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ment élargi à coups de drague, est tel qu'un embouteillage n'est guère plus à craindre.

De nombreux canons puissants sont établis sur les crêtes qui ont vue sur la mer; ils rendent fort improbable une attaque de vive force de la place par une escadre même très puissante.

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Au fond du lac est en achèvement l'arsenal de Sidi-Abdallah. Deux grandes cales sèches sont terminées, et une grande partie des ateliers sont construits. Les machines, les outils, les approvisionnements arrivent au fur et à mesure des crédits.

En l'état actuel, l'arsenal est très loin de pouvoir rendre à une escadre tous les services qu'elle serait en droit d'en attendre. L'an dernier il ne fut pas en mesure de relever le Farfadet, faute de moyens de levage suffisant. Du temps a été perdu en 1903 et 1904, qui ne sera jamais rattrapé.

A Bizerte, un arsenal tout neuf, construit suivant les derniers principes industriels, est achevé, peut-on dire, mais il ne vit pas, faute de personnel et de travail à exécuter. On pourrait répéter à son sujet l'histoire du singe de la fable qui avait oublié d'allumer sa lanterne. Nous verrons ultérieurement ce qu'il serait possible de faire pour remédier à cet état de choses sans augmenter le budget.

A Bizerte, il n'existe aucun trafic, ce dont on se plaint avec juste raison. Malgré l'opinion des personnes qui croient impossible que les deux marines de guerre et de commerce puissent vivre côte à côte, il faudrait créer un trafic dans notre jeune port de guerre. Cela serait possible: il suffirait d'amener à Bizerte le produit des mines de phosphates en voie d'exploitation sur la frontière algéro-tunisienne. Si ces minerais vont s'embarquer à Bône, ils devront parcourir un plus grand nombre de kilomètres que s'ils sont dirigés sur Bizerte; ils ne feront pas grand bien à Bône, petit port encombré et peu susceptible

d'agrandissement; par ailleurs, ils priveront Bizerte du fret de retour indispensable. Si la France désire que le charbon nécessaire à sa flotte ne lui revienne pas à des prix exorbitants, elle doit assurer un fret de retour aux charbonniers.

Là encore les deux marines doivent s'entr'aider. Le lac peut contenir toutes les flottes françaises sans gêne pour aucune. L'union fait la force.

NOS PORTS DE COMMERCE

A côté de ses ports de guerre, la France possède une demidouzaine de ports de commerce qui, sans être outillés comme le sont les ports dont nous venons de parler, pourront néanmoins être utilisés pendant les hostilités, et ne doivent pas être passés sous silence.

Le premier de ces ports est sans conteste Dunkerque qui, par sa situation stratégique, doit attirer l'attention de tout Français. Pour mettre en lumière la valeur de cette situation, on ne saurait mieux dire que les Anglais achèvent actuellement une base militaire de tout premier ordre à Douvres, en face de Dunkerque. Cette nouvelle forteresse maritime est destinée à fermer le Pas-de-Calais comme Gibraltar ferme la Méditerranée et Singapour le détroit de Malacca.

Jusqu'à présent Singapour n'était qu'un port de commerce; mais l'amirauté britannique est occupée à négocier l'achat de la Compagnie Tanyong-Pagar. Elle va donc posséder tous les docks, quais, cales de radoub, magasins, ateliers, remorqueurs, et se constituer ainsi un arsenal tout monté à la portée de l'Extrême-Orient.

On voit quel soin apportent nos voisins d'outre-Manche à se préparer partout des bases solides d'action.

C'est de la haute stratégie.

Dunkerque malheureusement ne se prête pas à l'installation d'un point d'appui. Les bas-fonds de l'entrée et les courants interdisent la circulation des navires en dehors de l'instant de la haute mer; les torpilleurs eux-mêmes ne peuvent circuler plus d'une heure sur trois en moyenne. Nous ne sommes donc pas favorisés. Malgré cela, Dunkerque est appelé à nous rendre quelques services en temps de guerre par sa position sur le Pasde-Calais. Il suffit d'ailleurs, pour s'en convaincre, de relire l'histoire maritime et diplomatique française on y verra le nom de Dunkerque revenir constamment; on y reconnaîtra l'importance maritime de la ville par l'intérêt que les Anglais avaient soit à la posséder, soit à la détruire.

voies ferrées reliées à la grande ligne, des appareils de levage nécessaires à la manutention des colis, de bascules, de hangars, enfin de tous les accessoires.

On voit par ce court aperçu que Dakar est sur le point de devenir un port parfaitement outillé.

Certaines personnes estiment qu'un arsenal militaire et un port de commerce ne peuvent être voisins sans se nuire. Nous pensons, au contraire, qu'il serait désirable que tout port de guerre fût doublé d'un port de commerce, mais dans certaines conditions.

Il va de soi que, à Dunkerque, la marine de guerre gêne la marine de commerce, vu qu'elle occupe un bassin entier. De même, à Brest, la marine de guerre gêne considérablement le mouvement des vapeurs de charge.

Anciennement à Brest, le commerce avait, comme port, l'entrée même de l'arsenal. C'est aux quais de la Penfeld qu'accostaient les voiliers marchands.

Puis on a créé un port à Porstrein dans lequel le trafic pût se développer à son aise. Mais la marine de guerre, se trouvant à l'étroit dans la Penfeld, a débordé et s'est vue obligée d'abriter les torpilleurs dans le port de commerce qu'elle encombre d'une manière exagérée. Les armateurs ont grande hâte de voir achevés les travaux de Lanninon qui les délivreront de la sujétion du mouvement constant des torpilleurs et leur rendront l'usage d'un bassin. Cela se conçoit sans peine.

