SCÈNE IIL ARISTIONE, ERIPHILE, sostrate, CLÉONICE, CLITIDAS. CLÉONICE. Madame, je viens vous dire qu'Anaxarque a jusqu'ici abusé l'un et l'autre prince par l'espérance de ce choix qu'ils poursuivent depuis longtemps, et qu'au bruit qui s'est répandu de votre aventure, ils ont fait éclater tous deux leur ressentiment contre lui, jusque là que, de paroles en paroles, les choses se sont échauffées, et il en a reçu quelques blessures dont on ne sait pas bien ce qui arrivera. Mais les voici. SCÈNE IV. ARISTIONE, ÉRIPHILE, IPHICRATE, TIMOCLÈS, SOSTRATE, CLÉONICE, CLITIDAS. ARISTIONE. Princes, vous agissez tous deux avec une violence bien grande; et, si Anaxarque a pu vous offenser, j'étais pour vous en faire justice moi-même. IPHICRATE. Et quelle justice, madame, auriez-vous pu nous faire de lui, si vous la faites si peu à notre rang dans le choix que vous embrassez? ARISTIONE. Ne vous êtes-vous pas soumis l'un et l'autre à ce que pourraient décider ou les ordres du ciel ou l'inclination de ma fille? TIMOCLES. Oui, madame, nous nous sommes soumis à ce qu'ils pourraient décider entre le prince Iphicrate et moi, mais non pas à nous voir rebuter tous deux. ARISTIONE. Et, si chacun de vous a bien pu se résoudre à souffrir une préférence, que vous arrive-t-il à tous deux où vous ne soyez préparés? et que peuvent importer à l'un et à l'autre les intérêts de son rival? IPHICRATE. Oui, madame, il importe. C'est quelque consolation de se voir préférer un homme qui vous est égal; et votre aveuglement est une chose épouvantable. ARISTIONE. Prince, je ne veux pas me brouiller avec une personne qui m'a fait tant de grâce que de me dire des douceurs; et je vous prie, avec toute l'honnêteté qu'il m'est possible, de donner à votre chagrin un fondement plus raisonnable; de vous souvenir, s'il vous plaît, que Sostrate est revêtu d'un mérite qui s'est fait connaître à toute la Grèce, et que le rang où le ciel l'élève aujourd'hui va remplir toute la distance qui était entre lui et vous. IPHICRATE. Oui, oui, madame, nous nous en souviendrons. Mais peutêtre aussi vous souviendrez-vous que deux princes outragés ne sont pas deux ennemis peu redoutables. TIMOCLES. Peut-être, madame, qu'on ne goûtera pas longtemps la joie du mépris qu'on fait de nous. ARISTIONE. Je pardonne toutes ces menaces aux chagrins d'un amour qui se croit offensé; et nous n'en verrons pas avec moins de tranquillité la fête des jeux Pythiens. Allons-y de ce pas, et couronnons, par ce pompeux spectacle, cette merveilleuse journée. Vous ne sauriez chanter rien de plus précieux, Rien de plus doux pour les oreilles. PREMIER SACRIFICATEUR. A ce dieu plein de force, à ce dieu plein d'appas, Il n'est rien qui résiste. SECOND SACRIFICATEUR. Il n'est rien ici-bas Qui par ses bienfaits ne subsiste. LA PRÊTRESSE. Toute la terre est triste Quand on ne le voit pas. CHOEUR. Poussons à sa mémoire PREMIÈRE ENTRÉE DE BALLET. Les six hommes portant les, haches font entre eux une danse ornée de toutes les attitudes que peuvent exprimer des gens qui étudient leurs forces; puis ils se retirent aux deux côtés du théâtre, pour faire place à six Voltigeurs. SCÈNE II. LA PRÊTRESSE, SACRIFICATEURS, MINISTRES DU SACRIFICE, VOLTIGEURS, CHŒUR DE PEUPLES. DEUXIÈME ENTRÉE DE BALLET. Six Voltigeurs font paraître en cadence leur adresse sur des chevaux de bois, qui sont apportés par des esclaves SCÈNE III. LA PRÊTRESSE, SACRIFICATEURS, MINISTRES DU SACRIFICE, ESCLAVES, CONDUCTEURS D'ESCLAVES, CHOEUR DE PEUPLES. TROISIEME ENTRÉE DE BALLET. Quatre Conducteurs d'esclaves amènent en cadence huit Esclaves, qui dansent pour marquer la joie qu'ils