Images de page
PDF
ePub

PRESTRES.

ARASPE à ŒDIPE.

GE's Dieux dont le Pontife a promis le fecours,

Dans leurs Temples, Seigneur, n'habitent point toujours.
On ne voit point leur bras fi prodigue en miracles;
Ces antres, ces trepieds qui rendent leurs oracles,
Ces organes d'airain que nos mains ont formés,
Toujours d'un fouffle pur ne font point animés.
Ne nous endormons point fur la foi de leurs Prêtres,
Au pied du fanctuaire il eft fouvent des traîtres,
Qui nous afferviffant fous un pouvoir facré,
Font parler les deftins, les font taire à leur gré.
Voltaire, Edip. act. 11. fc. V.

DIPE à JOCASTE.

J'ENTREVOIS des malheurs que je ne puis comprendre ;
Je crains que par les Dieux le Pontife inspiré,
Sur un deftin affreux ne foit trop éclairé.

JOCAST E.

Cet organe des Dieux eft-il done infaillible!
Un Miniftére faint les attache aux autels ;
Ils approchent des Dieux, mais ils font des mortels,
Penfez-vous qu'en effet, au gré de leur demande
Du vol de leurs oifeaux la vérité dépende?
Que fous un fer facré des taureaux gémiflans
Dévoilent l'avenir à leurs regards perçans,
Et que de leurs feftons ces victimes ornées,
Des humains, dans leurs flancs, portent les destinées ?
Non, non: chercher ainfi l'obfcure vérité,

C'eft ufurper les droits de la Divinité,

Nos Prêtres ne font point ce qu'un vain peuple penfe, Notre crédulité fait toute leur fience.

Voltaire, Edip. a&. I V. fc. I.

PRE VOYANCE.

A COMAT à OSMI N.

Moi, qui par un long ufage,

Des maximes du Trône ai fait l'apprentiflage;
Qui, d'emplois en emplois, vieilli fous trois Sultans,
Ai vû de mes pareils les malheurs éclatans,
Je fais, fans me flatter, que de fa feule audace
Un homme tel que moi doit attendre fa grace;
Et qu'une mort fanglante eft l'unique traité,
Qui refte entre 1 efclave & le maître irrité.

Racine, Bajaz. act. IV. fc. VII.

PRIER E.

LEs périls qui m'obfédent,

Ne font point encore paffés.
De nouveaux ennemis fuccédent
A mes ennemis terraffés.

[ocr errors]

Grand Dieu, c'eft toi que je reclame,
Leve ton bras, lance ta flamme,
Abaiffe la hauteur des cieux;
Et viens fur leur voûte enflammée,
D'une main de foudres armée,
Frapper ces monts audacieux.

Objet de mes humbles cantiques,
Seigneur, je t'adresse ma voix ?

Toi, dont les promeffes antiques
Furent toujours l'efpoir des Rois.
Toi, de qui les fecours propices,
A travers tant de précipices
M'ont toujours garanti d'effroi :
Conferve aujourd'hui ton ouvrage,
Et daigne détourner l'orage,
Qui s'apprête à fondre fur moi.

Arrête cet affreux déluge,
Dont les flots vont me submerger.
Sois mon vengeur, fois mon refuge
Contre les fils de l'étranger.
Venge-toi d'un peuple infidéle,
De qui la bouche criminelle,
Ne s'ouvre qu'à l'impiété ;
Et dont la main vouée au crime,
Ne connoît rien de légitime,
Que le meurtre & l'iniquité.

Rouffeau, Odes facr.

AMESTRIS à XERCE'S.

SEIGNEUR, pardonnez au tranfport qui m'agite. En vain à mon amour la plainte eft interdite. Après le coup affreux dont vous frappez mon cœur Rien ne peut plus ici contraindre ma douleur. Qu'elle éclate à vos yeux cette douleur mortelle, A qui vous impofez une loi fi cruelle. Jufte ciel! fe peut-il qu'un fils vi&orieux Votre image, ou plutôt l'image de nos Dieux, Soit privé par vous feul de l'honneur de prétendre A ces mêmes Etats qu'il fait fi bien défendre? Pardonnez: je fais bien qu'il ne m'est pas permis De prononcer, Seigneur, entre vous & vos fils. Mais fi jamais des Dieux la majesté fuprême,

Prenant foin fur un front de s'empreindre elle-même,
Si l'éclat des vertus, la gloire des hauts faits,
Le befoin de l'Empire, & les vœux des fujets;
En un mot, fi jamais la valeur, la naissance,
Furent des droits, Seigneur, pour la toute puiffance:
Qui mieux a mérité ce haut dégré d'honneur
Que celui qu'on en prive avec tant de rigueur ?
Je vois de mes difcours que votre cœur s'offense:
Mais, Seigneur, d'un Héros j'entreprens la défense.
Crébillon, Xercès, act. I. jc. VII.

ERICIE à NEOPTOLEM E.

Vous me devez compte de votre gloire : Elle eft à moi, Seigneur, autant qu'elle eft à vous; Et ce qui la flétrit fe partage entre nous. Si rien ne peut fléchir votre haine endurcie, Songez de quels malheurs elle fera fuivie. Vous verrez contre vous armer tout l'univers, Et Pyrrhus chaque jour renaître des enfers. Quoi, pour faire oublier le meurtre d'acide, Vous méditez encore un double parricide! Faudra-t-il vous compter au rang des affaffins, Et vous voir devenir l'opprobre des humains, Lorfque vous en pouviez devenir le modéle, Si votre ambition eût été moins cruelle ? Le ciel vous a comblé de fes dons précieux, Et vos vertus pouvoient vous égaler aux Dieux. La nobleffe du fang, la valeur, la prudence : En faudra-t-il, Seigneur, excepter la clémence ? Malgré mille revers vous avez vû cent fois L'univers vous placer parmi fes plus grands Rois; Et de tant de vertus le parfait affemblage, Deviendroit d'un tyran l'inutile partage ?

Je m'égare, Seigneur : Mais daignez pardonner ces tranfports à mon cœur.

Mon refpe&a toujours égalé ma tendresse.
Loin de me reprocher un difcours qui vous blesse
A mes larmes, Seigneur, laiffez-vous attendrir.
Crébillon, Pyrrh. act. v.

fc. II.

i

CIEL!

PRINCE S.

ESTHER à ASSUE'RUS.

IEL! verra-t-on toujours par de cruels efprits Des Princes les plus doux l'oreille environnée, Et du bonheur public la fource empoisonnée ? Racine, Efth. alt. 111. fc. IV¿

PRINCESSE.

JO CASTE à EGIN E.

CROIS-th

OIS-tu qu'une Princeffe
Puiffe jamais cacher fa haine ou fa tendreffe?
Des Courtifans fur nous les inquiets regards,
Avec avidité tombent de toutes parts.

A travers les refpects leurs trompeufes foupleffes
Pénétrent dans nos cœurs, & cherchent nos foibleffes
A leur malignité rien n'échappe & ne fuit;
Un feul mot, un foupir, un coup d'œil nous trahit
Tout parle contre nous, jufqu'à notre filence:
Et quand leur artifice & leur perfévérance
Ont enfin malgré nous arraché nos fecrets
Alors avec éclat leurs difcours indifcrets,
Portant fur notre vie une trifte lumiére,
Vont de nos paffions remplir la terre entiére.
Voltaire, Edip. act. 111. sc. Xi

* Elle parle à son pɩre.

[ocr errors]
« PrécédentContinuer »