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faire encore une observation. Votre Majesté dit que l'homme est malade: c'est bien vrai, mais Votre Majesté daignera m'excuser si je Lui fais observer que c'est à l'homme généreux et fort de menager l'homme malade et faible. Ensuite l'Empereur me quitta d'une façon qui me donna à croire que du moins je ne l'avais pas offensé; il me parla de nouveau de son intention de me faire inviter un jour. Donnera t-il suite à cette intention? Ce n'est pas certain. Il est bon que je prévienne Votre Seigneurie que je compte donner connaissance au comte Nesselrode de la conversation que j'ai eue avec son Impérial maître. || Je suis persuadé que le chancelier est inébranlablement favorable aux mesures de modération et aux vues anglaises, autant que cela est en son pouvoir. Son désir d'agir en harmonie avec le gouvernement de Sa Majesté ne peut que se fortifier, quand il aura été instruit des déclarations amicales que j'ai échangées à ce sujet avec l'Empereur. || En relisant ma dépêche, je me persuade que la conversation, bien qu'en abrégé, a été par moi fidèlement reproduite. Le seul point d'une certaine importance et auquel je n'ai pas touché est celui ci: l'Empereur me dit que les dernières nouvelles de Constantinople étaient plus satisfaisantes, les Turcs paraissant maintenaut plus raisonables bien. qu'on ignore de qu'elle façon s'est manifesté ce changement. Je ferai seulement observer combien il est important pour nous que--dans les affaires de Turquie-aucune décision ne soit prise, sans entente avec le gouvernement de la Reine, par un Souverain qui dispose de plusieurs centaines de milliers de baoïnnettes. || Agira-t-on conformément à cette entente? On peut en douter, d'autant plus que les assurances de l'Empereur sont un peu en contradiction avec les mesures sur lesquelles j'ai cru de mon devoir d'attirer l'attention de Votre Seigneurie. Toutefois, les paroles de l'Empereur me semblent avoir une valeur considérable et certainement elles me donnent en ce moment un avantage dont je ne manquerai pas de profiter. | Votre Seigneurie me pardonnera si je lui fais remarquer que quand je refléchis attentivement à ma conversation avec l'Empereur, il me paraît que ces ouvertures ainsi que d'autres semblables qui pourraient encore être faites ont pour but de poser un dilemme, par lequel il serait désirable que le gouvernement de Sa Majesté ne se laissât par enchainer. Le dilemme me paraît être celui-ci: Si le gouvernement de Sa Majesté britannique ne s'entendait pas avec la Russie sur ce qui doit se produire à la suite de la chûte de la Turquie, il n'aurait par de raisons de se plaindre dans le cas où ces suites seraient désagréables à l'Angleterre. Par contre, si le gouvernement de Sa Majesté entrait dans l'examen de cette éventualité, il serait, jus

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No. 92. qu'à un certain point, partie consentante à une catastrophe qu'il est important d'éloigner aussi longtemps que possible. || Tout ce qui precède peut probablement se résumer ainsi: L'Angleterre doit désirer une entente avec la Russie dans le but de prévenir la chûte de l'Empire Ottoman, tandis que la Russie préfererait que cette entente concernât les événements devant suivre cette chûte. || J'ai l'honneur etc.

P. S. Depuis que cette dépêche a été écrite, j'ai appris par le Ministre autrichien que l'Empereur lui avait parlé de sa conversation avec moi. J'ai dit à sir Hamilton Seymour, lui déclara l'Empereur que le nouveau ministère me parait fort et que je lui souhaite une longue durée, bien que, à dire vrai, je sache que quant à l'Angleterre nous devons forcément être alliés avec ce pays, et que nous ne devons pas nous lier à tel ou tel parti.

No. 93. 1853

No. 93. Depeşa Comitelui Nesselrode către Baronul
Brunnow, ambasadorul Russiei la Londra din
14 Ianuarie 1853, San Petersburg.

(Eastern Papers I, 1854, p. 61).

