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une reconnaissance émue, non seulement par le roi et par la famille royale, mais par tout le peuple danois.

Le roi a formulé ensuite l'espoir que l'empereur voudra bien reporter sur lui une partie de l'amitié qu'il avait pour le roi Christian, et qu'ainsi les relations amicales entre les deux peuples deviendrontde plus en plus cordiales. Le roi a terminé en portant la santé de l'empereur, de l'impératrice et de la famille des Hohenzollern. Ce voyage à Berlin des souverains danois a été très commenté, comme consacrant en quelque sorte la reprise définitive des relations amicales entre les maisons de Danemark et de Prusse, quarante-deux ans après que ce pays a arraché au Danemark le Schleswig-Holstein, dont la population danoise envoie encore un député protestataire au Reichstag.

-La mort de Mar de Stablewski. Me de Stablewski, archevêque de Posen, est mort subitement à l'âge de soixante-cinq ans. On l'a trouvé le 24 novembre, à dix heures du soir, devant son bureau de travail; il semblait dormir. Les causes de la mort sont imparfaitement connues. Ses médecins ont parlé de la rupture d'un anévrisme. Il est permis de supposer que le primat de Pologne a été mortellement ébranlé par les douloureuses émotions de ces temps derniers.

La question de la succession de Mer de Stablewski soulève en Allemagne de vives polémiques; car les intransigeants allemands réclament la nomination d'un prélat qui défende, avant toutes choses, la cause de la germanisation de la Pologne.

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Espagne. La crise ministérielle. Le débat parlementaire ouvert en Espagne au sujet de la loi des associations a provoqué dans les diverses fractions de la majorité des divisions assez profondes pour rendre impossible le maintien au pouvoir du gouvernement actuel. Le maréchal Lopez Dominguez, président du Conseil, en présence de cette situation, a donc cru devoir remettre sa démission, le 28 novembre, au roi Alphonse XIII, qui l'a acceptée et a immédiatement chargé M. Moret de constituer le nouveau cabinet. M. Moret a commencé aussitôt ses démarches et dès le lendemain il remettait au roi la liste des nouveaux ministres.

Tout porte à croire que M. Moret va essayer de réaliser en partie le programme politique qu'il voulait entreprendre en juillet dernier, lorsque les difficultés politiques intérieures l'obligèrent à donner sa démission.

Italie. Le voyage du roi de Grèce à Vienne et à Rome. Le roi Georges de Grèce, après avoir fait à Vienne un séjour d'une semaine, au cours duquel il a eu plusieurs entretiens avec l'empereur FrançoisJoseph, et le nouveau ministre commun des Affaires étrangères, le baron d'Erenthal, s'est rendu à Rome où il est resté quelques jours. Il a eu également, dans cette dernière ville, de fréquents entretiens avec le roi Victor-Emmanuel, et avec le ministre des

Affaires étrangères, M. Tittoni. On a dit qu'au cours de ces conversations, à Rome aussi bien qu'à Vienne, il a été fort question de la Crète.

A la fin de son séjour à Rome, le roi Georges a été reçu, au Vatican, par le Souverain Pontife en audience particulière.

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Maroc. L'action franco-espagnole à Tanger. En présence de l'état d'anarchie absolue qui règne au Maroc et de l'impuissance évidente du Makhzen à maintenir l'ordre dans ses Etats, le gouvernement français et le gouvernement espagnol sont entrés en pourparlers « en vue de se mettre d'accord sur les mesures éventuelles qui << pourraient s'imposer aux deux puissances chargées de l'établisse<<ment de la police à Tanger pour assurer l'ordre dans cette ville ». Dès que cet accord, qui est dès maintenant acquis en principe, et dont la conclusion définitive a seulement été retardée par la crise ministérielle qui vient d'éclater à Madrid, aura été rédigé, il sera communiqué par les ambassadeurs d'Espagne et de France, dans les différentes capitales, aux dix autres puissances signataires de l'Acte final d'Algésiras. On ne prévoit d'objections de la part d'aucune d'elles; plusieurs d'ailleurs parmi les plus importantes, notamment l'Angleterre et l'Allemagne, ont déjà même pris les devants et fait connaître à l'avance leur approbation.

L'action prévue par le concert franco-espagnol comportera deux formes, appropriées à la gravité des circonstances: 1° la présence de bâtiments de guerre dont les compagnies de débarquement réunies fourniront un effectif d'environ 800 hommes; 2° si la situation l'exigeait, l'envoi de corps de débarquement s'élevant pour chacune des deux puissances à 1.000 ou 1.200 hommes, soit en tout, avec les fusiliers marins, une force de 3.000 hommes. Le détachement espagnol serait prélevé sur la garnison de Cadix, le détachement français sur le 19° corps d'armée (Alger) et très probablement sur la division d'Oran. Dans aucun cas les troupes de débarquement ne feraient acte d'occupation. L'objet de leur mission se bornerait à mettre leur appui au service du pacha de Tanger et à rétablir son autorité ébranlée par Erraïsouli. L'action du contingent mixte serait limitée à Tanger et à sa banlieue et aurait un caractère purement provisoire.

