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grands corps de l'État, mais encore de ses correspondances intimes et toutes personnelles, soit avec les membres de sa famille, soit avec les dignitaires de l'Empire, soit avec tous ces hommes d'élite, généraux, administrateurs, savants, industriels, qu'il aimait tant à entretenir et à encourager.

Votre Majesté a pensé, Sire, qu'il était d'un haut intérêt national de recueillir et de coordonner cette correspondance aujourd'hui éparse dans les dépôts publics et dans quelques mains particulières. Les hommes d'État, les administrateurs, les historiens y trouveront les plus utiles enseignements, et ce seront autant de matériaux précieux pour le monument que la France élèvera plus tard à la gloire de Napoléon Ier par la publication de ses œuvres immortelles.

Pour répondre aux intentions de Votre Majesté, j'ai l'honneur de lui proposer la nomination d'une Commission, qui sera chargée de réunir et de classer la Correspondance de l'Empereur, et d'en surveiller la publication.

Je suis avec respect,

SIRE,

De Votre Majesté,

Le très-humble et très-obéissant serviteur et très-fidèle sujet,

ACHILLE FOULD.

DÉCRET.

NAPOLÉON, par la gràce de Dieu et la volonté nationale, EMPEREUR

DES FRANÇAIS,

A tous présents et à venir, SALUT.

AVONS DÉCRÉTÉ ET DÉCRÉTONS ce qui suit :

ARTICLE PREMIER.

Une commission est instituée pour recueillir, coordonner et publier la correspondance de notre auguste prédécesseur Napoléon I", relative aux différentes branches d'intérêt public.

ᎪᎡᎢ. 2.

Cette commission est ainsi composée :

MM. le maréchal VAILLANT, notre ministre de la guerre, grand maréchal du palais, membre de l'Institut, président;

Le baron DUPIN (Charles), sénateur, membre de l'Institut, vice-président;

Le comte BOULAY DE LA MEURTHE, sénateur;

P. MERIMÉE, sénateur, membre de l'Institut;

Le général de division AUPICK, sénateur;
Armand LEFEBVRE, conseiller d'État;

DE CHABRIER, directeur général des archives de l'Empire;
CHASSÉRIAU, maître des requêtes au Conseil d'État ;

PERRON, chef de section au ministère d'État.

ART. 3.

Notre ministre d'État est chargé de l'exécution du présent décret.

Fait à Boulogne, le 7 septembre 1854.

NAPOLÉON.

Par l'Empereur :

Le Ministre d'État,

ACHILLE FOULD.

Par d'autres décrets, en date des 10, 30 septembre et 24 octobre 1854, ont été nommés membres de la commission :

M. CUCHEVAL-CLARIGNY;

M. le général de division baron PELET, sénateur;

M. le général de division comte DE FLAHAUT, sénateur;

M. le comte Jérôme-Paul DE CHAMPAGNY, député au Corps Législatif.

RAPPORT DE LA COMMISSION

A L'EMPEREUR.

SIRE,

Auguste mit César au nombre des dieux et lui dédia un temple : le temple a disparu, les Commentaires sont restés. Votre Majestė, voulant élever au chef de sa dynastie un monument impérissable, nous a ordonné de recueillir et de publier la Correspondance politique, militaire et administrative de l'Empereur Napoléon Ier. Elle a compris que le plus éclatant hommage à rendre à ce génie incomparable était de le faire connaître tout entier. Nul n'ignore ses victoires, les lois dont il a doté notre pays, les institutions qu'il a fondées et qui demeurent immobiles après tant de révolutions; ses prospérités et ses revers sont dans toutes les bouches; l'histoire a raconté ce qu'il a fait, mais elle n'a pas toujours connu ses desseins; elle n'a pas eu le secret de tant de combinaisons admirables que la fortune a déjouées, de tant de grands projets à l'exécution desquels le temps seul a manqué. Les traces de la pensée de Napoléon étaient dispersées; il fallait les réunir et les mettre en lumière.

Telle est la tâche que Votre Majesté nous a confiée et dont nous étions loin de soupçonner l'étendue. Les milliers de lettres que nous avons recueillies de toutes parts nous ont permis de suivre, malgré quelques regrettables lacunes, la pensée de Napoléon jour par jour, et d'assister, pour ainsi dire, à l'enfantement de ses projets, au travail incessant de son esprit, qui ne connut d'autre

délassement que le changement d'occupation. Mais ce que la lecture d'une correspondance si variée offre de plus surprenant peut-être, c'est la puissance de cette intelligence universelle à qui rien n'échappe, qui tour à tour s'élève sans effort aux plus sublimes conceptions et qui descend avec la même facilité jusqu'aux derniers détails. Tantôt, planant sur le monde, Napoléon y trace les limites de nouveaux États, tantôt sa sollicitude se porte sur le plus humble hameau de son empire; son coup d'œil embrasse les questions dans leur ensemble, y plonge dans tous les sens et en pénètre les moindres parties. Rien ne lui semble indigne de son attention dès qu'il s'agit de réaliser ses desseins, et ce n'est pas assez pour lui de donner les ordres les plus précis, il en surveille lui-même l'exécution avec une persévérance infatigable.

Les lettres de Napoléon ne peuvent ajouter à sa gloire; mais elles font mieux comprendre sa prodigieuse destinée, le prestige qu'il exerça sur ses contemporains, le culte universel dont sa mémoire est l'objet, enfin, l'entraînement irrésistible par lequel la France a replacé sa dynastie au sommet de l'édifice qu'il avait construit.

Ces lettres présentent encore l'enseignement le plus fécond. Aussi est-ce dans une vue d'utilité générale que Votre Majesté a conçu le projet d'une publication, qui, toujours sérieuse et pratique, s'adresse aux peuples comme aux gouvernements, aux militaires et aux hommes d'État non moins qu'aux historiens. Peut-être quelques personnes, avides de connaître jusqu'aux moindres particularités de la vie intime des grands hommes, regretteront-elles que nous n'ayons pas reproduit des lettres qui, publiées ailleurs pour la plupart, n'ont trait qu'à des relations de famille et à des affaires domestiques. Rassemblées par nous comme les autres, elles n'ont pu trouver place dans le plan dont Votre Majesté nous a fixé les limites.

Hâtons-nous de déclarer que, conformément aux intentions expresses de Votre Majesté, nous nous sommes scrupuleusement interdit, dans la reproduction des lettres de l'Empereur, toute altération, tout retranchement, toute modification des textes. Quelquefois, pensant aux légitimes douleurs que doit causer un

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