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des parties sur lesquelles ils sont appliqués, en un temps plus ou moins long, selon la nature du poison, la durée du contact, son degré de concentration, sa plus ou moins grande solubilité; selon la nature du tissu, son état normal, morbide, etc. L'effet local est prompt, intense, avec les poisons solubles et concentrés, les acides, les alcalis minéraux, les chlorures, les nitrates de la 4me section; lent au contraire, méme nul ou peu appréciable, avec les poisons neutres, très-étendus, peu solubles. Il est aussi bien plus marqué sur les muqueuses, les plaies récentes, que sur la peau, les plaies anciennes, suppurantes, calleuses. Si le poison épuise son action sur le lieu même, il produit la destruction du tissu ou de l'organe, des cicatrices dif formes, rarement la mort, à moins que la réaction fébrile symptomatique ne soit très-intense, qu'il ne survienne une suppuration, une hémorragie consécutives, qui épuisent les malades (voyez Poisons acides, alcalins). En général, surtout avec les poisons qui n'ont pas un effet caustique immédiat, les liquides qui affluent vers ces parties les dissolvent, affaiblissent leur action caustique, et ils pénètrent ainsi peu à peu dans les tissus circonvoisins, les vaisseaux qui en partent, en déterminent la tuméfaction, l'inflammation, donnent lieu à une réaction fébrile trèsintense, avec soif, chaleur, anxiété générale, et si c'est au voisinage du cerveau, à des symptômes nerveux plus ou moins graves (voyez Arsenic ). Quelle que soit la voie d'introduction, le poison, une fois qu'il a pénétré dans la grande circulation, développe les mêmes effets constitutionnels, même du côté du tube intestinal, que dans les cas d'empoisonnement interne; fait important, capital, pour la direction à donner au traitement.

Les poisons inorganiques, introduits dans le tube intestinal, donnent lieu à des effets locaux de même nature que sur la peau, d'autant plus prompts, plus intenses que les parties offrent une texture plus délicate, sont plus anfrac

tueuses par conséquent, que le contact est plus prolongé. Mais étant dilués, affaiblis par les matières alimentaires, les liquides sécrétés, et le vomissement, le mouvement péristaltique s'opposant à ce qu'ils séjournent longtemps sur le même lieu, toutes les parties du tube intestinal ne sont pas cautérisées; aussi est-il excessivement rare qu'il ne se manifeste pas, en outre, des effets constitutionnels, dus à l'absorption du poison, et bien plus promptement que lorsque celui-ci est appliqué à l'extérieur.

Les effets locaux sur les muqueuses buccale, pharangée, œsophagienne, sont ordinairement peu intenses, même nuls ou bornés à une saveur spéciale, âcre, avec les poisons peu solubles, très-dilués, ou dont l'effet caustiqne est lent à se produire, surtout s'ils sont mélangés aux matières alimentaires. Au contraire, avec les poisons caustiques, les effets en sont presque immédiats et très-intenses. Ils consistent en une sensation de cuisson, de chaleur âcre, brûlante, caustique. Ces parties sont comme brûlées, cautérisées, elles s'enflamment, se tuméfient; l'escarre prend une couleur spéciale, grisâtre, noire ou jaune, se détache en lambeaux. Les sécrétions muqueuse et salivaire sont considérablement augmentées. L'inflammation, la tuméfaction s'étendent quelquefois jusqu'aux parties supérieures du larynx, d'où gêne plus ou moins grande de la respiration, et, dans quelques cas, menace d'asphyxie assez inquiétante pour nécessiter l'opération de la trachéotomie (poisons acides). L'effet est moins marqué sur l'œsophage, à cause de sa perpendicularité; cependant, avec les acides, les alcalis concentrés, il est quelquefois tellement cautérisé, rétréci, que la déglutition, les vomissements deviennent impossibles.

L'arrivée du poison dans l'estomac est accusée par une douleur âcre, brûlante à la région épigastrique, que la pression augmente, par des nausées, des rapports, des efforts de vomissements, la constriction du pharynx, des

vomissements d'abord de matières alimentaires, offrant des traces du poison, puis muqueuses ou bilieuses, et quelquefois sanguinolentes, ou mêlées à des pseudomembranes. Il est rare que l'effet des poisons inorganiques se borne à l'estomac, à la partie supérieure du tube intestinal; le plus souvent il y a des coliques, acompagnées de selles diarrhéiques, avec ou sans épreintes, plus rarement de constipation. Les matières des selles, fécales d'abord, puis aqueuses ou bilieuses, sont aussi quelquefois sanguinolentes, renferment des traces de poison, des pseudomembranes.

