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Genève. - Imprimerie Charles Schuchardt.

BULLETIN MENSUEL (5 janvier 1885.)1

L'incertitude qui règne encore sur le sort de quelques-uns des membres de la mission Flatters, a inspiré à M. Foureau, de Biskra, le désir de faire une expédition destinée à traverser le Sahara, en recherchant en route soit les survivants, soit les papiers de la mission. Déjà l'année dernière, M. Foureau a poussé une pointe hardie vers le sud, au delà des établissements qu'il a fondés à Touggourt, et tout récemment, il a adressé, au ministère de l'instruction publique, la demande d'être chargé d'une mission scientifique, qui aurait pour but de relier l'Algérie au Niger et au Soudan, et de relever définitivement la route parcourue. Un autre colon français, M. Pontecorboli, établi depuis quarante ans dans la province de Constantine, s'occupe aussi de constituer le personnel d'une expédition en faveur des survivants de la mission Flatters, avec l'aide d'anciens militaires, volontaires et retraités pour la plupart, qui se rendraient d'abord aux renseignements auprès des chefs arabes des régions du sud de l'Algérie, et prendraient des guides sûrs chez les Beni-M’zab et chez les Soufis.

M. le ministre de l'instruction publique de France a chargé le Dr Rouire d'une mission scientifique et archéologique sur les bords du lac Kelbiah, en Tunisie, où l'explorateur prétend avoir découvert l'emplacement de la mer intérieure à laquelle les anciens donnaient le nom de lac Triton. Les amis du colonel Roudaire ne renoncent pas encore à l'opinion que cette mer intérieure occupait l'emplacement actuel des chotts du sud de la Tunisie et de l'Algérie. Dans une des dernières séances de la Société de géographie de Paris, M. de Lesseps a fait hommage à la Société d'un ouvrage considérable de feu M. Ch. Tissot, dans lequel le savant auteur a consigné les résultats de son exploration minutieuse de la Tunisie. Ces résultats confirment pleinement les recherches du colonel Roudaire qui, pour le moment, sans rien demander au gouvernement, poursuit la réalisation de la création d'un port au seuil de Gabès. Il a choisi pour cela un point où la mer est plus profonde qu'elle ne l'est généralement dans ces parages; ce serait l'amorce du canal futur, qui mettrait les chotts en communication avec la mer, et en même temps le seul port de cette côte inhospitalière.

Les matières comprises dans nos Bulletins mensuels et dans les Nouvelles complémentaires y sont classées suivant un ordre géographique constant, partant de l'Algérie, puis allant à l'Est, longeant ensuite la côte orientale du continent et revenant par la côte occidentale.

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NIJHOFF

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Les études entreprises, sous la direction de M. de Lesseps, pour trouver les voies et moyens de satisfaire aux besoins nouveaux créés par l'affluence extraordinaire des navires dans le canal de Suez, sont terminées. La sous-commission qui en était chargée a renoncé à la création d'une seconde voie entre les deux mers, et a conclu à l'élargissement du canal actuel, dont le plafond sera porté de 24 mètres, sa largeur présente, à 40 mètres. Les travaux seront divisés en deux parties: la première consistera à élargir le canal de huit à dix mètres sur tout son parcours; la seconde aura pour but de donner au canal son type définitif. Cette division des travaux permettra aux navires de profiter le plus rapidement possible des améliorations qui viennent d'être adoptées. La traversée du canal s'opérera en 18 heures au lieu de 36. En même temps, M. de Lesseps a enfin obtenu du gouvernement égyptien l'autorisation de construire un canal d'eau douce, pour en alimenter la ville de Port-Saïd, qui, jusqu'ici, n'avait pour ce service que deux conduites, l'une de 24 centim., l'autre de 32 centim., à découvert le long des berges du canal, dans lesquelles deux machines élévatoires, établies à Ismaïlia, amènent l'eau douce. Le nouveau canal aura sa prise à Ismaïlia.

