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On voulait remuer les cendres du camp de Jalès et de la Vendée, rallier les débris de l'insurrection de la Bretagne, et de la Normandie, comprimer le peuple par la terreur, et le ramener par la violence à la barbarie des siècles féodaux.

Tout se dirigeait vers l'accomplissement de ce projet. Le trésor se dissipait en récompenses pour des dévouemens criminels, et des services que la patrie ne connaissait pas ou qu'elle désavouait. Les emplois, les pensions, les honneurs, étaient prodigués à des individus obscurs, chargés de la haine publique, flétris dans l'opinion, tandis que des écrivains, des ministres même de la religion, alarmaient les consciences timides, ébranlaient le système des propriétés, et attaquaient les lois que le chef de l'église leur avait fait un devoir de respecter.

Cette violation de l'ordre social, ce mépris de la morale commune, cet oubli des principes de la politique la plus simple, devaient amener un soulèvement général. Il était imminent; il allait entraîner la perte des hommes imprudens et présomptueux qui le provoquaient. Ils vous doivent encore une fois

leur salut.

Je ne rappelerai point ces prodigieux effets de l'assentiment du peuple et de l'armée; toute la population de l'est se pressant sur vos pas, toutes les tentatives de guerre civile échouées dans l'ouest et dans le midi, la milice royale dissoute, désarmée, dissipée sans résistance et dans l'espace de quelques jours, le peuple réintégré dans ses droits, ses ennemis réduits au silence, le calme partout rétabli.

Cependant il n'était pas naturel de penser que tous les germes de discorde fussent entièrement détruits; que tant de gens pussent voir leurs espérances s'évanouir sans conserver quelques regrets; que les privilégiés dont la royauté s'était entourée pussent supporter le licenciement sans murmures; que des hommes liés, depuis un an, par des enrôlemens secrets, excités au désordres par des distributions et des promesses d'argent, reprissent tout-à-coup les habitudes d'une vie paisible, et qu'enfin ceux qui avaient déjà violé la foi de plusieurs amnisties se montrassent aujourd'hui moins ingrats ou plus fidèles.

Les événemens ont justifié cette prévoyance.

Considérée sous un point de vue général, la France présente un imposant spectacle et les dispositions les plus favorables. Elle veut la paix mais ne sacrifiera pas sa gloire et son indépendance. Comme en 1792, elle veut jouir de la liberté civile et des avantages du régime représentatif; mais, éclairée par l'expérience, elle sent que cette jouissance ne peut lui être garantie que par un gouvernement puissant et ferme. Comme en 1792, elle est intérieurement agitée par un parti qui n'a rien perdu de ses prétentions, mais qui n'a plus ni la même

force ni la même influence; qui se plaint sans cesse des rigueurs dont il fut l'objet, mais qui doit se rappeler qu'il les provoqua par ses intrigus, ses résistances et ses fureurs.

D'où sont nées en effet ces lois terribles qui frappèrent les émigrés, les insurgés et leurs familles? n'est-ce pas de la nécessité où se trouvèrent nos assemblées nationales de punir des attentats, d'arrêter des complots, de rompre des correspondances, contre lesquelles les lois ordinaires étaient insuffisantes?

Les leçons du passé semblent perdues.

Les hommes

auxquels vous vouliez rendre une patrie, qui vous doivent l'état politique et le repos qui leur ont été assurés, ces hommes, Sire, que V. M. a, pendant les douze premières années de son régne, tâché de réconcilier avec la nation, semblent avoir voulu se séparer d'elle et renoncer à vos bienfaits.

Jusqu'ici la police de votre empire s'est bornée à observer leurs démarches: dans plusieurs endroits elle a dû les garantir des ressentimens populaires. La police, instituée pour le bien de tous ne connaît ni les haines locales, ni les fautes que le prince a oubliées. Destinée à réprimer les atteintes portées à l'ordre social, elle n'en viole pas les principes en prenant ses craintes pour des soupçons et ses soupçons pour des faits.

