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On accabloit le pauvre auteur. M. de Voltaire, qui nous a rapporté cette anecdote, étoit de ce fouper. -Il leur dit : « Meffieurs, vous avez tous raifon, vous » jugez en connoiffance de caufe; quelle différence » du ftyle de la Mothe à celui de la Fontaine! Avez>> vous vu la dernière édition des Fables de la Fon»taine? Non, dirent-ils. Quoi! vous ne connoiffez » pas cette belle fable qu'on a trouvée parmi les papiers de Madame la Ducheffe de Bouillon » ?II leur récita la fable. Ils la trouvèrent charmante, ils s'extafioient: « Voilà du la Fontaine difoient-ils, «c'eft la nature pure; quelle naïveté ! quelle gra"ce! Meffieurs, leur répondit-il, cette fable eft de la Mothe. Alors ils la lui firent répéter, & la trouvèrent détestable.

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Mignard, rival de le Brun, premier Peintre du Roi fous Louis XIV, avoit fi bien imité la manière du Guide, dans un tableau de la Magdeleine, que ce tableau fut vendu à un amateur comme étant de cet habile maître. Mais Mignard, dans la vue de tendre un piège à le Brun, que cet amateur connoiffoit, fit naître des doutes fur ce tableau. Il avança même qu'il étoit bien inférieur aux ouvrages du Guide. Le Brun, confulté & prévenu en faveur de ce tableau, par la raifon même que Mignard fembloit le méprifer, foutint non-feulement que le Guide l'avoit peint, mais encore qu'il étoit du meilleur temps de ce maître. Mignard, voyant l'affaire affez engagée pour fa propre gloire, découvrit lui-même la fupercherie, & en denna un jour, en présence de le Brun, les preuves les plus convaincantes. Celui-ci, un peu piqué, lui répondit: A la bonne-heure, faites donc toujours des Guides & non des Mignards.

Un Peintre de portraits, que l'on accufoit de ne pas bien faifir la reffemblance, voulut s'affurer un jour fi le reproche qu'on lui faifoit,étoit fondé. Il annonce à plufieurs perfonnes, & à ses enfants, qu'il a fait un portrait de quelqu'un qu'ils connoif fent tous, & qui le difpute au naturel pour la ref

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femblance. On vient voir fon tableau; on le critique, & la prévention agiffant, on trouve qu'il n'a point faifi les traits de fon original. Vous vous trompez, Meffieurs, dit alors la tête du tableau, car c'eft moi-même. En effet, c'étoit un ami qui s'étoit prêté au projet du Peintre, en plaçant fon vifage dans la toile d'un cadre ajusté à cet effet.

Q

PRIX DES CHOSES.

UI connoît mieux le prix des chofes qu'un mourant? Les paffions, qui lui faifoient autrefois illufion, l'abandonnent alors pour ne lui laiffer que le fpectacle effrayant de fa vie paffée. Un Monarque, ainsi que le rapporte le fage Sadi, étoit couché fur le lit de la mort; un courier entra & lui dit: Seigneur, nous avons pris une ville fur les ennemis. Allez, répond le Prince, l'annoncer à mon héritier, & dites-lui, que la prise de ceng villes ne confole pas un Roi à fes derniers moments, autant que le fouvenir d'une bonne action.

PROVERBES.

MAXIME populaire, ou façon de parler fenten

cieufe, qui eft dans la bouche de toutes fortes de perfonnes. Il y a des proverbes où la métaphore n'entre pas; mais ordinairement ils font exprimés en termes figurés. Les proverbes étrangers nous paroiffent en général avoir, foit pour le fens, foit pour l'expreffion, plus de fineffe & d'agrément que les proverbes Français. La trop grande familiarité que nous avons contractée avec ceux-ci, & l'habitude de les voir employer par toutes fortes de perfonnes, peuvent fans. doute contribuer à nous les rendre plus infipides. Nous nous contenterons d'en citer ici quelques-uns.

Proverbes Français.

PIERRE qui roule, n'amaffe point de mouffe. Il n'y a point de roses fans épines.

Un mauvais accommodement vaut mieux qu'un bon procès.

La voix du peuple eft la voix de Dieu.
Les bons comptes font les bons amis.
Les honneurs changent les mœurs.

Maifon bâtie & vigne plantée, ne se vendent pas ce qu'elles ont coûté.

Amour & Seigneurie nè veulent point de compagnie.

Avec le temps & la patience, on acquiert la fcience.

