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Enfin, fur cette derniere Diffolution, jettez quelque Sel alkali fixe, Ce fel alkali ayant une très-grande af finité avec l'eau-forte; il arrivera que le fel volatil urineux, venant à fe féparer de fon diffolvant, s'élévera en haut, où il fera emporté par sa légéreté. fa

Toutes ces expériences confirment, comme on voit, la Loi d'affinité que nous avons déjà établie : loi d'où peut uniquement découler leur explication, On peut auffi remarquer, à l'occafion de ces expériences, que l'Affinité ne fuit point la proportion de la pefanteur ou de la légérete: puifque fouvent un corps plus pefant eft précipité par un corps plus léger; & un corps plus léger, par un corps plus pefant,

TROISIEME GENRE DE PREUVES,
LES DIFFÉRENTES CRYSTALLISATIONS.

120. DÉFINITION. La Cryftallifation, en général, eft une opération par laquelle les Parties intégrantes. -d'un corps, féparées les unes des autres par l'interpofition d'un Fluide, font déterminées à fe joindre & à former des maffes d'une figure réguliere & conftante.

Cette définition convient, comme on voit, à tous les Corps dont les parties font naturellement fufceptibles d'un arrangement régulier: foit que leurs molécules foient tranfparantes, comme dans les fels, dans les cryftaux, dans les pierres précieuses; foit que leurs molécules foient opaques, comme dans les cailloux, dans les pyrites, dans les métaux.

La Crystallifation des Sels, que la Nature met plus à la portée de nos obfervations, va nous fervir d'introduction à la théorie générale de la Cryftallisation.

LA CRYSTALLISATION Des Sels,

121. EXPÉRIENCE, Placez fur un Porte-objets hofontal, à trois points différens, trois gouttes d'eau,

extraites de trois Verres dans lesquels vous aurez fait diffoudre féparément, du Sel commun, du Sucre, du Nitre; & laiffez évaporer tranquillement ces trois gouttes. (103).

Après l'évaporation, examinez avec un Microfcope, les trois points du Porte-objet, où étoient les trois gouttes évaporées. Vous y verrez des molécules d'une figure toujours réguliere, mais variée felon la nature des fels qui ont été infufés & diffous. Le Sel commun, celui qui fert à nos tables, forme des cubes; le Sucre, des globules; le Nitre, des prifmes allongés & rayés de rainures paralleles.

122. ASSERTION. Le phénomene de la Cryftallisation dés Sels, paroît découler uniquement de la Loi d'affinité, ou d'une Attraction Spéciale entre les éléments d'un même Sel.

DÉMONSTRATION. Après ce que nous avons dit & de la Matiere tourbillonnante & de l'Attraction commune à tous les corps indiftinctement, il feroit fort inutile de s'arrêter à réfuter de nouveau l'influence de ces deux Caufes dans le phénomene de la Cryftallifation, où elles ne peuvent évidemment influer pour rien. (104).

Il ne s'agit donc plus que de faire voir ici que ce phénomene découle naturellement de l'hypothefe d'une Attraction spéciale, dont nous avons d'abord démontré la poffibilité; dont nous avons enfuite établi l'existence; & dont nous allons faire l'application aux phénomenes de la Crystallisation en général & en particulier.

123. SUPPOSITIONS. Il eft conftant, parce que nous avons dit des Affinités chymiques ou des Attractions fpéciales, que l'on peut fuppofer avec la plus grande vraisemblance :

1°. Que les Parties intégrantes des corps, ont les unes vers les autres une Tendence naturelle, en vertu de laquelle elles s'approchent, s'uniffent, & adherent entre elles: quand aucun obftacle ne s'y oppose.

II°. Que dans les Corps fimples ou peu compofés, cette Tendence naturelle des Parties intégrantes les unes vers les autres, eft plus marquée & plus fenfible, que dans les Corps plus compofés : ce qui fait que les premiers font plus difpofés que les derniers, à la cryftallifation.

III. Que, quoique nous ne connoiffions point la figure des Molécules primitives qui conftituent les corps on ne peut douter cependant que ces molécules primitives n'aient chacune une Figure conflante, toujours la même, qui leur eft propre, & qu'aucun Agent créé ne peut leur faire perdre.

IV. Qu'il paroît également certain, qu'excepté le cas où toutes les Parties intégrantes d'un corps feroient parfaitement femblables dans tous leurs points; ces Parties intégrantes ne tendent point à s'unir indiftinctement par toutes leurs faces, mais plutôt par les unes que par les autres; & il eft vraisemblable que c'est par les faces qui peuvent avoir entre elles lé contact le plus immédiat & le plus étendu.