Au moment de quitter Assab pour se rendre au Choa, le comte Antonelli a reçu de Ménélik une lettre lui annonçant l'envoi d'une caravane chargée de dons pour le roi d'Italie, pour le commissaire d'Assab et pour le commandant du vaisseau de guerre en station dans les eaux de la colonie italienne. Le roi du Choa annoncé aussi qu'il a fait des présents à Mohammed-Anfali, le sultan d'Aoussa, pour qu'il prête son concours aux voyageurs italiens et prenne soin de leurs intérêts, en particulier pour qu'il leur fournisse les chameaux dont ils auront besoin ; Ménélik en aurait envoyé lui-même, mais comme ils meurent facilement en route, il a écrit à Mohammed-Anfali qu'il lui paraît plus prudent de les prendre à la côte. Il avait chargé M. Franzoi de transporter les restes de Chiarini par la route d'Assab, à laquelle il tient tout particulièrement, mais M. Franzoi a préféré celle d'Obock.

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Après avoir mis garnison à Zeïla et à Berbera, en remplacement des soldats égyptiens, l'Angleterre comptait faire de même pour Tadjoura, entre les possessions françaises d'Obock et de Sagallo; mais la France a pris les devants. Déjà au commencement de novembre, le commandant d'Obock avait rallié autour de lui les grands chefs indigènes, qui détiennent les routes des caravanes, et, au moment où l'évacuation de la côte par les troupes égyptiennes a commencé, il a obtenu d'eux qu'ils signassent un traité de protectorat en faveur de la France. Les territoires de

Sagallo et de Tadjoura ont une grande importance au point de vue commercial. En effet, tandis que la route d'Obock présente certaines difficultés aux caravanes, elles peuvent arriver en ligne droite à Sagallo ou à Tadjoura 1, en gagnant plus de huit jours de marche. L'eau douce se trouve en abondance dans cette région, dont l'aspect, même en été, est verdoyant. Les deux nouveaux postes français ont été organisés par le commandant d'Obock, que les deux sultans, Hamed et Loeïta, ont suivi au chef-lieu de la colonie française.

Le P. Locminé, missionnaire chez les Gallas, a écrit aux Missions catholiques, qu'il allait s'installer chez les Annia, de race galla, bergers, occupant un territoire grand comme la moitié de la Bretagne, et sans aucune culture. Adopté, suivant la coutume du pays, par Mudde Dalali, chef de la famille Dadakium, de la tribu des Ao-borayu, une des trois branches de la famille Malkatou, l'un des sept fils d'Annia, il est devenu un des hommes influents du pays. Il peut aller et venir partout sans le moindre danger. Son père adoptif a environ 90 ans. La cérémonie d'adoption n'a lieu qu'après conseil de famille et présentation à tous les notables de la tribu. Voici comment le P. Locminé la décrit : « Elle s'est faite dans un endroit retiré de la forêt, devant le « Conseil des dix, »> présidé par mon « vieux père, » avec le cérémonial usité en pareille circonstance. Je vous assure que « mes frères » ne sont pas aussi sauvages que vous pourriez le croire, et qu'ils font bien les choses. Le conseil était assemblé depuis six heures du matin. A midi précis, le Rabba en fonction (espèce d'huissier) est venu à la cabane où j'attendais, avec une certaine anxiété, le résultat de la délibération. Il s'accroupit, puis après un moment de silence: «Viens, » me dit-il simplement. Je le suivis pendant une demi-heure.

« Il ne parlait pas, ni moi non plus. Au bout de ce temps, il me fit tourner vers l'est, et me demanda de jurer de ne jamais faire connaître à personne les noms de ceux que j'allais voir. Je le lui promis. Alors il se remit en marche et, après plusieurs tours et détours, j'arrivai devant le conseil. Le président était assis sur une peau de veau, à trois ou quatre pas du cercle des « dix. » En ligne, du côté opposé au « vieux, » en dehors du cercle, les autorités Boku, Dori et Rabba, formant un carré; leurs visages étaient tournés vers l'est, et ils s'appuyaient sur leurs boucliers, leurs lances à la main, tous plus graves que des sénateurs. On me fit signe de m'asseoir au milieu du carré. Pas un mot! pas un mouve

Voir la carte, IVme année, p. 352.

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