Les phénomènes gastro-intestinaux, mème lorsque le poison est appliqué à l'extérieur, sont le plus constants, manquent rarement. Les rapports s'observent dans l'empoisonnement par les poisons qui, par réaction chimique sur les aliments, les tissus, donnent lieu à des produits gazeux (acides azotique, hypo-azotique, chloroazotique), par les carbonates, les sulfures alcalins, lesquels sont décomposés par les acides de l'estomac; enfin par les poisons volatils ou ayant une odeur spéciale (cuivre, étain, etc.) Les vomissements peuvent manquer ou cesser par suite des contractions spasmodiques, du rétrécissement de l'œsophage, alors la déglutition est impossible; par la perforation de l'estomac, des intestins, en ce cas, les matières passent dans la cavité péritonéale, et il existe des symptômes d'une péritonite très-intense; ou bien par l'épuisement du malade. La douleur est d'autant plus vive, plus aiguë, que les parties sont plus irritées, plus superficiellement enflammées. Elle manque même à la pression, ou est très-obscure, lorsque le poison a cautérisé profondément les tissus, en a détruit la sensibilité. Ce défaut de douleur, ce calme apparent, pourraient en imposer pour une amélioration trompeuse, si on ne tenait compte de l'état général. Dans l'empoisonnement par les acides concentrés, les préparations plombiques, moins souvent par

les préparations arséniales, il y a quelquefois constipation. Les pseudomembranes, le sang dans les matières des vodans missements et des selles, ne s'observent guère qne l'empoisonnement par les poisons caustiques. Cependant, la présence du sang n'est pas toujours en rapport avec la causticité du poison; elle peut dépendre, en outre, de la liquéfaction de ce liquide, de sa transudation à travers la muqueuse gastro-intestinale. Il est des cas, tout à fait exceptionnels, où les effets gastro-intestinaux ont consisté en un sentiment d'oppression, une douleur obtuse à la région épigastrique (arsenic). Les symptômes de péritonite ne s'observent guère que lorsqu'il y a épanchement de matières dans la cavité abdominale.

Les EFFETS GÉNÉRAUX, dynamiques ou constitutionnels, manquent rarement dans l'empoisonnement par les poisons inorganiques, et se développent d'autant plus promp tement que le poison a été appliqué sur une surface plus absorbante. Ils sont de deux ordres : les uns, qui constituent la première période de l'intoxication, dépendent de l'effet local du poison, de son passage en petite quantité dans le sang. De nature inflammatoire, ils sont caractérisés, comme du reste toutes les réactions fébriles, par de l'anxiété, un malaise général, de la soif, de la chaleur, la fréquence, la dureté du pouls, l'accélération de la respiration, la concentration des urines. Ces effets, variables en intensité, en durée, selon que la lésion locale est plus ou moins profonde, étendue, selon l'organe affecté, la quantité de poison absorbée, sont remplacés par d'autres manifestations opposées, qui constituent la seconde période: nous l'avons désignée, à la manière des médecins rasoriens, sous la dénomination d'hyposthénique, non que nous adoptions complétement leurs opinions, mais plutôt pour exprimer un ensemble de symptômes, consistant dans un état de dépression vitale, due à l'excès du poison, qui jugule en

quelque sorte l'organisme, s'oppose à l'exercice régulier des fonctions. Dans cette période de l'intoxication, le pouls est petit, fréquent, serré, irrégulier, intermittent, le froid très-intense, surtout aux extrémités, quelquefois même avec chair de poule, frisson, horripilation, perceptible ou non à la main, difficile à combattre par la chaleur artificielle. Le faciés est altéré, amaigri, le nez effilé, la voix éteinte; les yeux sont cernés, creux, les traits retirés. L'effet des poisons inorganiques sur le système nerveux se traduit par un affaissement général, plus rarement par des crampes, des symptômes nerveux, spamodiques ou convulsifs, de l'insensibilité partielle : l'intelligence reste presque toujours intacte. Les urines sont plus rares ou complétement supprimées. Il survient quelquefois des éruptions spéciales à la peau. Enfin l'affaissement s'accroît de plus en plus, les traits s'altèrent davantage, la peau se couvre d'une sueur froide, visqueuse, la respiration s'embarrasse; il y a des hoquets: la peau, les ongles se cyanosent; le pouls devient insensible, et les malades succombent en 24, 48 heures et plus, dans une espèce d'état asphyxique, semblable à celui des cholériques.

Si le malade vit plus longtemps, le sang devient de plus en plus diffluent, incoagulable, s'extravase à travers les muqueuses, dans les organes parenchymateux, en particulier dans les poumons, d'où hémorragies, gêne de la respiration, et il meurt dans une espèce d'état typhique en 4, 6 jours (voyez Arsenicaux, Mercuriaux).

Lorsque le poison a cautérisé profondément le tube intestinal, par suite de la dénudation de la muqueuse, la salivation, l'expulsion des pseudomembranes persistent pendant quelque temps; les vomissements, la constipation ou la diarrhée, ainsi que le froid, la suspension de la sécrétion urinaire, sont opiniâtres, et le patient, ne pouvant supporter aucune boisson, aucun aliment, succombe en 15 jours, un mois, dans un état d'émaciation extrême.

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