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Le service militaire, en Roumanie, est obligatoire et personnel. Les Roumains, qui ont atteint l'âge de 21 ans dans l'année précédente, doivent le service militaire armé ou auxiliaire, à moins qu'ils ne soient exemptés pour cause d'inaptitude physique, ou dispensés ou ajournés. La Roumanie, imitant en cela l'exemple de l'Allemagne, classe chaque année un grand nombre de jeunes gens dans la catégorie des ajournés. Les ajournés et les dispensés à titre conditionnel paient une taxe qui, versée dans la caisse de la dotation de l'armée, sert à donner des pensions pour ancienneté de services aux sous-officiers et aux soldats, des secours aux anciens militaires et à leurs familles. Les étrangers domiciliés en Roumanie, les individus nés en Roumanie d'un père étranger, sont astreints au service militaire, lorsqu'ils se trouvent dans l'impossibilité de justifier de l'accomplissement de leurs obligations militaires dans un autre pays. Cette mesure vise particulièrement les israélites, fort nombreux en Roumanie, surtout dans la Moldavie. La ville de lassy en compte 50.000 sur 90.000 habitants. Ce sont des juifs de Russie et de Galicie, attirés en Roumanie par le développement qu'ont pris le commerce et l'industrie depuis que la société roumaine s'est organisée et a adopté les habitudes européennes.

Le nombre des jeunes gens roumains inscrits sur les listes de recensement annuelles s'élève à environ 60.000. 8 % échappent aux opérations du recrutement, 20 % sont ajournés, 15% bénéficient d'une dispense, 6 % n'ont pas l'aptitude physique voulue pour le service militaire, enfin 5 % sont affectés au service auxiliaire. Le reste, 27.600 jeunes gens, est réparti, par voie de tirage au sort et sensiblement par moitié, dans l'armée permanente et dans l'armée semi-permanente, les numéros les plus bas étant désignés pour l'armée permanente. Les chiffres qui précèdent n'ont rien d'absolu; ils représentent le rendement moyen de cinq classes roumaines. On en peut tirer celte conclusion que 46 % des jeunes gens recensés en Roumanie sont incorporés, chaque année, dans l'armée active. Des raisons d'ordre budgétaire s'opposent à ce que la totalité des jeunes gens roumains aptes au service militaire soient incorporés dans l'armée pour y accomplir trois années de service intégralement. De là est venue la nécessité de diviser l'armée active en armée permanente et en armée semi-permanente. L'armée permanente reçoit une partie des jeunes gens affectés à l'infanterie et à la cavalerie et tous les jeunes gens affectés aux autres armes. L'armée semi-permanente ne comprend que des fantassins et des cavaliers. Dans l'armée permanente, les jeunes gens

accomplissent trois années de service effectif. Ceux d'entre eux dont l'instruction générale atteint un certain niveau sont renvoyés dans leurs foyers au bout de deux ans et même d'un an de service. Après leur service effectif, les soldats de l'armée permanente passent successivement 5 ans en congé et 2 ans dans la réserve. Qu'ils soient en congé ou dans la réserve, ils sont obligés de répondre, tous les ans, à une période d'instruction de 20 jours, à l'époque des manœuvres. Les hommes en congé correspondent aux réservistes en France; ils servent à la mobilisation, à compléter les effectifs de l'armée active. Les hommes de la réserve sont exclusivement affectés aux bataillons de dépôt.

Dans l'armée semi-permanente, le service est réglé de la manière suivante. Au moment de leur incorporation, les jeunes gens servent pendant 2 ou 3 mois, suivant qu'ils appartiennent à l'arme de la cavalerie ou à celle de l'infanterie. Renvoyés dans leurs foyers, ils s'y occupent à leur gré, mais ils sont astreints, par séries, à un appel de 8 jours tous les mois, à un exercice de tir au chef-lieu de la commune, chaque dimanche, à une période de manœuvres de 3 ou 3 mois, après la saison des récoltes. Pendant les cinq années actives, les hommes de l'armée semi-permanente fournissent un nombre de journées de présence qui varie suivant les ressources budgétaires, sans jamais descendre au-dessous de 600. Ils sont versés ensuite dans la catégorie des hommes en congé, où ils restent 2 ans, puis dans la réserve, où ils comptent également pendant 2 ans, dans les mêmes obligations que les hommes de l'armée perma

nente.

