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Thys et la perspicacité du roi Léopold s'appliquèrent à doter l'Etat Indépendant d'une voie ferrée'. Leurs efforts assemblèrent des capitaux dans un pays qui ne croyait pas l'entreprise possible, formèrent une société d'études, commencèrent les travaux (1890) et vainquirent à la fois l'obstination des hommes et de la nature.

Formidables furent les obstacles à surmonter au sortir de Matadi d'immenses bancs de quartz blanc d'une dureté insoupçonnée fermaient tout passage, plus loin des entassements de roches semblaient à la fois impossibles à gravir ou à contourner. Le chemin de fer ne pouvait se construire que par cheminement, l'absence de tout moyen de communication obligeait l'approvisionnement des chantiers à se faire par le rail, la construction des amorces de la ligne était la condition essentielle de son établissement. Par suite de la réverbération du soleil sur les sols pierreux, arides, encaissés, de couleur claire, la chaleur y atteint parfois dans la journée 95° pour descendre à 8 ou 10° seulement durant la nuit. La vie des ouvriers était intolérable : en trois ans (1890-93) sur 7.000 hommes de couleur employés aux travaux, près de 4.000 moururent. Les vides étaient diffi-. ciles à remplir. La population de la région traversée est peu dense, et d'ailleurs malhabile aux travaux pénibles. Des Chinois, des Barbades furent employés sans succès. Les Sénégalais résistèrent mieux. On dut élever les salaires pour empêcher les désertions. Cependant les premières traverses en bois, qu'on avait posées, étaient détruites par les fourmis blanches; on dut faire venir des traverses de fer. A cause du ruissellement rapide, les eaux dévalent en abondance dans les thalwegs et exigent pour leur passage sous la ligne de nombreux et importants débouchés; il fallut multiplier les travaux d'art. L'argent faillit manquer plusieurs fois. Après neuf années de travail assidu, le 16 mars 1898, le rail atteignait le Pool à Léopoldville. La voie, longue de 388 kilomètres, large de 075, a coûté plus de 75 millions de francs (quelques kilomètres ont coûté 240.000 francs l'un). C'est sans doute des chemins de fer africains celui qui a absorbé le plus de capitaux.

Malgré le faible écartement de la voie, la prospérité commerciale a, il est vrai, été grande tout de suite. L'ivoire et les caoutchoucs de l'intérieur, même de la région française, assurèrent très vite au chemin de fer un fret abondant. Des tarifs, qu'on évita de trop abaisser, rendirent le trafic rémunérateur. L'utilisation de la voie pour le transport des fonctionnaires,

Les chemins de fer aux colonies et dans les pays neufs, t. II (5e série des Publications de la Bibliothèque Coloniale Internationale), Bruxelles, 1900, in-8°.

agents, troupes, vivres, matériel, non seulement dans l'Etat Indépendant, mais dans l'hinterland du Congo français, dans l'Oubangui et jusqu'au Tchad, fut encore une cause de bénéfices. Le chemin de fer belge est devenu la voie d'accès non seulement du bassin du Congo, mais d'une partie du Soudan. Les recettes ont de bonne heure été très élevées. Elles présentent les chiffres bruts suivants :

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La diminution constatée dans les exercices 1901 à 1903 est due à l'application de tarifs plus doux et aussi sans doute à la raréfaction du caoutchouc et surtout de l'ivoire, surexploités au début. Il semble actuellement que les recettes tendent à remonter au chiffre élevé des premières années. Les projets des Belges dans la région des Grands Lacs assureront au chemin de fer le commerce de pays nouveaux, mais la Compagnie aura besoin, a déjà besoin d'augmenter son matériel, son personnel; peut-être lui faudra-t-il un jour porter sa voie à un écartement plus fort pour supporter un trafic plus considérable. Il est constant pourtant que le chemin de fer rendra avec usure et pendant longtemps les capitaux qu'il a demandés.

Sur l'estuaire du Congo se greffe une autre ligne, également construite et exploitée par les Belges : c'est le petit tronçon qui de Boma gagne la région de Mayombé. Cette petite ligne, achevée en 1900, a actuellement 80 kilomètres. C'est essentiellement un chemin de fer d'intérêt local; le pays qu'il draine est riche en produits, mais sera toujours limité. Il est néanmoins question de prolonger le tronçon jusqu'à la frontière du Congo français, afin de capter une part du commerce de notre colonie, si pauvre en voies de communication.

Les projets ne manquent pas par ailleurs aux Belges. Avoir donné au bassin du Congo un accès vers la mer, vers l'Europe,

I L'exercice s'étend du 1er juillet au 30 juin. Nous adressons nos meilleurs remerciements à M. L. Strauss, président du Conseil supérieur de l'Industrie et du Commerce du royaume de Belgique, pour l'obligeance avec laquelle il nous a communiqué plusieurs des renseignements que nous publions ici.

2 De nouveaux dégrèvements dans les tarifs devaient être opérés à partir du 1er juillet 1907. Une convention récente a reculé au 1er juillet 1910 la date d'entrée en vigueur des nouveaux tarifs.

QUEST. DIPL. ET COL. T. XXII.

