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Par une coupable habitude,

Ne confondez jamais vos chants precipitez,

Pefez avec exactitude

Des mots que DI EU même a diotez.

Pour donner à la voix une forcé nouvelle,
Le chant demeure fufpendu

Faites de ce repos un ufage fidele,

Qu'aucun inftant n'en fait perdu. Des Hymnes recitez penetrez le Myftere, Pendant tous ces inftants, l'efprit Goute à longs traits & fe nourrit

Des faintes veritez que la bouche profere.

Lorsqu'un fujet de joye exige un chant joyeux.
Ne le corrompez pas par une voix traînante,
Craignez auffi, craignez qu'un fon melodieux,
Par fa douceur ne vous enchante.
C'est par la feule verité, late

Qu'on trouve en ces Hymnes cachée,
Que l'ame doit être touchée
Que l'efprit doit être flatté.

N'allez point comme en plein theatre
D'un gefier delicat adouciffant les fons

Folement admiré d'une troupe idolatre,

Faire aux Hymnes facrez prendre un air de chanfons. Loin que le Seigneur vous entende,

Il eft irrité par vos vœux ;

D'un cœur touché, contrit les foupirs amoureux
Eft le langage qu'il demande.

D'une vaine grimace évitez la laideur,

Nouvrez pas trop la bouche & qu'une voix tonnante En fortant avectrop d'ardeur,

N'aille point dans les airs répandre l'épouvante

De ces cris fierement poussez
En vain les Temples retentiffent,
En vain les voutes en mugiffent,
Vos cris ne font point exaucez,
Faux Prophétes, troupe insensée

vous qui servez des Dieux fourds,

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Par des cris redoublez implorez leur fecours. Notre DiBu fçait des cœurs decouvrir la pensée, Il en penetre les defirs s

De cette demeure brillante,

Où des efprits heureux il fait tous les plaifirs, Sans qu'on lui fasse entendre une voix éclatante, il entend nes moindres foupirs.

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Ayez foin de fuivre l'usage, Le rit n'est point à votre choix. Dans des lieux differens le devoir vous engage, A fuivre differentes loix.

Le Temple du Seigneur fert d'azile à la paix,
Que la difcorde en foit bannie ;
Pendant une ceremonie,

Que jamais de legers fujets
N'excitent de debats frivoles.
Si l'on fait quelque faute au chœur,
Moderez toujours vos paroles,
Et remontrez avec douceur:
Mais lorsqu'une troupe mutine
Ofe contre vous s'emporter,
Il ne faut jamais qu'on s'obftine
A trop long-tems lui refifter:
Cedez vous aurez la victoire
Cedez à leur vaine fureur s

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A conferver la paix il est bien plus de gloire, Qu'à vainement combattre une frivole erreur.

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En chantant les divins Cantiques,
Ne montrez jamais de tiedeur,

C'est l'employ glorieux des troupes Angeliques,
En partageant leurs foins, partagez leur ardeur.
Que même avant la mort votre ame delivrée
Des nœuds qui l'attachent au corps,

Faffe de genereux efforts,

Et penetre des Cieux la demeure facrée.
Allez vous joignez à ces efprits heureux,
Admirez les tranfports de leur amour extrême
Votre Dieu, mortels, eft le même,
Cherchez à l'adorer comme eux.

C'est ainsi que dès cette vie
Deja de l'olympe habitant
Du bonheur le plus éclatant,
Votre efprit goûtera la douceur infinie.
Vous n'êtes ici qu'exilez:

Heureux fi de ces loix, obfervateurs zelez,
Vous rentrez dans cette patrie,

Où d'éternels plaifirs vos vœux feront comblez.

DISPUTATIO TERTIA

DE EPIGRAMMATE IN ANTONII ARNALDI

A

COR TRANSLATUM.

Ntoine Arnauld Docteur de Sorbonne, mourut dans une ville des pays bas le 8. Août 1694. Alors les Dames de Port-Royal des Champs, auffi zelées pour fa memoire après fa mort, qu'elles l'avoient été pour fa perfonne durant la vie demanderent à avoir fon cœur dans leur Eglife: ce qu'on leur accorda. Elles le placerent dans le lieu le plus honorable qu'il leur fut poffible.

Le cœur étant placé il fut queftion d'une Epitaphe. On crut ne pouvoir mieux s'adreffer qu'à Monfieur de Santeul. Comme l'affaire étoit délicate, les Religieufes crurent devoir fe rendre favorable notre Poëte. Pour cela elles l'inviterent à venir paffer quelques jours à Port-Royal, avec un de les confreres qui en étoit Superieur, & durant le féjour qu'il y fit, il compofa cette Epitaphe pour M. Arnauld.

IN ANT. ARNALDI COR, Ab exteris ad Portum Regium prope Parifios, ubi diu commoratus eft, olim fuerat allatum.

EPIGRAMMA.

C XI V.

D fanctas rediit fedes, ejectus & exul:

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A Hofte triumphate, tot tempeftatibus actus
Hoc PORTU in placido, hac facra tellure quiefcit
ARNALDUS veri defenfor, & Arbiter æqui.
Illius offa memor fibi vindicet extera tellus:
Huc cœleftis amor rapidis cor tranftulit alis,
Cor nunquam avulfum nec amatis fedibus abfens.

EPITAPHE DU COEUR DE MARNAULD

APPORTE'

A PORT-ROYAL DES CHAMP S.

TRADUCTION.

CXIV.

Chavien habiter me maison cherie,

Haffé, quoique vainqueur du fein de fa parrie,

Cet Arbitre des mœurs par qui la verité
Triompha du menfonge & de l'impieté;
Au port & dans le fein d'une terre facrée,
Il goûta après l'orage une paix aẞurée:
Qu'en des lieux inconnus, le fort injurieux
Cache du Corps d'ARNAULD les reftes precieux;
Ici l'amour Divin fur ses rapides ailes,
Lui même a transporté les depoüilles mortelles
De ce Coeur que l'exil n'a jamais détaché

Des faints lieux dont ARNAULD fut par force arraché.

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