On trouve, dans l'organisation de l'armée active roumaine et dans les obligations d'activité imposées pendant 9 ans aux Roumains, la préoccupation d'instruire le plus grand nombre de jeunes gens avec le minimum de dépenses, de ne les garder sous les drapeaux que le temps strictement nécessaire, mais de les y rappeler le plus souvent possible. Les rappels répétés contribuent au développement de l'esprit militaire dans un pays, tout en assurant l'amalgame des hommes en activité de service avec ceux des réserves et la cohésion des unités de l'armée. C'est avec le service à court terme et au moyen du contact périodique des réservistes avec les hommes de l'armée active, que les Prussiens sont arrivés, après les désastres de 1806, à organiser une armée puissante par le nombre et par l'homogénéité de ses éléments. Napoléon Ier leur avait imposé des effectifs du temps de paix dérisoires. Ils éludèrent une obligation qui leur enlevait tout espoir de relèvement par les armes, en

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faisant passer sous les drapeaux, mais pour quelques mois seulement, tous leurs jeunes gens valides. C'est la Prusse qui, la première, a fait une application du service réduit. Actuellement, et bien avant l'adoption de la loi de deux ans en France, l'Allemagne n'impose que deux ans de service, au maximum, à tous ses soldats de l'armée active n'appartenant pas à la cavalerie ou à l'artillerie à cheval. Par contre, elle soumet ses réservistes à deux appels d'une durée, chacun de 8 semaines, et les hommes de la landwehr du premier ban à deux périodes d'instruction de 14 jours.

Les Allemands sont, en effet, convaincus de la nécessité d'avoir des réservistes d'autant plus instruits et rompus à la discipline militaire, que la durée du service dans l'armée active est plus réduite. Toute diminution de la durée du service dans l'armée active doit coïncider, logiquement, avec une obligation nouvelle imposée aux hommes des réserves.

Les réservistes roumains, qu'ils proviennent de l'armée permanente ou de l'armée semi-permanente, sont versés, au bout de deux années, dans la milice. Ils y restent pendant six ans. La milice correspond à l'armée territoriale en France. En temps de paix, les miliciens sont soumis à des appels ordinaires et extraordinaires. Les appels ordinaires ne dépassent pas quarantehuit heures. Leur but est de faire participer les hommes de la milice à des exercices ou à des inspections. Les appels extraordinaires ont lieu un peu avant l'époque des grandes mancuvres, afin que les miliciens puissent y prendre part. Ils durent, au maximum, un mois. A la mobilisation, l'appel extraordinaire a lieu, par classe, en commençant par la plus jeune. Les miliciens sont, enfin, versés dans la glota, où ils restent de 36 ans à 46 ans. La glota correspond à la réserve de l'armée territoriale en France. Les hommes de la glota sont destinés à remplacer dans les garnisons et dans les forteresses les troupes actives employées en campagne.

M. Stourdza, chef du parti libéral roumain, président du Conseil et ministre de la Guerre dans ces dernières années, a songé à introduire en Roumanie le service de deux ans, ce qui eût amené la disparition des éléments semi-permanents de l'armée active. Il a renoncé à son projet pour deux raisons : à cause de l'augmentation des dépenses militaires qu'eût fatalement entraînée le service ininterrompu imposé pendant vingtquatre mois à tous les soldats de l'armée active et eu égard au danger qu'il y a toujours à rompre d'une manière complète

avec des traditions appropriées aux mœurs nationales. La Roumanie conserve donc son système de recrutement et son organisation militaire fort différents de ceux qu'ont adoptés les autres puissances européennes, puisqu'ils lui donnent tout à la fois une armée permanente et une armée semi-permanente, c'est-à-dire une milice. La distinction à faire entre ces deux termes armée permanente et milice, se trouve dans leur définition. L'armée permanente est caractérisée par le maintien des hommes sous les drapeaux au delà du terme nécessaire à leur instruction militaire, quel que soit, d'ailleurs, leur mode de recrutement, conscription ou engagement volontaire et le caractère du service, obligatoire, personnel, réduit. La milice englobe tous les citoyens valides. Mais les miliciens ne font que passer sous les drapeaux. Ils n'y restent et on ne les y rappelle que pendant le temps strictement nécessaire à leur instruction militaire. L'armée semi-permanente roumaine a bien le caractère d'une milice. On ne peut cependant pas l'appeler de ce nom, de peur d'une confusion, les Roumains se servant du mot milice pour désigner la fraction de leurs forces militaires désignée, en France, sous le nom d'armée territoriale.

L'organisation militaire, en Roumanie, repose, en partie, sur la division du territoire en circonscriptions correspondant aux 34 régiments d'infanterie, et sur cette particularité que le régiment d'infanterie est employé à recruter toutes les armes et tous les services. La circonscription est partagée entre les quatre compagnies semi-permanentes du régiment (le régiment d'infanterie roumain comprend deux bataillons permanents et un bataillon semi-permanent, chacun d'eux à quatre compagnies) chargées, dans l'étendue de leur territoire, des opérations du recrutement et de l'administration des hommes en congé et des réservistes. Chaque année, les jeunes gens de la circonscription reconnus bons pour le service sont répartis en nombre sensiblement égal entre les éléments permanents et les éléments semi-permanents. Les compagnies d'infanterie permanente étant deux fois plus nombreuses que les compagnies semipermanentes et le temps de service dans l'armée permanente moins long que dans l'armée semi-permanente, il s'ensuit que les compagnies semi-permanentes ont un effectif trois fois plus élevé que l'effectif des compagnies permanentes et trop considérable pour que tous les hommes puissent être habillés, armés et suffisamment encadrés ou instruits. Il y a là un vice d'organisation, une perte de forces vives auxquels le gouvernement

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