privilégiée pour la navigation à vapeur sur le Danube, et aux nombreux moyens de transport dont elle dispose, les riches et abondants produits de la Hongrie, de la Transylvanie et des provinces danubiennes, vinrent suppléer aux approvisionnements fournis autrefois par la Russie. De cette manière, non-seulement la crise alimentaire, sur laquelle feu l'empereur Nicolas avait le plus compté pour éteindre l'ardeur belliqueuse des puissances occidentales, fut heureusement vaincue, mais en outre l'approvisionnement des armées alliées en Crimée fut considérablement facilité et régulièrement assuré. Cés faits et autres expliquent assez pourquoi au sein du congrès de Paris, les plénipotentiaires de l'Autriche insistèrent tant sur les engagements contractés par leur gouvernement envers la compagnie pour la navigation à vapeur sur le Danube, et sur les droits acquis de • celle-ci. Ne se trouvant pas suffisamment autorisés par leurs instructions à prendre une décision capable de préjuger les questions réservées à la compétence des ministres des finances et du commerce d'Autriche, le comte Buol et le baron de Hubner en avaient, à l'issue de la séance du congrès de Paris tenue le 6 mars, référé à leur propre gouvernement. L'empereur François-Joseph soumit immédiatement la question à l'examen du conseil des ministres; le baron de Bruck plaida avec tant de chaleur la causé de la liberté absolue de la navigation du Danube, qu'il rallia sans difficulté toutes les voix de ses collègues. En conséquence, le comte Buol put annoncer au congrès, le 18 mars, « que les instructions de sa cour sur le deuxième point, concernant le Danube, l'autorisaient à déclarer que l'Autriche adhérait à l'entière application au haut comme au bas Danube des principes établis par l'acte du congrès de Vienne. » A peine les protocoles du congrès de Paris furent-ils rendus publics, que l'esprit de parti s'en empara pour accuser les plénipotentiaires de l'Autriche d'avoir cherché à rendre illusoire le but que les puissances alliées s'étaient proposé lorsqu'elles avaient stipulé dans les préliminaires que la navigation du Danube et de ses embouchures serait efficacement assurée. Ceux qui avancèrent une telle accusation ignoraient donc que l'Autriche, après avoir signé la dernière paix aveć le Piémont, n'eut rien de plus pressé que d'employer son ascendant sur les États riverains du Pô pour obtenir que la libre navigation de ce fleuve, garantie par l'article 96 de l'acte final du congrès de Vienne, devint enfin une vérité? Le traité conclu par le baron de Bruck le 3 décembre 1849 avec les plénipotentiairesde Bavière et de Parme, et auquel le gouvernement papal donna son adhésion le 11 mai 1850, atteste hautement que la libre navigation du Pô est véritablement l'œuvre du cabinet impérial. Si celui-ci avait nourri, par rapport au Danube, les arrière-pensées qu'on lui prête, il n'aurait pas manqué de prétextes pour arriver à ses fins. Dans les discussions qui avaient eu lieu en 1784 : entre les différentes puissances européennes au sujet de la navigation de l'Escaut, la Hollande soutint que les deux bras de ce fleuve qui la traversent étaient complétement artificiels; qu'ils n'étaient navigables que grâce à l'industrie des Hollandais et aux travaux d'art qu'ils avaient exécutés et qu'ils entretenaient à leurs frais, De là, cette stipulation dans le traité de... Westphalie, que l'Escaut inférieur et les canaux de Sas et de Swin resteraient fermés du côté de la Hollande. A plus forte raison l'Autriche aurait pu soutenir que le haut Danube n'est devenu complétement navigable que grâce aux travaux que depuis 1818 elle a entrepris à l'effet d'en régulariser le cours. Le Danube traverse la monarchie autrichienne depuis Passau jusqu'à Orsowa dans une étendue de 