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France. Le retour de M. Beau, gouverneur général de l'Indo-Chine. M. Beau, gouverneur général de l'Indo-Chine, est arrivé à Marseille le 22 août. Interviewé aussitôt, le gouverneur général a exposé qu'il venait plaider la cause de l'indigène; mais, pour appliquer la politique qu'il a conçue, il faut de l'argent, et cet argent la métropole seule devra le fournir. « Ce n'est pas que notre situation financière <«< soit mauvaise, a dit M. Beau; les services ne coûtent pas plus cher « qu'autrefois. Les dépenses qui augmentent sont celles des travaux <«< commencés qu'il faut abandonner ou terminer. » Les idées que M. Beau a exposées ainsi lui ont inspiré une circulaire du 26 janvier de cette année, à la suite de laquelle on a estimé à près de 150 millions la somme nécessaire pour réaliser les réformes projetées. Or, la question va se poser de savoir si l'Indo-Chine est actuellement en situation de faire un aussi important appel au crédit. La moins-value des recettes de l'exercice 1905, par rapport aux évaluations budgétaires, était estimée à environ 10 millions, et l'on a lieu de craindre que le déficit ne s'installe dans le budget général de l'Indo-Chine. A ces craintes exprimées de divers côtés, le gouverneur général a répondu par une lettre publique. Dans sa défense, M. Beau montre les recettes croissant de façon continue de 1899 à 1904; mais en 1905 elles sont seulement de 69.607.000 francs contre 72.967.000 francs en 1904. La cause de cet important fléchissement ne doit être recherchée, d'après M. Beau, que dans la situation économique du Tonkin à la suite des terribles inondations de l'an dernier, et dans celle de la Cochinchine depuis le typhon et les inondations de 1904.

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L'encyclique pontificale et la loi de séparation. Le pape Pie X a adressé ses instructions à l'Eglise de France relativement à la conduite à tenir en vue de la mise en application de la loi de Séparation des Eglises et de l'Etat. L'encyclique pontificale se prononce contre les associations cultuelles.

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Allemagne. L'entrevue du roi Edouard VII et de Guillaume II à Cronberg. La rencontre du roi d'Angleterre et de l'empereur d'Allemagne, décidée en principe en janvier dernier, dans les lettres échangées entre les deux souverains à l'occasion de l'anniversaire de Guillaume II, et arrêtée dans tous ses détails, il y a deux mois, par un commun accord entre Londres et Berlin, s'est faite à la petite gare de Cronberg, le 15 août. Les deux monarques se sont salués très cordialement et se sont embrassés à deux reprises.

Après les présentations, Edouard VII et Guillaume II se sont rendus en voiture au château de Friedrichshof, ancien domaine de l'impératrice Frédéric, actuellement propriété de la princesse Marguerite de Hesse. Un déjeuner intime a eu lieu, et le soir un dîner de 32 couverts a réuni tous les personnages princiers présents au château. Le lendemain matin, le roi Edouard VII est reparti par Cronberg, pour Marienbad, accompagné par l'empereur Guillaume II.

De ce qu'ont pu se dire dans cette journée les deux souverains, nous ne savons rien. Il est à remarquer que la presse des deux pays a été exceptionnellement sobre de détails et de commentaires.

Nous citerons cependant le passage suivant de la Correspondance d'Empire de l'Allemagne du Sud:

Les journaux français écrivent qu'ils ont reçu de Londres l'assurance que rien ne sera changé à l'entente cordiale par l'entrevue de Friedrichshof. Nous croyons possible, en effet, que les Français aient reçu de Londres une pareille réponse, s'ils ont posé la question.

Nous ne voyons aucun inconvénient à la compléter de notre côté par une déclaration allemande qui lui corresponde.

L'Allemagne ne pense vraiment pas à s'employer à troubler d'une façon ouverte ou secrète les relations entre les puissances occidentales. Le roi Edouard et son entourage ont pu s'en convaincre dans les conversations de Friedrichshof, de même que sir Edward Grey a pu s'en apercevoir après avoir causé avec l'ambassadeur allemand à Londres.

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Les scandales coloniaux; l'affaire Podbielski. Nous avons déjà signalé combien l'opinion publique en Allemagne s'est justement émue des récents scandales coloniaux. L'affaire de certaines fournitures faites par la maison Zippekirlch, où a paru se trouver compromis le ministre de l'Agriculture, M. de Podbielski, réserve encore quelques surprises. Le 13 août dernier, le ministre envoya à la chancellerie sa lettre de démission, et trois jours plus tard une lettre insérée dans la Gazette de l'Allemagne du Nord ne laissait aucun doute sur les intentions du chancelier de remplacer son collègue. Depuis, les amis de M. de Podbielski ont essayé de peser sur la décision de l'empereur pour que la démission ne soit pas acceptée. Quoi qu'il en soit, Guillaume II a déclaré que, conformément à la proposition du prince de Bülow, il n'était pas en état de prendre une décision définitive. Pour le moment, l'empereur a suspendu son jugement et ne veut pas prendre encore une décision qui paraîtrait lui avoir été imposée.

