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exactement, il avait trouvé, comme saint Cyrille, que le jour de Pâques de l'année suivante devait être le dimanche neuvième des calendes de mai, c'est-à-dire le vingt-troisième d'avril, dont il explique les raisons. Il fait mention du miracle d'un baptistère de Sicile, arrivé l'an 417, sous le pontificat de Zosime.

La même année, 443, saint Léon écrivit aux évêques de Campanie, de Picenum, de Toscane, et de toutes les provinces suburbicaires, une lettre décrétale. Picenum est aujourd'hui une grande partie de la marche d'Ancône. Trois évêques, Innocent, Légitime et Ségèce, furent chargés de porter dans les provinces cette décrétale, qui apparemment était le résultat d'un concile. Elle reprend divers abus: que l'on élevait au plus haut rang du sacerdoce des gens de condition servile, ou engagés à des devoirs incompatibles avec le service de l'Église et quelquefois malgré leurs maîtres; que l'on ordonnait des bigames; qu'il y avait des clercs qui prêtaient à usure ou sous leur nom, ou sous des noms empruntés quoique l'usure fût défendue même aux laïques. Le Pape ordonne qu tous ces abus soient retranchés, sous peine aux évêques contrevenants, d'être interdits et privés de sa communion, et il recommande d'observer les décrets de saint Innocent et de ses autres prédéces

seurs.

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Les conciles provinciaux concouraient avec le Pape au rétablissement de la discipline. Nous signalerons particulièrement le premier concile d'Orange, en 441, et le concile de Vaison, en 442. Les canons de ces deux conciles sont une nouvelle preuve des sentiments de charité et de liberté qui distinguaient l'Église dans ces siècles de violences et d'esclavage. Le concile d'Orange prescrit de donner aux insensés, souvent si maltraités

comme possédés du démon, tout ce que la piété exige. Il renouvelle le respect dû au droit d'asile, en défendant de livrer ceux qui se réfugient dans une église Il ordonna de réprimer, par censure ecclésiastique, celui qui voudra réduire en servitude ceux qui auront été affranchis par l'Église ou recommandés à l'Église par testament. Nous voyons le concile de Vaison prendre sous sa protection les enfants trouvés. Pour réprimer la coutume barbare qu'avaient les païens d'exposer leurs enfants, Constantin, inspiré par la foi catholique, avait ordonné, en l'année 331, qu'ils appartiendraient à ceux qui les auraient nourris et élevés en qualité de leurs enfants, ou de leurs esclaves, à leur choix, sans que les pères ou les maîtres eussent aucun droit de les répéter. Honorius avait ajouté, en 412, que celui qui élèverait l'enfant, prendrait pour sa sûreté une attestation de témoin, avec la signature de l'évêque. On ne discontinuait pas d'inquiéter ceux qui avaient levé des enfants exposés, ce qui faisait que personne n'osait s'en charger, et ces pauvres créatures périssaient. C'est pourquoi le concile de Vaison ordonna que le dimanche le diacre annoncerait à l'autel qu'un enfant exposé avait été levé, afin que si on prétendait le reconnaître, la personne eût à le déclarer dans les dix jours; sinon celui qui le redemanderait, serait frappé de censure ecclésiastique, comme homicide.

Saint Léon ne borna pas son zèle à resserrer les liens de la discipline; le maintien du dogme dans toute sa pureté fixa aussi son attention, dès le commencement de son pontificat. Il s'occupa d'abord de combattre les manichéens qui étaient, à cette époque, très-nombreux dans Rome. Après la conquête de l'Afrique par les Vandales, une foule de ces hérétiques s'étaient rendus

