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du crime qu'ils avaient commis, paraissant ainsi l'unique criminel aux yeux de la justice; de sorte que les juges ne virent plus et ne durent effectivement plus voir que lui seul à poursuivre et à punir. On l'admira, on le plaignit. Mais la rigueur des formes et la lettre de la loi obligèrent les magistrats de prononcer contre lui, quoiqu'à regret, un arrêt de mort. Ce fut une consternation générale. Le jour de l'exécution est fixé au lendemain. Par une disposition de la providence, au moment où le bourreau arrive sur la place pour préparer l'échafaud, il est frappé lui-même de mort subite en présence de tout le peuple. On s'écrie sur-le-champ, de tous les côtés, que c'est une déclaration manifeste du ciel, et qu'il faut absolument faire grâce au pauvre patient, victime volontaire du dévouement le plus héroïque. Tous les cœurs déchirés poussent à la fois le même cri en sa faveur. Mais tout à coup un autre jeune homme fait entendre sa voix au milieu de la multitude; c'était précisément l'un des complices impliqués dans le mème procès criminel, et auquel un si beau sacrifice venait de sauver la vie. «Personne ne se présente, dit-il, pour dresser l'échafaud; eh bien! je prends sur moi ce soin. Il n'y a point de bourreau! j'en ferai les fonctions, et je me charge du supplice. » Tout le monde frissonna d'horreur, comme nous tous tant que nous sommes ici présents, en entendant une proposition si barbare, que les juges n'étaient pas en droit de rejeter. Il se mit donc à l'œuvre, et la sentence fut exécutée. Vous frémissez, mes frères! à la bonne heure! Mais je suppose que vous me comprenez. Ce jeune homme si intéressant qui vient de mourir en quelque sorte devant vous pour le salut de ses frères, savez-vous qui c'est ? C'est Jésus-Christ en son état de victime toujours vivante dans le sacrement de l'eucharistie! Et ce bourreau d'office, ce bourreau volontaire, qui est-il? C'est vous tous, pécheurs sacriléges qui m'écoutez! Jésus-Christ, votre rédempteur et le mien, s'était donné pour vous une seconde vie par le testament et par le prodige de son amour; il semblait pour toujours à l'abri d'une nouvelle mort dans ce tabernacle; c'est vous tous, malheureux Judas, c'est vous qui avez renouvelé son supplice après sa résurrection; c'est vous qui, par vos communions en état de péché mortel, avez dit, sinon en paroles, au moins par le fait, ce qui est pis encore : <Tirez Jésus-Christ du fond de ce sanctuaire où il est caché sous les voiles eucharistiques; livrez-le moi sur cette table sainte ; c'est moi qui vais le sacrifier de nouveau, c'est moi qui veux élever de mes mains sa croix sur un autre calvaire; c'est moi qui me charge d'être son bourreau! »

LEÇON VIH.

DES DISPOSITIONS NÉCESSAIRES POUR BIEN COMMUNIER.

D. "Quelles sont les dispositions nécessaires pour communier diguement?-R. Il y en a de deux sortes : les unes regardent l'âme et les autres regardent le corps.

EXPLICATION.

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- Le sacrement de l'eucharistie étant, de tous les sacrements, le plus excellent et le plus anguste, puisqu'on y reçoit non seulement da grâce, mais l'auteur même de la grâce, exige nécessairement des dispositions plus saintes, et les exige plus sévèrement que les autres sacrements. Entre ces dispositions, les unes regardent l'âme, et les autres regardent le corps.

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D. Quelle est la première disposition de l'âme nécessaire pour communier dignement?-R. C'est de n'être coupable d'aucun péché mortél. EXPLICATION. — Pour communier dignement, il faut être en état de grâce, c'est-à-dire n'avoir sur la conscience aucun péché mortel; parce que la sainte eucharistie étant un sacrement des vivants, elle suppose la vie spirituelle de la grâce et une sainteté au moins commencée dans ceux qui la reçoivent. Le chrétien qui se prépare à la sainte communion doit, par conséquent, s'éprouver soi-même, selon la doctrine de l'apôtre (1);; et si, après un sérieux examen de sa conscience, il se sent coupable de péché mortel, c'est pour lui une obligastion indispensable de recourir au sacrement de pénitence pour s'en purifier, et, quelque contrition qu'il croie avoir, il ne doit pas communier avant d'avoir reçu l'absolution de son péché (2).

(1) Probet autem seipsum homo, et sic de pane illo edat et de calice bibat. I. Cor. 11.128 — (2) Ecclesiastica autem consuetudo declarat, eam probationem necessariam esse, ut nullus sibi conscius montalis peccati, quantumvis sibi contritus videatur, absque præmissâ sacramentali confessione, ad sacram eucharistiam accedere debeat. Cour. Trid. sess. ¡¡¡, cap. 7.

D. Que doit faire celui qui se souvient, avant la communion, d'avoir oublié en confession un péché mortel? -R. Il doit, s'il est possible, s'en confesser avant de se présenter à la table sainte.