Je profite du courrier que j'expédie aujourd'hui à Votre Excellence pour lui accuser réception de son expédition du 17/29 Décembre, et 14 Ianuar. l'assurer du vif intérêt avec lequel nous en avons pris lecture. L'Empereur a été surtout très satisfait des premières explications que vous avez échangées avec le chef de la nouvelle administration britannique, et des soins que vous avez pris pour bien établir dans son esprit, comme dans celui de Lord John Russell, avec lequel nous aurons désormais à traiter plus particulièrement, les points principaux sur lesquels vont s'engager nos relations avec le nouveau Ministère. Parmis ceux que vous avez touchés nous avons surtout remarqué celui qui concerne notre situation actuelle en Turquie et le compte que vous avez rendu à Lord Aber- ■ deen et à Lord John Russel du véritable caractère de la grave question des Lieux Saints. Vous aviez déjà abordé ce sujet avec Lord Malmesbury au moment où il se retirait des affaires et vos efforts pour le lui faire envisager sous son vrai jour, n'avaient pu que rencontrer l'approbation de notre augustre Maître. Malheureusement les démarches

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que Votre Excellence avait cherché à obtenir de lui, tant à Paris qu'à No. 93. Constantinople se rapportaient à une situation qui n'est plus la même aujourd'hui. A cette époque les démarches de l'Ambassadeur de France en Turquie et ses menaces pour forcer les Ministres Ottomans à éluder l'exécution du Firman, n'avaient pas encore définitivement réussi. On pouvait conserver l'espoir que les représentations de l'Angleterre au Cabinet Français auraient pour effet d'arrêter M. de Lavalette dans sa marche. Cet espoir à été frustré. Depuis lors, les efforts de l'Ambassade Française ont triomphé à Constantinople. Non seulement le firman revêtu du hati-chérif du Sultan n'a pas été exécuté à Jérusalem, mais il a été traité avec dérision par les Ministres de Sa Hautesse. A l'indignation de toute la population du rit grec, la clef du Temple de Bethléem a été livrée aux Latins de façon à constater publiquement leur suprématie religieuse en Orient. Le mal est donc fait, M. le Baron, et ce n'est plus de le prévenir qu'il s'agit. Il faut maintenant y porter remède. Les immunités du rit orthodoxe lésées, la parole que le Sultan avait donnée solennellement à l'Empereur violée, exigent un acte de réparation quelconque. C'est à l'obtenir qu'il faut travailler. Voilà l'état actuel de la question. Si nous prenions pour exemple les procédés impérieux et violents qui ont conduit la France à ce résultat, si nous étions comme elle indifférents à la dignité de la Porte, aux conséquences qu'un remède héroique peut exercer sur une constitution déjà aussi fortement délabrée que celle de l'Empire Ottoman, notre marche serait toute tracée et nous n'aurions pas de longues reflexions à faire. La menace et l'emploi de la force seraient nos moyens immédiats. On a appelé le canon la dernière raison des rois. Le gouvernement français en a fait sa raison première. C'est l'argument par lequel il a déclaré de prime abord vouloir débuter à Tripoli, comme à Constantinople. Malgré nos griefs légitimes et au risque d'en attendre quelque temps de plus le redressement, nous chercherons à adopter une méthode moins expéditive. Nous voulons encore, de même que nous l'avons toujours voulu, la conservation de l'Empire Ottoman, comme étant à tout prendre la combinaison la moins mauvaise à interposer entre tous les intérêts Européens, qui ne manqueraient pas de se heurter violemment en Orient si le vide venait à s'y faire. Nous nous efforcerons conséquemment d'éviter jusqu'au bout autant, qu'il peut dépendre de nous, sans compromettre notre honneur, tout ce qui serait de nature à ébranler encore davantage ce corps si faible et si chancelant, au risque de le faire tomber en poudre. Quoique nous ayons vainement taché jusqu'ici de rendre la Porte accessible aux conseil de la raison, nous allons faire encore (Acte şi Documente II).

