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DANS

ORATEUR.

ANS Athene autrefois, peuple vain & léger; Un Orateur voyant fa patrie en danger

Courut à la tribune ; & d'un art tyrannique
Voulant forcer les cœurs dans une Républiqué,
Il parla fortement fur le commun falut.
On ne l'écoutoit pas : l'Orateur recourut
A ces figures violentes

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Qui favent exciter les ames les plus lentes.
Il fit parler les morts, tonna, dit ce qu'il pût.
Le vent emporta tout: perfonne ne s'émut.
* L'animal aux têtes frivoles

Etant fait à ces traits ne daignoit l'écouter.
Tous regardoient ailleurs : il en vit s'arrêter
A des combats d'enfans & point à fes paroles.
Que fit le Harangueur? il prit un autre tour.
Cérès, commença-t-il, faifoit voyage un jour
Avec l'anguille & l'hirondelle:

Un fleuve les arrête; & l'anguille en nâgeant
Comme l'hirondelle en volant,
Le traverfa bien-tôt. L'affemblée à l'inftant
Cria tout d'une voix & Cérès que fit-elle ?
Ce qu'elle fit un promt courroux
L'anima d'abord contre vous.

Quoi, de contes d'enfans fon peuple s'embarrasse!
Et du péril qui le menace,
Lui feul, entre les Grecs, il néglige l'effet!
Que ne demandez-vous ce que Philippe fait ?
A ce reproche l'affemblée

Par l'Apologue réveillée

Se donne entiére à l'Orateur :

Un trait de Fable en eut l'honneur.

Nous fommes tous d'Athene en ce point ; & moi-même Au moment que je fais cette moralité,

* Le peuple.

* Si Peau-d'Ane m'étoit conté,

J'y prendrois un plaifir extrême.

Le monde eft vieux, dit-on, je le crois : cependant 11 le faut amufer encor comme un enfant.

* Vieux Conte.

La Fontaine, Fables.

ORGUE I L.

CLYTEMNESTRE à IPHIGENIE

Il faut d'un noble orgueil armer votre courage

*

Moi-même de l'ingrat approuvant le deffein,
Je vous l'ai dans Argos préfenté de ma main ;
Et mon choix que flattoit le bruit de fa Nobleffe
Vous donnoit avec joie au fils d'une Déeffe.
Mais puifque déformais fon lâche repentir
Dément le fang des Dieux dont on le fait fortir,
Ma fille, c'est à nous de montrer qui nous fommes
Et de ne voir en lui que le dernier des hommes.
Lui ferons-nous penfer par un plus long féjour,
Que nos vœux, de fon cœur, attendent le retour?
Rompons avec plaifir un hymen qu'il différe.

Racine, Ipbig. act. 11. fc. IV.

L

ORGUEIL PUNI.

E chêne un jour dit au rofeau :

Vous avez bien fujet d'accufer la nature.
Un roitelet pour vous eft un péfant fardeau.
Le moindre vent qui d'aventure

* Achille.

Fait rider la face de l'eau,

Vous oblige à baiffer la tête:

Cependant que mon front au Caucase pareil,
Non content d'arrêter les rayons du foleil,
Brave l'effort de la tempête.

Tous vous eft Aquilon, tout me femble Zéphir.
Encor fi vous naiffiez à l'abri du feuillage
Dont je couvre le voisinage,
Vous n'auriez pas tant à fouffrir,
Je vous défendrois de l'orage.

Mais vous naiffez le plus fouvent

Sur les humides bords des Royaumes du Vent.
La nature envers vous me femble bien injufte.
Votre compaffion, lui répondit l'Arbuste,
Part d'un bon naturel, mais quittez ce fouci:

Les vents me font moins qu'à vous redoutables,
Je plie, & ne romps pas : vous avez jufqu'ici
Contre leurs coups épouvantables
Réfifté fans courber le dos :

Mais attendons la fin. Comme il difoit ces mots :
Du bout de l'horifon accourt avec furie.
Le plus terrible des enfans,

Que le Nord eût porté jufques-là dans fes flancs.
L'arbre tient bon, le rofeau plie:
Le vent redouble fes efforts,
Et fait fi bien qu'il déracine

Celui de qui la tête au ciel étoit voisine,
Et dont les pieds touchoient à l'empire des morts.
La Fontaine, Fable du chêne & du rofean.

M

*

PAPIMANIE.

AÎTRE François dit que Papimanie,
Eft un pays où les gens font heureux.
Le vrai dormir ne fut fait que pour eux :
Nous n'en avons ici que la copie.
Et par Saint Jean, fi Dieu me prête vie,
Je le verrai ce pays où l'on dort:
On y fait plus, on n'y fait nulle chofe :
C'eft un emploi que je recherche encore
Ajoutez-y quelque petite dofe

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D'amour honnête, & puis me voilà fort.
Tout au rebours, il eft une Province
Où les gens font haïs, maudits de Dieu.
On les connoît à leur visage mince,
Le long dormir eft exclus de ce lieu
Partant, Lecteurs, fi quelqu'un fe préfente
A vos regards, ayant face riante,
Couleur vermeille, & vifage replet,
Taille, non pas de quelque mingrelet.
Dire pourrez, fans que l'on vous condamne
Certui me femble à le voir Papimane.
Si d'autre part celui que vous verrez
A l'œil riant, le corps rond, le teint frais,
Sans héfiter qualifiez cet homme
Papefiguier. Papefiguefe nomme

L'ifle & Province, où les gens autrefois
Firent la figue au portrait du Saint Pere :
Punis en font, rien chez eux ne profpere.
Ainfi nous l'a conté Maître François.

* Rabelais.

La Fontaine, Contes

DANS

PARADIS.

ANS l'inftant * l'un & l'autre s'avance Vers les lieux fortunés qu'habite l'innocence. Ce n'eft plus des enfers l'affreufe obfcurité C'eft du jour le plus pur l'immortelle clarté. Henri voit ces beaux lieux, & foudain à leur vûe Sent couler dans fon ame une joie inconnue : Les foins, les paffions, n'y troublent point les cœurs, La volupté tranquille y répand fes douceurs. Amour, en ces climats, tout reffent ton empire! Ce n'eft point cet amour que la molleffe infpire, C'eft ce flambeau divin, ce feu faint & facré, Ce pur enfant des cieux fur la terre ignoré. De lui feul à jamais tous les cœurs fe rempliffent Ils défirent fans cefle, & fans ceffe ils jouiflent, Et goûtent dans les feux d'une éternelle ardeur Des plaifirs fans regret, du repos fans langueur. Là regnent les bons Rois qu'ont produit tous les âges; Là font les vrais Héros; là vivent les vrais Sages; Là fur un Trône d'or Charlemagne & Clovis Veillent du haut des Cieux fur l'Empire des Lys. Les plus grands ennemis, les plus fiers adverfaires; Réunis en ces lieux, n'y font plus que des freres. Voltaire, Henri. ch. v II.

C'EN

PARDO N.

HE'RODE à MARIAM NE.

'EN eft fait, je me rends, banniffez votre effroi Puifque vous m'avez vû vous triomphez de moi.

*Saint Louis & Henri IV.

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