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Et furtout de l'Amour volage;
Et quelques traits moins enfantins
Auraient été la vive image

Du Dieu qui préfide aux jardins.
Ce double & charmant avantage
Peut diminuer à la fin;

Mais la gloire augmente avec l'âge.
Du fculpteur la modefte main
Vous fera l'air moins libertin ;
C'eft de quoi mon héros enrage.
On ne peut filer tous fes jours
Sur le trône heureux des amours:
Tous les plaifirs font de paffage ;
Mais vous faurez régner toujours
Par l'efprit & par le courage.
Les traits du Richelieu coquet,
De cette aimable créature,
Se trouveront en mignature
Dans mille boètes à portrait,
Où Macé mit votre figure.

Mais ceux du Richelieu vainqueur,
Du héros, foutien de nos armes,
Ceux du père, du défenseur
D'une république en allarmes,
Ceux de Richelieu fon vengeur,

Ont pour moi cent fois plus de charmes.

Pardon.

Pardon. Je fens tous les travers
De la morale où je m'engage:
Pardon; vous n'êtes pas fi fage
Que je le prétens dans ces vers.
Je ne veux pas que l'univers
Vous croye un grave perfonnage.
Après ce jour de Fontenoi,
Où couvert de fang & de poudre,
On vous vit ramener la foudre
Et la victoire à votre roi:
Lorfque prodiguant votre vie,
Vous eutes fait pâlir d'effroi,
Les Anglais, l'Autriche, & l'envie,
Vous revintes vîte à Paris,
Mêler les myrtes de Cypris
A tant de palmes immortelles.
Pour vous feul, à ce que je vois
Le tems & l'amour n'ont point d'ailes
Et vous fervez encor les belles
Comme la France & les Génois.

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EPITRE

AURO I,

Préfentée à SA MAJESTÉ, au Camp devant Fribourg.

Ous, dont l'Europe entière aime ou craint la juftice, Brave & doux à la fois, prudent fans artifice, Roi néceffaire au monde, où portez-vous vos pas? De la fièvre échapé, vous courez aux combats! Vous volez a Fribourg! En vain la Peyronie * Vous difait, » Arrêtez, ménagez votre vie; » Il vous faut du régime, & non des foins guerriers; » Un héros peut dormir couronné de lauriers. Le zèle a beau parler, vous n'avez pû le croire. Rebelle aux médecins, & fidèle à la gloire, Vous bravez l'ennemi, les affauts, les faifons, Le poids de la fatigue & le feu des canons. Tout l'état en frémit, & craint votre courage, Vos ennemis, grand Roi, le craignent davantage : Ah! n'effrayez que Vienne, & raffûrez Paris : Rendez, rendez la joye à vos peuples chéris; Rendez-nous ce héros, qu'on admire & qu'on aime.

Un fage nous a dit, que le feul bien fuprême, Le feul bien, qui du moins reffemble au vrai bonheur, Le feul digne de l'homme, eft de toucher un cœur, Si ce fage eut raison, fi la philofophie

* Premier chirurgien du roi.

Plaça

Plaça dans l'amitié le charme de la vie,

Quel eft donc, juftes dieux! le deftin d'un bon roi,
Qui dit, fans fe flater, Tous les cœurs font à moi!
A cet empire heureux qu'il eft beau de prétendre!
Vous qui le poffédez, venez, daignez entendre,
Des bornes de l'Alface aux remparts de Paris,
Ce cri que l'amour feul forme de tant de cris.
Accourez, contemplez ce peuple dans la joye,
Béniffant le héros que le ciel lui renvoye.
Ne le voyez-vous pas, tout ce peuple à genoux,
Tous ces
avides yeux qui ne cherchent que vous,
Tous nos cœurs enflammés volant fur notre bouche?
C'eft-là le vrai triomphe, & le feul qui vous touche.
Cent rois au Capitole en efclaves trainės,
Leurs villes, leurs tréfors, & leurs dieux enchaînés,
Ces chars étincelans, ces prêtres, cette armée,
Ce fénat infultant à la terre opprimée,

Ces vaincus envoyés du fpectacle au cercueil,
Ces triomphes de Rome étaient ceux de l'orgueil :
Le vôtre eft de l'amour, & la gloire en eft pure;
Un jour les effaçait, le vôtre à jamais dure;
Ils effrayaient le monde, & vous le raffûrez:
Vous, l'image des Dieux fur la terre adorés !
Vous, que dans l'âge d'or elle eût choifi pour
Goûtez les jours heureux que vos foins font renaître.
Que la paix floriffante embelliffe leur cours :

maître !

Mars fait des jours brillans, la paix fait les beaux jours. Qu'elle vole à la voix du vainqueur qui l'appelle,

Et qui n'a combattu que pour nous &

1. Novembre 1744.

pour

elle.

LET

LETTRE

A SON ALTESSE SERENISSIME

MADAME

LA DUCHESSE DU MAINE,

Sur la victoire remportée par le Roi à Lawfelt.

Augufte fille & mère de héros,

Vous ranimez ma voix faible & caffée,
Et vous voulez que ma muse laffée,
Comme Louis ignore le repos.

D'un crayon vrai, vous m'ordonnez de peindre
Son cœur modefte, & fes brillants exploits,
Et Cumberland, que l'on a vû deux fois
Chercher ce roi, l'admirer & le craindre:
Mais des bons vers l'heureux tems est passé;
L'art des combats eft l'art où l'on excelle:
Notre Alexandre en vain cherche un Apelle;
LOUIS s'élève, & le fiécle eft baiffé.
De Fontenoy le nom plein d'harmonie
Pouvait au moins feconder le génie:
Boileau pâlit au feul nom de Woërden;
Que dirait-il, fi non loin d'Helderen,
Il eût falu fuivre entre les deux Nethes
Bathiani fi favant en retraites,

Avec d'Eftrée à Rofmal s'avancer?

La

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