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Bulgarie. L'agitation antihellénique. Le 19 août, comme nous l'indiquions dans notre dernière livraison, une grande réunion a eu lieu à Philippopoli, à laquelle assistaient dix-neuf cents délégués des associations de Macédoine et de divers points de Bulgarie, et vingt mille citoyens de Philippopoli et des environs. On a pris les résolutions suivantes :

1o Inviter le gouvernement bulgare à user de tous les moyens dont la

nation dispose pour l'application intégrale de l'article 23 du traité de Berlin; rompre les relations diplomatiques avec la Grèce et user envers les ressortissants grecs des représailles permises par le droit international;

2o Reconnaître l'inefficacité des réformes, selon le programme de Muerzsteg;

3o Exprimer des regrets pour les actes d'intolérance auxquels les provocations grecques ont poussé souvent quelques Bulgares contre les Grecs malgré la tolérance dont les Bulgares ont fait preuve depuis leur existence politique ;

4o Inviter la nation bulgare à faire tous les sacrifices matériels nécessaires pour obtenir l'exécution de l'article 23 du traité de Berlin.

Des copies de ces résolutions ont été portées par le bureau de la réunion, suivi en procession par une foule immense, aux consuls de Russie, de France et d'Angleterre.

Ainsi donc le mouvement antigrec s'accentue toujours en Bulgarie. De regrettables actes de violences contre les Grecs ont eu lieu à Anchialos. Le gouvernement bulgare a, il est juste de le reconnaître, pris aussitôt toutes les mesures d'urgence pour rétablir l'ordre et la sécurité dans la principauté. Mais l'opinion grecque est vivement surexcitée. Le gouvernement et le patriarcat réclament l'intervention efficace des puissances conformément au traité de Berlin.

Norvège. Les élections norvégiennes. Les élections au Storthing ont eu lieu jusqu'à présent dans 56 circonscriptions sur 117 (il y a 39 députés des villes et 78 des communes rurales). Dans 27, il y a ballottages. Parmi les 29 représentants déjà élus, on estime que 15 sont du côté du cabinet Michelsen, pendant que les 14 autres, dont trois socialistes-démocrates, représentent un programme plus radical et nationaliste, de la nuance de M. Lovland, ministre des Affaires étrangères. Celui-ci paraît donc avoir des chances de former le prochain cabinet. Dans ce cas, les élections seraient un échec pour la couronne, les radicaux ayant des tendances plutôt républicaines.

Russie. Un attentat contre M. Stolypine. Déclarations du premier ministre. Un abominable attentat vient d'avoir lieu, le 25 août, contre M. Stolypine. Le premier ministre russe a heureusement échappé à la bombe des assassins; mais il a été atteint dans ses plus chères affections. Son fils et sa fille ont été blessés mortellement peut être, par l'explosion qui a fait d'autre part une soixantaine de victimes, tant morts que blessés, parmi lesquels M. Kovostof, membre du conseil des ministres, le général Zamiatine, secrétaire général du ministère de l'Intérieur, M. Voronine, grand maître des cérémonies, et le prince Nakaschidze, tous tués sur le coup. Les assassins étaient au nombre de quatre. Trois ont été tués. Le quatrième, blessé, a été arrêté.

Quelques jours avant l'attentat, le 17 août, M. Stolypine avait reçu en audience privée le correspondant du Temps, M. Paul Boyer, qui

a relaté ainsi son intéressante conversation avec le premier ministre

russe:

Saint-Pétersbourg, 17 août,

Je viens d'être reçu en audience privée par M. Stolypine, qui m'a fait les déclarations suivantes.

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Quels qu'aient été les motifs de la dissolution de la Douma, il faut accepter le fait accompli. L'histoire dira lequel des deux encourt la plus grande responsabilité, du gouvernement ou de la Douma.

Le mouvement révolutionnaire dépend exclusivement de la question agraire; il est donc d'ordre social et non politique. Les paysans sont peu soucieux de revendiquer des libertés.

La solution immédiate de la question agraire est impossible. Il est impossible, notamment, de supprimer d'un trait de plume la propriété communautaire. Il est nécessaire de chercher une transition sans empiéter brusquement sur les droits acquis. Nos commissions agraires locales élaborent des solutions locales.

Le ministère n'a pas encore organisé l'expropriation forcée des biens particuliers ou monastiques; mais il la repoussera certainement, la considérant comme un pillage, puisque l'empereur y est nettement hostile. D'ailleurs, l'expropriation forcée n'est admissible que dans des cas extrêmement rares, légitimés par des raisons d'utilité publique, par exemple quand de petites enclaves paysannes ne sont pas accessibles.

