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NORMAND.

UN Normand avoit nié en Justice, un dépộc

confié, & violé la religion du ferment. Sa partie adverfe, bien armée, l'attendit dans un lieu écarté, & ne fe contentoit pas de l'accabler de reproches. Entre vous & moi, lui dit le parjure, qui craignoit la fuite de cette rencontre, je ne nie point le dépôt; mais quelle néceffité que les Juges foient inftruits de nos affaires?

la

Un Normand racontoit à un autre, un fait abfurde & réellement incroyable. A d'autres, lui dit le premier; tu veux rire. Non, parbleu ! foi de Chrétien.- Le parierois-tu? Oh! non; mais j'en jurerois. M. Piron a fait de ce petit conte, matière d'une épigramme. Et dans la comédie de l'Ecoffaife, Wafp dit, au fujet de Lindanne, qu'il foupçonne d'être Ecoffaife: Je ne le parierois pas, mais j'en jurerois.

NOUVELLIST E.

LE ridic

E ridicule ordinaire de la plupart des Nouvelliftes de profeffion, eft de foupçonner une grande raison d'Etat dans les démarches les plus indifférentes du Ministère. C'est ce ridicule que l'auteur d'une feuille périodique d'Angleterre voulut un jour faire appercevoir L'Ambaffadeur de France avoit différé les fêtes qu'il devoit donner pour la naiffance du Duc de Bourgogne, & les Nouvelliftes faifoient là-deffus, des raifonnements à perte de vue. Il n'importe ni à l'une ni à l'autre Cour, dit l'Ecrivain périodique, que les réjouiffances fe célèbrent demain, ou que la célébration en foit renvoyée à la fin du monde,

N***, grand Nouvellifte, ne débitoit guère que de fauffes nouvelles. Un jour il en dit une vraie mais nullement vraisemblable. Quelqu'un la redifant d'après lui,on ne la crut point. Il cita fon auteur, & on crut moins encore. Un troifième survint, qui confirma la nouvelle, & la prouva. Mais, reprit ⚫vivement un des incrédules, puifque cela eft vrai, pourquoi N*** l'a-t-il dit? Effais de Littérature.

Quelqu'un demandoit, en présence de M. N***, s'il y avoit des nouvelles intéreffantes. On lui répondit: Monfieur N*** peut vous en instruire car il en fait.

?

On a fait ce conte. Un Nouvellifte de profeffion avoit toujours autour de lui, dans les promenades publiques, beaucoup de gens qui l'écoutoient. Un jour, voyant un laquais qui étoit mêlé parmi les autres, il voulut l'envoyer plus loin. Monfieur, lui dit le laquais, je retiens ici place pour mon maître.

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L'OPERA Français, dit un Auteur moderne, eft

parmi les drames, ce que l'Orlando eft parmi les poëmes épiques. Lulli & Quinault peuvent en être regardés comme les créateurs. Voyez Lulli, Quinault, Didionnaire des Portraits & Anecdotes des Hommes illuftres.

Le Triomphe de l'Amour eft le premier Opéra dans lequel on introduifit des danfeufes. Ce ballet fut d'abord exécuté à Saint-Germain-en-Laye, de*vant Sa Majefté, le 21 Janvier 1682, Monfeigneur, Madame la Dauphine, Mademoiselle, le Prince & la Princeffe de Conti, le Duc de Vermandois, Mademoiselle de Nantes, avec plufieurs autres Seigneurs & Dames de la Cour, dansèrent dans ce ballet. Ce mélange des deux fexes rendit le spectacle fi brillant, & fut fi applaudi, que lors de la représentation du même opéra à Paris, fur le théa

tre du Palais Royal, le 6 Mai fuivant, on crut qu'il étoit indifpenfable, pour le fuccès de ce genre de fpectacle, d'y remplacer les Dames de la Cour par des danfeufes. Depuis cette époque, elles ont toujours continué d'être une des portions les plus brillantes de l'Opéra.

"

Parmi les danfeufes qui ont été applaudies fur ce théatre, nous citerons la décente Sallé, qui, par fes mœurs, mérita l'eftime publique.

De tous les cœurs & du fien la maîtreffe,
Elle allume des feux qui lui font inconnusa
De Diane c'eft la Prêtreffe,

Danfant fous les traits de Vénus.

Avec quelle ame & quelle vérité cette aimable danfeufe dirigeoit-elle tous fes mouvements! Le fpectateur enchanté, y voyoit toujours un tableau fini. Mademoiselle Sallé favoit même enrichir le deffein du Poëte, par des actions épifodiques, entièrement de fon invention. L'auteur du Traité hijtorique de la Danfe, nous rapporte à ce fujet, certe anecdote précieuse pour les arts. Dans la paffacaille de l'Europe galante, cette danfeufe paroiffoit au milieu de fes rivales, avec les graces & les defirs d'une jeune Odalique qui a des deffeins fur le cœur de fon maître. Sa danfe étoit formée de toutes les jolies attitudes qui peuvent peindre une pareille paffion. Elle l'animoit par degrés: on lifoit, dans fes expreffions, une fuite de fentiments: on la voyoit flottante tour-à-tour, entre la crainte & l'efpérance; mais, au moment où le Sultan donne le mouchoir à la Sultane favorite, fon vifage, fes regards, tout fon maintien prenoient rapidement une forme nouvelle. Elle s'arrachoit du théatre, avec cette espèce de défespoir des ames vives & tendres, qui ne s'exprime que par un excès d'accablement.