en Italie et surtout à Rome, où ils répandirent secrètement leur doctrine et formèrent plus tard des sociétés de leur communion. Leur extérieur se montrait sous les apparences de la modestie et ne trahissait par aucun signe leur affiliation; leur vie était austère, ils se soumettaient aux plus grandes privations, sans toutefois attirer les regards, parce que la pratique des mortifications était alors universelle. Ils restèrent pendant fort longtemps inconnus; car ils exerçaient leur culte et propageaient leur doctrine avec le plus profond mystère, et tout annonce que ce ne fut que vers la fin de la seconde année de son pontificat, au mois de novembre de l'an 443, que saint Léon acquit la preuve certaine de l'existence à Rome de cette secte (1). Mais à peine se fut-il assuré de ce fait, qu'il prit immédiatement les mesures les plus efficaces pour supprimer ces hérétiques. La tendance à se livrer, sous le manteau de la dévotion et de l'austérité, aux mœurs les plus dissolues, détermina la sévérité dont le Pape usa à leur égard. Des témoins oculaires lui ayant fait connaître les infamies dont ils se rendaient coupables dans leurs assemblées, son premier acte fut de prononcer, pendant le jeûne du mois de décembre 443, une homélie pour mettre les fidèles en garde contre les manoeuvres des manichéens, et solliciter le concours des catholiques dans ses efforts pour découvrir les partisans de cette secte. Dans son zèle pour conserver intact le dépôt de la foi et pour le salut des âmes, il prit souvent la parole devant le peuple afin de lui exposer les idées des manichéens, les signes auxquels on pouvait les reconnaître. Transportons-nous par la pensée à quatorze siècles en arrière, dans une des véné

(1) Léon, opp. Ed. Ballerini, t. II, p. 583,

rables basiliques où saint Léon venait enseigner les fidèles. Devenons un des auditeurs du grand pontife, écoutons-le nous dévoiler les mensonges, les ruses et les menées des ennemis de la foi.

Le jour de la fête de la Pentecôte, il prononça ces paroles (1):

« Arrêtons-nous un peu, mes chers Frères, pour saisir avec intelligence ce que le Seigneur veut nous faire entendre, lorsqu'il dit : Le Saint-Esprit dira tout ce qu'il aura entendu, et il vous annoncera les choses à venir. Car outre plusieurs autres passages de la sainte Écriture qui confondent l'impiété des manichéens, ces paroles qui sont sorties de la bouche de Celui qui était la vérité même, font voir clairement l'absurdité de leurs dogmes, et rendent méprisables leurs mensonges sacriléges. En effet, pour paraître avoir dans le chef de leur secte quelque chose de grand et un homme extraordinaire, ils ont voulu faire croire que dans leur maître Manès, c'était le Saint-Esprit qui s'est fait voir aux hommes; et que le Paraclet, promis par le Sauveur, n'était venu que lorsque cet imposteur, qui a trompé tant de malheureux, a paru dans le monde. Ils disent que le SaintEsprit résidait tellement dans sa personne, que leur maître Manès était lui-même cet esprit divin qui, par le ministère de sa parole et sous la forme d'un corps humain, enseignait à ses disciples toutes les vérités dont il leur donnait l'intelligence, et qu'il leur décou

(1) Dernière homélie pour la fête de la Pentecôte

vrait des secrets qui avaient été inconnus à tous les siècles précédents. J'aurais honte de réfuter sérieusement de telles absurdités, s'il n'y avait encore quelques personnes assez sottement crédules pour y ajouter foi. Qu'elles sachent donc que leur maître Manès, digne ministre du père du mensonge et l'auteur des superstitions les plus obscènes, n'a paru sur la terre que deux cent soixante ans après la Résurrection de notre Seigneur Jésus-Christ, et qu'il a été condamné dans le temps où régnait l'empereur Probe, sous le consulat de Paulin. Les chrétiens souffraient alors la huitième persécution, et il y avait une infinité de martyrs qui avaient prouvé par leurs victoires l'accomplissement des promesses faites par le Sauveur, lorsqu'il disait à ses disciples: Quand on vous livrera aux gouverneurs et aux magistrats, ne préméditez point comment vous devez parler, et ne pensez pas à ce que vous devez dire. Les paroles que vous aurez à faire entendre, vous seront inspirées à l'heure méme, car ce n'est point vous qui parlerez, mais c'est l'esprit de votre Père qui parlera en vous.

« La promesse de Jésus-Christ n'a donc pu rester pendant un si long temps sans être accomplie, et cet esprit de vérité que les impies ne sont pas capables de recevoir, n'a point différé à répandre sur les membres de son Église ses dons de sagesse et d'intelligence, de science et de piété, de conseil, de force et de crainte, jusqu'à la naissance de cet imposteur dont toute la doctrine n'est qu'un tissu de mensonges les plus in

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