1232 kilomètres. Pour avoir une idée de l'irrégularité de son cours, il suffit de dire, qu'après avoir, près de Vienne, atteint une largeur de 17,370 pieds, il se trouve, à quelques lieues d'Orsowa, tellement encaissé entre les montagnes appelées «les Portes de fer » que son lit ne dépasse pas 480 pieds.. Pendant que sur la frontière bavaroise il coule à 878 pieds au-dessus du niveau de la mer, il n'a près d'Orsowa qu'une élévation de 125 pieds, offrant d'une extrémité à l'autre une pente totale de 742 pieds, produite surtout par les sept cascades qui se suivent entre Alibegh et Orsowa. Depuis peu d'années seulement, les navires et stea mers chargés peuvent franchir régulièrement les Portes de fer. Il a fallu pour cela modérer la rapidité du cours f du fleuve et en adoucir graduellement les pentes trop précipitées, de lui créer pour ainsi dire un lit stable, qui permît d'établir dans tout son parcours un tirant • d'eau suffisant au passage des navires d'un certain tonnage. Les travaux d'art entrepris dans ce but se trouvent détaillés dans un savant et lucide exposé publié en 1854 par le baron de Czoernig, direc teur du bureau central. I. R. de statistique administrative. Les plénipotentiaires de l'Autriche n'auraient eu qu'à produire devant le congrès de Paris cet intéressant exposé: tout le monde y aurait puisé la preuve que la libre navigation du Danube, proclamée 'par le congrès de Vienne et confirmée par celui de Paris, ne figurerait vraisemblablement encore-long• temps que sur le papier, si l'Autriche, depuis presque quarante ans consécutifs, n'avait sacrifié des sommes énormes à vaincre les obstacles naturels de toute sorte qui entravaient la navigation du Danube. L'Autriche en livrant le haut Danube à la concurrence de tous les pavillons, non-seulement ne réclame aucune indemnité pour les travaux dont profiteront désormais toutes les nations, mais en outre elle assume le poids de nouveaux sacrifices, puisqu'elle aura à indemniser la compagnie I. R. privilégiée pour la na vigation à vapeur sur le Danube, dont le monopole, garanti par l'État, n'expire qu'en 1881. Ni la Grande-Bretagne, ni les États-Unis d'Amérique n'ont, en pareil cas, montré autant de désintéressé : ment que la cour de Vienne, Par le traité de paix signé à Paris en 1763 entre l'Angleterre, la France et l'Espagne, le Canada fut cédé à l'Angleterre par la France, et la Floride par l'Espagne; la frontière des possessions anglaises fut alors établie par une ligne imaginaire tracée par le milieu du Mississipi, depuis sa source jusqu'à Iber ville, et à travers ce dernier fleuve et les lacs de Maurepas et Pontchartrain jusqu'à la mer. Le droit de navigation du Mississipi fut accordé aux Anglais dans toute son étendue, sans qu'ils fussent soumis à aucun paye.. ment. Peu après la Louisiane fut eédée à l'Espagne par la France, et par le traité de Paris de 1783 la Floride fut rendue à l'Espagne...... Cependant, l'indépendance des États-Unis avait été reconnue et la navigation du Mississipi fut permise à leurs citoyens en vertu d'un traité intervenu entre eux et l'Angleterre. Mais l'Espagne, qui possédait les deux rives du fleuve à son embouchure, et même plus haut, prétendait avoir un droit exclusif à la navigation depuis cette embouchure jusqu'au point ou la frontière méridionale des Etats-Unis touchait le fleuve. Les Etats-Unis résistèrent à cette prétention et soutinrent leur droit de participation dans la navigation du Mississipi, se fondant pour cela sur les traités de 1763 et 1783, aussi bien que sur le droit naturel et .. le droit des gens. Les discussions entre les deux gou vernements furent terminées par le traité dé 1795, signé à San Lorenzo el Real, qui déclara (art. 4) que Ja navigation du Mississipi serait libre dans toute sa : |