EXPLICATION. - Il est certain, comme nous l'expliquerons bientôt, que le péché omis dans la confession, par un oubli non coupable, a été remis, avec tous les autres, par l'absolution générale qu'on a reçue. En conséquence, celui qui aurait communié sans se ressouvenir de ce péché, et croyant de bonne foi s'être accusé de tous ceux qu'il avait commis, n'aurait pas communié indignement; la communion produirait en lui tous ses salutaires effets. Celui qui ne se ressouvient du péché omis qu'au moment de la communion, et lorsqu'il est déjà à la sainte table, ne doit point se retirer au risque de scandaliser les assistants; il faut seulement qu'il forme dans son cœur un acte de contrition, et qu'il prenne la résolution d'accuser ce péché dans sa prochaine confession. Mais si on se rappelle un péché grave omis en confession, assez à temps pour réparer cette omission, sans crainte de scandale, on doit, s'il est possible, aller retrouver le confesseur, avant de se présenter à la sainte table. « Quoique le sentiment opposé, dit le cardinal de La Luzerne, soit soutenu par plusieurs docteurs, celui-ci nous paraît devoir être suivi dans la pratique, comme plus probable, et surtout comme plus sûr (1). »

D. Celui qui, se croyant de bonne foi en état de grâce, commu nierait avec un péché mortel, commettrait-il un sacrilége? R. Non.

EXPLICATION.

-L'eucharistie étant un sacrement des vivants, exige l'état de grâce, comme nous venons de le dire, pour être reçu dignoment. Toutefois, celui qui, se croyant de bonne foi en état de grâce, s'approcherait de Ja table sainte avec an péché mortél, ne commettrait pas

`(1) Rituel de Langres, in-4°, p. 307. — L'abbé Vermot, Question's pratiques sur le sacrement de pénitence, p. 168.

un sacrilege; dans ce cas, disent les théologiens, le sacrement effacerait d'abord en lui le péché dont sa conscience se trouve souillée, et produirait ensuite tous ses autres effets. Il en serait de même à l'égard de celui qui, ne pouvant se confesser, et croyant avoir la contrition parfaite avec le vœu du sacrement de pénitence, commumierait avec la seule attrition (1).

D. Quelle est la seconde disposition de l'âme nécessaire pour communier dignement? — R. C'est d'être instruit des principaux mystères de la foi.

EXPLICATION. Celui qui ignorerait qu'il n'y a qu'un seul Dieu en trois personnes; que la seconde personne, le fils, s'est fait homme pour nous racheter; que le même fils de Dieu fait homme a institué un sacrement où il est réellement et substantiellement présent; celui, dis-je, qui ignorerait ces vérités, serait-il en état de comprendre la grandeur et l'excellence de l'action que l'on fait en communiant? Serait-il capable d'apprécier la sainteté et l'amour immense de celui qui, dans l'eucharistie, se donne à l'âme fidèle sans réserve et sans partage? Il est donc nécessaire, pour communier dignement, d'être instruit des principaux mystères de la foi.

D. Quelle est la troisième disposition de l'âme nécessaire pour communier dignement? R. C'est de croire fermement le sang, l'âme et la divinité de Jésus-Christ.

EXPLICATION.

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C'est la conséquence de ce qui vient d'être dit. Comment, en effet, pourrait-on apprécier la grandeur et l'excellence de l'action que l'on fait en communiant, si on ne croyait pas ce que la foi enseigno touchant l'eucharistie? Il faut donc, pour ne pas profaner cet admirable sacrement, croire fermement qu'en communiant, c'est Jésus-Christ qu'on va recevoir : le même Jésus-Christ qui est mort pour nous racheter, qui est sorti du tombeau plein de gloire et d'immortalité, et qui est maintenant assis au plus haut des cieux, où il reçoit (1) Voir la leçon des sacrements en général, p. 12.

les adorations des anges et des saints. On doit le croire plus fermement que si on le voyait de ses propres yeux; se soumettre entièrement à Dieu, qui a révélé ce prodige, et courber avec docilité ses sens et sa raison sous le joug de la foi. En effet, les sens et la raison peuvent être trompés; la véritable foi ne peut l'être : la parole de Dieu proposée par son Eglise ne peut jamais égarer.

D. Les dispositions dont il vient d'être parlé ne peuvent-elles pas se trouver même dans les criminels condamnés à mort? - R. Oui et c'est pour cela qu'ils peuvent être admis à la communion.

EXPLICATION. Le savant Joseph Molanus prouve que c'est aller contre les saints canons que de priver de la communion les criminels condamnés à mort, s'ils la demandent et donnent des marques non équivoques de repentir. Il cite, à l'appui de son opinion, plusieurs conciles qui se sont exprimés à cet égard de la manière la plus formelle. « Si, à l'article de la mort, on doit donner » la communion à tous ceux qui font l'aveu sincère de » leurs péchés et qui les détestent du fond du cœur, pour» quoi ne la donnerait-on pas à ceux qui, en expiation » de leurs crimes, subissent la peine capitale? » Ainsi s'exprime le concile de Worms, de l'an 700 (1). « Les » voleurs et les brigands que l'idée du supplice qui les > attend pourrait réduire au désespoir, ne doivent » pas être privés de la communion, s'ils expriment le » désir de la recevoir. » Ce sont les paroles du concile de Tribur, de l'an 898 (2). Cependant la plupart de nos rituels défendent de la leur donner. Cela vient peut-être de ce que, autrefois, ils étaient exécutés le jour même

(1) Si omnibus, de peccatis suis puram confessionem agentibus, et dignè pœnitentibus, communio in fine secundùm canonicum jussum danda est, cur non etiam eis qui pro suis peccatis pœnam extremam persolvunt? (Conc. Wormatiense, apud Molanum, t. XXVII, p. 458, cursus theol. completi.) – (2) Furibus et latronibus, si expectatione mortis desperati putantur, atque reconciliari se mysteriis sacrosanctis deprecantur, communionis gratiam non negamus tribuendam. (Conc. Triburiense, apud Molanum, ibid.)

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