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l'acide cyanhydrique avec la plupart des autres poisons. Dans les cas ordinaires, en raison de la portion qui est éliminée par les vomissements, les selles ou toute autre voie, il est bien difficile de la déterminer; aussi voyonsnous des doses très-fortes d'un mème poison, 1 gram. de sublimé, d'acétate de morphine, ne pas être mortelles, mais encore, dans quelques cas, donner lieu à des accidents moins intenses que des doses plus faibles. En ne tenant compte que de la portion du poison absorbée, on peut, à priori, fixer la dose toxique d'après les trois données que nous avons indiquées dans le paragraphe précédent. Dans l'impossibilité de répondre à cette question d'une manière absolue, nous renvoyons à chaque poison en particulier.

III.-La quantité de poison retirée des organes est-elle suffisante pour expliquer la mort? En négligeant la portion de poison qu'on peut trouver en nature dans le tube intestinal, ne tenant compte que de la partie retirée des organes où il a pénétré par absorption, si celle-ci est supérieure à celle du poison normal, surtout si l'on a employé les réactifs, un procédé convenable et pour éviter toute cause d'erreur, on peut affirmer que le poison provient d'un empoisonnement, que la quantité est suffisante pour donner la mort. Lorsque la quantité de poison obtenue est égale ou inférieure à celle qu'on trouve normalement, il faut rester dans le doute, surtout si l'on n'a aucun renseignement sur les antécédents, si le inalade, par exemple, n'a pas éprouvé des accidents aigus d'intoxication, s'il n'a pas employé la substance toxique comme médicament, depuis combien de temps il a cessé le traitement, sa profession, etc., circonstances très importantes que nous avons déjà discutées (page 231). On trouvera d'autant moins de poison que le malade aura survécu plus longtemps, en raison de son élimination constante. Si le malade n'avait succombé que le dixième, quinzième, vingtième jour, il pourrait

même n'en rester aucune trace dans les organes; par conséquent, par cela seul qu'on n'aurait pas obtenu du poison, il ne faudrait pas en conclure qu'il n'y a pas empoi

sonnement.

IV. La quantité de poison introduite dans telle ou telle matière alimentaire, médicamenteuse, etc., est-elle suffisante pour donner la mort? - Cette question a été assez souvent posée, et les experts ont eu à constater la nature, la quantité de poison introduite dans du vin, du café, un potage, etc. Il faut en ces cas faire à la fois l'analyse qualitative et quantitative, s'assurer, autant que possible, en quel état s'y trouve le poison, s'il n'a les matières été modifié pas

alimentaires.

par

Pour connaître la quantité d'un poison contenu dans un ou plusieurs organes, dans les matières suspectes, les moyens analytiques diffèrent selon sa nature, celles des matières. Tantôt on le sépare soit par distillation si c'est un poison volatil; soit à l'aide d'un véhicule, l'alcool, l'éther, le chloroforme, les acides étendus, dont on le sépare ensuite en vaporisant le véhicule ou en le précipitant à l'aide d'une base (alcalis végétaux); soit en transformant le poison en sulfure, chlorure, en sel insoluble, dont le poids, soustraction faite du soufre, du chlore, de l'acide, donne celui du métal; soit enfin en le transformant en gaz hydrogène-arsénié, antimonié, lequel est décomposé à chaud dans un tube, dont l'augmentation de poids indique celle du métal. Ces deux derniers procédés servent ordinairement à doser les poisons minéraux de la 4 section. Lorsque c'est un poison acide, alcalin, qui ne forme pas des sels insolubles avec les bases, les acides, on le dose d'après la quantité de soluté titré de base ou d'acide qu'il faut pour les neutraliser.

me

M. Chevallier, ayant à déterminer si la quantité d'ammoniaque ajoutée à du vin était suffisante pour donner la

mort, en distilla un décilitre dans une cornue, avec addition de potasse, pour retirer la portion d'ammoniaque qui aurait pu se combiner avec l'acide du vin. Il obtint 2/3 d'un liquide limpide, offrant les réactions de l'ammoniaque, qui exigea 1 gramme 5 décigrammes d'acide sulfurique à 36° pour être saturé; ce qui représente 2 grammes 2 décigrammes d'ammoniaque, ou 26 grammes par litre de vin, dose assez forte pour déterminer des accidents; mais il est difficile de croire qu'on ait pu en faire usage.

