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A furpaffé l'art de la Chine;
Vos vafes Japonnois & blancs,
Toutes ces fragiles merveilles ;
Ces deux luftres de diamans
Qui pendent à vos deux oreilles ;
Ces riches carcans, ces colliers
Et cette pompe enchantereffe
Ne valent pas un des baifers
Que tu donnais dans ta jeuneffe.

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LETTRE

LETTRE

A MONSEIGNEUR

LE CARDINAL DU BOIS. *

U

De Cambray, Juillet 1722.

Ne beauté qu'on nomme Rupelmonde,
Avec qui les amours & moi
Nous courons depuis peu le monde,
Et qui nous donne à tous la loi,

Veut qu'à l'inftant je vous écrive.

Ma Mufe, comme à vous, à lui plaire attentive, Accepte, avec transport, un fi charmant emploi.

Nous arrivons, monfeigneur, dans votre métropole, où je crois que tous les ambaffadeurs & tous les cuifiniers de l'Europe fe font donné rendez-vous. Il femble que les miniftres d'Allemagne ne foient à Cambray que pour faire boire la fanté de l'empereur. Pour meffieurs les ambaffadeurs d'Efpagne, l'un en

*Cette lettre eft de 1722. On l'a imprimée plufieurs fois, mais on la donne ici fur l'original. Madame de Rupelmonde

tend

était fille du Maréchal d'Alègre, mariée à un Seigneur Flamand, & mère du Marquis de Rupelmonde tué en Bavière.

182 LETTRE A MR. LE CARDINAL DU BOIS.

tend deux meffes par jour, l'autre dirige la troupe des comédiens. Les miniftres Anglais envoyent beaucoup de couriers en Champagne, & peu à Londres. Au refte, personne n'attend ici votre éminence on ne pense pas que vous quittiez le palais - royal pour venir viliter vos ouailles. Vous feriez trop fàché, & nous auffi, s'il vous falait quitter le ministère pour l'apoftolat.

Puiffent Meffieurs du Congrès,

En buvant dans cet afyle,
De l'Europe affûrer la paix !
Puiffiez-vous aimer votre ville,

Seigneur, & n'y venir jamais!
Je fais que vous pouvez faire des homélies,
Marcher avec un porte-croix,
Entonner la Meffe par-fois,

Et marmoter des litanies.

Donnez, donnez plutôt des exemples aux Rois;
Uniffez à jamais l'efprit à la prudence;
Qu'on publie en tous lieux vos grandes actions:
Faites-vous bénir de la France,

Sans donner à Cambray des bénédictions.

Souvenez-vous quelquefois, monfeigneur d'un homme, qui n'a en vérité d'autre regret que de ne pouvoir pas entretenir votre éminence auffi fouvent qu'il le voudrait, & qui de toutes les graces que vous pouvez lui faire, regarde l'honneur de votre converfation comme la plus flateufe.

LET

LETTRE

DE MONSIEUR LE CARDINAL

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DE FLEURY,

A MR. DE VOLTAIRE.

A fi ce 14. Novembre 1740.

E reçois dans le moment, monfieur, une feconde lettre de vous, & je n'en perds pas un auffi pour y répondre, dans la crainte que Mr. le marquis de Beauveau ne foit parti de Berlin. Je ne puis qu'approuver le voyage que vous y allez faire; & vous êtes attaché par des titres trop juftes & trop puiffans au roi de Pruffe, pour ne pas lui donner cette marque de votre refpect & de votre reconnaiffance. Le feul motif de la reine de Saba vous eût fuffi pour ne pas vous y refufer.

Je ne favais pas, que le précieux préfent que m'a fait madame la marquife du Châtelet, de l'Anti-Machiavel, vint de vous ; il ne m'en eft que plus cher, & je vous remercie de tout mon cœur. Comme j'ai peu de momens à donner à mon plaisir, je n'ai pû en lire jufqu'ici qu'une quarantaine de pages, & je tâcherai

de l'achever dans ce que j'appelle fort improprement ma retraite; car elle eft par malheur trop troublée pour mon repos.

Quel que foit l'auteur de cet ouvrage, s'il n'eft pas prince, il mérite de l'ètre, & le peu que j'en ai lu eft fi fage, fi raisonnable, & renferme des principes fi admirables, que celui qui l'a fait ferait digne de commander aux autres hommes, pourvû qu'il eût le courage de les mettre en pratique. S'il eft né prince, il contracte un engagement bien folemnel avec le public & l'empereur Antonin ne fe ferait pas acquis la gloire immortelle, qu'il confervera dans tous les fiécles, s'il n'avait foutenu, par la justice de fon gouvernement, la belle morale, dont il avait donné les leçons fi inftructives à tous les fouverains.

Vous me dites des chofes fi flateufes pour moi, que je n'ai garde de les prendre à la lettre; mais elles ne laiffent pas de me faire un fenfible plaifir, parce qu'elles font du moins une preuve de votre amitié. Je ferais infiniment touché, que fa majefté Pruffienne pût trouver dans ma conduite quelque conformité avec fes principes; mais du moins puis-je vous affurer, que je fens, & regarde les fiens comme le modèle du plus parfait & du plusglorieux gouvernement.

Je tombe fans y penfer dans des réflexions politiques, & je finis en vous affùrant, que je tâcherai de ne pas me rendre indigne de la bonne opinion que fa majefté Pruffienne dai

gne

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