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Le Chargé d'Affaires de France à Saint-Pétersbourg, au Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères.

Saint-Pétersbourg, le 20 avril 1886.

A la suite de la circulaire que la Porte a adressée aux Puissances pour leur demander d'intervenir auprès de la Grèce pour qu'elle désarme saus retard, M. de Vlangali fait savoir au Gouvernement ottoman que le Gouvernement impérial était disposé, pour sa part, à inviter son Agent à Athènes à renouveler ses précédentes instances et à prendre part à toute démarche collective qui aurait pour objet d'adresser au Gouvernement grec des observations répondant au légitime désir de la Porte.

TERNAUX COMPANS.

Le Chargé d'Affaires de France à Saint-Pétersbourg, au Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères.

(Télégramme.)

Saint-Pétersbourg, le 20 avril 1886.

On a reçu ici des informations analogues à celles qui sont parvenues à Votre Excellence au sujet de la Crète.

Quant aux observations qu'il conviendrait d'adresser à ce sujet au Cabinet d'Athènes, je crois que M. de Vlangali est tout disposé à s'associer aux démarches qui seraient faites par les Puissances.

Il m'a dit que le Gouvernement britannique, ému de l'attitude prise par le Gouvernement grec, serait disposé à prendre l'initiative d'une proposition aux Puissances, qui aurait pour objet d'exercer une action collective sur le Gouvernement grec en vue d'un désarmement. En cas de refus, les Représentants des Puissances devraient être rappelés, et les flottes combinées bloqueraient la côte orientale et le golfe de Corinthe. Des ouvertures dans ce sens auraient été faites à Londres à M. de Staal. Sir E. Morier, dans un entretien avec M. de Vlangali, aurait exprimé l'avis que le blocus devrait être appliqué non sculement aux navires de guerre grecs, mais encore aux navires marchands. Il y aurait exception pour les bâtiments étrangers. TERNAUX-COMPANS.

Le Ministre Plénipotentiaire, chargé de la gestion intérimaire de l'Ambassade de France à Constantinople, au Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères.

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A sa réception de ce jour, le Ministre des Affaires étrangères m'a parlé de la Crète. Je lui ai répondu que le Gouvernement de la République réprouvait complètement les agissements qui s'y produisaient et que Votre Excellence avait chargé M. de Mouy de s'exprimer dans ce sens auprès de M. Delyannis. Il vous en est très reconnaissant. M. de Nélidow lui a dit. de son côté, qu'il avait invité par le télégraphe son Agent à la Canée à déclarer que le Gouvernement russe désire sincèrement la paix et qu'il désapprouve toute manifestation individuelle ou publique de nature à exciter les esprits entre la Turquie et la Grèce. MONTHOLON.

Le Ministre de France à Athènes, au Président du Conseil,
Ministre des Affaires étrangères.

(Télégramme.)

Athènes, le 21 avril 1886. J'ai signalé aujourd'hui à M. Delyannis la fàcheuse impression que produisaient certains faits imputés au Consul grec de la Canée. Le Président du Conseil en a contesté l'exactitude en assurant que son Agent avait des instructions contraires. Il a ajouté que, par déférence pour nos conseils, il allait renouveler en ce sens les recommandations les plus fermes. Mes Collègues n'ont reçu jusqu'à présent aucune direction à cet égard de leurs Gouvernements.

Je crois toujours que M. Delyannis désire éviter la guerre et que la Porte ne le souhaite pas moius.

On pourrait encore amener une solution amiable, si rien d'imprévu ne survient. MOUY.

Le Chargé d'Affaires de France à Saint-Pétersbourg, au Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères.

(Télégramme.)

Saint-Pétersbourg, le 21 avril 1886. M. de Giers a télégraphié de Livadia à M. de Vlangali que le Gouverncment impérial adhérerait aux deux points principaux de la proposition anglaise l'ultimatuin et le blocus; mais sous cette réserve que le Commandant des forces russes conserverait sa pleine liberté d'action. En d'autres termes, la Russie est disposée à associer ses efforts à ceux des autres Puissances pour obtenir que la Grèce procède à un désarmement immédiat, sans toutefois aller jusqu'à des actes d'hostilité.

TERNAUX-COMPANS.

L'Ambassadeur de France à Londres, au Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères.

(Télégramme)

Londres, le 21 avril 1886.

Le Ministre des Affaires étrangères me fait savoir que son projet de note à adresser au Gouvernement grec a été accepté par l'Italie et l'Allemagne ; il attend d'un jour à l'autre l'acceptation de l'Autriche. Il compte sur le concours effectif de ces trois Puissances. Il croit que la Russie s'associera à la présentation de la note. Il m'a déclaré que le moment d'agir était venu et qu'il était décidé à agir. L'Ambassadeur de Russie m'a dit hier que son Gouvernement ne cesserait pas de tenir au Cabinet grec le langage le plus énergique dans le sens du désarmement.

