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L'Ambassadeur de France à Vienne, au Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères.

(Télégramme.)

Vienne, le 27 avril 1886.

J'ai reçu hier dans la soirée vos deux télégrammes, datés du 26. Aussitôt après les avoir reçus, j'ai adressé au Ministre des Affaires étrangères une communication écrite pour lui annoncer que M. Delyannis, avait promis à M. de Mouy de donner officiellement connaissance aux Représentants des Puissances, dans la journée même, de son adhésion à notre démarche. J'ai insisté en conséquence, comme vous le recommandiez, pour que la remise de la note collective fut tout au moins différée. Le comte Kalnoky m'a répondu ce matin par un billet particulier indiquant « qu'il avait appris dans la soirée d'hier par un télégramme d'Athènes que les Représentants des Puissances, ayant considéré la lettre de M. Delyannis à M. de Moüy comme insuffisante, avaient remis la Note collective à 6 heures du soir, comme leurs instructions le leur prescrivaient ». FOUCHER.

Le Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères,
au Ministre de France à Athènes.
(Télégramme.)

Paris, le 28 avril 1886.

Les Puissances considèrent que la communication de M. Delyannis à leurs Représentants à Athènes n'a pas été suffisamment explicite. Voici textuellement ce que me fait télégraphier Lord Rosebery : « Que M. Delyannis déclare nettement et sans ambages que, cédant aux conseils de la France (mots soulignés dans l'original), il prend l'engagement de désarmer à bref délai, et je me tiens pour satisfait. L'essentiel, pour nous, est que la déclaration soit catégorique et ne laisse pas la porte ouverte à de nouvelles revendications ». La conduite de M. Delyannis me paraît toute tracée. Il doit, à mon sens, s'appropriant les mots même du Ministre anglais, adresser immédiatement à vos Collègues la déclaration demandée. Son amour-propre ne peut en souffrir, car il constate par là même que sa résolution était prise et son engagement de désarmer connu avant toute intervention des Puissances et indépendamment de la remise de l'ultimatum. En se maintenant, au contraire, sur le terrain de sa Note protestative, mentionnée dans votre télégramme du 27 courant, M. Delyannis replace son pays dans la fausse situation d'où nous avions réussi à le tirer et l'expose aux plus graves périls. La solution, selon nous, est dans la proclamation nette et franche de l'attitude adoptée dimanche dernier, à la suite de nos démarches, et dans l'exécution rapide des mesures que cette attitude implique. C. DE FREYCINET.

Le Ministre de France à Athènes, au Président du Conseil,
Ministre des Affaires étrangères.

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Le Gouvernement grec, qui était tout disposé à commencer dès à présent le désarmement, ne veut pas le poursuivre sous le coup de l'ultimatum. Le Cabinet est violemment attaqué par la presse; une manifestation

peu considérable a eu lieu hier, mais on en annonce une autre pour aujourd'hui et l'irritation augmente.

Le Roi m'a fait demander ce matin. Sa Majesté ne s'explique pas pourquoi les Représentants des Puissances sont venus troubler tout à coup le règlement pacifique de la question grecque par une manifestation semblable. Maintenant, m'a-t-il dit, il est difficile de donner suite au désarmement tant que l'escadre restera à Phalère. »

Il faut, lui ai-je répondu, offrir aux Puissances la satisfaction qu'elles demandent. Si la Grèce, perdant le sang-froid, se livre à une irritation stérile, la situation ne peut se modifier. Il importe donc de répondre à la Note collective en sauvegardant à la fois la dignité du pays et la volonté des Puissances. En affirmant dans la réponse, en termes conciliants, la résolution prise librement par la Grèce dès dimanche dernier et, d'autre part, en expliquant nettement que cette décision implique la démobilisation dans un certain et bref délai, le Gouvernement atteint le double objet qu'il doit avoir en vue, qui est de ménager à la fois l'opinion publique et l'Europe. MOUY.

L'Ambassadeur de France à Londres, au Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères. (Télégramme.)

Londres, le 28 avril 1886.

J'avais écrit à Lord Rosebery pour lui communiquer la substance de votre télégramme de ce matin, et pour lui transmettre textuellement les paroles que je lui avais attribuées dans mon télégramme d'hier et que vous avez télégraphiées au Comte de Moüy.

Il vient de me répondre par le biliet suivant :

« Je vous remercie de votre lettre. J'espère de tout mon cœur que le télégramme de M. de Freycinet aura le succès qu'il mérite. >>

Il est très essentiel qu'on voie ici combien votre conduite a été conforme aux intérêts généraux de l'Europe, dont vous n'avez voulu vous séparer que sur une question d'exécution. Je me propose de lire votre télégramme en entier à Lord Rosebery. WADDINGTON.

