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jamais dans le sein de Dieu. Remettez donc devant ses yeux, en notre faveur, les soupirs et les larmes que l'iniquité d'ici-bas vous a tant de fois arrachés. Vous ne pouvez plus, dans la gloire, pleurer sur nos misères; mais vous pouvez nous obtenir la grace de pleurer sur nous-mêmes. En attendant du que vous nous obteniez des vertus, moins obtenez-nous des larmes. Pleurer, frapper nos poitrines, nous prosterner contre terre à la face de notre Dieu, sera notre consolation. Envoyez-le, Seigneur, cet esprit de contrition et de prière, envoyez-le sur vos enfans. C'est Thérèse qui vous le demande avec nous; Thérèse, des entrailles de qui vous avez fait couler des fleuves d'eau vive sur les hommes des derniers temps. Nous en sommes altérés, Seigneur ; c'est notre soif qui parle pour nous; c'est Thérèse elle-même, animée de votre gloire, qui joint ses vœux aux nôtres. Faites donc, ổ mon Dieu, et ne tardez pas; formez vous

même dans vos enfans ce cri si tendre et si touchant: O Père ! ô Père ! Demandez vousmême à vous-même, demandez en nous et pour nous; afin que notre prière ne soit qu'amour, et que nous passions enfin, de cet amour de foi, en l'amour de l'éternelle jouissance. C'est, mes frères, ce que je vous souhaite, au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.

POUR

LA PROFESSION RELIGIEUSE

D'UNE NOUVELLE CONVERTIE.

Venite, audite, et narrabo, omnes qui timetis Deum, quanta fecit animæ meæ.

O vous tous qui craignez le Seigneur, venez, écoutez, et je raconterai tout ce qu'il a fait à mon ame.

Ps. LXV,

16.

L'EUSSIEZ-VOUS cru, ma chère sœur, que l'époux des vierges vous attendait dans cette solitude dès les jours de l'éternité ? C'était donc là ce qu'il voulait de vous, lorsqu'il tirait tant de profonds gémissemens de votre cœur, et que vous ne saviez pas encore vousmême pourquoi vous gémissiez ? O mystère de grace! voies de Dieu dans le cœur de l'homme, inconnues à l'homme même ! ô Dieu abîme de sagesse et d'amour!

Fille chrétienne, élevez votre voix; appelez à ce spectacle les hommes et les anges. Dites dans un humble transport: O vous tous qui craignez le Seigneur, hátez-vous de venir vous me verrez, et vous verrez la grace en moi. Peuples, assemblez-vous, accourez en foule; que les extrémités de la

terre l'entendent, que toute chair adınire et tressaille car il a regardé la bassesse de sa servante, et il a fait, en moi de grandes choses, celui qui est puissant. Enfans de Dieu, rendez gloire à son œuvre. Que la terre et les cieux soient pleins de son nom : que tout en retentisse jusqu'au fond de l'abîme que tout s'unisse à moi pour chanter le tendre cantique, le cantique toujours nouveau des éternelles miséricordes. Venite, audite, etc.

Découvrons donc, ma chère sœur, dans les deux parties de ce discours, non à votre gloire, mais à celle de Jesus-Christ, ce qu'il a opéré dans votre conversion, et ce qu'il a préparé dans votre sacrifice. Par l'un vous instruirez le monde des richesses de la grace; par l'autre vous serez instruite vous-même de ce que la grace doit achever en vous dans la solitude. Voilà tout le sujet de ce discours.

O esprit, ô flamine céleste, qui allez embraser la victime, soyez vous-même dans ma bouche une langue de feu. Que toutes mes paroles, comme autant de flèches ardentes, percent et enflamment les cœurs. Donnez, donnez, Seigneur, c'est ici la louange de votre grace. Marie, mère des vierges, priez pour nous. Ave, Maria.

1

PREMIER POINT.

JADORE Souvent en tremblant, mes frères, ce jugement qui est un abime, ce profond conseil par lequel Dien permet que tant d'enfans soient livrés à l'erreur. Quoi! cat age si tendre, si simple, si innocent, suce avec le lait le poison; et les parens que Dien lui choisit, par leur tendresse aveugie causent son malheur ! Faut-il que sa docilité meme le rende coupable! O Dieu ! vons étes pourtant juste. Nous savons par vous-même que vous ne haissez rien de tout ce que vous avez fait; que vous êtes le Sauveur de tous; que toutes vos voies sont vérité et miséricorde à vous seul louange dans votre secret; à nous le silence, le trembiement et l'adoration. Mais sans pénétrer trop avant, mes frères, concluons, avec saint Augustin, que Diea voit dans un cœur une malignite subtile que nos yeux, trop accoutunes à une corruption plus grossière, sonvent ne découvrent pas. Il voit l'orgueil naissant qui abuse déjà des prémices de la raison, et qui mérite qu'un tourbillon de ténebres vienne la confondre; l'abus des richesses, des plaisirs, des honneurs, de la sante, des graces du corps, et même de esprit. C'est la vanité qui abuse des choses presque aussi vaines qu'elle. Mais abuser de la raison dans le point essentiel de la

religion, c'est résister au Saint-Esprit, c'est l'éteindre, c'est lui faire injure', c'est tourner le plus grand don de Diet contre Dieu même.

Jeune créature, flattée et éblouie de vos propres rayons, ce que le monde admire en vous est ce que Dieu déteste. Sous ces jeux innocens de l'enfance se déploie déjà un sérieux funeste, une raison faible qui se croit forte, une présomption que rien n'arrête et qui s'élève au-dessus de tout, un amour forcené de soi-même, qui va jusqu'à l'idolâtrie. Voilà ce que Dieu juste frappe d'aveugle

ment.

Erreur d'une ame enivrée d'elle-même, bientôt punie par mille autres erreurs. ! La voyez-vous qui court après les idoles de son invention? Ne croyez pas qu'elle soit docile, du moins elle ne l'est qu'à la flatterie. On lui dit lisez les écritures, jugez par vousmême, préférez votre persuasion à toute autorité visible; vous entendrez mieux le texte que l'église entière, de qui vous tenez et les sacremens et l'écriture même; le SaintEsprit ne manquera pas de vous inspirer par son témoignage intérieur; vos yeux s'ouvriront; et en lisant avec cet esprit la parole divine, vous serez comme une divinité. On le lui dit, et elle ne rougit point de le croire. Prêter l'oreille à ces paroles empoisonnées du serpent, est-ce docilité? Non,

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