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apprendre aussi à mourir, nous vous conjurons par les douleurs de votre mort de nous faire supporter la notre avec une humble patience, et de changer cette peine affreuse qui est imposée à tout le genre humain, en un sacrifice plein de joie et de zèle. Oui, bon Jesus, soit que nous vivions, soit que nous mourions, nous sommes à vous. En vivant, hélas ! nous n'y sommes qu'avec la triste crainte de n'y être plus un moment après. Mais en mourant, nous serons à vous pour jamais, et vous serez aussi tout à nous, pourvu que le dernier soupir de notre vie soit un soupir d'amour pour vous, et qu'ainsi la nature se perde dans la grace. Ainsi soit-il,

SERMON

POUR

LA FÊTE D'UN MARTYR.

Ossa pullulent de loco suo : nam corroboraverunt Jacob, et redemerunt se in fide virtutis.

Que les os refleurissent en leur place: car ils ont fortifié Jacob, et ils se sont rachetés eux-mêmes par la vertu de leur foi. Au chapitre 49 de l'Ecclésiastique.

C'EST ainsi que l'auteur de ce livre sacré, après avoir parlé de l'homme juste que le Seigneur a donné à la terre, loue douze prophètes qui ont instruit le peuple de Dieu. Que cette louange convient, mes frères, aux reliques des saints martyrs qui font la gloire de l'église! On ne trouve plus rien d'eux ici bas que des ossemens desséchés tristes victimes de la mort et de la corruption mais ces ossemens presque réduits en poudre se releveront au grand jour où JesusChrist les ranimera. Que dis-je ? je les vois déjà; ils sont hors des tombeaux, parce qu'ils ont fortifié Jacob, parce qu'ils ont soutenu l'église par leur invincible courage, parce qu'ils se sont rachetés eux-mêmes, et que la vertu de leur foi, qui était le don de Dieu, les a délivrés de la tentation. Tome XII.

:

G

Précieuses dépouilles du martyr que nous célébrons, vous sortez de ces lieux souterrains où la nouvelle Rome, mère des martyrs, porte dans ses entrailles ceux que l'ancienne Rome, idolâtre et enivrée du sang des saints, a persécutés. Heureuse la France qui vous ouvre son sein avec cette pieuse pompe ! heureux le jour qui éclaire cette fète heureux nous-mêmes, mes frères, à qui Dieu donne de la pouvoir célébrer ! Fleurissez, revêtez-vous de gloire, sacrés ossemens, et répandez dans toute la maison de Dieu une odeur de martyre; Ossa pullulent de loco suo,

Ne tardons pas, mes frères, à expliquer le vrai esprit de cette fête, Voici deux biens qui nous sont présentés. D'un côté, l'exemple d'un martyr; de l'autre, ses reliques. Son martyre, c'est l'exemple qu'il faut imiter; le dépôt de ses reliques demande notre culte. Considérons donc dans les deux points de ce discours; premièrement, ce que c'est qu'un martyr; secondement, le culte qui est dû à son corps.

O Sauveur, qui l'avez formé ce martyr, qui du haut du ciel avez regardé son combat avec complaisance, qui êtes descendu dans la lice pour combattre et pour vaincre en lui, qui l'avez enfin couronné; venez en moi, donnez-moi une bouche enflammée et digne de louer celle du témoin qui vous a si

D'UN MARTYR.

glorieusement confessé. Marie, mère du 147 chef de tous les martyrs, intercédez pour nous. Ave, Maria.

PREMIER POINT.

QUAND on lit, mes frères, les magnifiques promesses faites à l'église, on y trouve des rois de la terre qui en seront les nourriciers, et qui viendront en silence baiser ses sacrés vestiges; on aperçoit la plénitude des nations qui doit venir à elle, et entrer en foule dans la porte de l'évangile. A ce spectacle disparaissent jusqu'aux moindres images de persécution. On est tenté de croire que Dieu, qui tient les cœurs des princes dans ses mains, et qui aime son église comme tout homme aime son propre corps, doit tenir en bride toutes les puissances humaines, pour conserver à ses enfans une éternelle paix. Mais autant, dit Dieu aux hommes, que le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant mes voies et mes pensées sont au-dessus des vôtres. Voici donc ce qu'il a pensé, lui à qui seul appartient la sagesse. Il a trouvé dans ses profonds conseils qu'il est meilleur de permettre que les maux arrivent pour les changer en biens, que de ne les permettre jamais. Et en effet, qu'y a-t-il de plus divin que de commander au mal même, et de le rendre bon ? Comment le fait-il, mes frères ? dit saint Augus

tin. C'est qu'il donne à l'iniquité le cours qu'il lui plait selon ses desseins. Il ne fait pas l'iniquité; mais en la laissant échapper d'un côté plutôt que d'un autre, il la règle, il la domine, il la fait entrer dans l'ordre de sa providence. Ainsi il laisse la fureur s'allumer dans le cœur des princes païens: force leur est donnée contre les sacrifices, et ils affligent les saints du Très-haut. Mais ne craignez rien; la persécution ne peut être que bonne dans la main de Dieu. Le sang des martyrs sera une semence féconde pour multiplier les chrétiens. Le vaisseau sera agité par une cruelle tempête, mais les va gues ne pourront l'engloutir. L'église s'étendra sur les nations jusqu'aux extrémités de l'univers, pendant même qu'elle répandra tant de sang. Quand après trois cents ans de persécution elle aura lassé les persécuteurs, et montré qu'elle est indépendante de toutes les puissances humaines, alors elle daignera recevoir à ses pieds les Césars pour les soumettre à Jesus-Christ. Cependant ceux qui s'imaginent renverser le vrai Dieu c'est par lui qu'ils sont soutenus. C'est lui qui se joue de tous leurs projets, et qui fait servir leur rebellion méme à l'accomplissement des siens. Par la persécution, il prépare à la vraie religion des témoins, mais des témoins qui en scelleront la vérité de leur propre sang. Par la persécution, il prépare aux per

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