Le Chargé d'Affaires de France à Saint-Pétersbourg, au Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères.

(Télégramme.)

Saint-Pétersbourg, le 28 avril 1886. L'Empereur a approuvé le Représentant de la Russie à Athènes de ne pas s'être séparé de ses Coliègues et de s'être associé à la remise de l'ultimatum.

M. de Vlangali incline à penser que la Déclaration remise par M. Delyannis aux Représentants des Puissances devait être conçue dans des termes trop vagues pour qu'ils aient cru pouvoir s'en contenter. J'ai fait remarquer à M. de Vlangali que si cette hypothèse explique la résolution prise par les Représentants des Puissances, elle ne la justifie pas complètement; car il aurait semblé plus naturel, en présence de la bonne volonté manifestée par le Gouvernement grec, de ne pas agir avec précipitation. TERNAUX-COMPANS.

Le Ministre Plénipotentiaire, chargé de la gestion intérimaire de l'Ambassade de France à Constantinople, au Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères.

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Hier, en audience solennelle, Sa Majesté m'a dit, après les discours d'usage: « Il m'est bien agréable de constater en toute occasion que la France se montre fidèle à ses traditions d'amitié envers la Turquie, et je la remercie de s'appliquer à résoudre pacifiquement les questions qui menacent à la fois le repos de mon Empire, ainsi que la paix de l'Europe ». Le Sultan m'a fait un accueil tout particulièrement affectueux.

MONTHOLON.

Le Ministre de France à Athènes, au Président du Conseil,
Ministre dos Affaires étrangères.

(Télégramme.)

Athènes, le 28 avril 1886, 11 h. 30 m. soir.

Je venais de quitter le Président du Conseil qui avait persisté à refuser de placer dans sa réponse à la Note collective le mot de « démobilisation » en affirmant que l'opinion publique tout entière serait soulevée par cette expression en présence de l'escadre, lorsque j'ai reçu ce soir votre télégramme de ce matin. J'ai demandé immédiatement à M. Delyannis un nouvel entretien. Je lui ai, suivant vos instructions, douné communication de votre télégramme. Il en a compris sur le champ la haute valeur, mais j'ai dù discuter avec lui de la manière la plus pressante pour lui faire apprécier la nécessité de se conformer exactement au texte de Lord Rosebery; les mots « désarmement à bref délai » ont soulevé ses objections: il voulait, eu égard à l'animosité de ses adversaires, atténuer ces expressions. Je l'en ai détourné catégoriquement. J'espère qu'il finira par admettre à peu près le mot « désarmement », mais il tient à mettre ensuite « dans le délai naturellement indiqué par la prudence pour une semblable opération. » Il dit que l'on ne peut exiger qu'il renvoie d'un seul coup 40,000 hom-mes et réclame un peu de temps en vue de l'ordre public et de l'organisation militaire. Je dois le revoir demain matin pour terminer.

MOUY.

Le Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères,
au Ministre de France à Athènes.

(Télégramme.)

Paris, le 29 avril 1886.

Une dépêche d'Athènes du 28 de ce mois, publiée par l'Agence Havas, rapporte que M. Delyannis aurait déclaré à une députation qu'il n'avait fait aucune promesse de désarmement à la France ou à une autre Puissance. mais qu'il avait simplement accepté la médiation de la France, à la condition que la question grecque fût prochainement réglée.

Je ne saurais croire que M. Delyannis ait tenu un pareil langage, qui est en opposition formelle avec les assurances mentionnées dans votre télégramme du 26 avril soir, et d'après lesquelles « la démobilisation et

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la mise sur le pied de paix étaient implicitement contenues dans l'adhésion à la communication française. »

Veuillez appeler l'attention du Ministre des Affaires étrangères sur les inconvénients qu'il y aurait à donner prétexte à de pareilles interprétations et faites-moi connaitre sa réponse. C. DE FREYCINET.

L'Ambassadeur de France à Londres, au Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères.

Londres, le 29 avril 1886.

J'ai donné à Lord Rosebery lecture du télégramme que vous avez adressé à M. de Mouy pour presser M. Delyannis de s'exécuter franchement. Je lui ai fait sentir combien votre conduite avait été nette et correcte, et je l'ai mis en garde contre les nouvelles des journaux et les paroles qu'ils mettent dans la bouche de M. Delyannis.