Ainsi elle n'a point prématurément attenté à la liberté individuelle de ceux qu'elle devait présumer en état de conspiration contre la liberté publique. Loin de restreindre l'indépendance des écrivains, elle a rappelé dans la carrière poléinique ceux que la honte et la crainte en avaient éloignés. Elle a retiré de cette modération et de son respect pour les lois l'immense avantage d'éclairer la nation sur ses véritables dangers et ses véritables intérêts; d'affaiblir par la publicité l'importance que le mensonge et la calomnie obtiennent du mystère et de la clandestinité; de connaître les foyers, les ressorts, les agens des intrigues, et les laisser se tramer et se développer saus la gène d'une surveillance sensible.

Toutefois, il est tems de mettre un terme aux manoeuvres qui se pratiquent. Les émigrations commencent, les correspondances s'établissent à l'extérieur; elles se débitent et circulent au-dedans; des comités se forment dans les villes; on cherche à répandre des inquiétudes dans les campagnes.

Si, lorsque de semblables symptômes se manifestèrent pour la première fois en France, on eût arrêté le mal dans son principe; si, au lieu de se borner à des menaces et de suivre les conseils d'une indulgence temporatrice, l'autorité eut déployé toute la puissance dont elle est investie, la patrie n'aurait pas à éte entraînée sur le bord de l'abyme, on n'aurait pas à déplorer les mesures de violence auxquelles les gouvernemens d'alors furent contraints d'avoir recours, et que la gravité des circonstances peut à peine justifier.

Au reste, des désordres réels paraissent le résultat des manœuvres qu'on observe.

Dans une commune du département du Gard, quelqués individus attroupés ont, un instant, arboré le drapeau blanc. Quelques bandes armées ont paru dans les départemens de Maine-et-Loire et de la Loire-Inférieure.

Des femmes, dans le Calvados, ont déchiré le drapeau tricolore d'une commune.

Des cris séditieux se sont fait entendre; quelques actes de rébellion ont eu lieu dans le département du Nord.

Dans celui des Côtes-du-Nord, un maire a éte massacré par deux anciens chouans.

Ces délits répandent l'alarme dans les lieux où ils se commettent. Je sais qu'ils se rattachent aux efforts qu'on a faits depuis un an, pour réveiller les haines révolutionnaires et rétablir la guerre civile. Ils ne dépendent point exclusivement du changement politique qui vient de s'opérer sans obstacles; ils ne menacent pas la sûreté de l'état; ils ne caractérisent pas même un parti subsistant et formé.

Certes, ceux qui attaquent les propriétés et se livrent à des assassinats, ceux qui rompent tous les liens qui les attachent à la France, et la dévouent au fer des étrangers et aux discordes de l'intérieur; ces hommes n'ont rien de français. Ils peuvent suivre les opinions, seconder les vœux de quelques complices; mais ils n'ont point de partisans. Tous les gens de bien, tous les amis de l'ordre et de la paix, quelles que soient leurs vues politiques, tous détestent l'atrocité de pareils actes; tous sont intéressés à ce que ces désordres ne se propagent pas, et désirent qu'ils soient réprimés avec une sévérité capable d'en arrêter le cours,

Je ne propose point à V. M. de prendre des mesures extraordinaires ou d'excéder les bornes du pouvoir constitutionnel.

Il y a quelques mois que des tribunaux ont puni de la déportation et de quatre ans d'exil les cris de vive l'empereur; ceux de vive le roi restent aujourd'hui sans poursuites, ou ne sont punis que par voie de simple police; cette modération est le signe de la puissance. Mais les tribunaux ne peuvent, sur d'autres points, rester indécis et incertains, sans manquer à leurs devoirs, et sans détruire le concert d'intentions qui anime le peuple et le gouvernement.