La danfe remplit aujourd'hui tellement les divers actes de nos opéra, que ce théatre paroît dreffé moins pour la représentation d'un poëme lyrique,

que pour une Académie de danfe. La langueur mor telle de notre récitatif n'eft pas la moindre caufe de ce goût vif des fpectateurs pour la danfe. Auffi un homme d'efprit, à qui on demandoit un moyen pour foutenir un Opéra prêt à tomber, répondit affez plaifamment, qu'il n'y avoit qu'à alonger les danfes, & raccourcir les jupes.

La première fois que l'opéra d'Ifis fut représenté devant Louis XIV, ce Prince en fut fi fatisfait, qu'il fit rendre l'Arrêt du Confeil, par lequel il eft permis à un Gentilhomme, de chanter à l'Opéra, d'en retirer des gages, fans déroger.

Thevenard, retiré du théatre en 1727, & mort en 1731, étoit la plus belle baffe-taille que l'on eût entendue. Un Abbé, placé au parterre de l'Opéra, un jour que cet acteur repréfentoit, étoit importuné par un fat qui fredonnoit continuellement à fes oreilles. L'Abbé fit quelques geftes de dépit. Et qu'avez-vous, Monfieur l'Abbé, lui dit le fat? vous ne me paroiffez pas content. C'eft, Monfieur, répondit l'Abbé, que j'enrage contre ce coquin de Thevenard qui m'empêche de vous entendre.

Ceux qui ont recueilli les anecdotes du théatre, nous en citent quelques-unes qui peuvent fervir à nous rappeller ces jeux olympiques, où la Grèce affemblée, couronnoit fes héros. La première fois que le Maréchal de Villars vint à l'Opéra, après Ja grande affaire de Denain, en 1712, là Demoiselle Antier faifant le rôle de la Gloire, dans le prologue d'Armide, lui préfenta dans las balcons du théatre, où il étoit, une couronne de laurier. Le lendemain, le Maréchal lui envoya une tabatière d'or. La même chofe eft arrivée pour le Maréchal de Saxe, après la célèbre journée de Fontenoy. Ce Général étant dans les balcons de l'Opéra, la Demoiselle de Metz, nièce de la Demoiselle Antier, représentant la Gloire, dans le prologue du même opéra d'Armide, lui préfenta auffi la couronne de laurier, que fa modeftie ne lui permit d'accepter qu'avec beaucoup de peine. Ce Maréchal envoyi

le lendemain, à la Déeffe, pour dix mille francs de pierreries.

ORACLES.

LA confultation des oracles, étoit, comme l'ori

fait, la pratique la plus fuperftitieufe de la religion des anciens. Il y en avoit à Délos, à Claros, à Delphes, & par-tout où l'on rencontroit un peuple crédule & des cavernes.

Lorsqu'il faudra entreprendre la défense de vos amis, dit Epictète, ne confultez point les devins, & n'attendez point leurs réponfes fur ce que vous devez faire. Les anciens ont, fur ce principe, admiré la réponse que l'oracle d'Apollon fit à ceux de Cumes, qui l'envoyèrent confulter, s'ils livreroient au Roi de Perfe, Pactias qui s'étoit mis fous leur protection. L'oracle répondit qu'ils le livraffent. Ariftodicus, un des premiers de la ville, foutint que l'oracle n'avoit pu faire une réponse fi injufte, & qu'il falloit de néceffité, que les députés euffent rapporté faux. La ville, fur cette repréfentation, chargea Ariftodicus d'y aller lui-même avec de nouveaux députés. L'oracle fit la même réponse. Ariftodicus, peu fatisfait, fe promenant autour du temple, apperçut un nid d'oiseaux qu'il chafla à coups de pierres. Alors il fortit du fanctuaire, une voix qui lui cria: « Déteftable mortel!

qui te donne la hardieffe de chaffer d'ici, ceux qui "font fous ma prote dion?-Eh quoi! grand Dieu » répondit auffi-tôt Ariftodicus « vous venez de » nous ordonner cette action injufte, en nous com"mandant d'abandonner Pacias qui s'eft refugié "fous notre protection. Impies que vous êtes » répondit le Dieu « puifque vous savez que c'est "mal-fait d'abandonner ceux qui fe jettent entre » vos bras, pourquoi venez-vous me confulter? Eft» ce pour me tenter? »

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