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c'était beaucoup déjà, et c'était l'essentiel. Mais le chemin de fer de Matadi n'ouvre à l'exploitation que les régions drainées par les parties navigables du Congo, et de ses affluents. L'immense bief de plus de 1.600 kilomètres, qui de Pool s'étend aux Stanley Falls est ouvert au commerce; une flotte de cent var peurs y navigue aujourd'hui. Mais les rapides des Stanley Falls coupent de nouveau toute communication avec le cours supérieur. De Ponthierville à Nsengoué, sur une longueur de 350 kilomètres s'étend un second bief, rendu par eux à peu près inaccessible. De même, en amont de Nsengoué, les chutes Hindé 2 arrêtent de nouveau les relations avec les biefs navigables du haut fleuve, avec les branches maîtresses qui, d'après les plus récents témoignages, permettraient de gagner par bateau jusqu'au Kasongo et au Katanga. Dans des régions, où les pistes, toujours mal tracées, disparaissent rapidement dans le fouillis de la végétation, le portage ne peut suffire à tourner de tels obstacles une voie ferrée est nécessaire. Enfin, puisque le bassin du Congo confine à celui du Nil et aux Grands Lacs, n'est-il pas naturel qu'on songe à les unir?

Pour ces raisons fut constituée le 4 juin 1902, avec l'assentiment et l'appui du roi Léopold,, une Compagnie des Chemins de fer du Congo supérieur aux Grands Lacs africains. D'accord et de compte à demi avec l'Etat Indépendant, qui par ailleurs lui, concède des terres, la Compagnie doit construire. les lignes suivantes :

1° De Stanleyville à Ponthierville (120 kilomètres), pour éviter les Stanley Falls. Sur cette section les travaux sont en cours. On espère faire sauter les roches qui gênent la navigation en amont de Ponthierville et établir un bief praticable jusqu'à Nyangoué;

2o De Nsengoué à Bouli (environ 200 kilomètres), pour contourner les chutes Hindé;.

3o De Stanleyville au lac Albert (700 à 800 kilomètres); 4o D'un point du Congo, Nyangoué ou Kasongo, au Tanganyika (150 à 200 kilomètres).

Les difficultés à vaincre seront multiples. Il faudra amener les ouvriers et le matériel à Stanleyville, à 2.000 kilomètres de la côte. Il faudra, comme un tunnel à travers une montagne, percer des avenues dans le fouillis inextricable de la forêt équatoriale, puis lutter contre l'action des pluies et la croissance des herbes folles. Le travail humain n'a pas ici de pire ennemi

Il n'y a pas là une seule chute, mais une série de rapides, qui sur 160 kilomètres interdisent toute navigation.

2 Elles se succèdent de même sur une longueur de 100 kilomètres.

que l'exubérance des forces naturelles. Il faudra une infrastructure, des traverses, des rails plus coûteux et plus lourds que sur la section de Matadi, car on renonce à l'écartement de 075; on veut des voies de 1 mètre. Mais ces obstacles surmontés, quelques-unes des régions du cœur de l'Afrique, les plus distantes de toute mer, les plus impénétrables, seront ouvertes au commerce et à la civilisation. Par le lac Albert et la vallée du Nil un débouché nouveau sera donné à l'Etat. Indépendant; par le Tanganyika,, cette mer intérieure, où peutêtre un jour Belges, Allemands et Anglais se disputeront l'empire du commerce, le Congo confinera au réseau ferré de la Rhodésia et pourra entrer en concurrence avec la Grande-Bretagne par l'exploitation des cercles les plus septentrionaux de cette possession. Les caoutchoucs, les palmiers à huile et les minerais du Katanga, si vantés par le capitaine Lemaire, seront exploités. Déjà les explorations du capitaine Jacques permettent de projeter une voie qui dériverait vers le cours navigable du Congo le cuivre, l'or et l'étain du Katanga, dont les Anglais convoitent le transit. En face de la Tanganyika Concessions Co, une Compagnie du chemin de fer du Katanga vient de se constituer à Bruxelles. Un hinterland agrandi sera ainsi donné à la porte d'entrée du Congo, au chemin de fer de Matadi. L'Etat Indépendant, qui a servi déjà tant de bénéfices à ceux qui ont eu foi en som avenir et engagé leurs capitaux dans ses. entreprises, sera assuré d'une destinée florissante.

Le Congo Français sera promis à une égale fortune le jour où il aura des chemins de fer. Cette immense colonie de 1.800.000 kilomètres carrés 2 peuplée de 10 à 12 millions d'indigènes, paraît un réservoir précieux de richesses naturelles. Etendue du 5o de latitude Sud au 15° de latitude Nord, elle possède une succession variée de zones de végétation et d'exploitation, depuis la forêt équatoriale du Mayombé, les taillis et les galeries boisées de l'Oubangui-Chari, jusqu'aux steppes du Kanem et du Quadaï. On passe, sans quitter le sol français, de la région des palmiers à huile et des arbres caoutchifères aux champs de tamarins et de karités de la Sangha et de l'Oubangui, aux mimosas épineux du Soudan. Trop longtemps la chasse aux esclaves, les agitations, les guerres, les dévastations causées par les tyrans locaux, le défaut de moyens de

1 De l'avis des Belges mêmes, les ingénieurs anglais qui se sont installés au Katanga, « y travaillent comme s'ils ne devaient plus jamais le quitter, avec une activité, un << esprit de suite, une intelligence pratique et un succès grandissant, auxquels tous « les voyageurs qui reviennent de ces régions lointaines sont unamimes à rendre hommage (Mouvement géographique du 23 avril 1905)..

2 Trois fois environ la superficie de Madagascar ou de liIndo-Chine.

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