L'Ambassadeur d'Italie m'a dit que son Gouvernement s'était rallié à la note anglaise. WADDINGTON.

Pro Memoria remis par lord Lyons à M. de Freycinet

le 22 avril 1886.

La question turco-bulgare ayant été heureusement menée à fin par l'action

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unie des Grandes Puissances, la seule menace qui subsiste pour la paix de l'Europe est l'attitude hostile de la Grèce envers la Porte.

Le Gouvernement hellénique a continué ses préparatifs militaires en dépit d'avertissements solennels et répétés, et tous les moyens pacifiques de l'amener à mettre ses armements sur le pied de paix ont été épuisés.

Dans ces circonstances, le Gouvernement de Sa Majesté considère comme arrivé le temps où les Puissances sont appelées, dans l'intérêt de la paix, à adopter des mesures calculées pour mettre un terme à l'état de tension créé par le refus de la Grèce de se conformer aux désirs des Puissances.

En conséquence, le Gouvernement de Sa Majesté désire soumettre à l'examen des Puissances les mesures ci-après qui ont pour objet d'atteindre le but désiré. Le Gouvernement de Sa Majesté proposerait :

1° Qu'une note collective fût présentée au Gouvernement hellénique par les Représentants des Puissances à Athènes, dans les termes du projet ci-annexé, invitant la Grèce à réduire, sans délai, son armée au pied de paix et à donner l'assurance, dans la semaine, que des ordres conformes ont été promulgués ;

2o Qu'un navire de guerre de chacune des Puissances représentées à la baie de Suda se rendrait au Pirée et y resterait en attendant la réponse du Gouvernement grec, afin de donner aux Représentants des Puissances telle assistance et de prendre telle mesure qu'ils pourraient demander;

3° Que, dans le cas où la Grèce n'enverrait pas dans le délai fixé une réponse satisfaisante à la Note collective, les Représentants des Puissances demanderaient leurs passeports et s'embarqueraient immédiatement à bord des navires de guerre portant leurs pavillons respectifs;

4° Que les Commandants de ces navires notifieraient alors au Gouvernement grec qu'ils ont reçu l'ordre d'établir le blocus de la côte Est de la Grèce et du golfe de Corinthe contre tous les bâtiments grecs, et que tous les vaisseaux grecs qui tenteraient de violer ce blocus deviendront sujets à capture;

5° Qu'immédiatement après cette notification, les Escadres alliées commenceraient à agir d'après sa teneur.

ANNEXE

Les soussignés, Représentants d

sont chargés par leurs Gouvernements respectifs d'adresser au Cabinet d'Athènes la déclaration suivante :

<< Les préparatifs militaires que la Grèce persiste à continuer, malgré les instances solennelles et réitérées des Puissances, pèsent gravement sur une Nation voisine et amie, et constituent aujourd'hui le seul danger qui menace la paix de l'Orient.

«Tous les moyens de conciliation auxquels les Puissances ont eu recours pour amener la Grèce à se conformer aux vœux pacifiques de l'Europe ayant échoué, les Gonvernements précités, résolus de maintenir les engagements qu'ils ont pris entre eux aussi bien qu'envers la Turquie, se trouvent dans la nécessité d'imposer un terme à cet état de choses. Eu conséquence, les soussignés, par ordre de leurs Gouvernements respectifs, invitent le Cabinet d'Athènes à mettre l'armée hellénique sur le pied de paix dans le plus bref délai, et à leur donner l'assurance, dans le cours d'une semaine à dater de la présente Déclaration, que des ordres conformes ont été promulgués.

Si, à l'expiration de ce terme, les soussignés ne recevaient pas de réponse, ou en cas qu'elle ne soit pas satisfaisante, la responsabilité des conséquences qu'entrainerait ce refus retomberait tout entière sur le Gouvernement hellénique. >>

Le Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères,
à l'Ambassadeur de France à Londres.

(Télégramme.)

Paris, le 22 avril 1886

L'Ambassadeur d'Angleterre vient de me remettre le projet de Note collective que vous m'aviez annoncé, et dont vous connaissez vraisemblablement le texte. J'ai revu lord Lyons aujourd'hui, et je lui ai donné ma réponse après avoir consulté mes Collègues. Je lui ai dit que la démarche n'était peut-être pas très opportune, surtout en la forme où on la projetait; qu'on aurait gagné sans doute à ménager davantage les susceptibilités des Grecs, et que, si j'avais à rédiger la note, j'empleierais des termes différents, tout en lui laissant la même fermeté de fond; mais que je ne pouvais prétendre à remanier un document qui paraissait déjà accepté de plusieurs Puissances et que je me bornerais à deux corrections qui me semblaient indispensables. Ce sont: 1° la suppression de la phrase incidente « résolus de maintenir les engagements qu'ils ont pris entre eux, aussi bien qu'envers la Turquie » ; j'ai dit à lord Lyons que, par là, les Puissances se donLaient l'air d'avoir formé une sorte de coalition contre la Grèce; lord Lyons a reconnu la justesse de mon observation; 2o le remplacement du mot imposer par fixer; lord Lyons a également apprécié cette correction.