Déjà, dans plusieurs communes de la France, des acquéreurs des domaines nationaux, dont rien ne menace la tranquillité, ont présenté des soldats armés à leurs frais pour la

sûreté de tous,

La jeunesse bretonne, pour la défense du trône et de la patrie, a renouvelé le pacte fédératif de Pontivy. Ce généreux

dévouement ne peut rester sans éloges, sans imitateurs et sans appui.

Partout les gardes nationales s'organisent. Il n'est donc plus besoin, pour assurer l'ordre intérieur, que de rappeler les lois existantes, d'en déterminer l'application, et d'en faire connaître les dispositions pénales.

Tel est l'objet du projet de décret que j'ai l'honneur de Soumettre à V. M. Le duc d'OTRANTE.

(Signé)

Extrait des minutes de la secrétairerie d'état.

Au palais de l'Elysée, le 9 Mai, 1815.

Napoléon, empereur des Français,

Sur le rapport de notre ministre de la police générale,
Notre conseil d'état entendu,

Nous avons décrété et décrétons ce qui suit:

Art. 1er. Tous les Français, autres que ceux compris dans l'art. 2 de notre décret d'amnistie du 12 Mars dernier, qui se trouvent, hors de France, au service, ou auprès, soit de LouisStanislaus-Xavier, comte de Lille, soit des princes de sa maison, sont tenus de rentrer en France, et de justifier de leur retour dans le délai d'un mois, conformément aux articles 7, 8, et 9 de notre décret du 6 Avril, 1809, à peine d'être poursuivis aux termes dudit décret.

2. Les officiers de police judiciaire, y compris les préfets et les maires, remettront à nos procureurs généraux et impériaux l'état des noms, prénoms, qualités, et demeures des individus domiciliés dans leur ressort, qu'ils croiront susceptibles de l'application de l'article précédent.

3. Nous enjoignons à nos procureurs-généraux et impériaux de poursuivre sans délai les auteurs et complices de toute relation et correspondance qui aurait lieu de l'intérieur de l'empire avec le comte de Lille, les princes de sa maison ou leurs agens, lorsque lesdites relations ou correspondances auraient pour objet les complots, mance uyres, spécifiés dans l'article 77 du code penal.

4. Toute personne convaincue d'avoir enlevé le drapeau tricolore placé sur le clocher d'une église ou tout autre monument public sera punie conformément à l'art. 257 du code pénal.

5. Les communes qui ne se seront point opposées à l'enlèvement du drapeau tricolore, fait par attroupement public, seront poursuivies en exécution de la loi du 10 vendémiaire an IV, relative à la responsabilté des communes.

6. Toute personne convaincue d'avoir porté un signe dé ralliement autre que la cocarde nationale, sera punie d'une année d'emprisonnement, conformément à l'article 9 de la loi du 27 germinal an IV, sans préjudice des peines portées par l'article 91 du code pénal, dans les cas prévus par cet article. 7. Les préfets feront réimprimer et afficher le chapitre 1er du titre 1er livre III du code pénal.

Il en sera de même des § 2 et 3 de la section 3 des mêmes titre et livre.

8. Notre cousin le prince archi-chancelier chargé du portefeuille du ministère de la justice, et notre ministre de la police générale, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera inséré au bulletin des lois.

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Par décret du 9 Mai, S. M. a nommé le prince archi-trésorier grand-maître de l'université impériale.

Par décret du même jour, S. M. a nommé M. le maréchal duc de Dalmatie son major-général.

12 Mai, 1815.

DÉCRETS IMPÉRIAUX.

Extrait des minutes de la secrétairerie d'état.

Au palais de l'Elysée, le 9 Mai, 1815.

Napoléon, empereur des Français,

Nous avons décrété et décrétons ce qui suit:

Art. 1er. Le duc de Plaisance est nommé grand-maître de l'université impériale.

2. Notre ministre de l'intérieur est chargé de l'exécution du présent décret.

(Signé)

NAPOLÉON.

Par l'empereur,

Le ministre-secrétaire-d'état,

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