Dans de telles conditions, les deux flottes se gênent mutuellement, et ne peuvent vivre sur le pied de confraternité si nécessaire à tous les points de vue.

En effet, la marine de guerre et la marine de commerce ont l'une et l'autre les mêmes besoins de ports bien abrités, facilement accessibles, de quais, de cales sèches, d'ateliers métallurgiques... Les metteurs en œuvre de tous ces instruments de travail parlent la même langue, vivent d'une manière semblable; en temps de guerre, ils auront besoin à chaque instant les uns des autres, aussi bien au large qu'en France.

Pourquoi, dès lors, assurer qu'ils ne peuvent vivre côte à côte dès le temps de paix? Faisons en sorte seulement que les terrains qui leur sont affectés soient quelque peu distants pour que les bâtiments ne se gênent pas les uns les autres, mais travaillons à ce que les deux ports restent voisins, et l'on se trouvera en temps de guerre vis-à-vis d'une situation fort avantageuse.

Le fait d'être à proximité d'un arsenal permet au port de commerce de profiter de l'abri des défenses militaires, lui

assure un peu de fret, lui fournit même des moyens puissants d'action dont il peut ne pas disposer à un moment donné. En retour, la marine de guerre trouvera au port de commerce une aide précieuse dans les ateliers privés, dans les remorqueurs des Sociétés particulières, dans les vapeurs de charge disponibles...

Il serait trop long d'énumérer tous les avantages qui sautent aux yeux. Pour qu'il n'y ait que des avantages à cette dualité du port, il suffit que les deux organismes possèdent devant eux une étendue de terrain et une étendue d'eau largement suffisantes à leur développement. Il n'en est pas ainsi à Brest, d'où s'ensuit un tiraillement regrettable.

Dakar n'aura pas à se plaindre de la proximité des deux ports, à moins d'un accroissement colossal de trafic maritime. Le département militaire creuse une cale sèche qui sera toujours à la disposition du commerce, d'où une économie notable pour la ville qui n'aura pas cette dépense à faire; il construit des jetées, crée des ateliers de réparations dont le commerce. profitera.

D'ailleurs, à Saïgon, les deux ports sont voisins, se succèdent sur le fleuve sans empiéter sur leurs domaines respectifs; ils se complètent sans se gêner; personne ne se plaint.

Tous les travaux faits au Sénégal ne sont pas sans coûter un nombre respectable de millions qui sont fournis par plusieurs budgets.

Le ministère des Colonies dépense 11 millions pour la construction des forts et casernes nécessaires à la défense de la place.

La Rue Royale dépense 24 millions, dont 4 pour la cale de radoub et le bassin des torpilleurs, 11 pour la jetée, 9 pour le dragage et la construction des ateliers de l'arsenal.

Enfin la colonie paie, sur les fonds de l'emprunt de 65 millions, autorisé par décret du 23 juillet 1903, environ 10 millions pour la construction du port de commerce.

Comme on le voit, l'argent n'a pas été marchandé, et de nombreux millions ont coulé partout, refoulant les villages nègres, perçant des rues et des boulevards, asséchant des marais, amenant de l'eau, bâtissant un superbe et coûteux palais pour le gouverneur.

Le projet d'un nouvel emprunt de 100 millions vient d'être arrêté (mai 1906), dont le produit doit servir en grande partie à terminer l'aménagement industriel de nos colonies africaines.

Il est à désirer que toutes ces dépenses ne soient pas en pure

Le Havre, relativement éloigné de la grand'route de la Manche, a son port fermé comme celui de Dunkerque à chaque basse mer. Sa position à l'embouchure de la Seine attire l'attention. C'est par la Seine qu'est entrée, en 1870 et 1871, la plus grande partie des approvisionnements divers que nous avons été obligés d'acheter à l'étranger. Un trafic important se fait au Havre et à Rouen; enfin le Havre possède des docks et ateliers nombreux et variés qui ne seront pas à négliger par une escadre en manœuvre.

Mais au Havre, comme à Dunkerque, aucun des derniers grands navires de combat ne pourra passer en cale sèche.

Saint-Nazaire, La Pallice, Bordeaux, sur l'Océan, ont des voies d'accès relativement faciles; leurs ports assez bien outillés sont en mesure de faire des réparations importantes à des vaisseaux avariés par le combat. Mais nous ne pensons pas qu'ils soient guère utilisés dans l'avenir, ne l'ayant guère été dans le passé. Leurs cales sèches ne peuvent recevoir nos gros

cuirassés.

Marseille et la Ciotat, deux grands ports aux environs de Toulon, ne peuvent que lui servir de satellites, lui venir en aide en cas de travaux nombreux et urgents. Cependant les cales sèches de ces deux ports ne pourront recevoir les cuirassés de 18.000 tonnes en projet.

La ville de la Ciotat et les ateliers des Messageries maritimes ne sont pas défendus et peuvent être bombardés du large.

Cet incident d'ailleurs ne pourrait avoir un gros effet sur le résultat des opérations, et n'est pas autrement à craindre. Une division ennemie qui se livrerait à cet amusement sans danger courrait le risque, après avoir vidé ses soutes, de se voir attaquée par une division en meilleure forme.

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Enfin Alger: ce port est mal outillé et ne répond en rien aux besoins d'une flotte de commerce moderne; encore moins aux besoins d'une escadre en temps de guerre. Les croiseurs du programme de 1900 et nos nouveaux cuirassés ne peuvent entrer dans la cale sèche; les ateliers privés sont peu puissants. Un amiral pourra donc réapprovisionner ses bâtiments à Alger mais il n'y trouvera qu'un abri précaire et aucun moyen de réparation.

H. TANIF.

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