Lord Rosebery m'a répété que rien ne pouvait être plus utile à la cause commune que votre télégramme, et qu'il espérait vivement le succès de votre démarche. Répondant à mes questions, il m'a confirmé que les Représentants des Puissances à Athènes avaient remis l'ultimatum en vertu d'instructions antérieures et sans en avoir demandé de nouvelles; il a ajouté que leur conduite avait été approuvée par leurs Gouvernements respectifs. Depuis lors il ne paraît pas y avoir eu de nouvelles communications entre M. Delyannis et les Représentants des Puissances. Lord Rosebery m'a lu un télégramme de Sir H. Rumbold qui confirme la nouvelle de la circulaire adressée aux Préfets par M. Delyannis et dans laquelle l'attitude que vous avez prise se trouverait dénaturée. WADDINGTON.

Le Ministre de France à Athènes, au Président du Conseil,
Ministre des Affaires étrangères.

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Le Gouvernement grec n'a pas consenti malgré mes instances réitérées à insérer textuellement dans sa réponse à la Note collective les expressions indiquées par Lord Rosebery.

Le Conseil des Ministres a décidé la rédaction de la réponse suivante, qui est adressée ce soir à mes Collègues.

Ce document, après l'accusé de réception, continue ainsi : « Le Gouvernement Royal, en se référant à sa Note identique du 14/26 adressée à Leurs Excellences, etc., et à M. le Chargé d'affaires de Russie, avant la remise de leur Note collective du même jour, croit devoir ajouter l'explication suivante Le Gouvernement Royal ayant adhéré aux conseils de la France, d'après la Note identique précitée, adressée à Leurs Excellences et au Chargé d'affaires de Russie, avant la remise de la Note collective du 11/26 avril, a donné par cette adhésion l'assurance solennelle que la Grèce ne troublera pas la paix, conformément aux désirs des Puissances.

La conséquence de cette adhésion est que la Grèce ne gardera pas sous les drapeaux l'effectif actuel de l'armée. Conséquemment, son Gouvernement procèdera à la réduction graduelle de cet effectif dans les délais imposés par la prudence indispensable dans une pareille opération. »

MOUY.

Le Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères, au Ministre de France à Athènes.

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L'esprit de la réponse que M. Delyannis a adressée hier aux Représentants des Puissances semble assez satisfaisant. J'aurais désiré toutefois que le Cabinet hellénique, se rendant à vos avis, se rapprochat davantage de la formule anglaise. Il est bien souhaitable que M. Delyannis, de son côté, procède rapidement aux mesures effectives de désarmement.

Je me plais à espérer que les Puissances prendront en considération la situation difficile du Gouvernement Royal et que toute complication sera C. DE FREYCINET.

définitivement écartée.

Le Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères, au Ministre de France à Athènes.

(1élégramme.)

Notre Ambassadeur à Londres me télégraphie :

(Suit le texte. Voir ci-dessus.)

Paris, le 30 avril 1886.

Je vous prie de vouloir bien provoquer d'urgence de M. Delyannis une explication catégorique. Sans lui lire le télégramme même de M. Waddington et sans mettre en avant la personne de Lord Rosebery, vous l'entretiendrez des faits susmentionnés. Vous protesterez énergiquement contre le caractère attribué à nos démarches. Vous lui rappellerez que nous n'avons pris envers la Grèce aucun engagement quelconque ni accepté aucune espèce de condition. Vous vous êtes borné à lui donner des assurances générales de notre bon vouloir, assurances qui étaient, d'ailleurs, superflues, car il ne pouvait en douter. Vous apprécierez dans quelle mesure il conviendrait de donner une certaine publicité à votre protestation et sous quelle forme vous pourriez rectifier les fausses allégations qui se produisent afin d'en arrêter les fâcheux effets. C. DE FREYCINET.

Le Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères, aux Représentants de la République à Berlin, à Constantinople, à Londres, à Saint-Pétersbourg, à Rome et à Vienne.

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L'Ambassadeur d'Autriche-Hongrie m'a entretenu aujourd'hui des affaires de Grèce. Au cours de la conversation, il a fait allusion à certaines paroles attribuées à M. Delyannis, qui tendraient à subordonner le désarmement à la réalisation d'engagements pris par la France. Il aurait même été question d'une médiation à exercer par elle. L'Ambassadeur d'Autriche exprimait le regret que notre rôle fût ainsi dénaturé. Je l'ai remercié de son sentiment et j'ai démenti catégoriquement tout engagement de notre part. Nous nous sommes bornés à faire parvenir au Cabinet hellénique des assurances générales de bon vouloir qui n'étaient que la paraphrase du dernier paragraphe de la déclaration lue par M. de Mouy à M. Delyaunis le 23 avril. J'ai ajouté que ce matin même j'avais télégraphié à M. de Moüy

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