La présence du maître engraiffe le cheval.
Qui a terre,

guerre.

L'âne du commun eft toujours le plus mal bâté. Pour faire un bon ménage, il faut que l'homme foit fourd & la femme aveugle.

Ménager le vin quand le tonneau eft à sa fin, c'eft s'y prendre un peu tard.

L'animal le plus féroce refpecte fon femblable.
Il n'y a bon cheval qui ne bronche.

Un mors doré ne rend pas le cheval meilleur.
Le Moine répond comme l'Abbé chante.
A un bon joueur, la balle vient.

Quand il fait beau, prends ton manteau ; quand il pleut, prends-le fi tu veux.

Belles paroles & mauvais jeu trompent les jeunes & les vieux.

Péché caché eft à demi pardonné.

Il faut avoir plufieurs cordes à fon arc. Il n'y a point de fi belles roses qui ne devien nent gratte-cus

Ventre affamé n'a point d'oreilles.

A bon appétit, il ne faut point de sauce.
Chien qui aboie, ne mord pas.
Chaque oifeau trouve fon nid beau,
Qui aime Bertrand, aime fon chien.

Chat échaudé craint l'eau froide.

Fin contre fin n'eft pas bon à faire doublure.
Il n'eft point de belles prifons ni de laides amours.
Au royaume des aveugles les borgnes font rois.
Chaque pays, chaque guife.

Qui fert tout le monde n'oublie perfonne,
On connoît les amis au besoin.

Dis-moi qui tu hantes, je te dirai qui tu es.
Proverbes Italiens.

La vita al fin, il di loda la fera : Louez la vie d'une perfonne après fa mort, & le jour quand if eft nuit.

Vuoi farvendetta del tuo nemico,governali bene: Si tu veux te venger de ton ennemi, gouverne-toi bien.

E meglio effer amici da lontamo, che nemici d'appreffo: Il vaut mieux être ami de loin, qu'ennemi de près.

Paffato pericolo, gabbato il fanto: On ne se fouvient plus de fes promeffes, quand le péril eft paffé.

Con tempo e la paglia, fi maturam le nefpole: Avec le temps & la paille, les nefles fe mûriffent. Honor di bocca affai vale, pocco cofta: Les belles paroles fervent beaucoup, & coûtent peu.

Cento ore di faftidio, non pagano un quatrino di debito: Cent heures de chagrin ne paient pas un fou de dettes.

E meglio un buon amico che cento parenti : Un bon ami vaut mieux que cent parents.

La peggior ruota del caro fa maggior ftrepito; La plus mauvaise roue du chariot fait toujours le plus de bruit.

Che ti fa piu carezze, che non fuole,o t'a ingan narto, o ingannari vuole : Celui qui te fait plus de careffe qu'à l'ordinaire, t'a trompé, ou veut te tromper.

Bandeera vechia honor di capitano : La vieille bannière est l'honneur du capitaine.

P

Ne di tempo, ne di fignoria,ti pigliar malincenia: Ne te ch grine ni du temps, ni du gouver

nement.

L'arme de peltroni non tangliano ne farano: Les armes des poltrons ne percent point.

Proverbes Espagnols.

DANS les confeils, les murailles ont des oreilles. La chaffe, la guerre, la galanterie; pour un plaifir mille peines.

Fais bien, tu auras des envieux; fais mieux, tu les confondras.

Le renard fait beaucoup; mais une femme amoureufe en fait davantage.

La fanté du corps eft le pavot de l'ame.

Il n'y a point de plus fidèle miroir qu'un vieux

ami.

La langue est le témoin le plus faux du cœur. L'efpérance eft le viatique de la vie humaine. La négligence eft l'émail de la vraie beauté. Chacun eft le fils de fes œuvres.

Les actions de chaque homme font le pinceau de fon naturel.

Celui à qui vous donnez, l'écrit fur le fable, & celui à qui vous ôtez, l'écrit fur l'acier.

Proverbe Hollandais.

CEUX qui confeillent, ne paient pas; pour faire entendre, que confeiller ne donne pas les moyens d'exécuter.

Proverbes Ruffes.

ON reçoit l'homme fuivant l'habit qu'il porte & on le reconduit fuivant l'efprit qu'il a montré Proverbes Afiatiques.

AVEC le temps & la patience, la feuille du mûrier devient fatin.

Quiconque croit pouvoir contenter fes defirs par la poffeffion des chofes qu'il fouhaite, reffem

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