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paralysies partielles, etc. Plusieurs de ces accidents ont été observés aussi par le professeur Fuster et autres praticiens,

Une femme de chambre, par jalousie, met chaque jour un peu d'acide arsénieux dans la soupe de sa rivale, qui servait la même maîtresse; peu de temps après le diner le poison est vomi avec les aliments sans accidents graves; mais le manége étant répété tous les jours, pendant six semaines, l'estomac acquit une sensibilité excessive; il se manifesta des douleurs d'entrailles, des crachements de sang, un amaigrissement extrême et une susceptibilité telle, que le moindre contact déterminait des spasmes, des convulsions; son estomac ne pouvait supporter aucun aliment; elle fut à la campagne, et se rétablit assez bien. A son retour à Paris, son ennemie implacable mit une forte dose d'arsenic en poudre dans son café; il en résulta des vomissements répétés, et on acquit alors seulement la certitude de l'empoisonnement. Cette malheureuse femme tomba dans l'état le plus déplorable; cependant elle se rétablit (Renault).

M. Millon (page 15) a constaté aussi cet état d'amaigrissement, avec développement extraordinaire du foje, des désordres fonctionnels, en rapport avec l'organe affecté, chez les chiens, dans les aliments desquels il introduisait, pendant plusieurs jours, 10 à 30 centigr. d'émétique. Les mercuriaux peuvent donner lieu à une espèce de fièvre lente avec exacerbations, chaleurs insolites, troubles fonctionnels de l'organe particulièrement affecté, ou bien, surtout chez les personnes exposées aux émanations mercurielles, à la tuméfaction de la muqueuse buccale, de la face, avec salivation, fétidité de l'haleine, ulcérations, liquéfaction du sang, tendance aux hémorrhagies, éruptions spéciales, chute des dents, nécrose des os maxillaires, tremblements, paralysies, etc. Les cuivreux, donnés comme médicaments, ont déterminé un état de dépérissement

cachectique, scorbutique avec hémorragie des muqueuses, des coliques diarrhéiques, du ténesme, des vomissements, des douleurs d'estomac, du mal de tête, un affaiblissement progressif; accidents qui, sans nul doute, doivent s'observer aussi avec les aliments cuivreux. Chez les ouvriers affectés de colique de cuivre, M. Corrigan donne, comme caractéristique, une liseré rouge-pourpre avec rétraction des bords des gencives, des dents canines et bicuspidées. Il n'y a, dit-il, ni coliques aiguës, ni constipation, ni paralysies partielles comme avec le plomb. Qu'il nous suffise d'énoncer seulement les accidents déterminés par les préparations plombiques, données ou appliquées comme médicaments, ou chez les ouvriers, tels que la colique, l'anthralgie, la paralysie, l'anesthésie, l'encéphalopathie saturnines, ordinairement précédés, comme symptômes prodromiques, de la coloration des gencives, de la saveur, de l'haleine saturnines; enfin l'ictère, l'amaigrissement, des paralysies des muscles extenseurs des mains, des pieds, etc., qui quelquefois en ont imposé pour d'autres affections.

L'abus des plantes âcres, irritantes, peut donner lieu à une affection chronique du tube intestinal, et, par suite, à un état d'amaigrissement. Les narcotiques ou stupéfiants, quoique l'économie paraisse s'y habituer en quelque sorte, affaiblissent la sensibilité, la motricité générales, amènent une espèce d'hébétement, d'affaissement moral, et, en ralentissant la digestion, les phénomènes d'assimilation, produisent l'amaigrissement. Nous n'avons pas besoin de signaler les accidents que détermine l'abus des alcooliques. Quant à ceux produits par l'usage des viandes altérées, décomposées, enfumées, nous les avons indiqués avec quelques détails, quoiqu'ils soient plutôt du ressort de l'hygiène (tom. II, page 657).

C.-Effets consécutifs.

Les lésions organiques et fonctionnelles qui persistent après l'élimination du poison constituent les effets consécutifs. Il est bien difficile, dans beaucoup de cas, de savoir si les effets ne dépendent pas encore de la présence du poison; nul doute que les douleurs épigastriques, les vomissements, les coliques, la diarrhée ou la constipation, l'état de maigreur, etc., qui succèdent aux effets immédiats des poisons acides, alcalins, et autres poisons âcres, caustiques, ne soient exclusivement consécutifs, ne dépendent surtout des lésions du tube intestinal. La dispépsie, l'épigastralgie, l'insensibilité, la paralysie, la contracture des muscles fléchisseurs des mains, des pieds, qu'on observe quelquefois dans l'empoisonnement par les préparations arsenicales, sont sans doute aussi sous la dépendance des lésions du tube intestinal, du système nerveux ou musculaire. En est-il de même dans les cas d'empoisonnement lent par ces poisons, par les préparations cuivreuses, antimoniales, mercurielles, plombiques, etc., surtout lorsque les accidents se déclarent chez des personnes qui, depuis six mois, un an et plus, ne travaillent plus ces dernières préparations? Il est difficile de se prononcer, puisque l'analyse a démontré la présence de ces poisons dans les organes longtemps après que les personnes en avaient cessé l'administration; qu'ensuite, surtout avec le mercure, le plomb, ces accidents peuvent se développer, réapparaître sous l'influence de l'iodure de potassium, sel qui rend ces poisons solubles. Quant aux effets observés après l'empoisonnement par les narcotiques, les poisons qui agissent sur le système nerveux cérébro-spinal, nul doute qu'ils ne soient consécutifs. Il serait important, sous le point de vue thérapeutique, de pouvoir distinguer les effets consécutifs de ceux qui dépendent encore de la présence du poison; comme cela n'est