124. APPLICATION. Il eft facile, d'après cette théorie, de rendre raifon du phénomene de la Crystallitation des fels; & d'établir la précédente Affertion.

1o. A mefure que l'eau s'évapore, les Molécules falines, qui font fixes & non volatiles, fe détachent d'elle à fa furface; & ne peuvent être attirées & abforbées par l'eau reftante, qui, faturée de fel, comme on le fuppofe, ne conferve plus de force attractive à cet égard. (103).

II°. Ces Molécules falines furabondantes, dont le nombre augmente fans ceffe à mesure que l'eau cons

tinue à s'évaporer, répandues & fufpendues en nombre immenfe à la furface de l'eau, doivent à la fin fe trouver fi près les unes des autres, qu'elles fe rencontrent & fe touchent.

Alors, en vertu de leur Attraction mutuelle que rien ne gêne, elles devront s'unir & s'attacher entre elles, par leurs faces ou par leurs points les plus analogues. De-là, la Régularité des figures qu'elles prennent.

III. Ces Molécules unies & entaffées en petites maffes régulieres, que l'oeil apperçoit à la furface de l'eau fous la forme d'une petite pellicule, deviennent à la fin plus pefantes qu'un égal volume d'eau.

Elles doivent donc alors defcendre très-lentement au fond de l'eau, par leur petit excès de gravitation; & continuer à s'unir & à adhérer les unes aux autres au fond de l'eau, par leurs faces plus analogues.

De-là, la Régularité des grandes maffes de fel, quand il fe cryftallife dans une eau pure & tranquille; où rien n'empêche la force attractive des molécules falines, d'avoir fon effet dans toute fa perfection.

IV°. Le même mécanisme doit avoir lieu, jufqu'à l'entiere évaporation de l'eau.

De-là, la Cryftallifation réguliere de toute la maffe de fel, qui fe trouvoit divifée & répandue dans toute la maffe de l'eau. C. Q. F. D.

125. REMARQUE I. Le Sel, en fe crystallifant, ne fe fépare point de toute l'eau avec laquelle il étoit uni dans la diffolution. En vertu de fon affinité avec l'eau, il en retient les dernieres portions, avec un degré de force qui empêche l'ultérieure évaporation de cette eau. Cette Portion d'eau reftante, combinée avec les cryftaux du Sel, ne fait qu'un même tout avec lui; & on ne peut la lui enlever, fans lui faire perdre la régularité de fes figures: d'où il résulte qu'un Sel cryftallifé eft un compofé de fel & d'eau.

Les Chymiftes nomment cette eau adhérente aux cryftaux du fel, Eau de la cryftallifation.

1o. Un degré de chaleur convenable, peut faire perdre à un Sel cryftallifé, l'eau de fa cryftallisation; & dans ce cas, il perd la régularité de fes figures, fans perdre fa nature spécifique de fel.

D'où il s'enfuit que cette eau de la crystallisation, effentielle peut-être au fel cryftallifé comme cryftallifé, n'eft point de l'effence du fel comme fel; ou que cette eau de la cryftallifation eft furabondante à Jan fa nature faline.

II. La quantité d'eau de cryftallisation, varie beaucoup, felon la nature des fels. Le nitre & le fel commun n'en contiennent qu'une fort petite quantité : le fel de glauber & le vitriol martial, en contiennent environ la moitié de leur poids: il y a des fels qui en contiennent une quantité deux fois plus pefante qu'eux.

III°. Quand on a enlevé à un Sel crystallifé, l'eau de fa cryftallisation: ce fel expofé à l'air libre, reprend à-peu-près la même quantité d'eau. La raifon en eft que l'Atmosphere terreftre a toujours beaucoup de vapeurs, que la force attractive du fel attire & retient, comme au moment où a ceffé l'évaporation qui l'avoit cryftallifé.

Mais il ne reprend pas la régularité de fes Cryftaux; parce que les molécules dérangées n'ont pas affez d'aifance & de liberté, pour fe recombiner felon l'affinité de leurs faces les plus analogues.

126. REMARQUE II. Quand une Eau qui tient en diffolution un fel quelconque, s'évapore tranquillement & fans agitation: la Cryftallifation ne commence qu'au moment où eft arrivé le point de faturation. La raifon en eft, que les molécules falines, détachées de l'eau évaporée avant le point de faturation, font

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