ont d'avoir recouvré leur liberté. SCÈNE IV. LA PRÊTRESSE, SACRIFICATEURS, ministres DU SACRIFICE; HOMMES ET FEMMES, armés à la grecque; CHŒUR DE PEUPLES. QUATRIÈME ENTRÉE DE BALLET. Quatre hommes et quatre femmes, armés à la grecque, font ensemble une manière de jeu pour les armes. SCÈNE V. LA PRÊTRESSE, SACRIFICATEURS, MINISTRES DU SACRIFICE; HOMMES ET FEMMES, armés à la grecque; UN HÉRAUT, TROMPETTES, UN TIMBALIER, CHOEUR DE PEUPLES. (La tribune s'ouvre. Un héraut, six trompettes et un timbalier, se mêlant à tous les instruments, annoncent avec un grand bruit la venue d'Apollon.) CHOEUR. Ouvrons tous nos yeux A l'éclat suprême Qui brille en ces lieux. SCÈNE VI. APOLLON, SUIVANTS D'APOLLON, LA PRÊTRESSE, SACRIFICATEURS, MINISTRES DU SACRIFICE; HOMMES ET FEMMES, armés à la grecque; UN HÉRAUT, TROMPETTES, UN TIMBALIER, CHŒUR DE PEUPLES. (Apollon, au bruit des trompettes et des violons, entre par le portique, précédé de six jeunes gens qui portent des lauriers entrelacés autour d'un bâton, et un soleil d'or au-dessus avec la devise royale en manière de trophée.) CHOEUR. Quelle grâce extrême! Quel port glorieux! Où voit-on des dieux Qui soient faits de même ? CINQUIÈME ENTRÉE DE BALLET. Les six jeunes gens, pour danser avec Apollon, donnent leur trophée à tenir aux six hommes qui portent les haches, et commencent avec Apollon une danse héroïque. SIXIÈME ENTRÉE DE PALLET. A cette danse se joignent, en diverses manières, les six hommes portant les trophées, les quatre femmes armées avec leurs timbres, et les quatre hommes armés avec leurs tambours, tandis que les six Trompettes, le Timbalier, les Sacrificateurs, la Prêtresse et le chœur de musique accompagnent tout cela, en s'y mêlant par diverses reprises, ce qui finit la fête des jeux Pythiens et tout le divertissement. VERS Pour le ROI, représentant Apollon. Je suis la source des clartés; Dont le beau cercle m'environne, Ne sont brillants et respectés Du char où je me puis asseoir, Pour M. LE GRAND, suivant d'Apollon. Bien qu'auprès du Soleil tout autre éclat s'efface, Que l'on s'en tient toujours le plus près que l'on peut. Pour le marquis de VILLEROY, suivant d'Apollon. De notre maître incomparable Et le zèle puissant qui m'attache à ses vœux Pour le marquis de RASSENT, suivant d'Apollon. Je ne serai pas vain quand je ne croirai pas PERSONNAGES. PANDOLFE, père de Lélie. L'ÉTOURDI OU LES CONTRE-TEMPS. COMÉDIE EN CINQ ACTES.-1653. CÉLIE, esclave de Trufaldin. La scène est à Messine, dans une place publique. MASCARILLE, valet de Lélie. DEUX TROUPES DE MASQUES. MASCABILLE. Eh! trêve de douceurs. Qu'il pourra rencontrer de quoi vous faire sage; Et s'il vient à savoir que, rebutant son choix, D'un objet inconnu vous recevez les lois, Et de quis beaux sermons on vous régalera? Elle n'est pas fort bonne; et vous devriez tâcher... MASCARILLE (à part). Il se met en courroux. (Haut.) Tout ce que j'en ai dit Et Mascarille est il ennemi de nature? MASCARILLE. Laissez-moi quelque temps rêver à cette affaire. LÉLIE. Je ne sais. C'en est trop à la fin, Et pourrions, par un prompt achat de cette esclave, Trufaldin, qui la garde, est en quelque souci ; Et trouvant son argent, qu'ils lui font trop attendre, LELIE. Ah! que le ciel m'oblige en offrant à ma vue MASCARILLE. Vous le prenez là d'un ton un peu trop haut; TRUFALDIN (dans la maison). Célie! LÉLIB. Eh bien? Oh! rencontre cruelle ' Ce malheureux vieillard devait-il nous troubler! MASCARILLE. Allez, retirez-vous; je saurai lui parler. SCÈNE IV. TRUFALDIN, CÉLIE, LĖLIE, retiré dans un coin; MASCARILLE. TRUFALDIN (à Célie). Que faites-vous dehors? et quel soin