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chés, affectant tout le système musculaire, caractérisés par des roideurs, des fourmillements dans les membres, des secousses convulsives, rapides, douloureuses. Pendant l'attaque les membres sont roides, les doigts, les orteils fortement contractés, ce qui rend la démarche, la station impossibles. La tête est portée en arrière, le dos voûté, comme dans l'opisthotonos. La rigidité musculaire est quelquefois telle que le corps peut être soulevé d'une seule pièce. Il y a trismus, gêne extrême de la respiration. La déglutition est impossible. Le pouls est petit, serré. L'intelligence reste ordinairement intacte. A cet accès, de la durée de quelques minutes à un quart d'heure, succède une intermittence de la mème durée avec grand affaissement, bientôt suivie d'un autre accès tétanique plus violent que le premier, pendant lequel les muqueuses, les ongles se cyanosent par l'imperfection de la respiration. Cette espèce d'asphyxie est due, d'après M. Magendie, à la contraction des muscles de la respiration; d'après MM. Ségalas, Marsal-Hall, à la contraction spasmodique des muscles de la glotte. Si on n'y remédie par l'insufflation (Magendie), par la trachéotomie (Marsal-Hall), le malade peut succomber au troisième ou quatrième accès.

Tel est le mode d'action des strychnées (noix vomique, fève Saint-Ignace, fausse angusture, eupas tieuté, strychnine, brucine, etc.). La coque du Levant, plus rarement le camphre, le redoul, les colchicacées, les aconits, quelques poisons narcotiques, narcotico-âcres, même irritants, peuvent donner lieu aussi à des accès tétaniques, mais les accidents nerveux, du moins chez l'homme, sont moins constants, moins intenses, n'offrent pas une intermittence aussi tranchée, revétent plutôt le caractère convulsif que tétanique, et s'accompagnent, en outre, d'accidents gastro-intestinaux plus inflammatoires, ou de symptómes de narcotisme.

VI. Il est des poisons organiques qui participent à la

fois du mode d'action des poisons narcotiques et tétaniques, en outre de leur effet irritant sur le tube intestinal. C'est ainsi que paraissent agir les aconits, les digitales, le redoul, les rhododendrum, les azalea, le sumac des corroyeurs, l'œnanthe, plusieurs champignons et apocynées, etc.

VII.—Enfin, les gaz sulfhydrique, des égouts, des fosses d'aisancé, et autres gaz sulfhydrates, les matières animales en putrefaction, les gaz auxquels elles donnent naissance, la viande des animaux surmenés, le venin des animaux venimèux, les poisons septiques des auteurs, etc., paraissent agir en modifiant l'hématose, en rendant le sang diffluent, incoagulable, facilement décomposable. Ce liquide, ainsi modifié, est moins excitant, s'infiltre dans les tissus des organes, trouble leurs fonctions, et, quoique les effets de cés divers poisons ne soient pas tout à fait comparables, ils se réduisent en un état d'affaissement, d'hyposténie générale, avec syncopes, lypothymies, troubles nerveux, etc., et, dans les cas de mort, la dissociation des éléments organiques, la putréfaction sont très-promptes.

Cet exposé rapide indique les poisons inorganiques, organiques et gazeux qui ont entre eux quelque analogie quant à leurs effets. Il ne faut pas cependant accepter cés données d'une manière absolue, car plusieurs modifiant à la fois divers systèmes d'organes, de fonctions, font partie de plusieurs groupes; cependant, en s'aidant des caractères, organoleptiques, de la prédominance, de la nature de tels ou tels symptômes, il sera possible, dans la plupart des cas, de les rapporter à leur groupe spécial.

Les effets se manifestent ordinairement aussitôt après l'ingestion du poison ou dans la première heure, rarement plus tard. Dans l'empoisonnement par les champignons, les aliments préparés ou conservés dans des vases en cuivre, ils se déclarent quelquefois, 4, 6, 12 heures après. Leur apparition est aussi retardée par le sommeil, par

la plénitude de l'estomac, la nature des matières alimentaires, par l'exercice, les stimulants dans l'empoisonnement par les narcotiques. Une fois développés, leur marche est continue et assez constante. Il peut bien y avoir des alternatives de soulagement, d'aggravation, mais presque jamais une intermittence complète. Telle est du moins l'opinion qui a été soutenue par MM. Orfila, Devergie, dans un cas d'intoxication par le laudanum, tandis que MM. Lassaigne, Delafond, Regnault, d'après des expériences sur les animaux, ont émis une assertion contraire. Dans quelques cas d'empoisonnement par les arsenicaux, les champignons, les opiacés, le plomb, les accidents se sont tellement amendés pendant un certain temps, qu'on a pu croire à leur disparition complète; reste à savoir si toutes les fonctions ont été examinées avec soin. Ainsi, malgré l'état calme du malade, la disparition des symptômes gastro-intestinaux, M. Andral soupçonna un empoisonnement, porta méme un pronostic grave, par cela seul peau était froide, les battements du cœur et du que la pouls faibles. La personne avait pris de l'arsenic. L'intermittence pourrait se concevoir dans l'intoxication par les poisons qui forment des composés insolubles avec les matières alimentaires, qui ne sont qu'incomplétement neutralisés par les contre-poisons; nous doutons cependant qu'elle fût complète. Nous ne parlons pas de celle qu'on observe avec les strychnées, parce qu'elle est de trop courte durée.