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No. 93. dans ce but une dernière tentative conciliante. Nous sommes donc en 1853 ce moment à la recherche d'un arrangement qui puisse rendre au Firman la validité qu'on lui a ôtée; rétablir à Jerusalem les deux rites sur un pied d'égalité, et concilier leurs prétentions sans léser les droits de l'un et de l'autre. Les conseils pacifiques, mais fermes, dont ces propositions seraient accompagnées auront pour but d'éclairer la Porte sur la conséquence des torts qu'elle s'est donnée par faiblesse, envers nous, et en même temps de la rassurer contre les éventualités qui la préoccupent et l'effrayent du côté de la France. Les bases principales de cet arrangement sont déjà arrétées dans la pensée de l'Empereur, et dès que Sa Majessé les aura fixées définitivement, je ne manquerai pas, Monsieur le Baron, de le faire connaître à Votre Excellence. Mais tout en désirant et voulant fermement n'employer que des moyens pacifiques, il est toutefois une considération, que nous n'avons pu entièrement perdre de vue. C'est que l'ascendant moral de la France a pris de telles proportions à Constantinople, qu'il devient fort à appréhender que toutes nos démarches ne finissent par échouer contre l'idée que les conseillers du Sultan se sont faite de la force irresistible du gouvernement Français. Il peut arriver que la France en voyant balancer la Porte, ait recours encore une fois à son système comminatoire et pèse sur elle de manière à l'empêcher de prêter l'oreille à nos justes réclamations. La partie devient trop inégale entre nous et le Gouvernement Français si tandis que celui-ci fait mouvoir sans opposition son escadre sur tous les points de la Méditerranée, et présente la moindre de ses demandes à la bouche du canon, nous laissons indéfinement s'enraciner dans l'esprit des Turcs l'idée de notre impuissance à les défendre comme à proteger nos propres intérêts. L'Empereur a donc cru devoir aviser d'avance à quelques mesures de précaution pour appuyer nos négociations, neutraliser l'effet des menaces de M. Lavalette et se prémunir, en tout état de cause, contre les entreprises d'un gouvernement habitué à procéder par surprises. Nos mesures n'ont point le but de mettre en question d'aucune manière l'indépendance de la Porte Ottomane. Elles ont au contraire celui de maintenir cette indépendance contre une dictature étrangère, en assurant le repos du Sultan, en relevant son autorité compromise par l'Ambassadeur de France aux yeux de ses sujets du rit Grec qui forment en Europe la majorité de la population des ses Etats. C'est vous dire, M. le Baron, que dans la pensée de l'Empereur, la destination de nos préparatifs est d'avoir un effet plus moral que matériel. Comme les bruits exagérés qui se sont déjà repandus à se sujet pourraient inspirer des alarmes, il nous importait d'établir le véritable esprit de nos intentions.

Nous espérons que le Gouvernement Anglais ne se méprendera pas sur leur nature. Les preuves de modération qu'a données l'Empereur dans sa conduite envers la Turquie, en tant d'occasions antérieures, sont un gage que dans celle-ci il ne se départira pas des mêmes principes. Un intérêt commun appelle l'Angleterre, comme la Russie, à veiller à la conservation de la paix en Orient. Cet intérêt nous l'invoquons, en nous adressant franchement aujourd'hui à l'impartialité du Gouvernement Britannique. Si, comme nous n'en doutons pas, il tient aussi fortement que nous au maintien du status quo oriental, c'est à lui qu'il appartient d'éléver à présent la voix. Nous aider à Constantinople à dissiper l'aveuglement ou la peur panique des Turcs-, ramener, à Paris, le cabinet Français aux conseils de la prudence, telle doit être, selon nous, la double tâche des ministres Anglais; et s'ils veulent bien la prendre sur eux, les négociations que nous allons ouvrir, se résoudront, nous l'espérons, sans danger pour la paix orientale. C'est à agir auprès deux

en ce sens que l'Empereur vous charge, M. le Baron, de consacrer tous vous efforts et votre zèle.

Recevez, etc.

No. 93 1853

14 Januar.

No. 94. Depeşa lui Sir G. H. Seymour către Lord John
Russell, din 22 Ianuarie 1853. San-Petersburg.

(Eastern Papers. V. 1854 p. 6).

(Traducțiune).

Mylord, Le 14 de ce mois, à la suite d'une invitation reque No. 94. du chancelier, je me suie rendu chez l'Empereur et j'ai eu l'honneur 1853 de tenir avec Sa Majesté Impériale une très intéressante conversation 22 Ianuar. de laquelle il est de mon devoir de donner à Votre Seigneurie un compte-rendu qui, bien qu'imparfait, ne sera, dans aucun cas, incorrect. Je trouvai Sa Majesté seule: l'Empereur me reçut avec grande bonté en disant que, j'avais paru désireux de parler avec lui sur les affaires d'Orient; que, de son côté, il y était disposé mais qu'il voulait remonter à une période plus éloignée. „Vous savez, me dit Sa Majesté, les rêves et les plans dans lesquels se complaisait l'Impératrice Cathérine : elle les a légués à nos temps. Mais quoique héritier de ses immenses possessions térritoriales, je n'ai pas hérité de ces visions ou de ces in

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