Dans un empoisonnement par l'oxalate de potasse, mélé à du sulfate, pour apprécier la proportion des deux sels, MM. Chevallier et Lassaigne les dissolvent dans 30 fois leur poids d'eau, et précipitent le soluté par le chlorure de baryum. Le précipité traité par l'acide chlorhydrique faible, desséché à + 100, donna 6 gramme 105 de sulfate de baryte, ce qui représente 0 gramme 075 de sulfate de potasse ou 7 et 1/2 pour 100 de ce sel.-D'autre part, pour connaître le degré de saturation de l'oxalate de potasse, ils le purifient par la cristallisation, en décomposent 2 grammes dans un creuset de platine, saturent le résidu (carbonate de potasse) par l'acide sulfurique, évaporent, sèchent au rouge obscur, et obtiennent 0 gramme 950 de sulfate, ce qui représente 0 gramme 513 de potasse.—2 autres grammes d'oxalate sont précipités par l'acétate de plomb; l'oxalate, séché à l'étuve, pesait 3 grammes 621, représentant 0 gramme 910 d'acide oxalique, qui est à la quantité de 0 grammes 513 comme 1 équivalent d'acide oxalique est à 1 équivalent de potasse.

S'il s'agissait de déterminer, de doser la quantité d'arsenic, d'antimoine, etc., dans un organe, on le pèse, on agit sur le 1/3, le 1/4, par l'un des procédés indiqués; le poids du métal obtenu, multiplié par 3 ou par 4, donne la totalité contenue dans cet organe : c'est ainsi que MM. Chevallier et Lassaigne sont parvenus à déterminer la quantité absolue d'arsenic, de cuivre, renfermée dans tel ou tel viscère.

Barruel, trop peu cité, excellait aussi dans ces sortes d'analyses quantitatives.

VI.-Quest. En quel état le poison a-t-il été administré?

La plupart des poisons réagissent sur les matières organiques solides et liquides, sont modifiés dans leur état de combinaison, forment avec elles des composés insolubles, sont neutralisés par les contre-poisons; aussi, si ce n'est avec les poisons volatils, quelques acides et alcalis, il est rare qu'on les obtienne tels qu'ils ont été administrés, ou mêlés aux matières suspectes. Pour la solution de cette question, il faut tenir compte des effets, des lésions, du nouveau composé trouvé dans le tube intestinal. Si dans l'empoisonnement par l'acide sulfurique, la magnésie avait été donnée comme contre-poison, le sulfate de cette base, obtenu par cristallisation des liquides de l'estomac, les

traces d'inflammation, de cautérisation, ainsi que les

effets, donneraient à supposer que l'intoxication a été produite par cet acide. Si le poison avait formé un composé insoluble, comme dans l'empoisonnement par l'acide oxalique, la présence de l'oxalate de chaux, qui serait transformé en oxalate soluble et en carbonate de chaux par le carbonate de potasse, puis par le sous-acétate de plomb en oxalate de ce métal, dont on séparerait l'acide oxalique par le gaz sulfhydrique, combinée aux effets, aux lésions, servirait à tirer la même déduction que pour l'acide sulfurique; mais on ne saurait si c'est avec l'acide oxalique ou l'oxalate acide de potasse, à moins qu'on n'emploie l'alcool (affaire Kappler).

me

Les poisons de la 4 section formant des composés insolubles avec les matières organiques, dans presque toutes les expertises, on n'en retire guère que le métal ou le radical. S'ils avaient formé un composé insoluble avec le contre-poison, l'hydrogène sulfuré provenant de l'altéra

tion spontanée des matières organiques, du chlorure de sodium des aliments, avaient été transformés en sous-sels insolubles; la présence de ces nouveaux composés, qui sont inertes et qu'on réduirait par l'hydrogène ou le flux noir, coïncidant avec des lésions, des effets graves, donnerait à supposer que l'intoxication a eu lieu par une préparation soluble du même métal.

VII.-Quest. Valeur toxicologique des expériences et observations sur les animaux.

Les poisons sont délétères pour tout ce qui a vie, pour les plantes comme pour les animaux; c'est même cette propriété anti-vitale qui les constitue tels; par conséquent, les expériences et observations sur les animaux, trop vantées ou trop dépréciées, peuvent, étant bien institués, bien interprétées, éclairer la toxicologie humaine. Il nous paraît inutile de retracer ici les progrès qu'elles ont imprimés à cette partie des sciences médicales, à une époque où elle était encore dans l'enfance, ainsi que de nos jours, surtout pour la recherche du poison absorbé. Comment savoir autrement si unë substance, jusqu'alors inconnue, est toxique et même à priori à quelle dose? Mais, dira-t-on, il est des substances qui, étant toxiques pour l'homme, pour telle espèce animale, ne le sont pas pour d'autres, et l'on cite, à cet égard, les faits suivants : l'aconit tue les loups, non les chevaux (Virey): la petite ciguè est poison pour l'homme, non pour les autres animaux ; la phellandre aquatique l'est pour les chevaux, non pour les bœufs (Plenck). Les étourneaux se nourrissent de graines de ciguë; les faisans de celles de la pomme épineuse; les cochons des racines de jusquiame, substances qui sont toxiques pour l'homme. D'après Gohier, les ruminants sont peu accessibles à de fortes doses d'arsenic, de ciguë, de belladone, de noix vomique, d'opium, etc. Trois onces d'acide arsénieux, ou d'acide cyanhydrique, mélées à 10 onces d'eau-de-vie, n'ont

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