On a exagéré le manque de terres. Les terres domaniales de l'Etat et les terres asiatiques de colonisation paraissent suffire. La question des apanages est réservée à la décision de l'empereur, qui est très jaloux de cette prérogative. Pour le reste, la banque paysanne fait ses achats librement. Les élections de la Douma auront lieu en janvier et février, cinq ou six semaines avant l'ouverture de la session. La volonté de l'empereur est inébranlable; il est impossible de revenir en arrière. La Russie n'est pas comme la Turquie, qui donna une Constitution, puis l'abolit par firman. Il est impossible de prévoir ce que seront les élections; cela dépendra des circonstances. Les dernières eussent été autres si elles avaient eu lieu en décembre. Pour les prochaines, les zemstvos étant favorables au gouvernement, il est permis d'espér、 que la future Douma aura une droite et représentera plus exactement le pays. L'ancienne n'avait qu'une gauche, fait historique jusqu'ici inconnu. Mais, je le répète, on ne peut faire aucune prévision en présence des troubles actuels.

La situation est difficile : le gouvernement, réactionnaire malgré lui, lutte contre la révolution active. La presse, depuis la guerre, a pris une influence énorme. Le peuple russe lit et croit ce qui est écrit comme l'évangile. Les Français, les Allemands, les autres peuples sont doués d'esprit critique; les Russes, non.

Donc, quoique partisan du principe de liberté de la presse, je dois prendre des mesures préservatrices. Ainsi, lors de la dernière grève générale, nous avons dù, pour l'arrêter plus vite, supprimer les journaux qui l'eussent soutenue. Car gouverner, c'est prévoir. Mais aujourd'hui que le danger est passé, nous autorisons la réapparition de certains journaux. Notre programme demeure ce qu'il aurait été avec l'appoint des libéraux : les élections auront lieu, la Douma sera, des réformes raisonnables seront effectuées dans la mesure où la révolution le permettra.

Je cherche un moyen libéral pour lutter contre la révolution; je ne trouve que la force.

Hier matin, vingt-six personnes ont été tuées à Varsovie; partout des

bombes, partout des dépôts de bombes, et jamais personne ne veut être témoin. Il n'y a qu'un moyen la force.

On nous reproche d'éloigner la date des élections; nous prenons strictement le temps nécessaire à la préparation du travail législatif. Nous voulons apporter à la Douma des projets de loi prêts, basés sur la seule liberté de conscience.

Nous aurons sept projets de loi sur les sectes religieuses, l'état civil, le mariage civil, etc. De même un projet sur l'égalité des droits. Ici entre en scène la question juive, ardue, embarrassée par les préjugés historiques et par son importance économique.

Je ne suis nullement antisémite, mais je crois que résoudre la question juive d'un trait de plume conformément à la justice absolue rendrait un mauvais service aux juifs. Et les juifs aussi doivent être consultés.

En résumé, devant la révolution menaçante, nous faisons l'ordre, mais nous ne sommes pas des réactionnaires. Nous ferons les réformes possibles et nécessaires.

– Comme je demande au président du Conseil si un emprunt nouveau est probable, il me répond:

- Il n'y aura sûrement aucun emprunt russe avant la réunion de la Douma; et même plus tard, je ne prévois pas qu'un emprunt devienne nécessaire. Je ne suis pas un financier, mais je comprends qu'avec l'excédent actuel de 100 millions sur les prévisions, un emprunt serait une cause d'humiliation devant l'Europe et une sottise économique.

La question de l'emprunt n'a pas été et ne sera pas débattue devant le conseil des ministres.

Serbie. Les relations anglo-serbes. Le 20 août, à l'occasion de la présentation de ses lettres de créance au roi Pierre Ier, le ministre d'Angleterre, M. Whitehead, a été reçu en audience solennelle. Les discours suivants ont été échangés. M. Whitehead a dit :

Sire, c'est avec grand plaisir que j'ai obéi aux ordres du roi, mon auguste maître, et que j'ai l'honneur de me présenter devant Votre Majesté pour renouveler les relations amicales qui ont si heureusement existé dans le passé entre la Serbie et la Grande-Bretagne.

Je prie Votre Majesté de croire que j'emploiera tous mes efforts pour gagner la confiance de Votre Majesté et celle du gouvernement et de la nation serbe, et j'ose espérer que ces efforts ne manqueront pas de succès et auront par la suite de grands avantages pour les deux pays.

Le roi a répondu :

Je suis heureux de voir rétablir les relations d'amitiés et de bonne entente entre la Serbie et la Grande-Bretagne. C'est avec le plus vif plaisir que je reçois en votre personne l'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire de Sa Majesté le roi du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande.

En recevant de vos mains les lettres par lesquelles Sa Majesté vous accrédite auprès de ma personne en cette qualité, je tiens à vous donner l'assurance que je n'aurai rien tant à cœur que de maintenir et développer les rapports amicaux si heureusement renouvelés entre nos deux Etats.

Je me plais à vous dire que la réalisation de votre tâche vous sera granQUEST. DIPL. ET COL.- -T. XXII.

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