Dès maintenant, les bâtiments de guerre français qui devront se rendre à Tanger ont été désignés et sont prêts à appareiller. Ce sont les croiseurs cuirassés Suffren, Saint-Louis et Charlemagne placés sous le pavillon de l'amiral Touchard. Le transport Nive accompagnera la division et servira à aller chercher au besoin les détachements français que l'on empruntera au 19° corps d'armée. Le Suffren, le Charlemagne et le Saint-Louis remplaceront à Tanger les trois unités navales qui y sont actuellement, le Jeanne-d'Arc, le Galilée et le Forbin, unités qui sont fatiguées actuellement par un long séjour à

la mer, et ont besoin de rallier leur port d'attache. De son côté, le gouvernement espagnol a désigné, pour se rendre à Tanger, le croiseur-cuirassé Pelayo, qui remplacera le croiseur Princesse des Asturies, les croiseurs Rio de la Plata et Infante Isabelle, et l'aviso Maria de Molina.

Dès que la France et l'Espagne se seront mises complètement d'accord et auront, comme nous le disions tout à l'heure, pu faire connaître cet accord aux puissances intéressées, elles demanderont à leurs parlements respectifs de ratifier l'Acte final d'Algésiras. On sait que cette ratification n'a eu lieu jusqu'ici, par ordre de date, que de la part du Maroc, de la Belgique, de la Russie et de l'Angleterre. Mais encore une fois, les mesures concertées entre la France et l'Espagne sont purement de précaution et restent subordonnées aux événements; elles étaient cependant nécessaires, pour montrer que les deux puissances chargées de l'organisation policière du Maroc se liennent prêtes à sauvegarder la vie et les biens des Européens dans tout l'empire marocain.

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-Le Makhzen et les réformes. Nous rappelons plus haut la ratification donnée par le Maroc à l'Acte d'Algésiras. Il convient de s'expliquer sur les « réserves » qu'aurait faites le sultan Abd el Aziz à propos de cette même ratification. M. Georges Villiers a donné à ce sujet, dans le Temps du 17 novembre, des renseignements précis que nous croyons intéressant de reproduire ici. En voici l'exposé :

Il semble qu'on se soit singulièrement exagéré la valeur de ces « réserves ». Et il paraît utile de remettre, pièces en main, les choses au point. L'obscurité et l'équivoque sont, en de telles affaires, toujours bonnes à dissiper.

D'abord, et c'est là le premier point, il n'existe aucun document officiel adressé aux puissances par le Maroc et où ces réserves se trouvent formulées.

En second lieu, Abd el Aziz, en mettant sa signature au bas de l'Acte d'Algésiras (cette signature devant, aux termes de cet Acte, valoir comme ratification), a accepté définitivement les mesures proposées par la conférence. Il n'y a sur la portée de cette acceptation ni à discuter ni à épiloguer. Cette acceptation est acquise. Et le Maroc est lié.

Là-dessus, et j'y insiste, l'entente est absolue entre les puissances. Cela dit, qu'est-ce qu'on appelle les « réserves » du Makhzen, étant d'ailleurs bien entendu que ces réserves sont en valeur ? Voici les faits.

Abd el Aziz, neuf jours après avoir signé, adressa à M. Malmusi, ministre d'Italie, délégué par les puissances, des « observations et desi«derata ». Le ministre d'Italie fit remarquer que ni les unes ni les autres ne pouvaient abolir ni restreindre la portée de la ratification. M. Malmusi rendit compte de l'incident dans les termes suivants :

« Le ministre d'Italie au Maroc au ministre d'Etat à Madrid.

<< Monsieur le Ministre,

« Tanger, 5 août 1906.

« J'ai l'honneur de remettre ci-joint à Votre Excellence le résumé d'une

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<<note verbale que le vizir, ministre des Affaires étrangères de Sa Majesté << Chérifienne, m'a remise, à titre officieux, à mon départ de Fez.

« Votre Excellence jugera la suite que peut comporter la note de « Sid Abd el Kerim ben Sliman.

« Cette communication - je me permets d'ajouter m'a été faite « neuf jours après que Sa Majesté l'empereur du Maroc eut accepté et << ratifié intégralement l'Acte d'Algésiras. Ainsi les observations et desi«derata qui y sont exprimés conservent la séparation bien marquée que, « dès mes premières entrevues avec le sultan et ses conseillers, j'ai eu « soin d'établir entre l'explication et la discussion du protocole. «Je prie Votre Excellence d'agréer, etc.

« G. MALMUSI. »

Par conséquent note verbale, c'est-à-dire document purement officieux, non signé, remis au ministre d'Italie, au moment de son départ, neuf jours après la ratification, et accepté par M. Malmusi sous les plus expresses réserves, comme la simple expression de vœux qui ne pouvaient prévaloir contre les décisions de la conférence : voilà à quoi se borne la << protestation » qu'on a si fort exagérée.