En outre, mais ceci est de pure forme, j'ai proposé de supprimer les mots : ou en cas qu'elle ne soit pas.

Lord Lyons m'a demandé ensuite ce que ferait le Gouvernement français relativement au blocus éventuel et au rappel des agents. Je lui ai dit que, pour le blocus, le sentiment public en France ne nous permettrait pas d'y prendre part; que quant au rappel de M. de Moüy, nous examinerions. C. DE FREYCINET.

Le Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères,
au Ministre de France à Athènes.

(Télégramme)

Paris, le 22 avril 1886.

Veuillez demander immédiatement une entrevue officielle à M. Delyannis, et lui donner lecture de la Déclaration suivante :

« La France a donné à la Grèce des marques non équivoques de son amitié. Dans ces derniers temps, elle lui a adressé, à diverses reprises, des conseils dictés par la plus sincère sympathie. Aujourd'hui, sous « l'influence du même sentiment, elle croit devoir lui faire entendre un « solennel avertissement.

L'attitude actuelle de la Nation grecque l'expose aux plus graves « périls. En y persistant, elle court au-devant d'une catastrophe ou d'une humiliation. Sans vouloir préjuger les résolutions de l'Europe, nous << sommes certains qu'elle opposera une barrière aux entreprises que la Grèce pourrait former contre la Turquie. Bientôt, sans doute, les Puissances notifieront cette volonté au Cabinet hellénique et le mettront en • demeure de renoncer à ses armements. A ce moment, quelle sera sa • situation? Ne sera-t-il pas obligé, un peu plus tôt ou un peu plus tard, d'obtempérer à cette injonction? Nous voudrions éviter cette pénible • extrémité à la Grèce ; c'est pourquoi nous venons dire à son Gouverne⚫ment : « Rendez-vous à l'évidence, écoutez la voix d'une Puissance

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« amie, suivez des conseils qui n'ont rien de blessant pour votre amour« propre. Prenez, pendant qu'il en est temps encore, une initiative dont vous êtes les maitres et dont vous aurez tout le mérite. »

«Nous ajouterons que, si des jours plus favorables doivent luire pour « la Grèce, son Gouvernement les préparera par cette attitude prévoyante « dont l'Europe entière lui saura gré. Nous-mêmes, nous n'oublierons pas qu'en déférant à nos vœux, la Grèce nous aura épargné le chagrin de nous associer à des démarches d'un tout autre caractère, auxquelles notre « constant souci de la paix générale nous interdit de refuser ce concours. Vous laisserez à M. Delyannis copie de cette déclaration.

C. DE FREYCINET.

Le Ministre de France à Athènes, au Président du Conseil,
Ministre des Affaires étrangères.

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Selon vos instructions, j'ai donné lecture et laissé copie à M. Delyannis de votre dépêche d'hier en faisant ressortir la solennité de la démarche dont j'étais chargé. Le Président du Conseil m'a prié de vous exprimer toute sa gratitude pour ce témoignage d'intérêt et de bienveillance. Il a insisté à plusieurs reprises sur la haute influence que cette Déclaration doit exercer sur le Gouvernement et le pays. Il m'a demandé de ne répondre qu'après avoir conféré avec le Conseil des Ministres, ed ajoutant qu'en l'absence du Ministre de la Guerre, il ne pourra me faire connaitre une décision avant lundi soir. J'ai exprimé mon regret de ce retard, mais M. Delyannis ne veut pas préjuger l'avis d'un Coilègue aussi considérable dans le Cabinet. Lui-même m'a paru irès ému, mais indécis. Il prétend craindre que l'opinion ne lui reproche de reculer sans avoir rien obtenu. Il a paru penser que bien des gens préféreraient ne céder qu'à la force. Il eût évidemment désiré des assurances en faveur des intérêts helléniques. J'ai insisté alors en termes sobres, et en me référant à l'autorité supérieure de votre télégramme, sur les avantages d'une décision pacifique immédiate, motivée par les considérations les plus graves et par les démarches péremptoires d'une Puissance particulièrement investie du respect et de la confiance de la Grèce.

J'ai fait remarquer que si la Grèce ne cède qu'à la force, elle restera sous le coup du mécontentement des Puissances, tandis qu'une solution amiable, gardant au pays la bienveillance de l'Europe, est plus rassurante pour l'avenir.

Cet argument de votre télégramme a particulièrement frappé le Président du Conseil. Il m'a dit, en terminant, qu'il allait communiquer au Roi, ce soir ou demain matin, le texte que je lui avais remis.

MOUY.

Le Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères,
à l'Ambassadeur de France à Londres.

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L'Ambassadeur d'Angleterre m'a annoncé ce matin que la première modification réclamée par moi dans le projet de Note collective avait été intro

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