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La gloire parle, & Louis me réveille;
Le nom du roi charme toujours l'oreille;
Mais que Lawfelt eft rude à prononcer!
Et quel befoin de nos panégyriques,
Difcours en vers, épitres héroïques,
Enregistrés, vifés par Crébillon *
Signés † Marville, & jamais Apollon?
De votre fils je connais l'indulgence;
Il recevra fans courroux mon encens ;
Car la bonté, la foeur de la vaillance,
De vos ayeux paffa dans vos enfans;
Mais tout lecteur n'eft pas fi débonnaire;
Et fi j'avais, peut-être téméraire,
Repréfenté vos fiers carabiniers

Donnans l'exemple aux plus braves guerriers;
Si je peignais ce foutien de nos armes,
Ce petit-fils, ce rival de Condé,
Du Dieu des vers fi fétais fecondé,

Comme il le fut par le Dieu des allarmes ;
Plus d'un cenfeur, encor avec dépit,
M'accuferait d'en avoir trop peu dit.

Très-peu de gré, mille traits de fatyre,
Sont le loyer de quiconque ofe écrire;
Mais pour fon prince il faut favoir fouffrir:
Il eft partout des risques à courir ;
Et la cenfure, avec plus d'injuftice,

Va

* Mr. Crébillon de l'académie Françaife, examinateur des écrits en une feuille pré

fentés à la police.

Mr. Feydeau de Marville alors lieutenant de police.

Va tous les jours acharner fa malice
Sur des héros, dont la fidélité

L'a mieux fervi, que je ne l'ai chanté.

Allons, parlez, ma noble académie,
Sur vos lauriers êtes-vous endormie?
Repréfentez ce conquérant humain,
Offrant la paix, le tonnerre à la main:
Ne louez point, auteurs, rendez justice;
Et comparant aux fiècles reculés

Le fiécle heureux, les jours dont vous parlez,
Lifez Céfar, vous connaîtrez Maurice. *

Si de l'état vous aimez les vengeurs,
Si la patrie eft vivante en vos cœurs,
Voyez ce chef, dont l'active prudence
Venge à la fois Gènes, Parme & la France;
Chantez Bellifle; élevez dans vos vers
Un monument au généreux Bouflers;
Il eft d'un fang qui fut l'apui du trône :
Il eût pû l'être; & la faulx du trépas
Tranche fes jours échapés à Bellone,
Au fein des murs délivrés par fon bras.

Mais quelle voix affez forte, affez tendre,
Saura gémir fur l'héroïque cendre

De ces héros que Mars priva du jour,

Aux yeux d'un Roi, leur père & leur amour?
O vous, furtout, infortuné Bavière,
Jeune Froulay, fi digne de nos pleurs,
Qui chantera votre vertu guerrière ?

Maurice comte de Saxe.

Sur

Sur vos tombeaux qui répandra des fleurs?
Anges des cieux, puiffances immortelles,
Qui préfidez à nos jours paffagers,
Sauvez Lautrec au milieu des dangers;
Mettez Ségur à l'ombre de vos aîles;
Déja Rocou vit déchirer fon flanc:
Ayez pitié de cet âge fi tendre;
Ne verfez pas les reftes de ce fang,
Que pour Louis il brûle de répandre :
De cent guerriers couronnez les beaux jours:
Ne frapez pas Bonac & d'Aubeterre,
Plus accablés fous de cruels fecours,
Que fous les coups des foudres de la guerre.
Mais, me dit-on, faut-il à tout propos

Donner en vers des liftes de héros?
Sachez qu'en vain l'amour de la patrie
Dicte vos vers, au vrai feul confacrés;
On flate peu ceux qu'on a célébrés,
On déplait fort à tous ceux qu'on oublie.
Ainfi toujours le danger fuit mes pas;
Il faut livrer prefqu'autant de combats,
Qu'en a caufé fur l'onde, & fur la terre,
Cette balance utile à l'Angleterre.

Ceffez, ceffez, digne fang de Bourbon,
De ranimer mon timide Apollon,
Et laiffez-moi tout entier à l'histoire;
C'est là qu'on peut, fans génie & fans art,
Suivre Louis de l'Escaut jufqu'au Jart:
Je dirai tout, car tout eft à fa gloire:

Il fait la mienne, & je me garde bien
De reffembler à ce grand fatyrique *
De fon héros difcret hiftorien >
Qui pour écrire un beau panégyrique
Fut bien payé, mais qui n'écrivit rien.

* Boileau.

LE

*

LE

TEMPLE

L

DU GOU T. a

E Cardinal, oracle de la France,

Non ce Mentor, qui gouverne aujourd'hui,
Mais ce Neftor, qui du Pinde eft l'appui,
Qui des favans a paffé l'espérance,
Qui les foutient, qui les anime tous,
Qui les éclaire, & qui règne fur nous
Par les attraits de fa douce éloquence;
Ce cardinal, qui fur un nouveau ton,
En vers latins fait parler la fageffe,
Réuniffant Virgile avec Platon,
Vengeur du ciel & vainqueur de Lucrèce. b

Cet ouvrage fut compofé en 1731. Il en a été fait plufieurs éditions; celle-ci eft incomparablement la meilleure, la plus ample & la plus correcte.

Ce

b L'anti- Eucrèce n'avait point encor été imprimé. Mais on en connaiffait quelques morceaux & cet ouvrage avait une très-grande répu tation.

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