vous talonne, Vous à qui je défends de parler à personne? MASCARILLE. Monsieur, je suis tout vôtre, et ma joie est extrême De pouvoir saluer, en toute humilité, Un homme dont le nom est partout si vanté. TRUFALDIN. Très-humble serviteur. MASCARILLE. J'incommode peut-être ; Mais je l'ai vue ailleurs, où m'ayant fait connaître Les grands talents qu'elle a pour savoir l'avenir, Je voulais sur ce point un peu l'entretenir. Trufaldin. Quoi! te mêlerais-tu d'un peu de diablerie? CÉLIE. Non, tout ce que je sais n'est que blanche magie. MASCARILLE. Voici donc ce que c'est. Le maître que je sers Languit pour un objet qui le tient dans ses fers. Il aurait bien voulu du feu qui le dévore Pouvoir entretenir la beauté qu'il adore; Mais un dragon veillant sur ce rare trésor N'a pu, quoi qu'il ait fait, le lui permettre encor ; Et, ce qui plus le gêne et le rend misérable, Il vient de découvrir un rival redoutable : Si bien que, pour savoir si ses soins amoureux Ont sujet d'espérer quelque succès heureux, Je viens vous consulter, sûr que, de votre bouche, Je puis apprendre au vrai le secret qui nous touche. CELIE. Sous quel astre ton maître a-t-il reçu le jour ? MASCARILLE. Sous un astre à jamais ne changer son amour. CÉLIE. Sans me nommer l'objet pour qui son cœur soupire, La science que j'ai m'en peut assez instruire. Cette fille a du cœur, et, dans l'adversité, Elle sait conserver une noble fierté : Elle n'est pas d'humeur à trop faire connaître Les secrets sentiments qu'en son cœur on fait naître ; Mais je les sais comme elle, et, d'un esprit plus doux, Je vais, en peu de mots, te les découvrir tous. MARCARILLE. Oh! merveilleux pouvoir de la vertu magique ! CÉLIE. Si ton maître en ce point de constance se pique, Et que la vertu seule anime son dessein, Qu'il n'appréhende plus de soupirer en vain : Il a lieu d'espérer; et le fort qu'il veut prendre N'est pas sourd aux traités, et voudra bien se rendre. MASCARILLE. C'est beaucoup; mais ce fort dépend d'un gouverneur Difficile à gagner. CÉLIE. C'est là tout le malheur. MASCARILLE (à part, regardant Lélie). Au diable le fâcheux qui toujours nous éclaire! CÉLIE. Je vais vous enseigner ce que vous devez faire. LELIE (les joignant). Cessez, ô Trufaldin, de vous inquiéter; C'est par mon ordre seul qu'il vous vient visiter, Et je vous l'envoyais, ce serviteur fidele, Vous offrir mon service, et vous parler pour elle, Dont je vous veux dans peu payer la liberté, Pourvu qu'entre nous deux le prix soit arrêté. MASCARILLE (à part). La peste soit la bête! Que vos écarts d'esprit n'étonnent plus les gens. MASCARILLE (seul). Fort bien. A dire vrai, l'argent SCENE VI ANSELME, MASCARILLE. ANSELME. Par mon chef, c'est un siècle étrange que le nôtre! Que c'est grande pitié. ANSELME. Elle? Et vous aime tant, Que tu me rends content! MASCARILLE. Peu s'en faut que d'amour la pauvrette n ‹meure : Anselme, mon mignoù, crie-t-elle à toute heure, Quand est-ce que l'hymen unira nos deux cœurs, Et que tu daigneras éteindre mes ardeurs? ANSELME. Mais pourquoi jusqu'ici me les avoir celées? Les filles, par ma foi, sont bien dissimulées! Mascarille, en effet, qu'en dis-tu? quoique vieux? J'ai de la mine encore assez pour plaire aux yeux. MASCARILLE. Oui vraiment, ce visage est encor fort mettable, S'il n'est pas des plus beaux il est des agréable. ANSELME. Si bien done?... MASCARILLE (veut prendre la bourse). Si bien donc qu'elle est sotte de vous, Ne vous regarde plus... ANSELME. MASCARILLE. Et vous veut... ANSELME. MASCARILLE. Quoi ? Que comme un époux ; Et me veut?... Et vous veut, quoi qu'il tienne, La?... Prendre la bourse... ANSELME. |