guère possible, du moins pour un certain nombre, nous avons réuni ces deux genres d'effets dans l'article précé

dent.

II.

Lésions toxicologiques.

De l'ensemble des effets, exposés dans l'article précédent, on peut déduire, à priori, les altérations pathologiques produites par les divers groupes de poisons. Les poisons dits acres, irritants, caustiques, étant donnés ordinairement à doses assez élevées, il est rare qu'ils ne laissent pas de traces de leur effet local. Les organes qui en ont reçu le contact sont congestionnés, irrités, enflammés, cautérisés, ramollis, ulcérés, perforés, offrent quelquefois des colorations particulières en rapport avec la nature de certains poisons; en jaune avec l'iode, les acides azotique, hypo-azotique, l'eau régale; en noir avec les acides sulfurique, chlorhydrique, phosphorique, acétique, etc. Ces diverses lésions, qui peuvent se rencontrer sur le même organe, et quelques-unes même s'étendre aux tissus, aux organes contigus, sont ordinairement en rapport avec le degré de causticité du poison, la nature, la quantité de matières avec lesquelles ils sont mélangés. Elles siégent surtout dans la grande et petite courbure de l'estomac, quelquefois dans le duodénum, rarement dans les petits intestins, assez souvent dans les gros, et ne s'observent à la bouche, au pharynx, à l'œsophage, qu'avec les poisons très-caustiques. Ces lésions ne sont pas toujours le résultat de l'action directe du poison; on les trouve aussi, du moins l'état congestionnel, inflammatoire, même les ulcérations, quand le poison a pénétré par toute autre voie. Le sang, si ce n'est avec les acides, est ordinairement diffluent, visqueux, peu coagulable, foncé en couleur; ce qui explique l'état congestionnel des organes parenchymateux, de la rate, du foie, des poumons, surtout lorsque l'intoxication s'est prolongée pendant un certain temps. Les muqueuses partici

pent alors de cet état, sont colorées en brun noirâtre, offrent des taches de même couleur, taches qui quelquefois, surtout lorsqu'elles siégent sur la muqueuse gastro-intestinale, ont été considérées comme de nature inflammatoire. Les matières des vomissements, celles du tube intestinal, offrent aussi, de même que les tissus, des colorations spéciales, renferment souvent le poison, appréciable directement à la vue, à l'odeur, etc, S'il y a perforation, on observe des traces de péritonite, à moins que le malade ait succombé avant qu'elle puisse se développer, Avec les poisons minéraux, les lésions ne sont pas toujours aussi éyidentes, aussi tranchées; quelquefois, même avec le poison le plus important, l'arsenic, elles n'offrent rien de caractéristique, sont peu marquées.

Lorsque le malade a succombé dans la période des effets consécutifs, les traces de congestion, d'inflammation, peuvent manquer complétement, ou bien cette dernière peut être passée à l'état chronique; alors la muqueuse gastrointestinale est d'un gris-ardoise, ramollie, friable. Aux ulcérations, aux escarres succèdent des cicatrices blanches ou rosées, plus ou moins étendues, intéressant quelquefois toute l'épaisseur des parois intestinales, dont les bords adhèrent intimement au foie,. à la rate, etc. L'estomac, les intestins sont fortement rétrécis; le pylore dur, squirreux; l'œsophage, comme disposé par colonnes, est aussi très-étroit. Enfin, la peau est terreuse, comme collée aux os, et le cadavre dans un état d'amaigrissement

extrême,

Dans l'empoisonnement par les narcotiques purs, les lésions de nature inflammatoire s'observent rarement du côté du tube intestinal. Elles consistent surtout dans un état congestionnel très-marqué des membranes du cerveau, du tissu sous-arachnoïdien, des sinus, de ses vaisseaux. Cet organe est piqueté. Il y a souvent épanchement séro-sanguinolent dans les ventricules. Le système veineux, les cavités

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