Quant à cette note verbale, elle portait tout entière, sauf une phrase, d'ailleurs inintelligible, sur des points de détail.

Sur un seul point, les << réserves » du Makhzen présentaient plus d'intérêt, mais non plus de valeur pratique : il s'agissait de la police. Voici, à cet égard, les extraits du résumé remis par M. Malmusi, à la suite des « observations » de Ben Sliman :

Le Makhzen demande s'il pourra, comme il le désire, substituer ou transporter les instructeurs militaires d'un port à un autre.

Il interprète cet article dans le sens que ni la France ni l'Espagne n'auront d'autres privilèges sur les autres puissances.

ART. 4. Le Mahkzen désire que, dans la pratique, cet article s'applique de manière que les instructeurs soient européens, non naturalisés, qu'ils connaissent la langue arabe. Les commandements seront faits en arabe, pour la meilleure exécution des exercices militaires par les soldats indigènes.

Dans son sentiment, une fois terminé le délai de cinq ans, les officiers instructeurs retourneront dans leur pays, dùment récompensés ; ils pourront être remplacés par des officiers du Makhzen.

ART. 9. D'après les dispositions de cet article, le Makhzen comprend que le caractère des réclamations sur lesquelles l'inspecteur général devra faire une information sera spécifié dans le sens qu'il s'agit de réclamations concernant exclusivement la police.

Comme on le voit, l'une des observations résumées par M. Malmusi, celle relative aux «< privilèges » de la France et de l'Espagne, semble tendre, si obscure soit-elle, à restreindre le rôle des instructeurs. La plupart des puissances ont déjà fait savoir au Makhzen que l'Acte d'Algésiras, ratifié par le sultan, est la charte de la police; qu'il n'y a pas lieu d'« interpréter » cet Acte, qui est la clarté même ; qu'il suffit de l'exécuter, ce à quoi toute l'Europe est de plus en plus résolue en présence des progrès de l'anarchie marocaine. Les prétendus « privilèges » dont parle la note verbale ne sont qu'un mandat donné par les puissances à deux d'entre elles en raison de leur situation spéciale. Il ne dépend pas du Maroc, qui a ratifié les décisions d'Algésiras, de contester ni ce mandat ni cette situation.

Voilà à quoi se réduit toute cette histoire. On voit qu'elle n'est pas si grave que d'aucuns semblaient le redouter.

Etats-Unis.

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Le conflit avec le Japon. Les autorités scolaires de San-Francisco, en refusant d'admettre les enfants japonais dans les mêmes écoles que les enfants américains, ont provoqué un conflit qui, d'apparence secondaire au début, comme nous l'indiquions dans notre livraison du 1er novembre, menace de prendre les proportions d'un casus belli.

Le consul général des Etats-Unis à Yokohama, qui se trouve actuellement à San-Francisco, a en effet déclaré que l'opinion japonaise était exaspérée des distinctions anti-japonaises faites par les Etats du Pacifique, et qu'au Japon on parlait ouvertement de la guerre. Tout en se défendant d'un pessimisme exagéré, il faut reconnaître que la situation est sérieuse, car, malgré la méthode conciliatrice de M. Metcalf, secrétaire d'Etat du Commerce et de l'Industrie, envoyé à San Francisco par le président Roosevelt pour apaiser le conflit, il semble bien certain que la Californie est décidée à maintenir l'exclusion des enfants japonais des écoles ordinaires.

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Quand bien même l'intervention fédérale se produirait sous une forme impérative et on sait les dangers d'une telle politique en face de la large autonomie des Etats de l'Union la difficulté subsisterait, car les Californiens sont résolus à ne pas laisser leurs enfants s'asseoir sur les mêmes bancs que les écoliers japonais. L'attitude du président Roosevelt, qu'on dit favorable aux réclamations japonaises, sera considérée à l'intérieur et à l'étranger comme une nouvelle orientation de la politique américaine. Cette politique trouvera des partisans nombreux dans les Etats du Nord, que l'infiltration japonaise ne menace pas, mais sera en défaveur dans les Etats du Sud où l'opinion publique, sur la question des races et des droits des Etats, favorisera naturellement les Californiens. La venue, annoncée, d'une escadre japonaise sur les côtes américaines du Pacifique ne fera pas faire un pas à la question, car l'esprit national aux États-Unis commence à s'exaspérer. Déjà la Yellow press réclame l'envoi dans le Pacifique de forces navales imposantes, car jusqu'à présent les EtatsUnis ne disposent en Extrême-Orient que des trois cuirassés Wisconsin, Ohio et Oregon, de quelques croiseurs protégés et canonnières sans valeur militaire, et de cinq contre-torpilleurs. Cependant une division navale composée des grands croiseurs cuirassés neufs West-Virginia, Colorado, Pennsylvania et Maryland vient de franchir le canal de Suez pour remplacer l'escadre asiatique; mais, malgré cet appoint, celle-ci demeure numériquement inférieure aux forces japonaises. - E. N.

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