d'espérer un développement analogue. Le budget des recettes de la Cochinchine dépassait à peine cinq millions au total en 1867; il atteint 23 millions en 1884! Un progrès analogue accompli au Tonkin pourrait, eu égard à l'importance relative du pays, porter ses revenus à une centaine de millions.

Les objections opposées dans votre Commission à la ratification demandée portent sur la plus importante des modifications qu'ait subies le traité du 23 août 1883. La convention conclue par M. Harmand prononçait l'annexion à la Cochinchine de la province annamite de Binh-Thuan, située à l'extrémité sud du royaume, et rattachait au Tonkin les trois provinces de Ha-Tinh, Ngue-Ann et Thanh-Hoa qui en ont fait d'ailleurs historiquement partie, et que les géographes désignent encore sous le nom de Tonkin méridional. Le traité rectificatif du 6 juin 1884 ne ratifie pas l'annexion du Bin-Thuan à la Cochinchine et il laisse le Ha-Tinh, le Ngue-Ann et le Thang-Hoa sous l'administration directe de la cour de Hué. Ces provinces continuent de faire partie intégrante de l'Annam, et elles seront, par conséquent, soumises au même protectorat général que les autres territoires du royaume.

Le Gouvernement de la République s'est expliqué très nettement sur les raisons qui l'avaient déterminé à ne pas accepter sur ce point l'oeuvre du négociateur de 1883. L'annexion du Binh-Thuan à la Cochinchine ne présenterait, d'après le Gouvernement, aucun intérêt économique ou politique; elle serait onéreuse pour le Budget colonial, sans compensation suffisante. Quant au rattachement au Tonkin des trois provinces de Thanh-lloa, Nghe-Ann et Ha-Tinh, il aurait eu pour résultat de démembrer le royaume d'Annam des territoires les plus productifs qui lui restent, et de priver ainsi la cour de Hué de ressources indispensables. Les provinces du nord, particulièrement le Ngué-Ann et lo Thanh-Hoa participent en effet de l'abondance et de la fertilité du Tonkin. C'est de là que le Gouvernement annamite tire à présent le plus clair de ses revenus. Si le Gouvernement de la République avait eu pour objet de hâler la chute du royaume d'Annam et de le transformer à bref délai en possession directe de la France, il aurait ratifié le rattachement du Thanh Hoa au Tonkin; mais sa ferme

intention étant de maintenir l'Annam comme Etat subordonné, protégé, mais distinct et autonome, il estime juste et bon de lui laisser les moyens de vivre.

On a objecté, tout d'abord, à ces considérations, que la rétrocession du BinhThuan et des provinces du nord produirait une impression désavantageuse sur l'esprit des populations de l'Extrême-Orient, que notre modération et notre générosité seraient taxées de faiblesse, et qu'on verrait dans l'abandon de ces clauses du traité du 25 août, un pas en arrière, un recul de l'influence française. On a exprimé l'appréhension que les partisans de la France, dans ces provinces, ne soient victimes, de la part des mandarins de Hué, de persécutions et d'atroces vengeances; on a dit enfin que le Ngué-Ann et le Thanh-Hoa serviraient de refuge à tous les mécontents et les handits, qu'ils constitueraient aux portes du Tonkin proprement dit, un foyer permanent de désordre, de trouble et d'insurrection, et que nous serions finalement forcés de faire d'autorité ce que le traité du 25 août nous permettait d'accomplir avec l'agrément ou tout au moins la signature de la cour de Hué.

La majorité de votre Commission estime que ces considérations seraient de grand poids s'il s'agissait de rétrocéder à un royaume annamite absolument indépendant et hostile des provinces dont la France aurait déjà pris possession. Mais telle n'est pas la situation. L'annexion de Binh-Thuan n'a jamais été un fait accompli; notre drapeau n'y a pas été arboré; quant aux provinces du nord, bien qu'elles aient fait historiquement partie du Tonkin, elles n'ont jamais été, depuis le début de notre intervention, considérées comme tonkinoises; nos troupes n'y ont jamais mis les pieds, et les habitants n'ont point été dans le cas de se compromettre pour notre cause. Il faut noter toutefois que des persécutions violentes y ont été exercées récemment sur les chrétiens indigènes. Enfin, et c'est, selon nous, l'argument décisif, l'éventualité de l'hostilité du royaume annamite doit être écartée du débat. Le protectorat que nous établissons à Hué est un protectorat effectif, efficace; la subordination que nous imposons à la cour de Hué est une subordination réelle, positive et pratique. Le résident général de France à Hué est armé par le traité de pouvoirs suffisants pour exiger de la cour et des ministres du roi la fidélité à la France; il disposera, d'ailleurs, de moyens militaires suffisants pour couper court à toute velléité de conflit et pour châtier toute tentative de trahison. La clef des difficultés qui peuvent se produire est à Hué, el Hué sera dans la main du résident général. Voilà ce qu'il convient de ne pas perdre de vue si l'on veut apprécier sainement la situation nouvelle de l'Annam.

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D'un autre côté, notre droit d'occupation militaire de tous les points de l'Annam que nous jugerons utile ne comporte aucune restriction. Le gouvernement de la République aura donc le droit de placer une garnison, par exemple, au défilé des montagnes Deongang, vers le cap Vioung-Khina, point stratégique signalé avec instance par M. Harmand, et dont l'occupation permettrait d'interdire toute communication entre les trois provinces du nord et de l'Annam. M. le Président du Conseil a déclaré, d'ailleurs, que le Gouvernement n'hésiterait pas à user de ses droits dans l'éventualité de persécutions contre nos partisans, de troubles dans le Thanh-Hoa ou d'incursions au Tonkin de bandes rebelles parties de cette province. Votre Commission a pris acte de ces décla

rations.

Tout en approuvant la décision prise de laisser à l'Annani le Thanh-Hoa et le Nghe An, elle pense toutefois que ces provinces doivent être l'objet d'une attention spéciale, d'autant plus vigilante que les vallées qui les traversent de l'ouest à l'est paraissent ouvrir, d'après les récentes explorations du docteur Neïs, des voies de communication directes du golfe du Tonkin vers la vallée du Mékong, aboutissant à Luang-Prabang, point central d'une importance politique et commerciale exceptionnelle.

Quant au Binh-Thuan, il est avéré que son annexion à la Cochinchine n'aurait été, pour longtemps du moins, qu'une source de dépenses stériles, nullement compensées par des avantages politiques. Cette province constitue, à l'extrémité sud de l'Annam, une sorte de longue corniche entre les montagnes et la mer.

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