L'intoxication présente ses anomalies, comme, du reste, les autres états morbides, et les effets peuvent varier selon les circonstances, individuelles, extérieures ou relatives au poison. Une femme, en croquant de l'acide arsénieux en morceaux, succombe en 6 heures dans un état hyposthénique sans symptômes locaux appréciables. L'acide oxalique, selon la dose, son degré de dilution, agit comme tétanique, narcotique, abolit la contractilité du cœur, ou détermine

l'inflammation du tube intestinal. Ce poison, l'acide arsenieux, le sublimé, etc., ont produit la mort en quelques heures, en donnant lieu à des symptômes convulsifs trèsintenses. Ils peuvent donner lieu aussi à un état de stupeur, à des paralysies ou insensibilités partielles. La nicotine détermine des convulsions tétaniques lorsqu'elle intoxique promptement. De trois personnes qui mangent une soupe contenant de la jusquiame, l'une est prise de narcotisme, l'autre d'accidents tétaniques, la troisième de paralysie de la moitié du corps. Dans le chapitre consacré au pronostic, nous reviendrons sur ces anomalies, et indiquerons les diverses circonstances qui peuvent modifier les effets des poisons.

B.-Empoisonnement lent.

Les empoisonnements lents, c'est-à-dire les accidents produits par les poisons qui pénètrent dans l'économie par petites doses à la fois, mais souvent répétées ou successives, sont bien plus fréquents qu'on ne le pense, et bien souvent attribués à tout autre cause. Ils résultent ordinairement de l'usage trop prolongé soit des médicaments, soit des boissons, des aliments préparés ou conservés dans des vases métalliques, en poterie commune; soit du séjour dans un lieu ou se dégagent, se produisent les matières gazeuses. Nous citons aussi quelques exemples d'homicides avec les acides administrés dans une boisson, avec les arsenicaux, les opiacés, etc., donnés par doses suc

cessives.

Quoique les effets lents produits par les poisons inorganiques soient au fond de même nature, consistent surtout en des désordres de la digestion, de l'assimilation, de l'innervation, aboutissent, en définitive, à un état de marasme cachectique ou scorbutique, ils offrent cependant quelques caractères spéciaux que nous croyons devoir indiquer succinctement. D'après Hufeland, l'usage prolongé du

phosphore peut occasionner de la cardialgie, des vomissements, le marasme, la fièvre hectique, etc. MM. Roussel, Sédillot, etc., ont signalé le ramollissement, l'ulcération des gencives avec nécrose, carie des dents, des os maxillaires, chez les personnes qui préparent les allumettes phosphorées. L'usage trop prolongé des iodes produit d'abord l'exaltation des organes génitaux, des sens, la salivation, une inflammation spéciale de la muqueuse oculaire, des sinus frontaux avec céphalalgie frontale, gravative, l'œdème de la glotte, l'atrophie des seins, des testicules, du tissu graisseux, des palpitations, un état cachectique, et, d'après quelques auteurs, la surdité, la paralysie des membres inférieurs, une espèce d'aliénation mentale; accidents qui nous paraissent bien exagérés. Le bromure de potassium, à dose progressivement élevée, amène l'anesthésie des organes des sens, de la génération, du système nerveux et locomoteur, surtout du pharynx, de l'isthme du gosier, de la conjonctive, organes qu'il rend insensibles aux stjmulants (M. Huette). L'usage des acides détermine une espèce d'émaciation due, soit à une affection chronique de l'estomac, soit à une modification de l'assimilation, même, d'après quelques faits, paraît prédisposer à la phthysie. Les alcalins, leurs carbonates modifient l'état plastique du sang, la nature des sécrétions, produisent un état scorbutique avec ramollissement des gencives, tendance aux hémorragies. Aux préparations arsenicales nous rapportons cet état de malaise, de dégoût pour les aliments, d'amaigrissement avec chute des poils, des ongles, d'esquammation de l'épiderme, hydropisie, etc., accidents auxquels succombaient les personnes qui, tous les jours, prenaient 5 à 6 gouttes d'acqua di Napoli, soluté d'acide arsénieux. Fowler, qui donnait l'acide arsénieux depuis 1/2 à 3/4 de grain dans les 24 heures, a noté, comme principaux accidents, nausées, anorexie, tranchées, vomissements, diarrhées, bouffissure du visage, enflure des membres, tremblements nerveux,

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